COUR D'APPEL DE PARIS ARRET DU 02 FEVRIER 2018
Pôle 5 - Chambre 2 (n°19, 10 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 16/24409
Décision déférée à la Cour : jugement du 18 novembre 2016 - Tribunal de grande instance de PARIS - 3ème chambre 2ème section - RG n°14/17643
APPELANTE S.A. ENTREPRENDRE, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé [...] 92100 BOULOGNE BILLANCOURT Immatriculée au rcs de Nanterre sous le numéro 403 216 617 Représentée par Me Francis DOMINGUEZ, avocat au barreau de PARIS, toque C 1536
INTIMEE S.A.S. EURO SERVICES INTERNET, prise en la personne de son président, M. Manuel O, domicilié en cette qualité au siège social situé [...] 75019 PARIS Immatriculée au rcs de Paris sous le numéro 420 842 023 Représentée par Me Léna ETNER, avocat au barreau de PARIS, toque B 154
COMPOSITION DE LA COUR : Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 6 décembre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de : Mme Colette PERRIN, Présidente Mme Véronique RENARD, Conseillère Mme Laurence LEHMANN, Conseillère qui en ont délibéré
Greffière lors des débats : Mme Christine L
ARRET : Contradictoire Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article
450 du code de procédure civile Signé par Mme Colette PERRIN, Présidente, et par Mme Carole T, Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.La société Euro Services Internet se présente comme une filiale de la société Multimedia Press, éditeur de publications mensuelles dans divers domaines qui sont diffusées en kiosque.
La société Entreprendre est une entreprise de presse qui édite un nombre important de publications périodiques. Elle indique être titulaire des marques suivantes : 'PSYCHO REVUE', 'QUESTION PSYCHO', 'L'ESSENTIEL DE LA PSYCHO', 'FEMININ PSYCHO', 'SANTE PSYCHO', 'CUISINER AU JOUR LE JOUR' et 'CUISINER' SCIENCE MAGAZINE', 'SCIENCE REVUE' et 'L'ESSENTIEL DE LA SCIENCE '.
La société Groupe Entreprendre était une société anonyme dont la société Entreprendre était l'actionnaire unique. Elle a été dissoute sans liquidation par acte du 25 novembre 2009, opérant une transmission universelle de son patrimoine à cette dernière.
Ayant constaté au mois de juillet 2014 que la société la société Euro Services Internet éditait 'des magazines similaires aux siens dans les mêmes domaines', et que ces publications comportaient des similitudes tant sur la forme (police, couleur, format) que sur le fond (reportages, photos, public visé), la société Entreprendre a, par trois actes distincts du 24 novembre 2014, fait citer la société la société Euro Services Internet en contrefaçon, concurrence déloyale et actes de parasitisme devant le tribunal de grande instance de Paris.
Les procédures ont été jointes.
Par ordonnance en date du 20 novembre 2015, le juge de la mise en état a fait injonction à la société Entreprendre de produire les éléments lui permettant de justifier de la titularité des marques PSYCHO REVUE et SANTE PSYCHO et de justifier de ce qu'elle vient aux droits de la société Groupe Entreprendre, et a déclaré irrecevable le surplus des demandes de la société Euro Services Internet en ce qu'elles ne relevaient pas de sa compétence.
Par jugement en date du 18 novembre 2016 le tribunal de grande instance de Paris a:
- déclaré irrecevables les demandes formées par la société Entreprendre au titre de la publication par la société Euro Services Internet du magazine PSYCHO ET DEVELOPPEMENT PERSONNEL,
- rejeté l'exception d'irrecevabilité tirée de la transaction intervenue en 2011 entre les parties pour le surplus,
- déclaré irrecevable la société Entreprendre en son action en contrefaçon de la marque SCIENCE REVUE n°003009743 déposée le 24/02/2000, faute de renouvellement de celle-ci,- rejeté l'exception d'irrecevabilité tirée du non-renouvellement des marques pour le surplus,
- déclaré irrecevable la société Entreprendre en son action en contrefaçon des marques L'ESSENTIEL DE LA PSYCHO, PSYCHO revue, SANTE PSYCHO, CUISINER AU JOUR LE JOUR et QUESTION PSYCHO faute de justifier être titulaire desdites marques,
- prononcé la nullité des marques L'ESSENTIEL DE LA SCIENCE n°154 228 538 pour les produits de l'imprimerie, livres, et les journaux, et SCIENCE MAGAZINE n°053365989 pour les brochures, livres et publication de livres,
- rejeté la demande de nullité pour le surplus,
- prononcé à l'encontre de la société Entreprendre la déchéance de ses droits sur la marque FEMININ PSYCHO à compter du 1er novembre 2008 pour l'ensemble des produits et services qu'elle vise,
- dit que la décision sera transmise, une fois celle-ci devenue définitive, à l'initiative de la partie la plus diligente, à l'Institut national de la propriété industrielle aux fins d'inscription au registre national des marques,
- déclaré recevable l'action en contrefaçon exercée par la société Entreprendre sur le fondement de la marque CUISINER et irrecevable cette action en ce qu'elle est fondée sur les marques SCIENCE REVUE, L'ESSENTIEL DE LA PSYCHO, PSYCHO revue, SANTE PSYCHO, QUESTION PSYCHO ; CUISINER AU JOUR LE JOUR, L'ESSENTIEL DE LA SCIENCE, SCIENCE MAGAZINE et FEMININ PSYCHO,
- débouté la société Entreprendre de ses demandes fondées sur la contrefaçon,
- débouté la société Entreprendre de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale et le parasitisme,
- débouté la société Euro Services Internet pour le surplus,
- condamné la société Entreprendre à payer à la société Euro Services Internet la somme de 8.000 euros au titre de l'article
700 du code de procédure civile,
- condamné la société Entreprendre aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article
699 du code de procédure civile.La société Entreprendre a interjeté appel de ce jugement par déclaration au greffe en date du 5 décembre 2016.
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 2 mars 2017, auxquelles il est expressément renvoyé, la société Entreprendre demande à la cour, au visa des articles L713-1 et L716- 1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle, et en ces termes, de :
- la recevoir en ses conclusions d'appelant et l'y déclarer bien fondée,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 18 novembre 2016,
En conséquence, statuant de nouveau,
- constater que la société Euro Services Internet a réalisé des actes de concurrence déloyale et de parasitisme, ainsi que de contrefaçon à son égard par la publication des magazines PSYCHO AU QUOTIDIEN, PSYCHO ET DEVELOPPEMENT PERSONNEL, DOSSIERS PRATIQUES DE PSYCHOLOGIE, PSYCHO ET VOUS, PSYCHO ET CONNAISSANCE DE SOI, LES DOSSIERS DE PSYCHO et CONSEILS ET ASTUCES PSYCHO,
- constater que la société EURO SERVICES INTERNET a réalisé des actes de concurrence
déloyale et de parasitisme, ainsi que de contrefaçon à son égard, par la publication des magazines LES DOSSIERS CLES DE LA SCIENCE, SCIENCES ET NATURE, QUESTIONS CLES SCIENCES, COMPRENDRE LES SCIENCES, LES CARNETS SCIENCES & CONNAISSANCES, DOSSIER SCIENCE et SCIENCES & CONNAISSANCES,
- constater que la société Euro Services Internet a réalisé des actes de concurrence déloyale et de parasitisme, ainsi que de contrefaçon à son égard par la publication du magazine CUISINEZ pour vos amis,
de ce fait,
- ordonner à la société Euro Services Internet de cesser l'édition et la publication des magazines PSYCHO AU QUOTIDIEN, PSYCHO ET DEVELOPPEMENT PERSONNEL, DOSSIERS PRATIQUES DE PSYCHOLOGIE, PSYCHO ET VOUS, PSYCHO ET CONNAISSANCE DE SOI, LES DOSSIERS DE PSYCHO et CONSEILS ET ASTUCES PSYCHO à compter du jugement à intervenir (sic) sous astreinte de 150 euros par jours de retard,- ordonner à la société Euro Services Internet de cesser l'édition et la publication du magazine CUISINEZ pour vos amis à compter du jugement à intervenir (sic) sous astreinte de 150 euros par jours de retard,
- ordonner à la société Euro Services Internet de cesser l'édition et la publication des magazines LES DOSSIERS CLES DE LA SCIENCE, SCIENCES ET NATURE, QUESTIONS CLES SCIENCES, COMPRENDRE LES SCIENCES, LES CARNETS
SCIENCES & CONNAISSANCES, DOSSIER SCIENCE et SCIENCES & CONNAISSANCES à compter du jugement à intervenir (sic) sous astreinte de 150 euros par jours de retard.
- condamner la société Euro Services Internet à lui verser :
- la somme de 50.000 euros au titre de la contrefaçon des marques et magazines PSYCHO REVUE, QUESTION PSYCHO, L'ESSENTIEL DE LA PSYCHO, FEMININ PSYCHO et SANTE PSYCHO,
- la somme de 50.000 euros au titre des actes de concurrence déloyale et de parasitisme opérés par la publication des magazines PSYCHO AU QUOTIDIEN, PSYCHO ET DEVELOPPEMENT PERSONNEL, DOSSIERS PRATIQUES DE PSYCHOLOGIE, PSYCHO ET VOUS, PSYCHO ET CONNAISSANCE DE SOI, LES DOSSIERS DE PSYCHO et CONSEILS ET ASTUCES PSYCHO,
- la somme de 50.000 euros au titre de la contrefaçon de la marque CUISINER dont elle est la seule et unique propriétaire.
- la somme de 50.000 euros au titre des actes de concurrence déloyale et de parasitisme opérés par la publication du magazine CUISINEZ pour vos amis,
- la somme de 50.000 euros au titre de la contrefaçon des marques et magazines SCIENCE MAGAZINE, L'ESSENTIEL DE LA SCIENCE et SCIENCE REVUE,
- la somme de 50.000 euros au titre des actes de concurrence déloyale et de parasitisme opérés par la publication des magazines LES DOSSIERS CLES DE LA SCIENCE, SCIENCES ET NATURE,QUESTIONS CLES SCIENCES, COMPRENDRE LES SCIENCES, LES CARNETS SCIENCES & CONNAISSANCES, DOSSIER SCIENCE et SCIENCES & CONNAISSANCES,
- la somme de 8.000 euros au titre de l'article
700 du Code de procédure civile,
- condamner la société Euro Services Internet aux entiers dépens, qui pourront êtreRecouvrés par son conseil conformément à l'article
699 du Code de procédure civile.
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 26 avril 2017, la société Euro Service Internet demande à la cour de :
- confirmer le jugement du 18 novembre 2016 du tribunal de Grande Instance de Paris en toutes ses dispositions,
- condamner la société Entreprendre à lui payer une somme de 12.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel sur le fondement de l'article
700 du Code de procédure civile et préciser que cette condamnation viendra en sus de la somme de 8.000 euros accordée au titre des frais irrépétibles de première instance.
- condamner la société Entreprendre aux entiers dépens dont distraction au profit de son conseil, conformément aux dispositions de l'article
699 du Code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 16 novembre 2017.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de la demande concernant la publication PSYCHO ET DEVELOPPEMENT PERSONNEL
Considérant que l'appelante ne conteste ni l'existence ni le contenu d'un protocole d'accord du 20 janvier 2011 conclu avec la société Euro Services Internet et Monsieur Robert L, portant sur plusieurs procédures judiciaires opposant les parties et notamment sur une procédure relative au(x) magazine(s) de psychologie, et aux termes duquel, elle a notamment renoncé 'à poursuivre la procédure relative au magazine PSYCHO ET DEVELOPPEMENT PERSONNEL' ;
Qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes formées par la société Entreprendre au titre de la publication par la société Euro Services Internet du magazine PSYCHO ET DEVELOPPEMENT PERSONNEL ;
Sur la titularité des marques invoquées
Considérant qu'aux termes du dispositif de ses dernières écritures, la société Entreprendre poursuit la société Euro Services Internet en contrefaçon, sans plus de précision autre que le visa des articles L 713-1 et L 716-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle ; que sans jamais se référer aux numéros des marques qu'elle invoque, elle explique néanmoins être titulaire des marques PSYCHO REVUE, QUESTION PSYCHO, L'ESSENTIEL DE LA PSYCHO, FEMININPSYCHO, SANTE PSYCHO, CUISINER AU JOUR LE JOUR, CUISINER, SCIENCE MAGAZINE, SCIENCE REVUE et L'ESSENTIEL DE LA SCIENCE ;
Considérant qu'il résulte des pièces versées aux débats que :
- la marque française PSYCHO REVUE n°04 3 315 596 a été déposée le 30 septembre 2004 par Monsieur L Robert en classes 16, 35, 38 et 41,
- la marque QUESTION PSYCHO n° 05 3 385 117 a été déposée le 11 octobre 2005 par Monsieur L Robert en classes 16, 35, 38 et 41,
- la marque L'essentiel de la psycho n° 08 3 590 102 a été déposée le 22 juillet 2008 par Monsieur Robert L en classes 16, 35, 38 et 41 et transmise à la société Entreprendre le 23 septembre 2010 selon inscription au BOPI 2010-42,
- la marque FEMININ PSYCHO n° 02 3 190 625 a été déposée le 24 octobre 2002 et renouvelée le 23 octobre 2012 par la SA Entreprendre en classes 16, 35, 38 et 41,
- la marque SANTE PSYCHO n°05 3 371 236 a été déposée le 20 juillet 2005 par Monsieur L Robert en classes 16, 35, 38 et 41 et renouvelée le 2 décembre 2015 par la SA Entreprendre à la suite d'un transfert totale de propriété du 2 décembre 2015 enregistrée au BOPI 2016-10,
- la marque CUISINER AU JOUR LE JOUR n°05 3 360 159 a été déposée le 20 mai 2005 par Monsieur L Robert en classes 16, 35, 38 et 41,
- la marque CUISINER n°10 3 730 294 a été déposée le 14 avril 2010 par la SA Entreprendre en classes 16, 35, 38 et 41,
- la marque SCIENCE MAGAZINE n°05 3 365 989 a été déposée le 20 juin 2005 par Monsieur L Robert en classes 16, 35, 38 et 41, transmise à la société Groupe Entreprendre puis à la SA Entreprendre qui a procédé à son renouvellement le 30 novembre 2015,
- la marque semi-figurative SCIENCE REVUE n°00 03009 743 a été déposée le 24 février 2000 par Monsieur L Robert en classes 16, 35, 38 et 41,
- la marque L'ESSENTIEL DE LA SCIENCE n°15 4 228 538 a été déposée le 25 novembre 2015 par la SA Entreprendre en classes 16, 35, 38 et 41 et enregistrée avec modification le 1er juillet 2016 ;
Considérant que pour justifier de la titularité des marques qui n'ont pas été déposées par elle, l'appelante produit un contrat de cession demarque(s) daté du 1er juin 2007 entre Monsieur Robert L et la société Groupe Entreprendre SA ainsi qu'un formulaire de demande d'inscription au registre de l'INPI de cet acte en date du 2 janvier 2008, et une déclaration de dissolution sans liquidation de la société Groupe Entreprendre SA en date du 25 novembre 2009 ;
Que force est de constater que le contrat du 1er juin 2007 ne vise pas la marque PSYCHO REVUE n°04 3 315 596 qui certes a fait l'objet d'un enregistrement auprès de l'INPI comme le soutient l'appelante mais de la part de Monsieur Robert L ;que par ailleurs si les marques CUISINER AU JOUR LE JOUR, QUESTION PSYCHO et SCIENCE REVUE, cette dernière n'ayant au demeurant pas été renouvelée, sont visées par la cession, celle-ci est intervenue au profit de la société Groupe Entreprendre inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés sous le n° B 339 542 194 et non de la SA Entreprendre inscrite sous le n° B 403 216 617 ;
Considérant par ailleurs, que si selon la déclaration de dissolution sans liquidation de la société Groupe Entreprendre en date du 25 novembre 2009, le conseil d'administration de la société Entreprendre, propriétaire de la totalité des actions composant le capital de la société Groupe Entreprendre, a approuvé la dissolution sans liquidation de cette dernière au 1er janvier 2010 et précisé que cette dissolution entraînait la transmission universelle du patrimoine de Groupe Entreprendre à la société Entreprendre, il n'est nullement justifié de la publication de cet acte et de l'inscription pour les marques invoquées du transfert au profit de la société Entreprendre, appelante ;
Considérant qu'il résulte de ces éléments que la société Entreprendre justifie être titulaire des marques suivantes :
- L'ESSENTIEL DE LA PSYCHO n°08 3 590 102,
- SANTE PSYCHO n°05 3 371 236,
- FEMININ PSYCHO n°02 3 190 625,
- CUISINER n°10 3 730 294,
- L'ESSENTIEL DE LA SCIENCE n°15 4 228 538, - SCIENCE MAGAZINE n°05 3 365 989 ;
Qu'elle est en revanche irrecevable à agir au même titre pour les marques dont elle ne justifie pas de la titularité ou du renouvellement, soit des marques :
- PSYCHO REVUE n°04 3 315 596,
- QUESTION PSYCHO n°05 3 385 117,- CUISINER AU JOUR LE JOUR n° 05 3 360 159,
- SCIENCE REVUE n°00 3 009 743 ;
Sur la nullité des marques
Considérant que l'appelante fait grief au jugement d'avoir prononcé la nullité de la marque L'ESSENTIEL DE LA SCIENCE n° 154228538 pour les 'produits de l'imprimerie', les 'livres' et les 'journaux' ainsi que de la marque SCIENCE MAGAZINE n°053365989 faisant valoir pour la première qu'elle n'a pas été déposée pour les produits susvisés et pour les deux marques qu'elles ne sont pas purement descriptives sans plus d'explications ;
Que tout en sollicitant la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, l'intimée soutient que les marques invoquées par la société Entreprendre sont toutes descriptives s'agissant de désigner une caractéristique des publications litigieuses pour les classes visant l'édition ; qu'elle indique que les termes 'psycho', 'revue', 'question', 'l'essentiel', 'féminin' et 'santé' appliqués à des revues ayant pour thème des réponses à des questions concernant la santé et la psychologie et destinées à un public féminin sont ainsi descriptifs ; de même que les termes 'cuisiner' et 'au jour le jour pour des publications traitant de la cuisine, et que sont descriptifs également les termes 'science', 'magazine', 'revue', 'l'essentiel' appliqués à des revues traitant des sciences ;
Considérant que selon l'article
L. 714-3 du code de la propriété intellectuelle 'Est déclaré nul par décision de justice l'enregistrement d'une marque qui n'est pas conforme aux dispositions des articles L. 711-1 à L. 711-4' ;
Qu'aux termes de l'article
L. 711-2 du même code 'Le caractère distinctif d'un signe de nature à constituer une marque s'apprécie à l'égard des produits ou services désignés.
Sont dépourvus de caractère distinctif :
a) les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service ;
b) les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l'espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l'époque de la production du bien ou de la prestation de service' ;
Considérant que le tribunal a prononcé la nullité des marques L'ESSENTIEL DE LA SCIENCE n° 154 228 538 pour les produits del'imprimerie, livres, et les journaux, et de la marque SCIENCE MAGAZINE n°053365989 pour les brochures, livres et publication de livres, et rejeté la demande de nullité pour le surplus ; que malgré ses développements, en sollicitant la confirmation du jugement en toutes ses dispositions dans le dispositif de ses dernières écritures, la société Euro Services Internet ne conteste devant la cour que la nullité de ces deux marques et acquiesce pour le surplus au jugement ;
Considérant que la marque L'ESSENTIEL DE LA SCIENCE n°154 228 538 a fait l'objet d'un enregistrement avec modification excluant les produits de l'imprimerie, livres, et les journaux de sorte que l'intimée, qui limite sa demande de nullité aux produits de l'édition sans autre analyse des produits visés à l'enregistrement de la marque, ne peut voir prospérer sa demande de nullité de la marque ; que le jugement sera en conséquence infirmé sur ce point, la demande étant sans objet ;
Considérant que la marque SCIENCE MAGAZINE n°053365989 a été enregistrée notamment pour désigner les 'livres, brochures et publication de livres', tous ces produits étant des produits de l'édition, et est purement descriptive du contenu des produits qu'elle désigne ; que c'est donc par des motifs exacts et pertinents que la cour adopte que le tribunal a dit qu'eu égard au public pertinent qui doit être en l'espèce constitué par le consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif, acheteur de revues grand public dans le domaine des science, la marque en cause ne remplit pas sa fonction d'origine qui est de garantir l'origine du produit concerné ;
Que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a prononcé la nullité pour défaut de distinctivité de la marque SCIENCE MAGAZINE n°053365989 pour les 'brochures, livres et publication de livres' ;
Sur la déchéance
Considérant que l'appelante reproche aux premiers juges d'avoir prononcé la déchéance de ses droits sur la marque FEMININ PSYCHO à compter du 1er novembre 2008 pour l'ensemble des produits et services qu'elle vise aux motifs que le point de départ du délai de 5 ans visé par l'article
L 714-5 du Code de la propriété intellectuelle part non pas à compter du dépôt de la marque mais à compter de la demande reconventionnelle de la société Euro Services Internet, qu'elle n'indique cependant pas, et que la marque est de surcroît exploitée ;
Que l'intimée soutient que la société Entreprendre n'est pas en mesure de justifier que l'ensemble de ses marques ont été exploitées dans les 5 ans qui ont suivi leur dépôt ; que sollicitant la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, sa demande en déchéance ne peut toutefois concerner que la marque pour laquelle la déchéance aété effectivement prononcée par le tribunal soit pour la marque FEMININ PSYCHO ;
Considérant que selon l'article
L.714-5 du Code de la propriété intellectuelle :
Encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes, motifs, n'en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l'enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans (...).
La déchéance peut être demandée en justice par toute personne intéressée. Si la demande ne porte que sur une partie des produits et services visés dans l'enregistrement, la déchéance ne s'étend qu'aux produits et services concernés.
L'usage sérieux de la marque commencé ou repris postérieurement à la période de 5 ans visée au premier alinéa du présent article n'y fait pas obstacle s'il a été entrepris dans les trois mois précédant la demande de déchéance et après que le propriétaire a eu connaissance de l'éventualité de cette demande ' ;
Considérant, en l'espèce, que si aucune des parties n'a défini la période à considérer pour apprécier la demande en déchéance, il résulte des énonciations du jugement, qui ne sont pas contestées sur ce point, que la société Euro Services Internet a sollicité la déchéance de la marque FEMININ PSYCHO n°023190625 déposée le 24 octobre 2002 et renouvelée par la société Entreprendre le 23 octobre 2012 aux termes de ses conclusions du 25 mars 2015 ;
Qu'en application des dispositions susvisées, la société Entreprendre doit donc démontrer l'usage sérieux de sa marque dans la période allant du 25 mars 2010 au 25 mars 2015 ;
Qu'elle se réfère ici expressément à sa pièce 29 intitulée 'extrait du site internet www.lafontpresse.fr concernant le magazine FEMININ PSYCHO qui n'est pas datée, ne mentionne aucune provenance et ne permet pas plus de dater les cinq magazines qui y figurent en vignettes ; qu'elle produit également en pièce n°6 une copie de couverture d'un magazine Féminin Psycho, qui n'est pas plus datée ;
Que ces éléments ne sont donc pas de nature à établir un usage sérieux de la marque en cause pour les produits et services visés dans l'enregistrement et pendant la période considérée ;
Que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a prononcé la déchéance des droits de la société Entreprendre sur la marque FEMININ PSYCHO, sauf à dire que la déchéance prendra effet au 25 mars 2015 ;Sur la contrefaçon et les actes de concurrence déloyale
Considérant que dans un même chapitre de ses dernières écritures, l'appelante incrimine des actes de contrefaçon et de concurrence déloyale ;
Que si elle sollicite, aux termes du dispositif de ses dernières écritures, une condamnation de l'intimée au titre de la contrefaçon 'des marques et magazines' qu'elle énumère, aucun moyen n'est invoqué dans ces mêmes écritures concernant le droit d'auteur qui n'est nullement revendiqué ;
Qu'eu égard au fondement de ses demandes et aux moyens que ses écritures contiennent, l'appelante agit donc manifestement et en premier lieu en contrefaçon de marques sur le fondement articles L713-1 (1er alinéa dans les motifs) et
L716-1 du Code de la propriété intellectuelle ; qu'elle ne caractérise cependant aucun acte de contrefaçon pas plus qu'elle n'analyse les marques et les produits qu'elle invoque ;
Que la demande en contrefaçon sera en conséquence rejetée ;
Considérant que l'appelante indique en même temps que la société Euro Services Internet s'est sciemment positionnée dans le sillage des magazines qu'elle édite dans les domaines de la psychologie, de la cuisine et de la science ; que plus précisément elle soutient que 'dans tous les domaines où la société Euro Services Internet s'est immiscée dans son sillage, il est à constater une reprise systématique de la mise en page, de l'utilisation des codes couleurs, ou encore des polices et textes utilisés' ;
Considérant toutefois, que la cour ne peut que constater que ne sont versés aux débats que des copies de couvertures de certains magazines, des extraits de sites internet les représentant ou des montages de photographies, et qu'il n'est procédé par la société Entreprendre à aucune description et a fortiori analyse de la mise en page, des codes couleurs, des polices et textes revendiqués et incriminés, pas plus qu'à la caractérisation d'un quelconque risque de confusion entre les produits en cause, analyse à laquelle il n'appartient ni à la cour ni à l'intimée de procéder en dehors du moindre élément en ce sens dans les écritures de l'appelant ; que par ailleurs s'agissant du parasitisme, aucun élément ne vient étayer l'argument selon lequel 'la société Euro Services Internet se serait sciemment positionnée dans les sillages des magazines édités par la société Entreprendre SA' ; que la demande fondée sur la concurrence déloyale et parasitaire doit en conséquence être également rejetée ;
Sur les autres demandesConsidérant qu'il y a lieu de condamner la société Entreprendre, qui succombe, aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article
699 du Code de procédure civile ;
Considérant enfin, que la société Euro Services Internet a dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge ; qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article
700 du Code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif du présent arrêt.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement rendu entre les parties le 18 novembre 2016 par le tribunal de grande instance de Paris sauf en ce qu'il a déclaré irrecevable la société Entreprendre SA en son action en contrefaçon des marques L'ESSENTIEL DE LA PSYCHO et SANTE PSYCHO faute de justifier être titulaire desdites marques, prononcé la nullité des marques L'ESSENTIEL DE LA SCIENCE n° 154 228 538 pour les produits de l'imprimerie, livres, et les journaux, prononcé à l'encontre de la société Entreprendre la déchéance de ses droits sur la marque FEMININ PSYCHO à compter du 1er novembre 2008 pour l'ensemble des produits et services qu'elle vise, et déclaré irrecevable l'action en contrefaçon de la société Entreprendre SA en ce qu'elle est fondée sur les marques, L'ESSENTIEL DE LA PSYCHO, SANTE PSYCHO, L'ESSENTIEL DE LA SCIENCE, SCIENCE MAGAZINE et FEMININ PSYCHO.
Statuant dans cette limite et y ajoutant,
Déclare recevable mais mal fondée la société Entreprendre SA en son action en contrefaçon des marques L'ESSENTIEL DE LA PSYCHO et SANTE PSYCHO.
Déclare sans objet la demande de nullité de la marque L'ESSENTIEL DE LA SCIENCE n°154 228 538 pour les produits de l'imprimerie, livres, et les journaux.
Prononce la déchéance des droits de la société Entreprendre SA sur la marque FEMININ PSYCHO à compter du 25 mars 2015 pour l'ensemble des produits et services visés au dépôt.
Dit que le présent arrêt sera transmis à l'initiative de la partie la plus diligente, à l'Institut national de la propriété industrielle aux fins d'inscription au registre national des marques.
Déclare recevable mais mal fondée la société Entreprendre SA en son action en contrefaçon des marques L'ESSENTIEL DE LA PSYCHO,SANTE PSYCHO, L'ESSENTIEL DE LA SCIENCE, SCIENCE MAGAZINE et FEMININ PSYCHO.
Condamne la société Entreprendre SA à payer à la société Euro Services Internet la somme de 8.000 euros au titre de l'article
700 du Code de procédure civile.
Rejette le surplus des demandes.
Condamne la société Entreprendre SA aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article
699 du Code de procédure civile.