Cour de cassation, Troisième chambre civile, 15 septembre 2015, 14-14.428

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2015-09-15
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
2013-12-19

Texte intégral

Sur le moyen

unique, ci-après annexé :

Vu

les articles 1134 et 1234 du code civil ensemble L. 145-9 du code de commerce ;

Attendu que selon l'arrêt attaqué

(Aix-en-Provence, le 19 décembre 2013) la société civile immobilière Les Tamaris (la SCI), propriétaire de locaux loués à MM. X... artisans selon bail renouvelé à compter du 1er janvier 1998, leur a délivré le 19 février 2007 un congé à effet du 1er janvier 2008 portant refus de renouvellement avec offre d'une indemnité d'éviction ; que le 23 décembre 2009, la SCI a notifié aux locataires restés dans les lieux le montant du loyer révisé payable à compter du 1er janvier 2010, puis les a assignés en expulsion le 23 mars 2012, en invoquant le congé et la prescription de l'action en paiement d'une indemnité d'éviction ;

Attendu que pour accueillir les demandes de la SCI, l'arrêt retient

que si le congé délivré comporte une erreur sur la date d'expiration du bail, le bailleur par cet acte a expressément donné congé aux consorts X... pour le 1er janvier 2008 et que la notification postérieure de la révision de loyer, est sans effet sur la régularité et la validité du congé et sur le délai de deux ans dont disposaient les locataires pour demander le paiement d'une indemnité d'éviction ;

Qu'en statuant ainsi

sans rechercher, comme elle y était invitée, si la notification le 23 décembre 2009, au cours du délai de deux années à compter du 1er janvier 2008, date d'effet du congé, d'un loyer révisé selon les termes du contrat de bail pour une période à venir à compter du 1er janvier 2010, ne caractérisait pas la renonciation de la bailleresse à se prévaloir du congé ou de ses effets, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS

: CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 décembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ; Condamne la SCI Les tamaris aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SCI Les Tamaris à verser la somme de 3 000 euros aux consorts X... ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze septembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE

au présent arrêt Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour les consorts X... Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir validé le congé avec refus de renouvellement et offre d'indemnité d'éviction délivré par la société civile immobilière Les Tamaris aux consorts X... le 19 février 2007, constaté la forclusion de l'action en paiement d'indemnité d'éviction des consorts X..., ordonné leur expulsion des lieux loués et condamnés les consorts X... à payer à la société civile immobilière Les Tamaris une indemnité d'occupation mensuelle de 972, 02 ¿ jusqu'à libération effective des lieux ; AUX MOTIFS QUE le bail commercial conclu entre les parties s'est poursuivi au-delà de son terme prévu au 31 décembre 2006 sans qu'un avenant ait été conclu ; que suivant acte d'huissier en date du 19 février 2007, la SCI Les Tamaris a donné congé aux consorts X... pour le 1er janvier 2008 avec refus de renouvellement et proposition de paiement d'une indemnité d'éviction, acte comportant la mention erronée que le bail renouvelé pour une durée de neuf années expirait le 31 décembre 2007 ; qu'aux termes de l'article L. 145-9 en vigueur à la date d'expiration de la période de renouvellement du bail, les baux commerciaux ne cessent que par l'effet d'un congé suivant les usages locaux et au moins six mois à l'avance ; qu'à défaut de congé, le bail fait par écrit se poursuit par tacite reconduction, au-delà du terme fixé par le contrat conformément à l'article 1738 du code civil et sous les réserves prévues à l'alinéa précédent ; que le congé doit être donné par acte extra judiciaire ; qu'il doit, à peine de nullité, préciser les motifs pour lesquels il a été donné et indiquer que le locataire qui entend soit contester le congé, soit demander le paiement d'une indemnité d'éviction, doit à peine de forclusion saisir le tribunal avant l'expiration d'un délai de deux ans à compter de la date pour laquelle le congé a été donné ; qu'en l'espèce, le bail s'est poursuivi au-delà du 31 décembre 2006 par tacite reconduction ; que le bailleur pouvait dès lors, à tout moment, délivrer Jean-Christophe BALAT Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation 4 bis, rue de Lyon 75012 PARIS un congé en respectant les dispositions de l'article L. 145-9 du code de commerce reprises ci-dessus ; que le congé donné par la SCI Les Tamaris pendant la période de tacite reconduction a respecté le délai de préavis de six mois ; que le congé a été suffisamment motivé par l'offre de paiement d'une indemnité d'éviction et par le refus de renouvellement du bail ; que le congé a rappelé les dispositions de l'article L. 145-9 du code de commerce reprise ci-dessus ; que le congé sera en conséquence validé, étant précisé que si le congé délivré comporte une erreur sur la date d'expiration du bail, soit le 31 décembre 2007 au lieu du 31 décembre 2006, le bailleur par cet acte a expressément donné congé aux consorts X... pour le 1er janvier 2008 ; que ces derniers, signataires du bail souscrit, étant présumés connaître la date d'échéance réelle, cette erreur ne peut entraîner la nullité du congé, la notification postérieure de la révision du loyer, adressée le 23 décembre 2010 par courrier par la SCI Les Tamaris aux consorts X... étant sans effet sur la régularité et la validité du congé délivré ; que les consorts X... se voyant offrir le paiement d'une indemnité d'éviction par le congé délivré, disposaient d'un délai de deux ans pour saisir la juridiction compétente aux fins d'en voir fixer le montant et obtenir si besoin était la condamnation du bailleurs à son paiement ; que le congé ayant été délivré pour le 1er janvier 2008, les consorts X... disposaient ainsi d'un délai jusqu'au 1er février 2010 à cette fin ; qu'aucune demande n'ayant été formée dans ce délai, l'action en paiement d'une indemnité d'éviction des consorts X... s'en trouve forclose ; que les consorts X..., sur les mêmes motifs, deviennent dépourvus de tout droit au maintien dans les lieux et que leur expulsion sera en conséquence ordonnée ; que jusqu'à libération définitive des locaux, ils seront condamnés à payer une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer, soit la somme de 972, 02 ¿ ; ALORS, D'UNE PART, QUE le congé, délivré par acte extra-judiciaire, doit mentionner de façon expresse, et à peine de nullité, que « le locataire qui entend soit contester le congé, soit demander le paiement d'une indemnité d'éviction, doit saisir le tribunal avant l'expiration d'un délai de deux ans à compter de la date pour laquelle le congé a été donné » ; qu'en constatant que le congé délivré par la SCI Les Tamaris aux consorts X... comportait « une erreur sur la date de l'expiration du bail, soit le 31/ 12/ 2007 au lieu du 31/ 12/ 2006 » (arrêt attaqué, p. 5, alinéa 4), puis en estimant que les consorts X..., « signataires du bail souscrit, étant présumés connaître sa date d'échéance réelle, cette erreur ne peut entraîner la nullité du congé » (arrêt attaqué, p. 5, alinéa 4), cependant que l'absence de grief ne saurait être affirmée sur la base d'une simple présomption de compétence du locataire, la cour d'appel a violé l'article L. 145-9 du code de commerce ; ALORS, D'AUTRE PART, QUE la renonciation à un droit résulte d'une manifestation de volonté non équivoque ; que dans leurs conclusions d'appel (p. 4), les consorts X... faisaient valoir qu'en leur adressant, le 23 octobre 2010, un courrier leur notifiant une révision du loyer en cours, la SCI Les Tamaris avait nécessairement renoncé au bénéfice du congé qui leur avait été délivré le 19 février 2007, dès lors que cette initiative révélait la volonté du bailleur de poursuivre la relation contractuelle ; qu'en écartant ce moyen au motif que « la notification postérieure de la révision du loyer, adressée le 23/ 12/ 2010 par courrier par la SCI Les Tamaris aux consorts X..., est sans effet sur la régularité et la validité du congé délivré » (arrêt attaqué, p. 5, alinéa 4), cependant que le litige ne portait pas sur le point de savoir si la notification de la révision du loyer affectait la régularité ou la validité du congé délivré antérieurement mais de savoir si cette notification ne valait pas renonciation par le bailleur au bénéfice du congé qu'il avait délivré auparavant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1234 du code civil.