Cour d'appel de Versailles, Chambre 5, 3 novembre 2022, 21/01877

Mots clés
Autres demandes contre un organisme • société • produits • risque • service • connexité • litispendance • vestiaire • réparation • procès-verbal • preuve • reconnaissance • recours • remise • ressort • rejet

Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
1 juin 2023
Cour d'appel de Versailles
3 novembre 2022
Tribunal judiciaire de Versailles
11 mai 2021

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Versailles
  • Numéro de pourvoi :
    21/01877
  • Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
  • Nature : Arrêt
  • Décision précédente :Tribunal judiciaire de Versailles, 11 mai 2021
  • Identifiant Judilibre :6364bc46e405357f749ead42
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Résumé

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Texte intégral

COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 88G 5e Chambre

ARRET

N° CONTRADICTOIRE DU 03 NOVEMBRE 2022 N° RG 21/01877 - N° Portalis DBV3-V-B7F-USJ7 AFFAIRE : S.A. [5] C/ CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE [Localité 4] Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Mai 2021 par le Pole social du TJ de VERSAILLES N° RG : 16/02488 Copies exécutoires délivrées à : la SELARL [2] Me Mylène BARRERE Copies certifiées conformes délivrées à : S.A. [5] CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE [Localité 4] le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS LE TROIS NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX, La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : S.A. [5] [Adresse 1] [Adresse 1] représentée par Me Véronique BENTZ de la SELARL CEOS AVOCATS, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 1025 substituée par Me Audrey MOYSAN de la SELARL CEOS AVOCATS, avocat au barreau de NANTES, vestiaire : 292 APPELANTE **************** CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE [Localité 4] [Adresse 3] [Adresse 3] représentée par Me Mylène BARRERE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D2104 INTIMEE **************** Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Septembre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Sylvia LE FISCHER, Présidente, Madame Marie-Bénédicte JACQUET, Conseiller, Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller, Greffier, lors des débats : Madame Dévi POUNIANDY, EXPOSÉ DU LITIGE Employé par la société [6], reprise par la société [5] (la société [5]), en qualité de chef mécanicien, M. [V] [P] (la victime) a souscrit, le 29 janvier 2016, une déclaration de maladie professionnelle auprès de la caisse primaire d'assurance maladie [Localité 4] (la caisse), faisant état d'une 'MP 30B', avec une première constatation médicale au 29 décembre 2015. Le certificat médical initial joint à la déclaration fait état de : « plaques pleurales bilatérales non calcifiées et épaississement pleural viscéral de la gouttière gauche associé à un début d'asbestose (...) confirmé par TDM du 29/12/2015. Affection relevant MP 30B chez un ancien mécanicien naval ». La caisse, après ouverture et instruction de deux dossiers, l'un pour les plaques pleurales bilatérales et l'autre pour l'épaississement pleural viscéral a, le 26 juillet 2016, pris en charge la pathologie « plaques pleurales » inscrite au tableau n°30, au titre de la législation sur les risques professionnels. La pathologie 'épaississement de la plèvre viscérale', inscrite au tableau n°30 des maladies professionnelles, a été prise en charge par la caisse, au titre de la législation sur les risques professionnels, par décision du 26 juillet 2016 et fait l'objet d'un autre recours devant la cour de céans, sous le RG n° 21/01879. Après rejet de sa contestation amiable, la société [5] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Yvelines, devenu le pôle social du tribunal judiciaire de Versailles, aux fins de solliciter l'inopposabilité à son égard de la décision de la caisse de prendre en charge la pathologie « plaques pleurales » déclarée par la victime. Devant le tribunal, compte tenu d'une procédure en reconnaissance de la faute inexcusable de la société [5] pendante devant la cour d'appel de Rouen, la caisse a sollicité la jonction de cette procédure avec celle concernant le même salarié pour la maladie 'épaississement de la plèvre', et a fait valoir une exception de litispendance et de connexité au profit de la cour d'appel de Rouen. Par jugement du 11 mai 2021 (RG n° 16/02488) le pôle social du tribunal judiciaire de Versailles a : - dit n'y avoir lieu à joindre la présente instance à celle enregistrée sous le numéro RG 16/02432 ; - rejeté les exceptions de litispendance et de connexité soulevées par la caisse ; - déclaré opposable à la société [5] la décision en date du 26 juillet 2016 de la caisse prenant en charge au titre de la législation professionnelle la maladie « plaques pleurales » de la victime, déclarée le 29 janvier 2016 ; - dit que la décision de la commission de recours amiable du 2 mai 2017 était justifiée ; - débouté les parties de leurs demandes contraires ou plus amples ; - condamné la société [5] aux dépens. La société [5] a relevé appel de cette décision. Les parties ont été convoquées à l'audience du 7 septembre 2022, date à laquelle elles ont comparu, représentées par leur avocat. Par conclusions écrites déposées et soutenues oralement à l'audience, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la société [5] demande à la cour : - de déclarer recevable et bien fondé son appel ; - de réformer le jugement du tribunal judiciaire de Versailles du 11 mai 2021 en toutes ses dispositions ; Et statuant à nouveau : - de déclarer inopposable à son encontre la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de la maladie du 26 juillet 2016 « plaques pleurales » déclarée par la victime ; En toutes hypothèses : - de débouter la caisse de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ; - de condamner la caisse aux entiers dépens. Pour l'essentiel de son argumentation, la société fait valoir que la maladie prise en charge par la caisse ne correspond pas à la désignation de la maladie mentionnée au tableau n° 30 des maladies professionnelles. La société conteste l'exposition au risque d'inhalation de poussières d'amiante, considérant que la victime n'effectuait pas les travaux listés au tableau n° 30, le seul constat du domaine d'activité de la victime ne pouvant suffire à caractériser l'exposition à l'amiante. La société considère que l'enquête diligentée par la caisse est insuffisante, à défaut d'avoir sollicité l'avis de l'inspecteur du travail et du service de prévention de la CARSAT. La société expose que la société [6], employeur de la victime jusqu'en 2014, ne figure pas sur la liste des entreprises ouvrant droit à la cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante et que des considérations générales sur la présence d'amiante dans les navires n'est pas suffisante à caractériser l'exposition certaine de la victime à l'inhalation de poussières d'amiante dans le cadre de l'exercice de ses fonctions au sein de la société, ce dernier ayant pu être exposé à ce risque dans le cadre des activités réalisées antérieurement à son embauche par la société [6]. Elle considère que l'éventuelle présence d'amiante dans les locaux ne peut caractériser l'exposition au risque et qu'en tout état de cause, la caisse ne rapporte pas la preuve de l'exposition certaine de la victime à l'inhalation de poussières d'amiante dans le cadre de ses activités professionnelles. Elle considère également qu'elle a sollicité auprès de la caisse la transmission des pièces du dossier, afin de formuler de nouvelles observations mais la caisse a refusé, violant son obligation d'information envers l'employeur. Par conclusions écrites déposées et soutenues oralement à l'audience, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la caisse demande à la cour : - de confirmer le jugement rendu le 11 mai 2021 par le pôle social du tribunal judiciaire de Versailles ; - de dire et juger que la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie « plaques pleurales » dont est atteint la victime est opposable à la société [5] ; - de condamner la société [5] aux entiers dépens. Pour l'essentiel de son argumentation, la caisse expose qu'elle n'est pas tenue par le libellé de la maladie tel qu'il figure sur le certificat médical initial, mais qu'il appartient au service médical de vérifier si la pathologie déclarée correspond à l'une des maladies visées dans un tableau des maladies professionnelles et si elle répond aux conditions médicales du tableau concerné. Elle fait valoir que le service médical a considéré que l'affection déclarée par la victime consistait en des plaques pleurales inscrite au tableau n° 30 et que cette pathologie avait été confirmée par la réalisation d'un scanner thoracique, également appelé tomodensitométrie ou 'TDM', ce qui a été confirmé par le médecin conseil de la caisse dans le cadre du colloque médico-administratif, auquel l'employeur a eu accès dans le cadre de la procédure d'instruction. La caisse rappelle qu'elle est tenue à une obligation d'information, consistant à informer l'employeur de la clôture de l'instruction et de la possibilité de venir consulter les pièces du dossier avant de prendre sa décision sur le caractère professionnel de la maladie, mais qu'elle n'a pas l'obligation de communiquer à l'employeur les pièces du dossier et qu'en tout état de cause, l'examen tomodensitométrique est un élément du diagnostic de la maladie qui n'a pas à figurer dans le dossier administratif de la caisse. S'agissant de l'exposition au risque, la caisse fait valoir que l'enquête a permis de démontrer que la victime avait été exposée à l'inhalation de poussières d'amiante dans le cadre de son activité professionnelle au sein de la société [5], la liste figurant au tableau n° 30 étant indicative et non pas impérative. Concernant les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la société [5] et la caisse sollicitent chacune l'octroi d'une indemnité de 1 500 euros.

MOTIFS

DE LA DÉCISION Sur la désignation de la maladie Selon l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, une maladie est présumée d'origine professionnelle si elle est mentionnée dans un tableau de maladies professionnelles et qu'elle remplit les conditions prévues par ce dernier. Dans les rapports caisse/employeur, il appartient à la caisse de démontrer que les conditions du tableau des maladies professionnelles dont elle invoque l'application sont remplies, et en particulier que la pathologie décrite dans le certificat médical accompagnant la déclaration de maladie professionnelle mentionne la maladie telle qu'elle est désignée dans le tableau, ou que des éléments objectifs du dossier constitué au moment de l'instruction permettent de démontrer cette adéquation. En outre, la maladie doit être considérée comme contractée au service du dernier employeur chez lequel la victime a été exposée au risque, avant sa constatation médicale, soit la société [5], sauf à cet employeur à rapporter la preuve contraire, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Le tableau n° 30B des maladies professionnelles vise les affections professionnelles consécutives à l'inhalation des poussières d'amiante : Désignation des maladies Délai de prise en charge Liste indicatives des principaux travaux susceptibles de provoquer ces maladies B Lésions pleurales bénignes avec ou sans modifications des explorations fonctionnelles respiratoires : 40 ans Travaux exposant à l'inhalation de poussières d'amiante, notamment : - extraction, manipulation et traitement de minerais et roches amiantifères. Manipulation et utilisation de l'amiante brut dans les opérations de fabrication suivantes : - amiante-ciment ; amiante-plastique ; amiante-textile; amiante-caoutchouc ; carton, papier et feutre d'amiante enduit ; feuilles et joints en amiante ; garnitures de friction contenant de l'amiante ; produits moulés ou en matériaux à base d'amiante et isolants. Travaux de cardage, filage, tissage d'amiante et confection de produits contenant de l'amiante. Application, destruction et élimination de produits à base d'amiante : - amiante projeté ; calorifugeage au moyen de produits contenant de l'amiante ; démolition d'appareils et de matériaux contenant de l'amiante, déflocage. Travaux de pose et de dépose de calorifugeage contenant de l'amiante. Travaux d'équipement, d'entretien ou de maintenance effectués sur des matériels ou dans des locaux et annexes revêtus ou contenant des matériaux à base d'amiante. Conduite de four. Travaux nécessitant le port habituel de vêtements contenant de l'amiante. - plaques calcifiées ou non péricardiques ou pleurales, unilatérales ou bilatérales, lorsqu'elles sont confirmées par un examen tomodensitométrique ; - pleurésie exsudative 35 ans (sous réserve d'une durée d'exposition de 5 ans) - épaississement de la plèvre viscérale, soit diffus soit localisé lorsqu'il est associé à des bandes parenchymateuses ou à une atélectasie par enroulement. Ces anomalies constatées devront être confirmées par un examen tomodensitométrique. 35 ans (sous réserve d'une durée d'exposition de 5 ans) En l'espèce, il ressort de la déclaration de maladie professionnelle versée aux débats que la pathologie concernée est une 'MP tableau 30 B'. Le certificat médical initial fait état de : « plaques pleurales bilatérales non calcifiées et épaississement pleural viscéral de la gouttière gauche associé à un début d'asbestose (...) confirmé par TDM du 29/12/2015. Affection relevant MP 30B chez un ancien mécanicien naval». Le certificat médical décrit donc la nature de la pathologie sans la moindre ambiguïté, et cette description correspond pleinement à la pathologie visée par le tableau n° 30 B, soit des plaques calcifiées ou non, péricardiques ou pleurales, unilatérales ou bilatérales. Le tableau n° 30 B exige que la pathologie soit confirmée par un examen tomodensitométrique. En l'espèce, le colloque médico-administratif confirme le diagnostic de plaques pleurales, et précise que les conditions médicales réglementaires du tableau sont remplies puisque le scanner thoracique, ou examen tomodensitométrique, a été réalisé le 29 décembre 2015. S'agissant d'un document couvert par le secret médical, l'examen tomodensitométrique n'a pas à figurer au nombre des pièces du dossier. Le moyen soulevé par la société [5] est donc non fondé. Sur l'exposition au risque Le tableau n° 30 des maladies professionnelles vise les affections consécutives à l'inhalation des poussières d'amiante et comprend une liste indicative des principaux travaux susceptibles de provoquer des maladies. Cette liste étant indicative, et non limitative, des travaux non spécifiquement prévus par celle-ci, peuvent être retenus comme susceptibles d'avoir provoqué la pathologie déclarée. Il résulte de l'instruction menée par l'agent enquêteur assermenté de la caisse, et notamment du procès-verbal d'audition de la victime, que celle-ci après avoir été marin-pêcheur de 1973 à 1980, a suivi une formation de mécanicien et a été embauchée par la société [6] le 19 octobre 1981 (devenue la société [5]) en qualité de gardien-veilleur sur un bateau d'après-guerre qui 'devait être composé d'amiante'. A compter de 1982 et jusque dans les années 2000, la victime occupait le poste de chef mécanicien à bord des remorqueurs et d'une drague et, selon ses déclarations, effectuait les tâches suivantes : - des travaux de mécanique (démontage des échappements, maintenance sur les calorifugeages se trouvant sur les échappements des collecteurs d'échappement) 'tout ce qui était chaud était recouvert avec des bandes d'amiante'. - des travaux de soudure 'j'utilisais des matelas d'amiante afin de refroidir progressivement la pièce soudée pour éviter qu'elle se casse'; - des travaux de peinture : 'peintures à base d'amiante et de plomb' ; - changement des bandes de frein de treuils oxydés par l'air salin ; - démontage et remise en état du moteur : nettoyage avec une soufflette, joints en amiante sur le moteur. La victime a indiqué qu'elle ne disposait d'aucune protection spécifique pour réaliser ces travaux et qu'elle utilisait des ponceuses, meuleuses et un chalumeau. La victime a précisé à l'agent de la caisse, travailler aux côtés d'autres corps de métiers dans un environnement poussiéreux dont la toiture était en fibro-ciment. Il précise que 'l'atelier a été rasé depuis à la demande de l'inspection du travail'. La victime indique que dans les années 2000, elle est devenue chef de chantier et pilote de remorqueur tout en continuant de pratiquer la mécanique avec notamment pour missions : - démontage de vieux ouvrages datant d'après-guerre 'sans protection respiratoire particulière'. La victime a indiqué à l'agent enquêteur qu'elle bénéficiait de ces équipements depuis environ 10 ans. La victime a précisé avoir été exposée à l'amiante ' de manière certaine' jusqu'à l'année 2000 et que c'est à l'occasion d'une visite médicale que le médecin du travail a prescrit un scanner qui a permis de diagnostiquer ses pathologies. Dans son mail du 24 mai 2016 à la caisse, M. [R] [E], animateur QSE au sein de la société [5], indique que les missions de la victime de 1981 à 2010 étaient les suivantes : - conduite de bateaux ; - entretien et maintenance des moteurs de bateaux. Réalisation des entretiens courants (vidange) et quelques interventions mécaniques (démontage et remontage) ; - manipulation de pièces métalliques (pièces moteurs, palplanches, fers ou pieux métalliques) ; - manipulation de produits (huiles moteur et hydrauliques, peintures) ; - réalisation de travaux de soudure à l'arc et d'oxycoupage. Puis de 2010 à ce jour : - conduite de bateaux ; - entretien et maintenance des moteurs de bateaux. Réalisation des entretiens courants (vidange). Les interventions mécaniques sont réalisées par des prestataires extérieurs ([M]) ; - manipulation de pièces métalliques (palplanches, fers ou pieux métalliques) ; - manipulation de produits (huiles moteur et hydrauliques, peintures) ; - réalisation de travaux de soudure à l'arc et d'oxycoupage. Il a émis des réserves sur l'utilisation de matelas d'amiante pour les travaux de soudure. Les travaux effectués par la victime, tels qu'ils sont décrits par la victime elle-même et l'employeur, correspondent à la liste indicative du tableau n°30 des maladies professionnelles. S'agissant de l'exposition de la victime à l'inhalation des poussières d'amiante, le docteur [L] qui a reçu la victime le 29 janvier 2016 dans le cadre d'une consultation de pathologie professionnelle a conclu que celle-ci ' a subi une exposition certaine aux poussières d'amiante et également aux huiles minérales usagées chargées en hydrocarbures polycycliques aromatiques et toujours exposé aux gaz d'échappement diesel. Ce bilan met en évidence des plaques pleurales et un début d'atélectasie par enroulement lobaire inférieur gauche sur un épaississement pleural diffus qui mériteront d'être reconnus en maladie professionnelle au titre du tableau 30 B (...)'. Il ressort du procès-verbal de constatation de l'agent enquêteur de la caisse suite à sa communication téléphonique du 20 mai 2016 avec M. [R] [E],qu' 'il n'y a pas de trace d'amiante au niveau du matériel. Des contrôles réguliers sont pratiqués par les affaires maritimes. Je ne dispose pas de remontée d'informations concernant cela. Peut-être qu'il y en avait, je ne sais pas. En tout cas, sur le matériel aujourd'hui, il n'y a pas d'amiante et aucune information n'a été remontée par les affaires maritimes. Les matériaux manipulés sont principalement des pièces métalliques ou en acier. Il y a également la manipulation de bidons lors des entretiens ou des vidanges, lors des maintenances. Il ne s'agit pas de grosse mécanique mais d'entretien courant. Très ponctuellement il y a une utilisation des produits de type peinture pour des retouches sur pièces acier. Les peintures sont de composition courante. (La victime) peut réaliser des travaux de soudure et de découpage par méthode oxyacétylénique (chalumeau). Cette tâche est effectuée par les opérateurs. (La victime) l'a réalisée en début de carrière mais aussi en tant que chef de chantier. Les soudures n'étaient pas réalisées en continu. Je n'ai pas d'information quant à l'utilisation de matelas amiantés lors de soudure. Les EPI mis à disposition sont des EPI standards : tablier, gants, cagoule.les salariés disposent de ces équipements depuis Eiffage. Les salariés sont certifiés MASE depuis 2006, il y a donc un minimum d'organisation de prévention. (...) Je ne dispose toutefois pas de retour avant 2006. Peut-être à l'époque, (la victime) a pu effectuer des intervention sur des gros travaux de mécanique. Actuellement il n'y a pas d'amiante dans les locaux. Les interventions de la victime se font principalement sur chantiers. Je ne dispose pas d'information concernant la composition du bâtiment (atelier) de l'époque. S'il y avait de l'amiante, ça aurait été sous forme de fibro amiante sur la toiture (...) Il est possible que (la victime), ait réalisé le démontage de vieux appontements. Il ya donc eu probablement une exposition dans le bâtiment dans lequel il intervenait. (...) Il y a peut être eu aussi une exposition sur les navires, partie cale mais son activité principale était sur les ponts (...) L'amiante pouvait se trouver dans les cabines de bateaux mais les anciens bateaux ont été vendus et leurs documents détruits. Néanmoins au vu des pièces, rien ne stipule qu'il y avait de l'amiante dans les navires. J'émets des réserves sur ce dossier portant sur les activités antérieures à l'embauche de (la victime) '. Concernant l'éventuelle exposition à l'amiante dans un atelier dans lequel la victime intervenait, M. [E] a précisé que cet atelier avait été 'rasé' et remplacé par un nouvel atelier et a émis des réserves sur la présence d'amiante dans cet atelier, à défaut de tout document attestant de la présence de ce matériau. La victime a décrit de manière particulièrement précise les tâches l'ayant exposée aux poussières d'amiante. L'employeur, quant à lui, s'il conteste la présence d'amiante à compter de 2006, n'exclut pas que la victime ait été exposée à l'amiante avant cette date, confirmant que les anciens navires contenaient de l'amiante. Le contrôleur du travail a émis un avis, le 26 février 2016, aux termes duquel il indique que 'l'utilisation de l'amiante à bord des navires pour le flocage, le calorifugeage et les faux plafonds a été proscrite à compter de l'entrée en vigueur par décret n°98332 du 29 avril 1998. Pour la période antérieure, il est notoire que les navires français étaient conçus avec des moteurs et chaudières calorifugés à l'amiante. Tout comme il est notoire que les mesures de prévention prises pour protéger les opérateurs amenés à poser et déposer ces calorifuges en amiante se sont avérées insuffisantes pour prévenir le risque de maladie professionnelle dans de nombreux cas, si bien que bon nombre d'entreprises de la réparation navale se trouvent inscrites sur la liste ouvrant droit au dispositif CAATA. Ainsi, si (la victime) ne relève pas d'une entreprise inscrite sur la liste ouvrant droit au dispositif CAATA de la réparation navale, du fait que l'activité principale de l'entreprise n'est pas la réparation navale, il a été, dans son poste de travail spécifique au sein de l'entreprise, très probablement exposé à l'inhalation de fibres d'amiante au cours de sa carrière professionnelle au cours des opérations de maintenance sur les moteurs et chaudières des navires de l'entreprise [5], ex [6]'. L'enquête diligentée par la caisse a donc établi que la victime a été exposée aux poussières d'amiante dans le cadre de ses fonctions, notamment en manipulant des calorifuges et des joints contenant de l'amiante, justifiant la prise en charge de sa pathologie au titre du tableau 30 B des maladies professionnelles. Les conditions de la maladie professionnelle telles qu'énoncées au tableau n° 30 sont donc remplies. Sur le respect de la procédure d'instruction La société reproche au tribunal d'avoir examiné le caractère contradictoire de la procédure d'instruction et précise que l'inopposabilité n'est pas invoquée sur ce fondement (pages 11 et 12 de ses conclusions), tout en relevant elle-même, à hauteur d'appel, des moyens tirés de ce chef (pages 11, 12 et 23 de ses conclusions), de sorte que la cour est tenue de les examiner. La société admet avoir consulté le dossier de la victime mais conteste (pages 11 et 23 de ses conclusions) l'absence de remise d'une copie des pièces du dossier et l'absence de communication du colloque médico-administratif. Ce moyen n'est pas fondé dès lors que, selon l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, et la jurisprudence constante, le respect du contradictoire dans la procédure de reconnaissance du caractère professionnel d'une maladie est satisfait par le seul envoi à l'employeur, par la caisse, d'une lettre qui l'informe de la fin de la procédure d'instruction, des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier dix jours avant de prendre sa décision et de la date à partir de laquelle elle prévoit de prendre sa décision, peu important la communication des pièces du dossier à l'employeur. La lettre de clôture du 4 juillet 2016, réceptionnée par la société, répondant à l'ensemble de ces prescriptions, la caisse a respecté les règles de procédure en la matière et le principe du contradictoire. Il est également justifié par les pièces soumises à la cour, que la société a consulté, le 21 juillet 2016, l'ensemble des éléments du dossier de la victime, dont la fiche du colloque médico-administratif (pièce 5 de la caisse). La caisse a consulté l'inspection du travail qui a émis un avis, conformément à l'article D. 461-9 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, mais ce texte n'impose aucune obligation quant à la consultation du service de prévention de la CARSAT, de sorte qu'il ne peut être reproché à la caisse de ne pas avoir sollicité cet avis. Aucune violation du respect du contradictoire n'étant établie, la décision de prise en charge de la maladie 'plaques pleurales' doit être déclarée opposable à la société [5] et le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions. L'exception de litispendance et de connexité soulevée par la caisse en première instance n'étant pas reprise en cause d'appel, il n'y a pas lieu de statuer sur ce point. Sur les dépens et les demandes accessoires La société, qui succombe à l'instance, est condamnée aux dépens d'appel et condamnée à payer à la caisse la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Elle sera corrélativement déboutée de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement et par arrêt contradictoire, Confirme le jugement rendu le 11 mai 2021 par le pôle social du tribunal judiciaire de Versailles en toutes ses dispositions ; Y ajoutant, Condamne la société [5] aux dépens d'appel ; Condamne la société [5] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie [Localité 4] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; Déboute la société [5] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. Signé par Madame Sylvia LE FISCHER, Présidente, et par Madame Clémence VICTORIA, Greffière placée, auquel le magistrat signataire a rendu la minute. Le GREFFIER, Le PRESIDENT,
Note...

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