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Tribunal administratif de Montpellier, 22 août 2023, 2304698

Chronologie de l'affaire

Conseil d'État
21 septembre 2023
Tribunal administratif de Montpellier
22 août 2023

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Montpellier
  • Numéro d'affaire :
    2304698
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Dispositif : Satisfaction partielle
  • Nature : Ordonnance
  • Avocat(s) : QUINQUIS
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Résumé

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Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête, enregistrée le 9 août 2023, la Section française de l'Observatoire international des prisons (OIP-SF), représentée par Me Quinquis, et l'association des avocats pour la défense des droits de détenus (A3D), représentée par Me Chapelle, demandent au juge des référés : 1°) d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, toutes mesures qu'il estimera utiles afin de faire cesser les atteintes graves et manifestement illégales portées aux libertés fondamentales des personnes détenues au centre pénitentiaire de Perpignan ; 2°) plus précisément, d'enjoindre, sur le même fondement, au Garde des Sceaux, au ministre de la santé ou à toute autre autorité qu'il estimera utile, de mettre notamment en œuvre les mesures suivantes, sous astreinte :

Sur la

surpopulation carcérale : - suspendre provisoirement les incarcérations, totalement ou partiellement, sur le modèle du dispositif " stop-écrou " mis en place dans la maison d'arrêt de Bordeaux-Gradignan, afin de réduire le niveau de surpopulation ; - faire réaliser une étude afin d'analyser les raisons du faible taux d'aménagement de peine et de proposer des pistes de mesures à mettre en place ; Sur les conditions matérielles de détention dans les cellules du centre pénitentiaire : - éliminer, pour des raisons d'hygiène et de santé, la moisissure présente dans les cellules ; - réaliser les travaux de rénovation et réhabilitation du système de ventilation des cellules qui le nécessitent ; - procéder à la réparation ou au changement des fenêtres défectueuses ; - s'assurer que chaque cellule dispose d'un éclairage artificiel ; - procéder à la réparation et au remplacement des miroirs cassés ou manquants ; - veiller à équiper chaque lit superposé d'une échelle ; - équiper les placards d'étagères lorsqu'ils en sont dépourvus ; - plus généralement, améliorer dans l'attente d'une solution pérenne, les conditions matérielles de vie en cellule ; - prendre toutes mesures de nature à améliorer le cloisonnement des annexes sanitaires dans les cellules qui le nécessitent ; - procéder à la réfection des sanitaires ainsi qu'à leur nettoyage, et en assurer une propreté pérenne ; - pour des raisons d'hygiène, équiper les sanitaires de lunettes et d'abattants ; Sur les espaces collectifs : - procéder au nettoyage et à la rénovation des toilettes mises à la disposition des personnes détenues en cours de promenade ; - équiper les cours de promenade d'abris, de bancs et d'installations légères d'exercice ; - équiper les douches collectives de cloisons individuelles, totales ou partielles, afin de garantir l'intimité des personnes détenues ; Sur l'accès aux douches : - doter, dans les installations sanitaires collectives toutes les cabines de douche d'une porte et procéder à l'entretien et au nettoyage régulier de ces installations ; - garantir à toutes personnes détenues un accès quotidien à une douche, en particulier s'agissant des femmes détenues pendant la période de menstruation ; Sur la présence de nuisibles dans les cellules et aux abords du centre pénitentiaire : - procéder sans délai au traitement ou au remplacement des matelas infestés par des punaises ; - amplifier les mesures tendant à la destruction des punaises de lits, éventuellement par la conclusion d'un nouveau contrat avec des entreprises spécialisées dans la destruction de ces nuisibles afin que leur nombre soit très substantiellement diminué dans le délai de trois mois à compter de la notification de la présente ordonnance ; - mettre à même les détenus qui n'ont accès ni à un lave-linge, ni à un service de buanderie de pouvoir laver leur linge en leur fournissant le matériel nécessaire à cet effet ou en s'assurant qu'ils en sont dotés ; - mettre en place un lavage plus régulier du linge fourni aux personnes détenues, participant à l'élimination des punaises de lits ; Sur les cours de promenade : - prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer un nettoyage régulier et suffisant des cours de promenade et du couloir y conduisant ; - prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la propreté et le fonctionnement des urinoirs et des points d'eau situés en cours de promenade en procédant, si nécessaire, à leur rénovation ou à leur remplacement ; - équiper les cours de promenade qui en sont dépourvues d'un abri, de bancs et d'installations permettant l'exercice physique ; - procéder dans les plus brefs délais à l'enlèvement de la totalité des détritus accumulés dans l'ensemble des espaces extérieurs sur lesquels donnent les cellules et veiller par un nettoyage régulier à maintenir ces espaces dans des conditions de propreté satisfaisantes ; Sur la sécurité et le risque incendie : - produire le dernier avis de la sous-commission de sécurité sur le centre pénitentiaire de Perpignan ; - procéder immédiatement, selon les modalités techniques les plus appropriées, et dans toute la mesure compatible avec la protection de la santé des personnes détenues ainsi qu'avec la nécessité de garantir la continuité du service public pénitentiaire, à l'ensemble des réparations qui s'imposent pour faire cesser tout danger pour la sécurité des personnes détenues et mettre en œuvre les préconisations de la sous-commission de sécurité ; - faire réaliser dans les meilleurs délais une vérification de la sécurité incendie de l'ensemble des cellules, en prenant en compte la surpopulation ; - compte tenu de l'importance du risque d'incendie et du climat de violence au sein de l'établissement pénitentiaire, procéder à l'installation, dans les plus brefs délais, d'un système d'appel d'urgence au sein de chaque cellule ; Sur les kits d'hygiène et de nettoyage distribués aux personnes détenues : - procéder au renouvellement périodique des kits d'hygiène et de nettoyage qui doivent être remis gratuitement à l'ensemble des personnes détenues ; Sur les mauvais traitements au quartier disciplinaire : - faire immédiatement cesser les comportements contraires à la déontologie observés au quartier disciplinaire ; - diligenter une enquête des services compétents sur le comportement des surveillants au quartier disciplinaire, et en tirer toutes les conséquences ; - effectuer, à titre conservatoire, un changement de l'équipe affectée au quartier disciplinaire ; - produire une note de service rappelant les exigences attendues en termes de déontologie ; Sur le maintien des liens personnels et familiaux des personnes détenues : - prendre toutes mesures utiles pour permettre un accès effectif des détenus aux téléphones mis à leur disposition dans les bâtiments et sur les cours de promenade ; Sur les fouilles intégrales : - assurer la traçabilité des décisions de fouilles ainsi que la transmission systématique d'un rapport circonstancié au procureur de la République lorsque la fouille est réalisée sur le fondement de l'article L. 225-2 du code pénitentiaire ; - assurer la notification systématique aux personnes détenues visées par les décisions de fouille prises sur le fondement de l'article L. 225-1 du code pénitentiaire ; - proscrire les fouilles intégrales dans des lieux inadaptés ; - prohiber tout comportement contraire à la déontologie lors des fouilles ; 3°) mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elles soutiennent que : - elles présentent, chacune, un intérêt à agir ; - se fondant notamment sur les rapports de visite du centre pénitentiaire de Perpignan par le contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) en 2014 et en 2023, et sur les recommandations en urgence formulées par la CGLPL le 6 juin 2023 et publiées au journal officiel du 5 juillet 2023, et des photographies qui y sont annexées, elles justifient d'une urgence justifiant la saisine du juge des référés sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ; les conditions indignes dans lesquelles sont détenues les personnes incarcérées au sein du centre pénitentiaire de Perpignan y exposent ces dernières à de multiples dangers objectifs et immédiats pour leur vie et leur intégrité physique et morale ainsi qu'à des atteintes massives à leur dignité et à leur vie privée ; il existe dans cet établissement une situation d'urgence non seulement extrême mais aussi permanente, tant que perdurent de telles conditions de détention ; l'urgence est, en effet, quotidienne et durable ; le centre pénitentiaire de Perpignan souffre en effet d'une suroccupation chronique alarmante ; - les conditions de détention constatées au sein de l'établissement et les dysfonctionnements qui y sont relevés portent une atteinte grave et manifestement illégale aux droits garantis par les stipulations des articles 2, 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi qu'à la dignité des détenus. Par une intervention, enregistrée le 10 août 2023, la fédération nationale des unions de jeunes avocats (A), représentée par Me Martin, demande au juge des référés de faire droit aux conclusions de la requête. Elle soutient que : - elle justifie d'un intérêt suffisant à intervenir eu égard à l'article 3 de ses statuts ayant notamment pour objet de " définir et promouvoir toutes mesures nécessaires à la protection de la personne, de ses libertés et au respect des droits de la défense " ; elle met en outre en œuvre des actions en vue d'améliorer les conditions de détention ; compte tenu de l'urgence attachée au présent recours et à l'imminence de la date d'audience, elle n'est pas en mesure de produite une habilitation régulière ce qui n'affecter pas la recevabilité de son intervention ; - elle s'associe pleinement aux moyens développés par les requérantes. Par une intervention, enregistrée le 10 août 2023, le syndicat des avocats de France (SAF), représenté par Me Delchambre, demande au juge des référés de faire droit aux conclusions de la requête. Il soutient que : - il justifie d'un intérêt suffisant à intervenir eu égard à son objet statutaire, ayant notamment pour objet " toute action relative au fonctionnement de la justice, aux conditions de détention, ainsi qu'aux droits des justiciables et de toute personne privée de liberté " ; - il s'associe pleinement aux moyens développés par les requérantes. Par une intervention, enregistrée le 11 août 2023, le conseil national des barreaux (CNB), représenté par Me Tcholakian, demande au juge des référés de faire droit aux conclusions de la requête. Il soutient que : - il justifie d'un intérêt suffisant à intervenir eu égard à son objet statutaire, ayant notamment pour objet de représenter l'ensemble des avocats de France et dès lors que des avocats de divers barreaux, notamment des Pyrénées-Orientales, sont amenés à assister et à défendre régulièrement des personnes détenues au centre pénitentiaire de Perpignan et sont, à ce titre, amener à pénétrer dans cet établissement pour rencontrer leurs clients ; il est en outre doté d'une commission " libertés et droits de l'homme ", laquelle est notamment chargée " de l'étude des projets et textes concernant les libertés, particulièrement dans le domaine du droit pénal et de la procédure pénale, de l'élaboration de rapports et avis relatifs aux dits projets et textes, de suivre pour le compte du Conseil national les dossiers collectifs ou individuels portant sur des atteintes aux droits de l'Homme en France comme à l'étranger, tout particulièrement lorsque sont entravés les droits de la défense ou lorsque ne sont pas garanties les règles du procès équitable. " ; sur initiative de cette commission, il met en œuvre des actions en vue d'améliorer les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires, notamment par le biais de la formation des avocats, d'organisation de colloques relatifs aux conditions de détention et d'échanges réguliers avec la Direction de l'administration pénitentiaire ; il présente un intérêt supplémentaire à intervenir dès lors que les conditions de détention du centre pénitentiaire de Perpignan emportent des conséquences sur les conditions d'intervention des avocats ; - il s'associe pleinement aux moyens développés par les requérantes. Par un mémoire en défense, enregistré le 14 août 2023, le Garde des Sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête de la Section française de l'Observatoire international des prisons et de l'association des avocats pour la défense des droits de détenus. Il fait valoir que : - à la suite de la visite du centre pénitentiaire de Perpignan par la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) du 6 au 10 mars 2023, l'établissement, en lien avec la direction interrégionale des services pénitentiaires de Toulouse, a déployé un plan d'action d'envergure pour répondre aux recommandations en urgence publiées au journal officiel du 5 juillet 2023 ; - le juge des référés devra rejeter l'ensemble des demandes formulées par les associations requérantes en tant que, d'une part, certaines de ces injonctions ne sont pas au nombre de celles pouvant être ordonnées sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, portant sur des mesures structurelles ou systémiques, et que, d'autre part, l'ensemble des pièces fournies permet de démontrer que les conditions posées par cet article ne sont pas remplies ; - l'existence d'une situation d'urgence particulière rendant nécessaire l'intervention du juge des référés dans les quarante-huit heures n'est pas caractérisée ; - il n'appartient pas à la juridiction administrative de prononcer certaines des injonctions sollicitées ; - il n'appartient pas au juge des référés de prononcer certaines des injonctions demandées qui relèvent de mesures structurelles ou reposant sur des choix de politique publique. La demande de la Section française de l'Observatoire international des prisons et de l'association des avocats pour la défense des droits de détenus et les interventions de la fédération nationale des unions de jeunes avocats, du syndicat des avocats de France et du conseil national des barreaux ont été transmises au ministre de la solidarité et de la santé et au préfet des Pyrénées-Orientales qui n'ont pas produit de mémoire en défense. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code pénitentiaire ; - le code de procédure pénale ; - la loi n° 2021- 403 du 8 avril 2021 ; - le décret n° 2021-1194 du 15 septembre 2021 ; - le code de justice administrative. Le président du tribunal administratif de Montpellier a désigné Mme Rigaud, présidente, pour statuer sur les demandes de référés. Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique du 16 août 2023 à 13 heures 30. Ont été entendus, au cours de l'audience publique tenue le 16 août 2023 à 13 heures 30, en présence de M. Martinier, greffier d'audience : - le rapport de Mme Rigaud ; -les observations de Me Quinquis, représentant la Section française de l'Observatoire international des prisons, substituant Me Chapelle pour représenter l'association des avocats pour la défense des droits des détenus, et substituant Me Tcholakian pour représenter le conseil national des barreaux ; - celles de Me Punzano, représentant la fédération nationale des unions de jeunes avocats ; - et celles de Mme F E, cheffe de la mission du droit et de l'expertise au sein de la direction interrégionale des services pénitentiaires de Toulouse, M. D C, directeur du centre pénitentiaire de Perpignan, et M. B G, directeur adjoint des services pénitentiaires de Toulouse, représentant le Garde des Sceaux, ministre de la justice. A l'issue de l'audience la juge des référés a différé la clôture de l'instruction au 17 août 2023 à 15 heures puis au même jour à 17 heures. Par un mémoire, enregistré le 17 août 2023 à 14 heures 42, le Garde des Sceaux, ministre de la justice, conclut aux mêmes fins et produits de nouvelles pièces. Considérant ce qui suit : 1. Le centre pénitentiaire de Perpignan, abrite un quartier " centre de détention " de 333 places dont une pour les PMR, un quartier " maison d'arrêt hommes " de 112 places, un service médico-psychologique (ci-après SMPR) de 10 places et un quartier destiné aux arrivants de 10 places dont une place femme, un quartier " maison d'arrêt femmes " de 27 places dont une place nurserie, un quartier de semi-liberté de 24 places, un quartier " mineurs " de 12 places, deux cellules de protection d'urgence, un quartier " Isolement " de 18 places et un quartier disciplinaire de 20 places dont 2 places femmes. Mis en service en 1987, cet établissement a fait l'objet de visites du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (ci-après CGLPL) en mars 2014, puis du 6 au 10 mars 2023, de manière inopinée pour ce qui concerne le quartier " maison d'arrêt hommes ". Cette dernière visite ayant révélé des atteintes aux droits et libertés des personnes détenues, un nouveau contrôle de la CGLPL a été diligenté du 3 au 14 avril 2023. A la suite de cette dernière visite, la CGLPL a émis, le 6 juin 2023 des recommandations en urgence en vertu de l'article 9 de la loi du 30 octobre 2007, lesquelles ont été publiées au journal officiel de la République française du 5 juillet 2023. Ces recommandations font état, notamment, d'une surpopulation carcérale chronique dont le niveau " inacceptable " entraîne, selon cette autorité, des atteintes graves aux droits fondamentaux des personnes détenues, des conditions matérielles de détention " indignes ", mais également de l'insuffisance des moyens mis en œuvre pour éradiquer les punaises de lit, d'une insalubrité générale aggravée par la prolifération de nuisibles dans les espaces de circulation et aux abords des bâtiments de la détention, et l'absence de protection suffisante de la sécurité et de l'intégrité physique et psychique des personnes détenues. 2. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. () ". 3. La Section française de l'Observatoire international des prisons (OIP-SF) et l'association des avocats pour la défense des droits des détenus (A3D) demandent au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au Garde des Sceaux, ministre de la justice ainsi qu'au ministre de la santé ou à toute autre autorité qu'il estimera utile, diverses mesures pour faire cesser des atteintes graves et manifestement illégales portées aux libertés fondamentales des personnes détenues au centre pénitentiaire de Perpignan. Sur les interventions : 4. La fédération nationale des unions de jeunes avocats (A), le syndicat des avocats de Frances (SAF) et le Conseil national des barreaux (CNB) justifient, eu égard notamment aux termes de leurs statuts, d'un intérêt suffisant pour intervenir au soutien de la présente requête. Leurs interventions sont, par suite, recevables et doivent être admises. Sur le cadre juridique du litige : 5. Aux termes du premier alinéa de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. La mort ne peut être infligée à quiconque intentionnellement, sauf en exécution d'une sentence capitale prononcée par un tribunal au cas où le délit est puni de cette peine par la loi ". Aux termes de l'article 3 de cette convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Enfin, aux termes de son article 8 : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". 6. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 2 du code pénitentiaire : " Le service public pénitentiaire s'acquitte de ses missions dans le respect des droits et libertés garantis par la Constitution et les conventions internationales ratifiées par la France, notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ". L'article L. 6 du même code dispose que : " L'administration pénitentiaire garantit à toute personne détenue le respect de sa dignité et de ses droits. L'exercice de ceux-ci ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles résultant des contraintes inhérentes à la détention, du maintien de la sécurité et du bon ordre des établissements, de la prévention de la commission de nouvelles infractions et de la protection de l'intérêt des victimes. Ces restrictions tiennent compte de l'âge, de l'état de santé, du handicap, de l'identité de genre et de la personnalité de chaque personne détenue ". Enfin, aux termes de l'article L. 7 de ce code : " L'administration pénitentiaire doit assurer à chaque personne détenue une protection effective de son intégrité physique en tous lieux collectifs et individuels ". 7. Eu égard à la vulnérabilité des détenus et à leur situation d'entière dépendance vis-à-vis de l'administration, il appartient à celle-ci, et notamment aux directeurs des établissements pénitentiaires, en leur qualité de chefs de service, de prendre les mesures propres à protéger leur vie ainsi qu'à leur éviter tout traitement inhumain ou dégradant afin de garantir le respect effectif des exigences découlant des principes rappelés notamment par les articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le droit au respect de la vie ainsi que le droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants constituent des libertés fondamentales au sens des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. Lorsque la carence de l'autorité publique crée un danger caractérisé et imminent pour la vie des personnes ou les expose à être soumises, de manière caractérisée, à un traitement inhumain ou dégradant, portant ainsi une atteinte grave et manifestement illégale à ces libertés fondamentales, et que la situation permet de prendre utilement des mesures de sauvegarde dans un délai de quarante-huit heures, le juge des référés peut, au titre de la procédure particulière prévue par l'article L. 521-2, prescrire toutes les mesures de nature à faire cesser la situation résultant de cette carence. 8. Le droit au respect de la vie privée et familiale rappelé notamment par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dont bénéficient, compte tenu des contraintes inhérentes à la détention, les personnes détenues, revêt le caractère d'une liberté fondamentale au sens des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. Lorsque le fonctionnement d'un établissement pénitentiaire ou des mesures particulières prises à l'égard d'un détenu affectent, de manière caractérisée, son droit au respect de la vie privée et familiale dans des conditions qui excèdent les restrictions inhérentes à la détention, portant ainsi une atteinte grave et manifestement illégale à cette liberté fondamentale, et que la situation permet de prendre utilement des mesures de sauvegarde dans un délai de quarante-huit heures, le juge des référés peut, au titre de la procédure particulière prévue par l'article L. 521-2, prescrire toutes les mesures de nature à faire cesser l'atteinte excessive ainsi portée à ce droit. 9. Il résulte de ce qui précède que les conditions d'intervention du juge des référés, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, diffèrent selon qu'il s'agit d'assurer la sauvegarde des droits protégés par les articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, d'une part, et du droit protégé par l'article 8 de la même convention, d'autre part, le paragraphe 2 de ce dernier article prévoyant expressément, sous certaines conditions, que des restrictions puissent être apportées à son exercice. Sur les pouvoirs du juge administratif et de l'autorité judiciaire statuant sur les conditions de détention des personnes prévenues ou condamnées : 10. Il résulte de la combinaison des dispositions des articles L. 511-1, L. 521-2 et L. 521-4 du code de justice administrative qu'il appartient au juge des référés, lorsqu'il est saisi sur le fondement de l'article L. 521-2 de ce code et qu'il constate une atteinte grave et manifestement illégale portée par une personne morale de droit public à une liberté fondamentale, de prendre les mesures qui sont de nature à faire disparaître les effets de cette atteinte. Ces mesures doivent en principe présenter un caractère provisoire, sauf lorsqu'aucune mesure de cette nature n'est susceptible de sauvegarder l'exercice effectif de la liberté fondamentale à laquelle il est porté atteinte. Le juge des référés peut, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, ordonner à l'autorité compétente de prendre, à titre provisoire, une mesure d'organisation des services placés sous son autorité lorsqu'une telle mesure est nécessaire à la sauvegarde d'une liberté fondamentale. Toutefois, le juge des référés ne peut, au titre de la procédure particulière prévue par l'article L. 521-2, qu'ordonner les mesures d'urgence qui lui apparaissent de nature à sauvegarder, dans un délai de quarante-huit heures, la liberté fondamentale à laquelle il est porté une atteinte grave et manifestement illégale. Eu égard à son office, il peut également, le cas échéant, décider de déterminer dans une décision ultérieure prise à brève échéance les mesures complémentaires qui s'imposent et qui peuvent également être très rapidement mises en œuvre. Dans tous les cas, l'intervention du juge des référés dans les conditions d'urgence particulière prévues par l'article L. 521-2 est subordonnée au constat que la situation litigieuse permette de prendre utilement et à très bref délai les mesures de sauvegarde nécessaires. Compte tenu du cadre temporel dans lequel se prononce le juge des référés saisi sur le fondement de l'article L. 521-2, les mesures qu'il peut ordonner doivent s'apprécier en tenant compte des moyens dont dispose l'autorité administrative compétente et des mesures qu'elle a déjà prises. 11. Enfin, il découle des obligations qui pèsent sur l'administration, qu'en parallèle de la procédure prévue à l'article L. 521-2 du code de justice administrative, qui permet d'ores et déjà de remédier aux atteintes les plus graves aux libertés fondamentales des personnes détenues, le juge de l'excès de pouvoir peut, lorsqu'il est saisi à cet effet, enjoindre à l'administration pénitentiaire de remédier à des atteintes structurelles aux droits fondamentaux des prisonniers en lui fixant, le cas échéant, des obligations de moyens ou de résultats. Il lui appartient alors de statuer dans des délais adaptés aux circonstances de l'espèce. 12. Par ailleurs, le législateur a introduit, par la loi du 8 avril 2021 tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention, l'article 803-8 du code de procédure pénale, - auquel renvoient également les dispositions de l'article L. 315-9 du code pénitentiaire -, qui dispose, à son premier alinéa, que : " Sans préjudice de sa possibilité de saisir le juge administratif en application des articles L. 521-1, L. 521-2 ou L. 521-3 du code de justice administrative, toute personne détenue dans un établissement pénitentiaire en application du [code de procédure pénale] qui considère que ses conditions de détention sont contraires à la dignité de la personne humaine peut saisir le juge des libertés et de la détention, si elle est en détention provisoire, ou le juge de l'application des peines, si elle est condamnée et incarcérée en exécution d'une peine privative de liberté, afin qu'il soit mis fin à ces conditions de détention indignes ". En vertu également de ces dispositions, le juge judiciaire peut ordonner à l'administration de mettre fin, par tout moyen, à ces conditions de détention dans un délai maximum d'un mois. Passé ce délai, si ces conditions perdurent, le juge ordonne soit le transfèrement de la personne, soit sa mise en liberté immédiate, le cas échéant sous contrôle judiciaire ou assignation à résidence, soit une autre mesure prévue au paragraphe III de l'article 707. Les modalités d'application de cet article ont été précisées par le décret du 15 septembre 2021 relatif au recours prévu à l'article 803-8 du code de procédure pénale et visant à garantir le droit au respect de la dignité en détention, entré en vigueur le 1er octobre 2021, et dont les dispositions ont été codifiées aux articles R. 249-17 à R. 249-41 du code de procédure pénale. Sur les demandes en référé : En ce qui concerne l'urgence : 13. Il résulte de l'instruction, et notamment des statistiques mensuelles de la population détenue et écrouée du ministère de la justice pour le mois de juillet 2023, de la note de la direction de l'administration pénitentiaire sur les capacités du centre pénitentiaire de Perpignan mise à jour au cours de premier trimestre 2023 et des données fournies par l'administration sur l'effectif réellement hébergé au sein de l'établissement, que le centre pénitentiaire de Perpignan connaît au 1er août 2023 un taux d'occupation global de 204,1 %, porté à 236,4 % pour ce qui concerne le quartier " maison d'arrêt hommes " et à 217,9 % pour ce qui concerne le quartier " maison d'arrêt femmes ". Il résulte en outre de l'instruction et notamment du courrier adressé par le directeur du centre pénitentiaire de Perpignan au procureur de la République près le Tribunal judiciaire de Perpignan, au président du Tribunal judiciaire de Perpignan et au juge de l'application des peines le 16 juin 2023 que le nombre de matelas au sol du quartier " maison d'arrêt hommes " s'élève à 86. Dans ces conditions, l'administration pénitentiaire est conduite, mécaniquement, à déroger au principe de l'encellulement individuel des détenus. Il résulte de l'instruction qu'à la date de la visite de la CGLPL, soit le 3 avril 2023, l'espace personnel des détenus au sein du quartier " maison d'arrêt hommes " était de 0,84 m² pour les cellules " triplées ". Ces éléments sont corroborés par les nombreuses photographies des cellules. Si le ministre de la justice fait valoir dans ses écritures en défense que le taux d'occupation de la maison d'arrêt est relativement stable et que le nombre de matelas au sol a sensiblement baissé depuis le 1er janvier 2022, ce qui n'est au demeurant pas corroboré par les pièces précitées, il ne contredit nullement les constatations de la CGLPL sur l'espace individuel propre à chaque détenu. Dès lors que, dans ces conditions, l'espace individuel des détenus est susceptible d'être inférieur au seuil de 3 m² défini par la CEDH, l'atteinte au droit des détenus placés en cellules " triplées " de ne pas subir de traitements inhumains et dégradants doit être présumée établie. Il ne résulte pas de l'instruction que les réductions de l'espace personnel de ces détenus ne seraient qu'occasionnelles. Il résulte par ailleurs des dernières recommandations de la CGLPL précitées, du rapport de visite dressés par cette autorité en 2014 en 2010, qu'en dépit des mesures d'ores et déjà prises par l'administration, un certain nombre d'éléments laissent penser qu'il existe encore des atteintes graves et manifestement illégales aux libertés fondamentales garanties par les articles 2, 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, y compris s'agissant de personnes qui ne seraient pas détenues en cellules " triplées ". 14. Il s'ensuit que, nonobstant les efforts manifestes de l'administration depuis la dernière visite de la CGLPL non seulement dans l'immédiat mais aussi en termes de programmation de travaux, l'atteinte grave et manifeste à des libertés fondamentales est établie en général, sans préjuger de l'existence ou non de situation d'atteinte à titre individuel entrant dans le champ de l'article 803-8 du code de procédure pénale précité ou d'un contentieux indemnitaire. 15. Dans ces circonstances et compte tenu de la vulnérabilité des personnes détenues et de leur situation d'entière dépendance vis-à-vis de l'administration, la condition d'urgence posée à l'article L. 521-2 du code de justice administrative doit être regardée comme remplie. La saisine du juge des référés en vue de prononcer le cas échéant des injonctions susceptibles d'être suivies d'effet à très bref délai est ainsi pleinement justifiée dans son principe. En ce qui concerne la surpopulation carcérale : 16. En premier lieu, les associations requérantes demandent au juges des référés d'enjoindre à l'administration de suspendre les incarcérations, totalement ou partiellement, au besoin sur le modèle du dispositif " stop-écrou " mis en place à la maison d'arrêt de Bordeaux-Gradignan, afin de réduire le taux de surpopulation carcérale au sein du centre pénitentiaire de Perpignan. Elles soutiennent que l'administration peut décider de suspendre temporairement toute nouvelle admission dans un établissement pénitentiaire particulier, lorsque la situation de cet établissement est à ce point dégradée qu'elle expose les personnes détenues à des conditions d'incarcération gravement attentatoires à la dignité humaine, comme le démontre le dispositif précité, sans pour autant préciser sur quel fondement juridique un tel dispositif a pu être mis en place. Toutefois, l'intervention de mesures mettant fin à la surpopulation carcérale ne peut, compte tenu de l'ampleur de ce phénomène au sein du centre pénitentiaire de Perpignan, que s'inscrire dans le cadre de mesures structurelles. En outre, et en tout état de cause, les mesures que peut ordonner le juge des référés doivent s'apprécier en tenant compte des moyens dont dispose l'autorité administrative compétente et des mesures qu'elle a, dans ce cadre, déjà prises. Or, l'administration pénitentiaire ne dispose d'aucun pouvoir de décision en matière de mises sous écrou, lesquelles relèvent exclusivement de l'autorité judiciaire. Une maison d'arrêt est ainsi tenue d'accueillir, quel que soit l'espace disponible dont elle dispose, la totalité des personnes mises sous écrou, cela étant conforme à la recommandation en urgence formulée par la CGLPL le 6 juin 2023 selon laquelle " des mesures associant les différents acteurs de la chaîne pénale doivent être prises sans délai pour réduire la pression carcérale sur l'établissement ". Au demeurant, l'administration fait valoir que la direction interrégionale des services pénitentiaires de Toulouse et la direction du centre pénitentiaire de Perpignan ont alerté les autorités judiciaires sur la situation de surpopulation carcérale au sein de l'établissement, sur les conséquences d'un tel surencombrement sur la dignité des personnes détenues hébergées ainsi que sur l'existence de places libres au sein du centre de détention et du quartier de semi-liberté. Elle indique également que les autorités judiciaires développent des mesures d'aménagement de peines, et notamment de libération sous contrainte de plein droit, mises en œuvre au sein de l'établissement de Perpignan, dont le nombre enregistré est supérieur à la moyenne nationale. A ce titre, il résulte de l'instruction que depuis le mois de janvier 2023, sur les 1 202 dossiers examinés par la commission d'application des peines au centre pénitentiaire de Perpignan, 79,8 % des dossiers ont donné lieu à des réductions supplémentaires de peine. Également, l'administration décrit la mise en œuvre d'un politique de transfert des personnes détenues éligibles pour un transfert dans une structure d'orientation vers la sortie (SAS) dont l'organisation prévoit la réunion de deux commissions pluridisciplinaires mensuelles et ayant abouti au transfert de 27 personnes détenues vers la SAS de Villeneuve-Lès-Maguelone. De même, le directeur du centre pénitentiaire de Perpignan bénéficie d'une délégation de signature du directeur interrégional des services pénitentiaires de Toulouse pour décider de transferts de la maison d'arrêt hommes vers le centre de détention de son établissement. 17. En second lieu, si les associations requérantes sollicitent qu'il soit enjoint à l'administration de " faire réaliser une étude afin d'analyser les raisons du faible taux d'aménagement de peine et de proposer des pistes de mesures à mettre en place ", une telle demande d'injonction qui porte sur des mesures d'ordre structurel, et au surplus sur des décisions de l'autorité judiciaires et des choix de politique publique, insusceptibles d'être mis en œuvre, et dès lors de porter effet à très bref délai, n'est pas au nombre des mesures d'urgence que la situation permet de prendre utilement dans le cadre des mesures que le juge des référés tient de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. 18. Dans ces conditions, le juge des référés ne peut qu'enjoindre à l'administration pénitentiaire de prendre, dans les meilleurs délais, les mesures qui apparaitraient de nature à améliorer, dans l'attente d'une solution pérenne, les conditions matérielles d'installation des détenus, telles que précisées ci-dessous. En ce qui concerne les autres injonctions relatives à des mesures structurelles : 19. Pour faire cesser les atteintes invoquées aux droits découlant des articles 2, 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la section française de l'Observatoire international des prisons et l'association pour la défense des droits des détenus, demandent qu'il soit enjoint à l'administration : - de réaliser les travaux de rénovation et de réhabilitation du système de ventilation des cellules qui le nécessitent ; - de veiller à équiper chaque lit superposé d'une échelle ; - d'équiper les placards d'étagères lorsqu'ils en sont dépourvus ; - de procéder à la réfection des sanitaires et en assurer une propreté pérenne ; - d'équiper les sanitaires de lunettes et d'abattants ; - de procéder à la rénovation des toilettes en cours de promenade ; - d'équiper les cours de promenade d'abris, de bancs et d'installations légères permettant l'exercice physique ; - de procéder, selon les modalités techniques les plus appropriées, à l'ensemble des réparations qui s'imposent pour faire cesser tout danger pour la sécurité des personnes détenues et mettre en œuvre les préconisations de la sous-commission de sécurité ; - de procéder à l'installation d'un système d'appel d'urgence au sein de chaque cellule ; - de produire une note de service rappelant les exigences attendues en termes de déontologie. 20. Eu égard à leur objet, les injonctions demandées mentionnées au point précédent, qui portent sur des mesures d'ordre structurel, et au surplus sur des choix de politique publique, insusceptibles d'être mis en œuvre, et dès lors de porter effet, à très bref délai, ne sont pas au nombre des mesures d'urgence que la situation permet de prendre utilement dans le cadre des pouvoirs que le juge des référés tient de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. Il s'ensuit que les associations requérantes ne sont pas fondées à demander le prononcé de ces injonctions. En ce qui concerne les conditions matérielles de détention dans les cellules du centre pénitentiaire de Perpignan : 21. En premier lieu, la CGLPL relève, dans ses recommandations en urgence formulées le 6 juin 2023, que les cellules du quartier " centre de détention " et celles du quartier " maison d'arrêt hommes " " accusent une usure et des dégradations plus importantes que ne pourrait le laisser espérer leur année de construction (1987) ", que, s'agissant du quartier " maison d'arrêt hommes ", la surpopulation ne saurait en être le seul facteur d'explication ", et que " la maintenance technique en cellule est insuffisante, générant des besoins exponentiels qui ne peuvent être couverts, faute de moyens humains et matériel ". L'état de dégradation et d'insalubrité généralisé dénoncé par cette autorité est corroboré par le cahier photographique annexé aux recommandations. Le ministre produit en défense un procès-verbal de constat dressé par commissaire de justice le 10 août 2023 aux termes duquel il a été constaté, à cette date, que les fenêtres des cellules sont en bon état d'entretien et sont équipées. L'administration fait également valoir dans ses écritures ainsi qu'à l'audience qu'un audit de l'ensemble des cellules a été réalisé au cours du mois de juin 2023 permettant d'établir un bilan afin de procéder aux réparations identifiées comme nécessaires dans chaque cellule, que la procédure existante permet aux personnes détenues constatant un dysfonctionnement ou la nécessité d'effectuer des travaux dans leur cellule de le signaler à un personnel de l'administration pénitentiaire afin qu'ils soient consignés dans le logiciel Genesis et qu'ils puissent être pris en charge par le service technique, cette prise en charge intervenant au fil de l'eau. Elle précise en outre que nombre de dégradations sont imputables aux détenus et qu'aux termes de l'article 11 du règlement intérieur chaque personne détenue doit entretenir sa cellule dans un état constant de propreté. Elle ajoute que les problèmes de moisissure au sein des cellules ont été largement réglés grâce à la rénovation du système de ventilation. Les associations requérantes ont soutenu lors de débats à l'audience d'une part que les constats par commissaire de justice n'ont pu être que très partiels et d'autre part que tant le système de maintenance que les travaux de rénovation de la ventilation sont manifestement insuffisants compte tenu des constats faits par la CGLPL lors de ses visites des mois de mars et avril 2023. Ni le procès-verbal de constat du 10 août 2023, ni le relevé d'interventions effectuées par le service technique de l'établissement ne permettent de s'assurer que les cellules identifiées par la CGLPL comme étant les plus dégradées auraient fait l'objet des mesures urgentes que nécessite leur état de vétusté et de délabrement. Or, l'état de ces dernières cellules caractérisé par des fenêtres cassées ou l'absence de fenêtre, la présence de moisissure sur les murs, la présence de dentifrice ou de lait en poudre pour boucher les trous, l'obstruction des bouches d'aération ou plus généralement " l'indignité des conditions d'hébergement " retenue par la CGLPL dans ses dernières recommandations, s'il n'y a pas été remédié, porte une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales garanties par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'hommes et des libertés fondamentales nécessitant qu'une mesure de sauvegarde soit ordonnée à très bref délai. Dès lors, l'urgence étant caractérisée, il y a lieu d'enjoindre à l'administration, dans l'attente d'une solution pérenne, de procéder, dans les cellules où cela n'aura pas déjà été fait, à l'élimination la moisissure présente dans les cellules, de procéder à la réparation ou au changement des fenêtres défectueuses et, de manière générale de remédier aux conditions d'insalubrité de ces cellules. 22. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que l'administration a d'ores et déjà entamé les procédures pour s'approvisionner en échelles de lit et de miroirs afin de procéder aux remplacements de ces éléments de mobilier dans les cellules qui en seraient dépourvues. En e qui concerne l'état de l'éclairage artificiel des cellules, l'administration fait valoir que l'audit mené en juin 2023 a permis de constater l'absence de système d'éclairage défectueux et qu'en tout état de cause, la procédure de maintenance, déclenchée par les signalements effectués sur le logiciel Genesis, permet de pallier aux dysfonctionnements au fil de l'eau, procédure. Il ne résulte ainsi pas de l'instruction que l'administration pénitentiaire ne traiterait pas ces signalements. Il y a donc lieu, en l'état de l'instruction, de considérer que la mesure sollicitée a été exécutée, le juge du référé-liberté ne pouvant en tout état de cause adresser à l'administration d'injonctions qui dépasseraient ce qu'exige la recherche d'une solution immédiate aux carences constatées. 23. En troisième lieu, les associations requérantes demandent qu'il soit enjoint à l'administration de prendre toutes mesures de nature à améliorer le cloisonnement des annexes sanitaires dans les cellules qui le nécessitent, en se fondant sur le constat établi par la CGLPL dans ses dernières recommandations selon lequel " dans un grand nombre de cellules, les cloisons latérales censées séparer les sanitaires du reste de la pièce sont dégradées, partiellement manquantes voire absentes et remplacées par des rideaux artisanaux confectionnés avec des draps ou des serviettes ", corroboré par le cahier photographique qui y est annexé. Lorsqu'une cellule est occupée par plus d'une personne, l'absence de séparation des sanitaires par une cloison ou par des rideaux permettant de protéger suffisamment l'intimité est de nature tant à porter atteinte à la vie privée des détenus, dans une mesure excédant les restrictions inhérentes à la détention, qu'à les exposer à un traitement inhumain ou dégradant, portant une atteinte grave à ces deux libertés fondamentales. Toutefois, d'une part, l'administration fait valoir sans être contredite que l'absence de certaines portes battantes type " saloon " résulte de dégradations effectuées par les détenus et que les portes défectueuses sont régulièrement réparées ou remplacées. D'autre part, les dispositifs artisanaux mis en œuvre par les détenus eux-mêmes et décrits par la CGLPL permet d'assurer provisoirement une séparation des sanitaires des cellules du reste de l'espace de la cellule. Il ne résulte ainsi pas de l'instruction que les dispositifs de cloisonnement partiel mis en place porterait une atteinte grave et manifestement illégale à la dignité humaine ou au droit au respect de la vie privée et familiale des personnes détenues dans la mesure où l'absence de cloisonnement total, que justifie la nécessité de pouvoir surveiller la totalité de la cellule, ne fait pas obstacle à ce que soit préservée l'intimité des détenus, quelles que soient les regrettables conséquences que ce dispositif entraîne. L'injonction demandée à ce titre doit donc être rejetée. 24. En quatrième lieu, si les associations requérantes sollicitent qu'il soit enjoint à l'administration de procéder au nettoyage des sanitaires dans les cellules, l'état de saleté importante de ces derniers ayant été constaté par la CGLPL dans ses dernières recommandations, il résulte cependant de l'instruction que l'administration pénitentiaire a procédé au décrassage des sanitaires dans les cellules au moins pour une partie d'entre elles selon les mentions portées au procès-verbal de constat dressé le 10 août 2023. Par ailleurs, aux termes du premier alinéa de l'article R. 321-4 du code pénitentiaire : " Chaque personne détenue en capacité physique de le faire entretient sa cellule ou la place qui lui est réservée dans un état constant de propreté, et fait son lit. A cet effet, l'administration pénitentiaire lui fournit les produits et objets de nettoyage nécessaires. ". L'administration fait valoir en défense qu'est remis à chaque personne détenue un kit d'entretien à son arrivée puis mensuellement, comprenant un produit multi-usage, des sacs poubelle, un flacon d'eau de javel, deux éponges, un produit lessive, une serpillère et un torchon. L'article 11 du règlement intérieur prévoit en outre que l'usage au sein de l'établissement est de fournir une serpillère tous les deux mois et de changer le torchon toutes les semaines, et que concernant l'eau de javel un flacon de 120 ml est remis à chaque personne détenue tous les quinze jours. Cette distribution n'apparaît pas manifestement insuffisante pour permettre à chaque personne détenue en capacité physique de le faire d'entretenir les sanitaires de sa cellule dans un état de propreté, conformément aux dispositions précitées du premier alinéa de l'article R. 321-4 du code pénitentiaire. Dans ces conditions, l'atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales des détenus garanties par les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas établi. La demande d'injonction relative au nettoyage des sanitaires en cellule doit donc être rejetée. En ce qui concerne les espaces collectifs : 25. En premier lieu, les associations requérantes demandent qu'il soit enjoint à l'administration de procéder au nettoyage des sanitaires mis à la disposition des personnes détenues en cours de promenade. Elles se fondent sur le constat, général, dressé par la CGLPL dans ses dernières recommandations aux termes desquelles " les espaces de circulation et les espaces communs sont insuffisamment nettoyés ", " les déchets de toutes sortes " s'accumulant au pied des bâtiments ainsi que sur les photographies qui y sont annexées. Si l'état de grande saleté et d'encrassement des sanitaires communs ressort en effet de ces documents, il résulte cependant de l'instruction, tant du procès-verbal du 10 août 2023 que des photographies plus récentes produites le 17 août 2023, qu'à la suite de ces recommandations l'administration a fait procédé au nettoyage efficace de ces installations sanitaires. L'injonction demandée à ce titre doit donc être rejetée. 26. En second lieu, les associations requérantes demandent qu'il soit enjoint à l'administration d'équiper les douches collectives de cloisons individuelles, totales ou partielles, afin de garantir l'intimité des personnes détenues. Il résulte toutefois de l'instruction, notamment des photographies des douches versées aux débats et des constats dressés par le procès-verbal du 10 août 2023, qui n'est pas utilement contredit sur ce point, que les douches collectives font l'objet d'un cloisonnement de séparation entre chaque douche. L'injonction demandée doit donc être rejetée. En ce qui concerne l'accès aux douches : 27. En premier lieu, si les requérantes demandent qu'il soit enjoint à l'administration de doter, dans les installations sanitaires collectives, toutes les cabines de douches d'une porte et de procéder à l'entretien et au nettoyage régulier de ces installations, il résulte de ce qui a été dit aux deux points précédents que l'injonction ainsi sollicitées et devenue sans objet et doit être rejetée. 28. En second lieu, les associations requérantes demandent qu'il soit enjoint à l'administration de garantir à toutes personnes détenues un accès quotidien à une douche, en particulier s'agissant des femmes détenues pendant leur période de menstruation. L'administration fait valoir qu'en application de l'article 12 du règlement intérieur de l'établissement, trois douches par semaines sont proposées aux détenus, que ces derniers, et notamment les femmes, bénéficient également de douches en cours de promenade à raison de deux tours de douche par jour et que des tours de douches supplémentaires sont autorisés pour les auxiliaires, après le sport et après les formations. Il ne résulte pas de l'instruction que les conditions actuelles d'accès aux douches caractériseraient une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés invoquées. En ce qui concerne la présence de nuisibles dans les cellules et aux abords du centre pénitentiaire : 29. Les dernières recommandations de la CGLPL exposent que 63 % des cellules du quartier " maison d'arrêt hommes " et 22 % de celles du quartier " centre de détention " étaient infestées de punaises de lit lors de la visite de l'établissement, précisant que le SMPR n'était pas épargné. Cette autorité ajoute que " si les contrôleurs ont pu relever les efforts financiers croissants consentis par l'établissement, ils n'ont pu qu'en constater l'absence de résultats ", que " les solutions mises en œuvre ne sont pas à la hauteur du problème et ne parviennent pas à endiguer le phénomène ", et recommande de prendre sans délai toute mesure utile pour éradiquer les punaises de lit, " y compris des mesures exceptionnelles de désencombrement pour permettre le traitement en profondeur des espaces concernés ". Les associations requérantes demandent, en conséquence, qu'il soit enjoint à l'administration de procéder sans délai au traitement ou au remplacement des matelas infestés par des punaises d'amplifier les mesures tendant à la destruction des punaises de lits, éventuellement par la conclusion d'un nouveau contrat avec des entreprises spécialisées dans la destruction de ces nuisibles afin que leur nombre soit très substantiellement diminué dans le délai de trois mois à compter de la notification de la présente ordonnance, de mettre à même les détenus qui n'ont accès ni à un lave-linge, ni à un service de buanderie de pouvoir laver leur linge en leur fournissant le matériel nécessaire à cet effet ou en s'assurant qu'ils en sont dotés et de mettre en place un lavage plus régulier du linge fourni aux personnes détenues, participant à l'élimination des punaises de lits. 30. Le ministre reconnaît, dans ses écritures, que la présence de punaises de lit a été constatée au sein du centre pénitentiaire de Perpignan lors de l'audit réalisé du 18 au 20 avril 2023 réalisé par un prestataire privé, postérieurement à la seconde visite de la CGLPL et que cet audit a permis d'identifier les cellules touchées par la prolifération de ces nuisibles - au nombre de 47 - afin de permettre à la société prestataire d'intervenir de manière ciblée. L'administration fait valoir que l'opération de traitement des punaises a été réalisée à compter du 4 mai 2023 et qu'elle a, pour ce faire, procéder à l'achat de six congélateurs. Elle précise également qu'à la suite de cette campagne, la société privée et agréée a dressé un bilan des cellules traitées les 14 et 15 juin 2023. Ce bilan révèle que 18,18 % des cellules traitées du bâtiment A, 14,28 % de celles du bâtiment C, 30 % de celles du bâtiment D, 20 % de celles du bâtiment E et 100 % de celles du SMPR présentent, en récidive, une infestation par des punaises de lit et que 5 cellules sur 46 examinées en cas de suspicion en sont infestées. Il résulte ainsi de l'instruction que la direction du centre pénitentiaire a mis en place des mesures récentes destinées à lutter contre les nuisibles, et que le prestataire a établi, le 3 août 2023, un devis pour de nouvelles mesures de désinsectisation. 31. Toutefois, si ces traitements ont amélioré la situation, il est constant qu'à la date de la présente ordonnance l'intervention de désinsectisation n'est pas intervenue et que les mesures prises jusqu'à présent n'ont pas été suffisantes pour éradiquer les punaises de lit dans l'établissement. Il résulte en outre des articles de presse et témoignages produits par les requérantes et non utilement contredits par l'administration en défense, que la prolifération de ces nuisibles s'étend également aux espaces communs (couloirs fréquentés par le personnel pénitentiaire). La prolifération dans les espaces communs et les cellules d'animaux nuisibles, imputable à une carence de l'administration, affecte la dignité des détenus et engendre un risque sanitaire pour l'ensemble des personnes fréquentant l'établissement, constituant par là-même une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Il y a lieu, l'urgence étant caractérisée, d'enjoindre à l'administration de faire procéder, dans les plus brefs délais, selon les modalités juridiques et techniques les plus appropriées, et dans toute la mesure compatible avec la protection de la santé des détenus et des autres personnes fréquentant l'établissement ainsi qu'avec la nécessité de garantir la continuité du service public pénitentiaire, à une opération d'envergure susceptible de permettre la désinsectisation de l'ensemble des locaux du centre pénitentiaire de Perpignan. 32. En revanche, il résulte de l'instruction d'une part qu'un auxiliaire est désormais dédié à la désinfection des cellules identifiées comme susceptibles d'être infestées par des nuisibles et qu'il est équipé d'un nettoyeur vapeur et de terre de diatomée afin d'accroître l'efficacité de son intervention et d'autre part que le lavage du linge hôtelier est effectué tous les quinze jours par la buanderie de l'établissement. Dans ces conditions et compte tenu de l'injonction prononcée visée au point précédent, il n'apparaît pas utile de prononcer d'injonction complémentaire. En ce qui concerne les cours de promenade : 33. La CGLPL a constaté, dans ses dernières recommandations, que les espaces de circulation et les espaces communs étaient insuffisamment nettoyés, que des déchets de toutes sortes s'accumulaient au pieds des bâtiments où ils attirent des chats et des goélands, qui prolifèrent. Les photographies qui y sont annexées corroborent ce constat. 34. Il résulte toutefois de l'instruction, et notamment du procès-verbal dressé par commissaire de justice le 10 août 2023 et des photographies plus récentes produites par le ministre le 17 août 2023, que l'administration pénitentiaire a fait procéder à un nettoyage efficace tant des abords des bâtiments que des cours de promenade et autres espaces communs. Il en résulte également, ainsi qu'il a été dit au point 25 de la présente ordonnance, que les installations sanitaires ont été nettoyées efficacement. Il n'y a donc pas lieu de faire droit aux demandes d'injonction relatives au nettoyage de ces espaces et installations. 35. Il résulte également de l'instruction que les cours de promenade sont équipées de quelques équipements sportifs (barres de traction, table de tennis de table, vélo d'entraînement) et qu'une partie des cours de promenade est abritée. Dans ces conditions, l'état actuel des cours de promenade ne peut être regardé comme caractérisant une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés invoquées. En ce qui concerne la sécurité et le risque incendie : 36. Les associations requérantes demandent qu'il soit prescrit à l'administration de produire le dernier avis de la sous-commission de sécurité sur le centre pénitentiaire de Perpignan et de faire réaliser dans les meilleurs délais une vérification de la sécurité incendie de l'ensemble des cellules, en prenant en compte la surpopulation. La CGLPL retient, dans ses dernières recommandations, que " la sécurité incendie est compromise dans un tiers des cellules du quartier " maison d'arrêt hommes " où les prises électriques sont dégradées, des fils électriques dénudés, ce qui constitue un risque majeur d'incendie ". Elle précise que " l'avis favorable formulé par la commission départementale de sécurité incendie, alors que des préconisations de mise en conformité ont été formulées concernant l'électricité et le gaz, interroge " et recommande de prendre " sans délai toute mesure utile pour mettre les cellules du quartier " maison d'arrêt homme " en conformité avec les normes de sécurité en matière de prévention du risque d'incendie ". 37. Le ministre fait valoir en défense que la dernière visite de la sous-commission s'est déroulée les 25 et 26 novembre 2021 et que la prochaine visite devra avoir lieu en novembre 2024. Il produit l'avis émis par cette commission le 26 novembre 2021, lequel est favorable et assorti de prescriptions ne conditionnant pas la poursuite de l'ouverture au public de l'établissement. Ces prescriptions tiennent à la remise en état de fonctionnement de la ligne directe reliée à un centre de traitement d'alerte, à la mise en conformité des installations électriques, des installations du SSI des installations de gaz et des installations des ascenseurs en tenant compte des derniers rapports de vérification Véritas d'octobre et décembre 2020, à la régularisation du remplacement du SSI en transmettant pour avis le cahier des charges fonctionnels et à la transmission d'une attestation d'effectif afin d'actualiser ce dernier. Ce dernier avis de la sous-commission ayant été transmis dans la présente instance, il n'y a pas lieu d'enjoindre à l'administration de le produire. 38. L'administration justifie avoir fait réaliser, par la société Idex Energies, les travaux de remise en conformité électrique selon le rapport Véritas achevés et réceptionnés sans réserve le 30 janvier 2023. Elle justifie en outre du contrôle au 13 juin 2023, par cette même société, de l'équipement de différentiels 30 mA des prises électriques des cellules de l'établissement. Elle justifie en outre avoir fait réaliser, par la société SPIE Facilities, des travaux de remise en conformité du système de sécurité incendie de l'établissement, achevés et réceptionnés le 10 août 2020 sous les réserves d'essais concluant des trappes fermées prévus le 8 septembre 2020, de la protection du câblage à mettre en place entre-deux, de la fixation et de la fermeture des boites de dérivation des quartiers disciplinaires hommes et femmes. Elle justifie enfin avoir fait procéder par la société Dekra aux vérifications règlementaires après travaux en janvier 2021. 39. Toutefois, compte tenu des incertitudes dont les associations requérantes et intervenantes ont fait part lors de l'audience s'agissant de l'obsolescence des constats de conformité des installations électriques et de sécurité incendie, de l'aggravation du risque incendie résultant nécessairement du taux de surpopulation carcérale au centre pénitentiaire de Perpignan et des constats alarmant dressés par la CGLPL après les deux visites effectuées en mars et avril 2023 dont il résulte que certaines cellules comportent des fils électriques apparents et pendant ou dénudés, il y a lieu de retenir que l'état des installations électriques et du système de sécurité incendie est susceptible de mettre en danger les personnes détenues concernées et constitue une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales garanties par les articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre à l'administration pénitentiaire, l'urgence étant caractérisée, de faire réaliser dans les meilleurs délais une vérification de la sécurité électrique de l'ensemble des cellules et de procéder immédiatement, selon les modalités techniques les plus appropriées, et dans toute la mesure compatible avec la protection de la santé des détenus ainsi qu'avec la nécessité de garantir la continuité du service public pénitentiaire, à l'ensemble des réparations qui s'imposent, en particulier en ce qui concerne les fils électriques dénudés, pour faire cesser tout danger pour la sécurité des personnes détenues. En ce qui concerne les kits d'hygiène et de nettoyage distribués aux personnes détenues : 40. En premier lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 321-5 du code pénitentiaire : " Les produits de la trousse de toilette remise à l'arrivée de toute personne détenue entrante sont renouvelés, selon des modalités déterminées par le chef de l'établissement pénitentiaire et au moins tous les mois, pour les personnes détenues dont les ressources sont insuffisantes, lorsqu'elles en font la demande. ". Il résulte de l'instruction, notamment des pièces produites par le ministre et n'est pas sérieusement contesté par les associations requérantes, qu'en application de l'article 12 du règlement intérieur chaque personne détenue arrivant au centre pénitentiaire de Perpignan se voit remettre un kit d'hygiène composé de deux rouleaux de papier toilette, d'un flacon de gel douche/shampoing, d'un désodorisant, d'un dentifrice, d'un peigne, d'un savon, d'un brosse à dents, d'un tube de crème à raser, d'un paquet de 5 rasoirs bi-lames jetables, d'un paquet de mouchoir, d'un gant, d'une serviette de toilette, d'une brosse à cheveux et d'un paquet de 20 serviettes hygiéniques pour les femmes. Cette trousse est également distribuée aux détenus indigents une fois par mois, conformément aux dispositions précitées du deuxième alinéa de l'article R. 321-5 du code pénitentiaire. Dans ces conditions, en l'absence d'atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales garanties par les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'y a pas lieu d'enjoindre à l'administration de procéder au renouvellement périodique des kits d'hygiène devant être remis gratuitement aux personnes détenues. 41. En second lieu, l'administration fait valoir en défense qu'est remis à chaque personne détenue un kit d'entretien à son arrivée puis mensuellement, comprenant un produit multi-usage, des sacs poubelle, un flacon d'eau de javel, deux éponges, un produit lessive, une serpillère et un torchon. L'article 11 du règlement intérieur prévoit en outre que l'usage au sein de l'établissement est de fournir une serpillère tous les deux mois et de changer le torchon toutes les semaines, et que concernant l'eau de javel un flacon de 120 ml est remis à chaque personne détenue tous les quinze jours. Dans ces conditions, en l'absence d'atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales garanties par les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'y a pas lieu d'enjoindre à l'administration de procéder au renouvellement périodique des kits de nettoyage devant être remis gratuitement aux personnes détenues. En ce qui concerne les mauvais traitements au sein du quartier disciplinaire : 42. La CGLPL a constaté, dans ses dernières recommandations, que l'usage de la force et des moyens de contrainte n'est pas tracé et que la posture professionnelle des agents affectés aux quartiers d'isolement et disciplinaire n'est pas conforme à la déontologique du service public pénitentiaire. Elle précise que " le recours aux menottes est systématique en cas de mise en prévention au quartier disciplinaire (64 mises en prévention du 1er janvier au 31 mars 2023) " laquelle est au demeurant systématique en cas de refus d'un détenu de réintégrer sa cellule - refus destinés à protester contre l'indignité de leurs conditions de détention ou les risques encourus d'atteinte à l'intégrité physique ". La CGLPL ajoute que " depuis près de trois ans à la date de visite du CGLPL, les quartiers d'isolement et disciplinaire relèvent d'une équipe dédiée, dont la posture professionnelle a été unanimement dénoncée par les détenus comme maltraitante envers les plus demandeurs ou récalcitrants ". Les contrôleurs ont ainsi recueilli plusieurs témoignages faisant état de propos déplacés voire insultants et de brimades imputés aux surveillants affectés aux quartiers d'isolement et disciplinaire. 43. Le ministre expose en défense que depuis la constitution de la brigade en poste affectée au quartier disciplinaire, aucune procédure prise sur le fondement de l'article 40 du code de procédure pénale n'a été initiée, ni davantage de procédures disciplinaires à l'encontre des agents pénitentiaires pour méconnaissance de leurs obligations déontologiques. Il ajoute que les agents ont été initiés par voie de rappels et de notes de services de la nécessité de faire des observations quotidiennes sur les personnes détenues placées au quartier disciplinaire et qu'une note de service en date du 9 juillet 2023 a diffusé à l'ensemble des agents du centre pénitentiaire l'ensemble des règles de déontologie auquel ils sont soumis. Lors des débats à l'audience, les représentants ont précisé que l'équipe en place au quartier disciplinaire donnait entière satisfaction, se comportant " en bon père de famille " et que les associations requérantes n'apportaient aucun commencement de preuve de la réalité et de la gravité des faits reprochés à des agents affectés au quartier disciplinaire. Les recommandations en urgence formulées par la CGLPL le 6 juin 2023 ne sont en effet corroborés par aucune autre pièce. Toutefois, compte tenu de l'office et des moyens alloués à la CGLPL et de la précision des faits relatés par cette autorité s'agissant des mauvais traitements dont se seraient plaints un certain nombre de détenus, ainsi que de la gravité de ces faits (délivrance d'un repas sur deux, impossibilité d'accéder à des vêtements de rechange, fouilles intégrales réalisées avec violence, doigts tordus durant l'opération, écrasement des orteils ), de tels agissements, dont la réalité n'est pas sérieusement remise en cause, doivent être regardés comme établis. L'administration ne peut dès lors être regardée comme assurant la protection de l'intégrité physique des détenus et la garantie de leurs droits. Les associations requérantes sont par suite fondées à soutenir que cette situation révèle une urgence justifiant la saisine du juge du référé au titre de l'article L. 521-2 du code de justice administrative et emporte une atteinte grave et manifestement illégale aux droits que les détenus tiennent de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et que l'urgence justifie la saisine du juge des référés en vue du prononcé d'injonctions. 44. Il y a dès lors lieu d'enjoindre à l'administration de faire immédiatement cesser les comportements contraires à la déontologie observés au quartier disciplinaire et de diligenter une enquête interne de l'établissement sur le comportement des surveillants au quartier disciplinaire. En revanche, il n'apparaît pas justifié d'effectuer, à titre conservatoire, comme le demandent les requérantes, un changement de l'équipe affectée au quartier disciplinaire. En ce qui concerne le maintien des liens personnels et familiaux des personnes détenues : 45. Les associations requérantes demandent qu'il soit enjoint à l'administration de prendre toutes mesures utiles pour permettre l'accès effectif des détenus aux téléphones mis à leur disposition dans les bâtiments et dans les cours promenades. Elles font valoir que la CGLPL relève dans ses dernières recommandations que " de nombreux postes téléphoniques en cellules sont en panne (35 % au quartier " maison d'arrêt hommes " et 19 % au quartier " centre de détention ") ". L'administration fait quant à elle valoir que toutes les cellules sont équipées de téléphones, à l'exception de celles du quartier disciplinaire, et que des cabines sont également disponibles en coursives et en cours de promenade. Elle précise que lorsqu'une cabine est hors service, les personnes détenues sont autorisées à utiliser celles situées dans les coursives, et décrit le système de maintenance pris en charge par le prestataire technique Telio via sa plateforme. Elle ajoute que chaque personne détenue ayant le statut de condamné arrivant dans l'établissement se voit remettre une carte téléphonique à titre gratuit. Ces conditions d'accès aux téléphones ou cabines, dont il n'est pas établi que la maintenance serait défaillante, ne portent pas une atteinte grave et manifestement disproportionnée aux droits des détenus au respect de leur vie privée et familiale en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, la demande d'injonction présentée par les associations requérantes sur ce point doit être rejetée. En ce qui concerne les fouilles intégrales : 46. La CGLPL expose, dans ses dernières recommandations, que des fouilles intégrales systématiques ont longtemps été mises en œuvre sur l'ensemble de la population détenue, hommes, femmes et mineurs. Elle poursuit en précisant que " bien que les contrôleurs qui ont mené la visite d'avril 2023 aient constaté que les recommandations émises à cet égard le mois précédent avaient été prises en compte par la direction, ils relevaient néanmoins la persistance de divers manquements aux exigences légales : traçabilité non systématique (en dépit d'une amélioration depuis mars) et réalisation des fouilles dans des lieux qui restent inadaptés. Faute de local dédié au quartier " maison d'arrêt hommes " et quartier " centre de détention ", les fouilles sont mises en œuvre dans les douches, des bureaux ou des salles d'activité inutilisées, parfois vitrées. ". 47. Les associations requérantes demandent qu'il soit ordonné d'assurer la traçabilité des décisions de fouilles ainsi que la transmission systématique d'un rapport circonstancié au procureur de la République lorsque la fouille est réalisée sur le fondement de l'article L. 225-2 du code pénitentiaire, d'assurer la notification systématique aux personnes détenues visées par les décisions de fouille prises sur le fondement de l'article L. 225-2 du code pénitentiaire, de proscrire les fouilles intégrales dans des lieux inadaptés et de prohiber tout comportement contraire à la déontologie lors des fouilles. L'administration fait valoir que les fouilles intégrales réalisées respectent les exigences des articles L. 225-1, L. 225-2 et L. 225-3 du code pénitentiaire et la circulaire du 15 juillet 2020 du directeur de l'administration pénitentiaire, qu'elles ont lieu dans une cabine de fouilles sauf pour les bâtiments d'hébergement qui n'en sont pas dotés mais pour lesquels un projet est en cours pour être réalisé en 2024, que chaque fouille est enregistrée dans l'application Genesis, que les agents comme les détenus sont informés des modalités des fouilles et de l'évolution de la législation par des notes de services. Il ne résulte pas de l'instruction que des fouilles illégales de personnes détenues seraient actuellement pratiquées au sein de l'établissement pénitentiaire. A supposer que d'autres fouilles que celles en cas de suspicion d'infraction ou dans le cadre d'un régime exorbitant soient pratiquées dans l'établissement sans être consignées sur un registre, cette circonstance ne caractérise pas une situation d'urgence particulière rendant nécessaire l'intervention d'une mesure de sauvegarde dans de très brefs délais. Dans ces conditions, en l'état de l'instruction, l'injonction sollicitée doit être rejetée. 48. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu d'enjoindre au Garde des Sceaux, ministre de la justice et au préfet des Pyrénées-Orientales pour ce qui le concerne ; - dans l'attente d'une solution pérenne, de procéder, dans les cellules où cela n'aura pas déjà été fait, à l'élimination la moisissure présente dans les cellules, de procéder à la réparation ou au changement des fenêtres défectueuses et, de manière générale de remédier aux conditions d'insalubrité de ces cellules ; - de faire procéder, dans les plus brefs délais, selon les modalités juridiques et techniques les plus appropriées, et dans toute la mesure compatible avec la protection de la santé des détenus et des autres personnes fréquentant l'établissement ainsi qu'avec la nécessité de garantir la continuité du service public pénitentiaire, à une opération d'envergure susceptible de permettre la désinsectisation de l'ensemble des locaux du centre pénitentiaire de Perpignan ; - de faire réaliser dans les meilleurs délais une vérification de la sécurité électrique de l'ensemble des cellules et de procéder immédiatement, selon les modalités techniques les plus appropriées, et dans toute la mesure compatible avec la protection de la santé des détenus ainsi qu'avec la nécessité de garantir la continuité du service public pénitentiaire, à l'ensemble des réparations qui s'imposent, en particulier en ce qui concerne les fils électriques dénudés, pour faire cesser tout danger pour la sécurité des personnes détenues ; - de faire immédiatement cesser les comportements contraires à la déontologie observés au quartier disciplinaire et de diligenter une enquête interne de l'établissement sur le comportement des surveillants au quartier disciplinaire. Sur les frais de l'instance : 49. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme globale de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E

Article 1er : Les interventions de la fédération nationale des unions de jeunes avocats (A), du syndicat des avocats de France (SAF) et du Conseil national des barreaux (CNB) sont admises. Article 2 : Il est enjoint au Garde des Sceaux, ministre de la justice et au préfet des Pyrénées-Orientales, chacun en ce qui les concerne, de prendre les mesures mentionnées au point 48 de la présente ordonnance. Article 3 : L'Etat versera à la Section française de l'Observatoire international des prisons et à l'Association des avocats pour la défense des droits des détenus la somme globale de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée à la Section française de l'Observatoire international des prisons, à l'Association des avocats pour la défense des droits des détenus, à la fédération nationale des unions de jeunes avocats (A), au syndicat des avocats de France (SAF) au Conseil national des barreaux (CNB), au Garde des Sceaux, ministre de la justice, au ministre de la santé et de la prévention et au préfet des Pyrénées-Orientales. Copie en sera adressée au directeur du centre pénitentiaire de Perpignan. Fait à Montpellier, le 22 août 2023. La juge des référés, L. Rigaud La République mande et ordonne au Garde des Sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Montpellier, le 22 août 2023, Le greffier D. Martinier

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