Chronologie de l'affaire
Tribunal administratif de Paris 27 décembre 2006
Cour administrative d'appel de Paris 07 mai 2008

Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre - Formation A, 7 mai 2008, 07PA01485

Mots clés contributions et taxes · généralités Règles générales d'établissement de l'impôt Redressement Commission départementale · compétence · inclusion · différend portant sur le montant du bénéfice industriel et commercial rj1

Synthèse

Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro affaire : 07PA01485
Type de recours : Plein contentieux
Précédents jurisprudentiels : [RJ1] Cf., sur le principe de l'imposition en tant que BIC des bénéfices des entreprises assujetties à l'impôt sur les sociétés, CE, 8 octobre 1993, SARL Gérard Unger Conseil, n° 127113, p. 258.
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 27 décembre 2006, N° 0118758
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur : Mme Isabelle DELY
Rapporteur public : M. JARDIN
Avocat(s) : LANDWELL ET ASSOCIES

Chronologie de l'affaire

Tribunal administratif de Paris 27 décembre 2006
Cour administrative d'appel de Paris 07 mai 2008

Résumé

z19-01-03-02-03z Une société anonyme exerçant une activité de gestion de portefeuille, de nature purement civile, a acquis des titres auprès d'une autre société moyennant un prix remis en cause par l'administration fiscale, qui a estimé que la première société avait bénéficié d'un avantage occulte à hauteur de la différence entre le prix de vente des titres et leur valeur réelle, avantage qu'elle a regardé, en application des dispositions du c de l'article 111 du code général des impôts (CGI), comme un revenu distribué à cette première société par la seconde. L'administration, par conséquent, a réintégré dans les bases imposables de la société anonyme le montant de cette distribution. Dès lors qu'en vertu du 1 de l'article 206 du CGI, les sociétés anonymes, quel que soit leur objet, sont passibles de l'impôt sur les sociétés, que leurs bénéfices sont dès lors, en application du I de l'article 209 du CGI, imposés en tant que bénéfices industriels et commerciaux (BIC), et que le bénéfice imposable est, aux termes de l'article 38 du CGI, déterminé d'après les résultats de l'ensemble des opérations de toute nature, le désaccord entre la société anonyme et l'administration fiscale à propos du montant de la somme réintégrée dans ses bases portait sur le montant du bénéfice industriel et commercial au sens de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales (LPF) et entrait par suite dans le champ de compétence de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires (CDI). Est sans incidence sur ce point la circonstance que cette somme aurait constitué pour une personne physique un revenu de capitaux mobiliers ne relevant pas de la compétence de la CDI.

Texte

Vu le recours, enregistré le 23 avril 2007, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0118758 du 27 décembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Paris a déchargé la société Francal des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 30 septembre 1992 ;

2°) de rétablir la société Francal au rôle de l'impôt sur les sociétés à hauteur de

129 650 euros au titre de l'exercice clos le 30 septembre 1992 ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2008 :

- le rapport de Mme Dely, rapporteur,

- les observations de Me Lostis, pour la société Francal,

- et les conclusions de M. Jardin, commissaire du gouvernement ;


Considérant qu'

à la suite d'une vérification de comptabilité ayant débuté le 23 février 1994 de la SA Francal, qui a pour objet statutaire la prise de participation dans toute société par achat, souscription d'actions, de parts sociales ou de parts d'intérêts et leur détention en tant que holding financier, l'administration a remis en cause le prix de cession des 800 titres de participation de la SA Soficob que lui a cédés la société Financière du Val, à un prix unitaire de 3 000 F, et a estimé que, par référence à la valeur locative de la SA Soficob, l'action en cause devait être évaluée à 6 997 F et, dès lors, a considéré, en application des dispositions de l'article 111 c du code général des impôts, que la SA Financière du Val lui avait consenti un avantage occulte à hauteur de la différence entre le prix de vente de l'action et sa valeur réelle, soit 3 997 F par action entraînant une variation de son actif net ; que l'administration ayant partiellement fait droit à la réclamation de la société, cette dernière a porté le litige restant devant le Tribunal administratif de Paris qui, par un jugement en date du 27 décembre 2006 dont le ministre fait régulièrement appel, a fait droit à sa demande et l'a déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 30 septembre 1992, au motif que l'administration a dépassé le délai de trois mois fixé par l'article L. 52 du livre des procédures fiscales lors de la vérification de comptabilité ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors en vigueur issue de l'article 30 de la loi n° 94-126 du 11 février 1994 : Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : 1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts ; 2° Les contribuables se livrant à une activité agricole lorsque le montant annuel des recettes brutes n'excède pas la limite prévue au b du II de l'article 69 du code général des impôts (...) : que ces dispositions organisent, au bénéfice de certaines entreprises limitativement énumérées, une garantie spéciale encadrant la procédure de vérification de comptabilité dont elles peuvent faire l'objet ; que la SA Francal qui exerce uniquement une activité à caractère civil de gestion d'un portefeuille de titres et de participations n'entre dans le champ d'aucune des dispositions de cet article ; que, par suite, le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a déchargé la société Francal des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 30 septembre 1992 ;

Considérant toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par la SA Francal tant en première instance qu'en appel ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au litige : Lorsque le désaccord persiste sur les redressements notifiés, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts... ; et qu'aux termes de l'article L. 59 A du même livre dans sa rédaction alors applicable : La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient : 1° Lorsque le désaccord porte, soit sur le montant du bénéfice industriel et commercial, du bénéfice non commercial, du bénéfice agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition, soit sur la valeur vénale des immeubles, des fonds de commerce, des parts d'intérêts, des actions ou des parts de sociétés immobilières servant de base à la taxe sur la valeur ajoutée, en application du 6° et du 1 du 70 de l'article 257 du code général des impôts ; qu'il résulte de ces dispositions que l'administration est tenue de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires sur demande du contribuable lorsque le litige concerne des matières pour lesquelles la commission est compétente en vertu de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales ;

Considérant que l'administration a refusé de faire droit à la demande de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires présentée par la société Francal, par une lettre en date du 29 novembre 1994, dans le délai de trente jours prévu à l'article R. 59-1 du livre des procédures fiscales, aux motifs que le litige se situait, s'agissant de revenus distribués, hors du champ de la compétence de la commission ;

Considérant qu'en vertu du 1 de l'article 206 du code général des impôts, les sociétés anonymes quel que soit leur objet sont passibles de l'impôt sur les sociétés ; que les bénéfices des entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés sont, quelle que soit la nature de leur activité, imposés en vertu de l'article 209-I du même code en tant que bénéfices industriels et commerciaux selon les règles fixées par les articles 34 à 45, 53A à 57 et 302 septies A bis de ce code ; que selon les dispositions de l'article 38 le bénéfice imposable est le bénéfice net déterminé d'après les résultats de l'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises et constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période ; qu'ainsi, le produit correspondant aux sommes litigieuses a été pris en compte pour déterminer le montant du bénéfice industriel et commercial alors même que lesdites sommes pouvaient être regardées comme entrant dans les prévisions de l'article 111c du code général des impôts et qu'à ce titre auraient constitué pour une personne physique des revenus de capitaux mobiliers ne relevant pas de la compétence de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que dès lors, le désaccord qui portait sur le montant du bénéfice industriel et commercial entrait dans le champ de compétence de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires tel que prévu par les dispositions précitées de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales ; que, par ailleurs, contrairement à ce que soutient le ministre, le différend, ainsi qu'il résulte de la lettre de demande de saisine de la commission ne portait pas uniquement sur la qualification juridique de la somme correspondant à la sous-évaluation du prix de cession mais également sur l'évaluation de la valeur vénale des titres compte-tenu de l'appréciation de l'existence du risque de conversion des obligations convertibles qui soulevait une question de fait relevant de la compétence de l'organisme consultatif ; que, par suite, en s'abstenant de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires en dépit de la demande qui lui avait été régulièrement adressée par la société Francal, l'administration a commis une irrégularité entachant la procédure d'imposition de nature à entraîner la décharge des impositions ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens présentés par la société Francal, que le MINISTRE n'est pas fondé à se plaindre de ce que le Tribunal administratif de Paris a déchargé la société Francal des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 30 septembre 1992 ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire droit aux conclusions de la société Francal tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en mettant à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros ;

D E C I D E :



Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la SA Francal une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

''

''

''

''

2

N° 07PA01485