COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 5 - Chambre 1 ARRÊT DU 04 DÉCEMBRE 2013 Numéro d'inscription au répertoire général : 13/14895 Décision déférée à la Cour : Décision du 23 Avril 2013 -Institut National de la Propriété Industrielle - - RG n° OPP 12-1946
DÉCLARANTE AU RECOURS
Société LES EDITIONS CHOUETTE (1987) INC, prise en la personne de se représentants légaux [...], CANADA Ayant élu domicile au Cabinet de Me Pascale D [...] 75008 PARIS Représentée et assistée de Me Pascale D, avocat au barreau de PARIS, toque : D0594
EN PRÉSENCE DE
Monsieur L GÉNÉRAL DE L'INPI [...] 50001 92677 COURBEVOIE CEDEX
représenté par Madame Marianne CANTET, chargée de mission
APPELÉE EN CAUSE
Mademoiselle Nathalie RAMON L non comparante, ni représentée
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 22 Octobre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Benjamin RAJBAUT, Président de chambre Madame Brigitte CHOKRON, Conseillère Madame Anne-Marie GABER, Conseillère qui en ont délibéré Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article
785 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Marie-Claude HOUDIN
MINISTÈRE PUBLIC :
à qui le dossier a été préalablement soumis et représenté lors des débats par Monsieur H WOIRHAYE, avocat général, qui a fait connaître son avis
ARRET :- réputé contradictoire
- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article
450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Benjamin RAJBAUT, président, et par Mme Marie-Claude HOUDIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Vu la décision du 23 avril 2013, par laquelle le directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI) a rejeté l'opposition n° 12-1946 formée le 9 mai 2012 par la société de droit canadien LES EDITIONS CHOUETTE (1987) INC (ci- après dite LES EDITIONS CHOUETTE) à l'enregistrement de la marque déposée par Nathalie RAMON L le 13 février 2012,
Vu le recours formé le 19 juillet 2013 par la société LES EDITIONS CHOUETTE,
Vu le mémoire contenant l'exposé des moyens du recours déposé au greffe par la société requérante le 7 août 2013,
Vu l'appel en la cause, par lettre recommandée avec accusé de réception du greffe distribuée le 23 août 2013, de Nathalie RAMON L laquelle n'a présenté aucune observation,
Vu les observations écrites du directeur de l'INPI déposées le 7 octobre 2013, Vu les conclusions en réplique de la société requérante du 11 octobre 2013, Le ministère public entendu en ses observations orales,
SUR CE ,
Considérant que
la société LES EDITIONS CHOUETTE est titulaire de la marque
verbale communautaire 'CAILLOU' déposée le 22 juillet 2008 et enregistrée à l'OHMI sous le numéro 007080559 en particulier en classes 9, 16 et 41 pour désigner notamment les <<livres électroniques disponibles sur l'internet ; produits de l'imprimerie ; livres, à savoir livres de fantaisie, miniromans, livres d'exercice, livres de coloriage, livres d'activités, livres d'histoires, bandes dessinées, magazines, revues, Services d'éducation et de divertissement ; production, distribution et présentation de programmes musicaux ; divertissements sous forme de représentations visuelles, audio, musicales et théâtrales en direct et préenregistrées, ; fourniture de jeux sur un réseau informatique mondial et des dispositifs portables et sans fil>> ;
Que Nathalie RAMON L a demandé le 13 février 2012 l'enregistrement de la marque 'Les plumes du Caillou' (demande n°12/3896611) en c lasse 41 pour les produits suivants :<<Education ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles ; publication de livres ; organisation de concours (éducation ou divertissement) ; organisation et conduite de colloques, conférences ou congrès ; organisation d'expositions à buts culturels ou éducatifs ; services de jeu proposés en ligne à partir d'un réseau informatique ; publication électronique de livres et de périodiques en ligne ; micro-édition >> ;
Considérant que le directeur de l'INPI ayant rejeté le23 avril 2013 son opposition à l'enregistrement de cette marque en ce qui concerne les produits précités, la société LES EDITIONS CHOUETTE a formé recours à l'encontre de cette décision, qui n'a pas retenu l'existence globalement d'un risque de confusion à raison de l'absence d'imitation de la marque antérieure par le signe contesté ;
Considérant que le recours porte également, sur la comparaison des services d'<<activités sportives>> de la demande d'enregistrement aux <<Services de divertissement>> de la marque antérieure, la société requérante faisant valoir qu'ils relèveraient tous deux du domaine du loisir ; que toutefois dans son acte d'opposition la société LES EDITIONS CHOUETTE n'a pas soumis au directeur de l'INPI l'éventuel lien pouvant exister entre ces services se contentant de se prévaloir de ce chef des seuls <<Services d'éducation>>, ce qui n'est pas contesté, et ce, même si elle visait par ailleurs les <<Services de divertissement >> ;
Que faute d'avoir soumis au directeur d de l'INPI les liens de similarité pouvant être relevés entre ces services (<<activités sportives >> et <<Services de divertissement>>) la société LES EDITIONS CHOUETTE ne saurait valablement s'en prévaloir dans le cadre du présent recours dépourvu de tout effet dévolutif ;
Considérant que la société LES EDITIONS CHOUETTE conteste en dernier lieu
dans ses écritures du 11 octobre 2013 l'absence de similarité entre les services d'<<activités sportives>> de la demande d'enregistrement et les <<Services d'éducation>> de sa marque antérieure ; que cependant dans le délai imparti par l'article
R 411-21 du Code de la propriété intellectuelle, elle n'a pas invoqué ce moyen à l'appui de son exposé du 7 août 2013 et s'avère irrecevable à le faire plus d'un mois après sa déclaration de recours du 19 juillet 2013 ; qu'en tout état de cause, il sera observé que le simple fait que des activités sportives puissent faire l'objet d'un enseignement dans des cours d'éducation physique et sportive ne saurait suffire à établir que ces services sont complémentaires ou similaires au sens du droit des marques alors qu'ils présentent des différences de nature et fonction propres à les distinguer ainsi que relevé par le directeur de l'INPI et que tout risque de confusion ou d'association entre eux est ainsi exclu ;
Considérant que, sur la comparaison des signes, il n'est pas discuté que la marque contestée n'étant
pas la reproduction à l'identique de la marque invoquée, faute de la reproduire sans modification ni ajout en tous les éléments la composant, il convient de rechercher s'il existe entre les signes en présence un risque de confusion, qui doit être apprécié globalement à la lumière de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce ; que certes cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ouconceptuelle des marques en cause, être fondée sur l'impression d'ensemble produite par les marques, en tenant compte notamment des éléments distinctifs et dominants de celles-ci ;
Considérant que la société LES EDITIONS CHOUETTE reproche à la décision critiquée de ne pas avoir retenu une interdépendance des facteurs en présence et, en particulier, l'absence de modification de la signification dominante du terme 'caillou' dans la demande d'enregistrement alors que les signes en cause présenteraient un haut degré de similitude et que la structure de l'expression incriminée, qui vise des services proches, permettrait de la percevoir comme une déclinaison de sa marque antérieure, laquelle présenterait un caractère fortement distinctif au regard des produits ou services en cause ;
Mais considérant que la similitude tenant à la reprise du terme 'Caillou'est amplement occultée :
-au plan visuel, par la présentation et longueur différente des signes, le signe contesté étant formé de quatre mots dont deux respectivement de 6 et 7 lettres alors que la marque antérieure n'est constituée que d'un seul terme de 7 lettres,
-au plan phonétique, par un rythme différent des signes en présence, savoir cinq temps au lieu de deux, et une sonorité d'attaque atténuant la prononciation plus heurtée du terme 'Caillou' ;
Considérant que, conceptuellement, la demande d'enregistrement renvoie à l'idée d'un début de phrase commençant, dans un ordre grammatical usuel, par un article 'Les' suivi d'un nom commun 'plumes', ce premier groupe nominal étant suivi d'un second groupe nominal introduit par l'article 'du' suivi du nom 'Caillou', étant relevé que l'apposition de cet article 'du' et la présence (au plan visuel) d'une majuscule 'C' dans le terme 'Caillou' peuvent évoquer le surnom connu ('le Caillou') donné à un lieu géographique, même si le mot 'Caillou' est phonétiquement et plus largement compris comme une pierre ou fragment de pierre de petite dimension ;
Que la marque antérieure composée du seul mot 'CAILLOU' évoque spontanément également une pierre, même si pour un public plus averti des produits en cause il renvoie au nom d'un personnage de littérature pour enfants ; que certes ce terme est intrinsèquement distinctif au regard desdits produits, mais l'expression 'Les plumes du Caillou' prise dans son ensemble l'est tout autant, tant il est inhabituel d'attribuer à une pierre, ou à un toponyme, des plumes, évoquant la production de l'épiderme d'oiseaux, voire l'écriture pour des services en rapport avec des écrits ;
Considérant qu'en réalité, dans l'expression contestée l'attention est attirée par le contraste au plan intellectuel et sonore de l'adjonction en attaque des mentions 'Les plumes du' au mot 'Caillou', adjonction qui revêt ainsi un caractère déterminant, tandis que visuellement le placement en fin de signe du terme 'Caillou' lui fait largement perdre de son attractivité propre au profit des quatre termes le précédant, instantanément perceptibles ;
Que le consommateur moyennement avisé des produits ou services désignés normalement attentif se souviendra d'une expression peu banale voire poétique de lademande d'enregistrement et ne sera pas enclin à croire à une déclinaison de la marque antérieure portant sur le seul terme 'CAILLOU' tant le signe 'Les plumes du Caillou' lui apparaîtra former un tout indissociable à raison de sa présentation et d'une formulation qui l'interpellera dans sa globalité, le mot 'Caillou' n'y apparaissant pas prépondérant mais fondu dans un ensemble;
Considérant, en de telles conditions, que la seule reprise du terme 'Caillou' ne saurait être de nature à créer un risque de confusion ni d'association dans l'esprit du public entre les deux signes, même pour des produits identiques ou similaires à ceux désignés dans la marque antérieure ;
Qu'il résulte de ce qui précède que le signe contesté ne constitue pas l'imitation de la marque 'CAILLOU' ; que le recours à l'encontre de la décision du directeur de l'INPI ne peut, en conséquence, qu'être rejeté ;
PAR CES MOTIFS
, LA COUR
Rejette le recours formé par LES EDITIONS CHOUETTE (1987) INC à l'encontre de la décision du directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle du 23 avril 2013 ;
Dit que le présent arrêt sera notifié par le greffe aux parties et au directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle, par lettre recommandée avec accusé de réception.