Vu la procédure suivante
:
Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 25 janvier 2019, 7 décembre 2020, 8 février, 9 avril et 23 décembre 2021, 9 mars, 21 avril et 16 mai 2022, la SARL
Blond et Roux architectes, la SAS Altia, la SAS Bureau Michel Forgue, la SAS
Espace Temps et la SAS MD Conseil, représentées par Me
Maras, demandent au tribunal, dans le dernier état de leurs écritures :
1°) d'annuler ou, à défaut, de résilier le
marché public de maîtrise d'œuvre conclu le 21 novembre 2018 entre la
commune de Nanterre et le groupement composé des sociétés Snøhetta Oslo AS, SRA Architectes, Kanju, Studio DAP, Egis Concept, Egis Bâtiments, Khephren Ingénierie et Sletec Ingénierie relatif à la réhabilitation et la transformation du centre dramatique national Nanterre-Amandiers ;
2°) de condamner la
commune de Nanterre à leur verser la somme de 671 890,69 euros en réparation des préjudices subis du fait de leur éviction
irrégulière de la procédure litigieuse, majorée des intérêts au taux légal à compter du 24 janvier 2019 et de leur capitalisation, dans les proportions suivantes :
- 442 664,69 euros à la SARL
Blond et Roux architectes ;
- 33 041 euros à la SAS Altia ;
- 104 022 euros à la SAS Bureau Michel Forgue ;
- 83 899 euros à la SAS
Espace Temps ;
- 8 264 euros à la SAS MD Conseil ;
3°) de mettre à la charge de la
commune de Nanterre la somme de 6 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- les moyens qu'elles soulèvent sont opérants dès lors que leur
offre ne peut être regardée comme
irrégulière ; leur évaluation des travaux incluant la construction d'une salle éphémère de 450 places qui s'élève en l'espèce à 28 003 840 euros hors taxes (HT), est très proche de la somme de 28 000 000 euros HT prévue dans les documents de consultation ; le coût des installations de chantier n'avait pas à faire l'objet d'un ligne distincte dans cette évaluation et, en l'espèce, le coût de ces équipements a été intégré dans le poste " structure " ;
- le
marché contesté a été adopté à l'issue de la mise en œuvre d'une procédure de passation
irrégulière dès lors qu'il a été conclu aux termes d'une procédure de dialogue compétitif alors que le pouvoir adjudicateur aurait dû organiser un concours en application de l'article
88 du décret du 25 mars 2016 ;
- le
marché contesté est entaché d'un vice affectant sa validité dès lors que le pouvoir adjudicateur a appliqué des critères distincts lors les deux phases de dialogue en méconnaissance de l'article
76 du décret du 25 mars 2016 ;
-
l'offre retenue par le pouvoir adjudicateur est
irrégulière dès lors, d'une part, que l'estimation des travaux proposés par le groupement attributaire excédait substantiellement l'enveloppe maximale de 28 000 000 euros HT prévue dans les documents de consultation et, d'autre part, que la somme retenue n'incluait ni les coûts relatifs aux opération de désamiantage ni les frais concernant la réalisation de la salle éphémère de 450 places ;
- la
commune de Nanterre a commis des erreurs manifestes dans l'appréciation des mérites respectifs des
offres ; elles ont été sous-notées s'agissant du critère relatif à l'appréciation de la qualité architecturale et paysagère du projet car elles avaient obtenu une note de 35 sur 40 à l'issue de la première phase de dialogue et que leur projet constituait un geste architectural fort ; s'agissant du critère relatif aux enjeux du programme et à ses aspects fonctionnels, le groupement titulaire a obtenu une note de 18 sur 20 et elles n'ont obtenu que 16 sur 20 alors que leur
offre a été considérée comme plus pertinente ; s'agissant du critère relatif à la pertinence des solutions techniques et environnementales, elles ont injustement obtenu une note de 10 sur 15 soit deux points de moins que le groupement attributaire ; s'agissant du critère " prise en compte des critères d'accessibilité, de sécurité, de maintenance ", les deux groupements ont obtenu une note identique de 8 sur 10 alors qu'il ressort du rapport d'analyse des
offres finales que leur
offre était de bien meilleure facture ;
- la méthode de notation utilisée pour évaluer le critère relatif au montant des honoraires est
irrégulière dès lors qu'elle a été de nature à priver de leur portée les critères de sélection ou, à tout le moins, neutraliser leur pondération en méconnaissance des principes fondamentaux d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures ;
- le
marché devra, à titre principal, être annulé compte tenu de la gravité des vices affectant sa validité qui révèlent, par ailleurs, une volonté de la
commune de Nanterre de favoriser le groupement titulaire ou, à titre subsidiaire, être résilié ;
- elles ont perdu une chance sérieuse d'emporter le
marché ;
- le manque à gagner de la SARL
Blond et Roux architectes s'élève à la somme de 442 664,69 euros ;
- la SAS Altia a subi un préjudice de 33 041 euros au titre de son manque à gagner ;
- la
commune de Nanterre versera 104 022 euros à la SAS Bureau Michel Forgue ;
- la SAS
Espace Temps demande que la
commune de Nanterre soit condamnée à lui verser la somme de 83 899 euros au titre de son manque à gagner ;
- la SAS MD Conseil sera indemnisée à hauteur de 8 264 euros.
Par des mémoires en défense et des pièces enregistrés les 7 octobre 2020 et 8 mars 2021, 18 février, 5 avril et 3 mai 2022, la
commune de Nanterre, représentée par Me
Gauch, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge des sociétés requérantes la somme de 4 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- à titre principal, le groupement composé des sociétés requérantes n'est pas susceptible d'avoir été lésé par les manquements qu'elles invoquent dès lors que leur
offre était
irrégulière aux motifs, d'une part, que leur estimation du montant des travaux excédait la somme de 28 000 000 euros HT prévue dans les documents de consultation et, d'autre part, que l'estimation réalisée ne prenait pas en compte les frais relatifs aux installations de chantier ;
- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par les sociétés SARL
Blond et Roux architectes, SAS Altia, SAS Bureau Michel Forgue, SAS
Espace Temps et SAS MD Conseil tendant à la contestation de la validité du contrat conclu avec le groupement attributaire ne sont pas fondés ;
- il n'existe pas de lien de causalité entre l'éviction du groupement composé des sociétés requérantes et les préjudices dont elles demandent réparation qui, en tout état de cause, ne sont pas établis.
L'ensemble de la procédure a été communiqué à la société Snøhetta Studio Paris, en sa qualité de mandataire du groupement attributaire du
marché, qui s'est constituée le 22 mars 2022 mais n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A,
- les conclusions de M. Gabarda, rapporteur public,
- et les observations de Me
Maras, représentant la SARL
Blond et Roux architectes, la SAS Altia, la SAS Bureau Michel Forgue, la SAS
Espace Temps et la SAS MD Conseil, et de Me Couvreur, représentant la
commune de Nanterre.
Une note en délibéré présentée par la SARL
Blond et Roux architectes, la SAS Altia, la SAS Bureau Michel Forgue, la SAS
Espace Temps et la SAS MD Conseil a été enregistrée le 9 septembre 2022.
Considérant ce qui suit
:
1. Par un avis publié le 2 août 2017 au bulletin officiel des annonces de
marchés publics, la
commune de Nanterre a décidé d'engager une procédure de dialogue compétitif en vue de l'attribution d'un
marché public de mission de maîtrise d'œuvre pour la réhabilitation et la transformation du centre dramatique national Nanterre-Amandiers. Les sociétés
Blond et Roux architectes, Architecture et technique, Altia, VP Green Engineering,
Espace Temps, Bureau Michel Forgue, Eléments ingénierie, MD Conseil et Agence TER, réunies sous forme de groupement conjoint dont la SARL
Blond et Roux Architectes était mandataire (ci-après, le groupement
Blond et Roux architectes), ont déposé leur candidature qui a été retenue pour participer à la première phase de dialogue compétitif avec cinq autres groupements. Par courrier du 29 mai 2018, le groupement
Blond et Roux architectes a été informé de la sélection de son
offre pour participer à la seconde phase du dialogue compétitif. En vertu de l'article VII.1 du règlement de la consultation, les
offres finales étaient jugées sur la base d'un critère " pertinence des enjeux du programme et aspects fonctionnels " (20 points), d'un critère " qualité architecturale et paysagère du projet " (20 points), d'un critère " pertinence des solutions scénographiques et acoustiques " (10 points), d'un critère " pertinence des solutions environnementales et techniques " (15 points), d'un critère " prise en compte des critères d'accessibilité, de sécurité et de maintenance " (10 points), d'un critère " crédibilité de l'estimation du coût des travaux et du planning proposé " (10 points) et d'un critère " montant des honoraires " (15 points). Au terme de l'analyse des
offres, le groupement composé des sociétés Snøhetta Oslo AS, SRA Architectes, Kanju, Studio DAP, Egis Concept, Egis Bâtiments, Khephren Ingéniérie et Sletec Ingéniérie (ci-après, le groupement Snøhetta) a été déclaré attributaire avec 79 points sur 100 et le groupement
Blond et Roux architectes a été classé en seconde position avec une note totale de 75 point sur 100. Par un courrier du 22 octobre 2018, la
commune de Nanterre a notifié au groupement
Blond et Roux architectes le rejet de son
offre. Le 31 octobre 2018, les sociétés du groupement
Blond et Roux architectes ont saisi le juge des référés en application des dispositions de l'article
L. 551-1 du code de justice administrative qui a rejeté leur requête par une ordonnance n° 1811345 du 20 novembre 2018. A la suite du rejet de leur demande indemnitaire du 25 janvier 2019, les sociétés
Blond et Roux architectes, Altia, Bureau Michel Forgue,
Espace Temps et MD Conseil demandent au tribunal, d'une part, d'annuler ou, à défaut, de résilier le marché public de maîtrise d'œuvre conclu le 21 novembre 2018 entre la
commune de Nanterre et le groupement Snøhetta et, d'autre part, de condamner la
commune de Nanterre à leur verser la somme de 671 890,69 euros en réparation des préjudices qu'elles estiment avoir subis.
Sur les conclusions à fin d'annulation ou de résiliation du contrat :
2. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles
L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. Si le représentant de l'Etat dans le département et les membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, compte tenu des intérêts dont ils ont la charge, peuvent invoquer tout moyen à l'appui du recours ainsi défini, les autres tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office. Un concurrent évincé ne peut ainsi invoquer, outre les vices d'ordre
public dont serait entaché le contrat, que les manquements aux règles applicables à la passation de ce contrat qui sont en rapport direct avec son éviction.
3. Saisi ainsi par un tiers dans les conditions définies ci-dessus, de conclusions contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses, il appartient au juge du contrat, après avoir vérifié que l'auteur du recours autre que le représentant de l'Etat dans le département ou qu'un membre de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné se prévaut d'un intérêt susceptible d'être lésé de façon suffisamment directe et certaine et que les irrégularités qu'il critique sont de celles qu'il peut utilement invoquer, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier l'importance et les conséquences. Ainsi, il lui revient, après avoir pris en considération la nature de ces vices, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, soit d'inviter les parties à prendre des mesures de régularisation dans un délai qu'il fixe, sauf à résilier ou résoudre le contrat. En présence d'irrégularités qui ne peuvent être couvertes par une mesure de régularisation et qui ne permettent pas la poursuite de l'exécution du contrat, il lui revient de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, soit la résiliation du contrat, soit, si le contrat a un contenu illicite ou s'il se trouve affecté d'un vice de consentement ou de tout autre vice d'une particulière gravité que le juge doit ainsi relever d'office, l'annulation totale ou partielle de celui-ci. Il peut enfin, s'il en est saisi, faire droit, y compris lorsqu'il invite les parties à prendre des mesures de régularisation, à des conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice découlant de l'atteinte à des droits lésés.
4. Un candidat dont la candidature ou
l'offre est
irrégulière n'est pas susceptible d'être lésé par les manquements qu'il invoque, sauf si cette irrégularité est le résultat du manquement qu'il dénonce. Il en va ainsi alors même que son
offre a été analysée, notée et classée par le pouvoir adjudicateur.
5. Aux termes de l'article
59 du décret du 25 mars 2016 : " I. - L'acheteur vérifie que les
offres qui n'ont pas été éliminées en application du IV de l'article 43 sont régulières, acceptables et appropriées. / Une
offre irrégulière est une
offre qui ne respecte pas les exigences formulées dans les documents de la consultation notamment parce qu'elle est incomplète, ou qui méconnaît la législation applicable notamment en matière sociale et environnementale. () / III. - Dans les autres procédures, les
offres inappropriées sont éliminées. Les
offres irrégulières ou inacceptables peuvent devenir régulières ou acceptables à l'issue de la négociation ou du dialogue, à condition qu'elles ne soient pas anormalement basses. / Lorsque la négociation ou le dialogue a pris fin, les
offres qui demeurent
irrégulières ou inacceptables sont éliminées. Toutefois, l'acheteur peut autoriser tous les soumissionnaires concernés à régulariser les
offres irrégulières dans un délai approprié, à condition qu'elles ne soient pas anormalement basses. / IV. - La régularisation des
offres irrégulières ne peut avoir pour effet de modifier des caractéristiques substantielles des
offres ". L'article V.3 de l'additif du règlement de dialogue compétitif du
marché de maitrise d'œuvre pour la réhabilitation et la transformation du centre dramatique nationale Nanterre-Amandiers prévoit que : " Le budget prévisionnel d'investissement alloué par le maitre d'ouvrage et ses partenaires à l'ensemble des travaux de réhabilitation et de transformation du centre dramatique national Nanterre-Amandiers est fixé à 28 000 000 d'euros HT maximum (valeur juin 2018). Les candidats devront veiller au strict respect de cette enveloppe pour la remise de leur proposition ". Aux termes de l'article 2 de l'acte d'engagement : " L'enveloppe financière prévisionnelle affectée à la réalisation des travaux par le maitre d'ouvrage est fixée à 28 000 000 euros HT, valeur juillet 2018. Cette enveloppe inclut également le coût lié à l'installation d'une salle de diffusion éphémère, hors site, pendant la durée des travaux et pour laquelle une mission complémentaire spécifique est également confine au maitre d'œuvre (coût évalué à 450 000 euros HT) ". L'annexe de l'additif du règlement de dialogue compétitif du
marché précise, enfin, que " () le dossier final à remettre par les candidats comportera les pièces et prestations suivantes : () / g) une note estimative du coût des travaux présentés de façon explicite et détaillée () ".
6. D'une part, il est constant que le groupement
Blond et Roux architectes a remis au pouvoir adjudicateur, le 28 septembre 2018, une
offre finale dans laquelle il estimait le montant des travaux de réhabilitation et de transformation du centre dramatique national Nanterre-Amandiers qu'il proposait à la somme de 27 553 840 euros HT, laquelle ne comprenait pas le montant lié à l'installation hors site de la salle de diffusion éphémère. Les sociétés requérantes font elles-mêmes valoir à cet égard que la somme de 450 000 euros HT devait être ajoutée à leur estimation du montant des travaux en application de l'article 2 de l'acte d'engagement. Il résulte ainsi de l'instruction que
l'offre du groupement
Blond et Roux architectes portait sur la réalisation de travaux pour un montant de 28 003 840 euros HT, excédant ainsi le montant de 28 000 000 euros HT prévu par les documents de la consultation. La
commune de Nanterre fait dès lors valoir, en défense, que cette
offre était
irrégulière.
7. Les sociétés requérantes soutiennent, à l'appui de leur contestation, que leur
offre doit être regardée comme régulière au motif, en premier lieu, que celle-ci a été analysée, notée et classée par le pouvoir adjudicateur. Toutefois, la circonstance que la
commune de Nanterre a classé
l'offre des requérantes à l'issue de la procédure de passation du
marché et l'a rejetée pour un autre motif ne fait pas obstacle à ce qu'elle invoque devant le juge du contrat l'irrégularité de cette
offre dès lors qu'elle dépassait le montant de réalisation des travaux. Les sociétés requérantes soutiennent, en deuxième lieu, qu'en opposant ainsi l'irrégularité de leur
offre dans le cadre du débat contentieux, la
commune de Nanterre les aurait privées d'une garantie. Elles ont toutefois elles-mêmes précisé, dans leurs écritures enregistrées le 21 avril 2022, que " tous les candidats, y compris Snøhetta, ont reçu la même information sur l'obligation de réserver une somme de 450 000 € HT sur le budget de 28 000 000 € HT pour la réalisation de cette salle externe " et reconnaissent en outre que le pouvoir adjudicateur n'était pas tenu d'inviter le groupement
Blond et Roux architectes à régulariser son
offre en application des dispositions mentionnées au point 5. Dans ces conditions, elles ne sauraient se prévaloir d'avoir fait l'objet d'un traitement différent des autres soumissionnaires et d'avoir été privée d'une quelconque garantie. Si les sociétés requérantes soutiennent, en troisième lieu, que leur estimation des travaux n'était supérieure que de 0,1 % à la somme maximale prévue par les documents de la consultation, cette circonstance est sans incidence sur l'appréciation de la régularité de leur
offre dès lors que les documents de la consultation et en particulier l'article V.3 précité de l'additif du règlement de dialogue compétitif du
marché de maitrise d'œuvre précisaient que les candidats devaient veiller au " strict respect " du budget maximum des travaux fixé à 28 000 000 euros HT.
8. Il résulte de tout ce qui précède que
l'offre du groupement
Blond et Roux architectes, qui méconnaissait les documents de la consultation, était
irrégulière et aurait pu, pour ce seul motif, être éliminée par la
commune de Nanterre. Dès lors que l'irrégularité de cette
offre ne résulte pas des vices qu'elles dénoncent, la SARL
Blond et Roux architectes, la SAS Altia, la SAS Bureau Michel Forgue, la SAS
Espace Temps et la SAS MD Conseil ne sont pas susceptibles d'avoir été lésées par les manquements qu'elles invoquent et ne sont ainsi pas recevables à contester la validité du contrat en cause.
9. D'autre part, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ne résulte pas de l'instruction que la
commune de Nanterre aurait, en concluant le
marché en cause avec le groupement Snøhetta, cherché à favoriser ce dernier. Dans ces conditions, en l'absence de contenu illicite du
marché conclu et dès lors que le contrat n'est affecté d'aucun vice de consentement ou de tout autre vice d'une particulière gravité, il y a lieu de rejeter les conclusions des sociétés requérantes tendant à l'annulation ou à la résiliation du
marché public de maîtrise d'œuvre conclu le 21 novembre 2018 entre la
commune de Nanterre et le groupement Snøhetta.
Sur les conclusions indemnitaires :
10. Dès lors qu'il résulte de l'instruction que
l'offre du groupement évincé était
irrégulière, ce dernier était dépourvu de toute chance d'obtenir le contrat. Les sociétés requérantes ne sont dès lors pas fondées à demander la réparation des préjudices qu'elles estiment avoir subis. Par suite, il y a lieu de rejeter leurs conclusions tendant à la condamnation de la
commune de Nanterre à leur verser la somme de 671 890,69 euros majorée des intérêts au taux légal et de leur capitalisation.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la
commune de Nanterre, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à la SARL
Blond et Roux architectes, à la SAS Altia, à la SAS Bureau Michel Forgue, à la SAS
Espace Temps et à la SAS MD Conseil la somme que celles-ci réclament au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. Il n'y a pas davantage lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la
commune de Nanterre sur le fondement de ces mêmes dispositions.
Par ces motifs
, le tribunal décide :
Article 1er : La requête des sociétés SARL
Blond et Roux architectes, SAS Altia, SAS Bureau Michel Forgue, SAS
Espace Temps et SAS MD Conseil est rejetée.
Article 2 : Les conclusions formées par la
commune de Nanterre au titre des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié aux sociétés SARL
Blond et Roux architectes, SAS Altia, SAS Bureau Michel Forgue, SAS
Espace Temps et SAS MD Conseil, à la
commune de Nanterre et à la société Snøhetta Studio Paris.
Délibéré après l'audience du 2 septembre 2022, à laquelle siégeaient :
Mme Coblence, présidente,
Mme Fléjou, première conseillère,
M. Goupillier, conseiller,
assistés de Mme Charleston, greffière.
Rendu
public par mise à disposition au greffe le 20 septembre 2022.
Le rapporteur,
signé
C. A La présidente,
signé
E. Coblence
La greffière,
signé
D. Charleston
La République mande et ordonne au préfet des Hauts-de-Seine en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.