Chronologie de l'affaire
Cour d'appel de Douai 02 octobre 2008
Cour de cassation 04 mai 2010

Cour de cassation, Chambre commerciale, 4 mai 2010, 08-70457

Mots clés société · concurrence déloyale · procédure civile · protocole · produits · clients · préjudice · sociétés · clause de non-concurrence · sanction · confusion · chiffre · réparation · vente · publicitaire

Synthèse

Juridiction : Cour de cassation
Numéro affaire : 08-70457
Dispositif : Cassation
Décision précédente : Cour d'appel de Douai, 02 octobre 2008
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Laugier et Caston, SCP Potier de La Varde, Buk-Lament

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Douai 02 octobre 2008
Cour de cassation 04 mai 2010

Texte

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Com, 19 septembre 2006, pourvoi n° 03-20. 511), qu'à la suite de son licenciement de la société Toner services Nord (TSN), M. X... a, le 6 avril 2000, convenu avec celle-ci d'une transaction, par laquelle, notamment, il était autorisé à exercer directement ou indirectement une activité de vente de cartouches laser sous réserve de ne pas vendre, pendant un an, aux clients de la région parisienne, et à ceux inscrits sur une liste annexée au protocole ; qu'à la suite de la création par M. X... de la société France Toner, dont l'objet est " la distribution de matériels et consommables informatique ", les sociétés TSN, Toner services BDR, Toner services FR (les sociétés Toner) et M. Y..., leur dirigeant, invoquant des violations de la clause conventionnelle de non-concurrence et des actes de concurrence déloyale, ont assigné M. X... et la société France Toner en réparation des préjudices subis ;

Sur le premier moyen

:

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que l'arrêt, infirmant le jugement, déclare valable l'acte introductif d'instance du 14 octobre 2000 sans répondre aux conclusions de M. X... et de la société France Toner soutenant que cet acte contrevenait aux dispositions de l'article 56 du code de procédure civile ;

Attendu qu'en statuant ainsi, sans motiver sa décision, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;

Sur le deuxième moyen

, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 1134 du code civil ;

Attendu que, pour condamner M. X... et la société France Toner à payer à M. Y... et à la société TSN une certaine somme à titre de dommages-intérêts en raison de la violation de la clause de non-concurrence prévue par le protocole du 6 avril 2000, l'arrêt retient que la sanction de l'inexécution du protocole était d'une année de chiffre d'affaires réalisé par M. X... et la société France Toner ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le protocole d'accord prévoyait que " l'indemnité à verser serait de un an du chiffre d'affaires réalisé directement ou indirectement par M. X... avec le client objet du litige ", la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis ;

Et

sur le troisième moyen

, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour dire établis les actes de concurrence déloyale reprochés à M. X... et à la société France Toner en raison de ressemblances entre les publicités des sociétés Toner et France Toner, l'arrêt retient que c'est vainement, et au rebours des énonciations de la Cour de cassation, que M. X... et la société France Toner font plaider que les ressemblances dans la présentation publicitaire des produits étaient dictées par la nécessité ou n'induisaient pas de confusion auprès de la clientèle ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la Cour de cassation avait reproché à la première cour d'appel saisie du litige, de ne pas avoir recherché si des ressemblances des présentations publicitaires critiquées étaient de nature à créer une confusion entre la société France Toner et la société TSN, la cour d'appel a méconnu les dispositions susvisées ;

PAR CES MOTIFS

, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 octobre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;

Condamne les sociétés Toner services Nord, Toner services BDR, Toner services FR et M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mai deux mille dix.

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat de la société France Toner et de M. X...


PREMIER MOYEN DE CASSATION


Monsieur Jérôme X... et la SARL France Toner font grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré valable l'acte introductif d'instance du 14 octobre 2000 ;

ALORS OU'en déclarant valable l'acte introductif d'instance du 14 octobre 2000 sans donner de motifs à sa décision infirmative, ni davantage répondre aux conclusions par lesquelles monsieur X... et la société France Toner faisaient valoir que cet acte introductif contrevenait aux exigences de l'article 56 du code de procédure civile, la cour d'appel n'a pas motivé sa décision et a ainsi violé l'article 455 du code de procédure civile.


DEUXIEME MOYEN DE CASSATION


Monsieur Jérôme X...et la SARL France Toner font grief à l'arrêt attaqué de les avoir solidairement condamnés à payer à monsieur Bernard Y... et la société Toner Services Nord la somme de 50. 000 euros pour violation du protocole transactionnel établi entre eux ;

AUX MOTIFS QUE selon le protocole intervenu entre les parties, monsieur X...devait recevoir une indemnité de rupture forfaitaire et définitive de quatre vingt mille francs ; qu'il était autorisé à exercer une activité de vente de cartouches d'imprimantes, sauf, pendant une année, à ne pas prospecter les clients de la région parisienne ni les clients visés dans une annexe au protocole ; que monsieur Y..., pour TS Nord, TS BDR et TS FR a, réglé la somme susdite ; que pourtant, monsieur X... pour sa société TS France (sic) a, selon les pièces versées aux débats, prospecté, par télécopies notamment, plusieurs clients de la région parisienne ou visés en annexe, et qui relevaient donc de la sphère réservées à TS Nord ou à TS BDR ou FR ; que la sanction de l'inexécution du protocole était, selon les termes de ce dernier, d'une année de chiffre d'affaires réalisé par monsieur X... et TS France ; que cette stipulation fait la loi des parties et celle de la Cour ; qu'en 2001, première année entière d'exercice de monsieur X... et de TS France, et dernière année d'exercice avant la naissance du litige, ce chiffre d'affaires a atteint la somme de 197. 258 euros, au paiement de laquelle monsieur Y... et ses trois sociétés peuvent prétendre ;

1°) ALORS QUE selon la clause de non-concurrence incluse dans le protocole d'accord conclu entre la société Toner Services Nord et monsieur X..., ce dernier s'était engagé à ne pas vendre de cartouches, pendant un an, aux clients de la région parisienne et aux clients figurant à la liste annexée à cette convention ; que la cour qui, pour dire que monsieur X... n'avait pas respecté le protocole, a relevé qu'il avait prospecté plusieurs clients de la région parisienne ou visés en annexe ce dont il ne résultait pourtant pas qu'il leur aurait vendu des cartouches, a violé l'article 1134 du code civil ;

2°) ALORS QUE le protocole d'accord précisait que l'indemnité à verser en cas de non respect par monsieur X... de son obligation de non-concurrence serait égale à un an du chiffre d'affaires réalisé directement ou indirectement par lui avec le client objet du litige ; qu'en jugeant toutefois que la sanction de l'inexécution du protocole était d'une année du chiffre d'affaires réalisé par monsieur X... et TS France (sic) et en se fondant, pour fixer le préjudice subi par les sociétés Toner Services et monsieur Y..., sur le chiffre d'affaire réalisé pendant une année entière par monsieur X... et la société qu'il avait créée, la cour d'appel a dénaturé les termes du protocole et ainsi violé l'article 1134 du code civil.

3°) ALORS QUE selon le protocole d'accord, si monsieur X... ne respectait pas son engagement concernant les clients, une des sociétés du groupe Toner Services pourrait saisir un tribunal compétent pour réclamer réparation du préjudice ; qu'en jugeant toutefois que monsieur Y... pouvait prétendre au paiement de l'indemnité contractuellement due en cas de non respect de la clause de non-concurrence, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du protocole d'accord et ainsi violé l'article 1134 du code civil.


TROISIEME MOYEN DE CASSATION


Monsieur Jérôme X... et la SARL France Toner font grief à l'arrêt attaqué de les avoir solidairement condamnés à payer à monsieur Bernard Y... et aux sociétés Toner Services Nord, Toner Services FR et Toner Services BDR la somme de 50. 000 euros pour concurrence déloyale ;

AUX MOTIFS QUE vainement et au rebours des énonciations de la Cour de cassation, monsieur X... et TS France font plaider que les clients démarchés ne sont pas nettement identifiés par l'adversaire dans ses écritures ou dans ses pièces ou encore que les ressemblances dans la présentation publicitaire des produits étaient dictées par la nécessité ou n'induisaient pas de confusion auprès de la clientèle ou enfin que ses démarchages n'avaient pas les caractéristiques de manoeuvres ; que par conséquent l'action en concurrence déloyale apparaît fondée et qu'il faut faire droit ; que le préjudice subi par monsieur Y... et ses trois sociétés ne se confond pas avec celui que sanctionne le protocole transactionnel susvisé au titre de la responsabilité contractuelle ; qu'il s'agit ici non plus de stigmatiser l'attitude d'un ancien cocontractant mais de réparer la désorganisation des trois sociétés de monsieur Y..., induite par les confusions avérées des clients, par le dumping sur les prix opéré par monsieur X... et par l'atteinte à la réputation des trois sociétés de monsieur Y... ; que la cour dispose d'éléments suffisants pour évaluer ce préjudice dans les termes du dispositif ci-après, au visa du rapport d'expertise comptable fourni aux débats mais très largement pessimiste ;

1°) ALORS QUE le créancier d'une obligation contractuelle ne peut se prévaloir contre le débiteur de cette obligation, quand bien même il y aurait intérêt, des règles de la responsabilité délictuelle ; qu'en se bornant, pour juger l'action en concurrence déloyale fondée, à énoncer que monsieur X... et la société France Toner énonçaient vainement que les clients démarchés n'étaient pas nettement identifiés, que les ressemblances dans la présentation publicitaire des produits étaient dictées par la nécessité ou n'induisaient pas de confusion auprès de la clientèle ou que ces démarchages n'avaient pas les caractéristiques de manoeuvres, sans rechercher, comme il le lui était pourtant demandé, si les actes de concurrence déloyale ainsi reprochés aux intimés constituaient bien une faute entièrement distincte de l'obligation de non-concurrence dérivant du protocole d'accord, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;

2°) ALORS QUE dans son arrêt du 19 septembre 2006 par lequel elle avait cassé la décision de la cour d'appel d'Amiens, la Cour de cassation avait reproché à cette cour de ne pas avoir recherché si des ressemblances des présentations publicitaires critiquées étaient de nature à créer une confusion entre la société France Toner et la société Toner Services Nord et d'avoir jugé que l'action en concurrence déloyale supposait la preuve de manoeuvres révélant un élément intentionnel ; que la cour qui, pour juger l'action en concurrence déloyale fondée et imputer à monsieur X... et la société France Toner des actes de concurrence déloyale, a retenu que ces derniers contredisaient vainement les énonciations de l'arrêt de la Cour de cassation en prétendant que les ressemblances dans la présentation publicitaire des produits étaient dictées par la nécessité ou n'induisaient pas de conclusion auprès de la clientèle ou que ces démarches n'avaient pas les caractéristiques de manoeuvres, a méconnu les termes clairs et précis de cette décision des énonciations de laquelle ne résultaient ni l'existence d'une confusion auprès de la clientèle ni l'existence de manoeuvres, violant ainsi les articles 4 du code de procédure civile et 1134 du code civil ;