Tribunal de grande instance de Paris, 23 octobre 2014, 2013/10552

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    2013/10552
  • Domaine de propriété intellectuelle : MARQUE
  • Marques : CHOCOCOOKIE ; CHOCOCOCO ; Chococookie ; Chocococo
  • Classification pour les marques : CL29 ; CL30 ; CL32 ; CL43
  • Numéros d'enregistrement : 3228721 ; 3228719 ; 11132701 ; 11548542
  • Parties : FRENCH COFFEE SHOP SARL ; V (Daniel) ; M (épouse V) / WAGRAM FINANCES SA

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Paris
2016-03-29
Tribunal de grande instance de Paris
2014-10-23

Texte intégral

TRIBUNAL D E GRANDE INSTANCE DE PARIS JUGEMENT rendu le 23 Octobre 2014 3èmc chambre 1 ère section N° RG : 13/10552 DEMANDEURS S.A.R.L. FRENCH C S [...] 33260 I.A TESTE DE BUCH Monsieur Daniel Roland René V Madame MARTIN épouse V représentées par Maître Guillaume DAUCHEL de la SELARL CABINET SEVELLEC, avocats au barreau de PARIS, avocats postulant, vestiaire #W0009 et plaidant par Me Denis B B & GO avocat au barreau de BORDEAUX DÉFENDERESSE S.A. WAGRAM FINANCES Place Narwick [...] 75008 PARIS représentée par Maître Claire HERISSAY DUCAMP de la SELARL SELARL CANDE - BEANCHARD - D avocat au barreau de PARIS, vestiaire //P0265 COMPOSITION DU TRIBUNAL Marie-Christine C, Vice-Présidente Camille LIGNIERES, Vice-Présidente Julien. RICHAUD. Juge assistés de Léoncia BELLON, Greffier, DÉBATS A l'audience du 08 Septembre 2014 tenue publiquement JUGEMENT Prononcé par mise à disposition au greffe Contradictoirement en premier ressort EXPOSE DU LITIGE La SARL FRENCH C S, immatriculée le 5 mai 1997 sous le numéro 411 787 187, a pour objet l'exploitation de commerces de vente au détail de café, viennoiseries, thé, chocolats aromatisés et autre boissons à base de café, thé, chocolat ou lait. Le 3 juin 2003, Monsieur Daniel V et son épouse, Madame Fabienne M, gérants de la SARL FRENCH C S, ont déposé les marques françaises verbales « CHOCOCOOKIE » portant le numéro d'enregistrement INPI 03.3.228.721 désignant le café aromatisé de la classe 30 et « CHOCOCOCO » portant le numéro d'enregistrement INPI 03.3.228.719 désignant le café aromatisé de la classe 30. La SARL FRENCH C S a déposé le 22 août 2012 la marque communautaire semi-figurative « Chococookie » sous le numéro d'enregistrement 11132701 désignant des produits des classes 29,30,32 et 43 puis, le 6 février 2013, la marque communautaire semi- figurative « Chocococo » sous le numéro d'enregistrement 11548542 désignant des produits de la même classe. La SA WAGRAM FINANCES, immatriculée le 31 décembre 1986 sous le numéro 339 592 685, a pour activité commerciale l'exploitation de commerces de vente au détail de boissons et notamment des boissons à base de café sous l'enseigne COLUMBUS CAFE. Elle utilise dans ce cadre des sirops de la société MONIN dont le sirop MONIN CHOCOLATE COOKIE. Expliquant avoir découvert la commercialisation par l'enseigne COLOMBUS CAFE de produits portant la dénomination « Choco Cookie », la SARL FRENCH C S et les époux V ont, par lettre recommandée avec accusé de réception du 16 octobre 2012. mis en demeure la SA WAGRAM FINANCES, de cesser l'utilisation ou de faire une mention quelconque des dénominations « Choco Cookie » dans le cadre de son activité. Par courrier du 30 octobre 2012, la SA WAGRAM FINANCES, soulignant la distinctivité limitée de la marque « CHOCOCOOKIE » et exposant n'utiliser les termes séparés « Choco » et « Cookie » qu'à des fins descriptives et non à titre de marque, contestait tout fait de contrefaçon mais proposait amiablement de remplacer la dénomination « Choco Cookie » par « Chocolaté Cookie ». Saisi par les époux V et la SARL FRENCH C S, le président du tribunal de commerce de BORDEAUX rendait sur requête une ordonnance du 16 mai 2013, désignant un huissier de justice aux fins de constat sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile. L'huissier procédait à ses opérations le 5 juin 2013. Par exploit d'huissier du 3 juillet 2013 les époux V et la société FRENCH COFFEE SHOP, qui indiquaient par ailleurs avoir découvert l'utilisation de la marque « CHOCOCO », ont assigné la SA WAGRAM FINANCES devant le tribunal de grande instance de PARIS à titre principal en contrefaçon de marques et subsidiairement en concurrence déloyale. Dans leurs dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 23 avril 2014 auxquelles il sera renvoyé pour un exposé de leurs moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile, les époux V et la SARL FRENCH C S demandent au tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire et au visa des articles 1,713-1 et suivants, L 716-1, L 716-3 et L 716-6 et suivants du code de la propriété intellectuelle 1382 du code civil et 15, 42. 696 et 700 du code de procédure civile :In limine lilis, de se déclarer compétent pour statuer sur le litige d'espèce et de dire que le procès-verbal de constat d'huissier du 5 juillet 2013 est valide et recevable. de déclarer leurs demandes recevables et bien fondées, de rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions de la défenderesse comme infondées et injustifiées, à titre principal : o de dire que les époux V et la société FRENCH COFFEE SHOP ont fait un usage sérieux et ininterrompu des marques nationales et communautaires litigieuses dont ils sont propriétaires, o de dire que les marques nationales et communautaires litigieuses présentent un caractère distinctif. o de dire que l'utilisation des dénominations « Choco Cookie » et « Choco'Coco » par WAGRAM FINANCES via les enseignes COLUMBUS CAFÉ pour désigner des produits identiques est un acte de reproduction, o de dire que l'utilisation des dénominations « Choco Cookie » et « Choco'Coco » par WAGRAM FINANCES via les enseignes COLUMBUS CAFE a créé un risque de confusion dans l'esprit du consommateur en relation avec les marques nationales et communautaires CHOCOCOOKIE et CHOCOCOCO détenues par les époux V et F C S. o dire que l'utilisation des marques françaises et communautaires CHOCOCOOKIE et CHOCOCOCO par les époux V et par FRENCH C S était prioritaire à celle effectuée par WAGRAM FINANCES du fait des dépôts de marque effectués par les demandeurs auprès de l'INPI, o de dire que WAGRAM FINANCES est l'auteur d'une contrefaçon des marques françaises et communautaires litigieuses, propriétés des demandeurs. - à titre subsidiaire, de dire que WAGRAM FINANCES est responsable de concurrence déloyale envers les époux V et F C S, - en tout état de cause : o d'ordonner à WAGRAM FINANCES de cesser d'utiliser les dénominations « Choco Cookie » et « Choco'Coco », ou toute autre dénomination présentant des similarités avec les marques nationales et communautaires CHOCOCOOKIE et CHOCOCOCO, sur tout produit, document ou outil promotionnel utilisé par elle, y incluant, sans limite de ce qui précède, toute enseigne, affiche, menu, dépliant publicitaire, site Internet ou autres, et de voir à ce que tous et chacun de ses franchisés fassent de même, sous astreinte de 500 € par jour à compter de la signification de la décision à intervenir, le tribunal de céans se réservant la liquidation de l'astreinte, o de condamner WAGRAM FINANCES au paiement de la somme totale des bénéfices réalisés sur les produits portant les dénominations « Choco Cookie » et « Choco'Coco » aux demandeurs, à titre de dommages et intérêts pour le préjudice économique subi par les époux V et F C S, o de condamner WAGRAM FINANCES au paiement de la somme de 50.000 € à chacun des demandeurs, à titre de dommages et intérêts pour le préjudice d'image subi par les époux V et par FRENCH C S, o de condamner WAGRAM FINANCES à verser à chacun des demandeurs la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance, en ce compris le coût des constats d'huissiers. En réponse, dans ses dernières écritures notifiées par la voie électronique le 28 avril 2014 auxquelles il sera renvoyé pour un exposé de ses moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la SA WAGRAM FINANCES demande au tribunal: - à titre liminaire, de prononcer la nullité du procès-verbal de constat du 5 juin 2013 en ce qu'il constitue des opérations de saisie-contrefaçon déguisées et n'a pas été ordonné par le tribunal matériellement compétent, - à titre principal : o de dire et juger que les époux V ne produisent aucune pièce de nature à démontrer un usage réel et sérieux de leurs marques françaises « CHOCOCOOKIE » n° 3228721 et « CHOCOCOCO » n° 3228719, o et en conséquence de prononcer, au visa de l'article L 714-5 du code de la propriété intellectuelle, la déchéance de la marque française « CHOCOCOOKIE » n° 3228721 et « CHOCOCOCO » n° 3228719 à compter de la publication de l'enregistrement desdites marques en date du 11 juillet 2003, o de dire et juger que les marques françaises et communautaires « CHOCOCOOKIE » n° 3228721/ CTM 011132701 et « CHOCOCOCO » n°3228719 / CTM 11548542 sont dépourvues de caractère distinctif pour les produits de la classe 30, o et en conséquence, de prononcer, au visa des articles L711-2, L714-3 du code de la propriété intellectuelle et de l'article 52 du Règlement (CE) n° 207/2009 du 26 février 2009, la nullité des marques françaises « CHOCOCOOKIE » n° 3228721 et « CHOCOCOCO » n°3228719 et de prononcer la nullité des marques communautaires « CHOCOCOOKIE » CTM 011132701 et « CHOCOCOCO » CTM 11548542 pour le café, le thé, le cacao et les succédanés du café relevant de la classe 30, o d'ordonner la transmission du jugement à intervenir à l'INPI et à l'OHMI pour son inscription sur les registres. o de déclarer mal fondées les demandes faites par la société FRENCH COFFEE SHOP et les époux V au titre de la contrefaçon et/ OU de la concurrence déloyale, - à titre subsidiaire : o de dire que les demandes de la société FRENCH COFFEE SHOP et des époux V sont incohérentes et mal fondées, o de débouter la société FRENCH COFFEE SHOP et les époux V de toutes leurs demandes, fins et prétentions, - à titre reconventionnel : o de condamner la société FRENCH COFFEE SHOP et les époux V à payer à la société WAGRAM FINANCES la somme de 30.000 euros pour procédure abusive. o de condamner la société FRENCH COFFEE SHOP et les époux V à payer à la société WAGRAM FINANCES la somme de 8.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens. L'ordonnance de clôture était rendue le 29 avril 2014. L'affaire, retenue à l'audience du 8 septembre 2014, a été mise en délibéré au 23 octobre 2014 et le jugement sera prononcé à cette date par sa mise à disposition au greffe, les parties représentées en ayant été avisées à l'issue des débats conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile. EXPOSE DES MOTIFS L'incompétence territoriale ou matérielle du tribunal de grande instance de PARIS, dont le relevé d'office n'est pour le juge qu'une faculté prévue et restreinte par les articles 92 et 93 du code de procédure civile, n'étant pas soulevée par la SA WAGRAM FINANCES, les développements des époux V et de la SARL FRENCH C S à ce titre sont étrangers au principal au sens des articles 4 et 480 du code de procédure civile et n'ont pas à être examinés. 1°) Sur la nullité du procès-verbal de constat du 5 juin 2013 Conformément à l'article 649 du code de procédure civile, les nullités des actes d'huissier de justice est régie par les dispositions qui gouvernent la nullité des actes de procédures. Et, en vertu des articles 117,118 et 119 du même code, le défaut de pouvoir constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l'acte susceptible d'être soulevée en tout état de cause sans que celui qui l'invoque ait à justifier d'un grief. Aux termes de leur requête aux fins de constat du 26 avril 2013 adressée au président du tribunal de commerce de BORDEAUX livrant un exposé des faits voisin de celui développé dans la présente instance, les demandeurs expliquaient avoir « eu la déconvenue de constater que leur marque était usurpée par un de leur concurrent, la société WAGRAM FINANCES », et invoquaient expressément les dispositions des articles L 716-1, L 713-2 et L 713-3 du code de la propriété intellectuelle, siège de la définition et des conditions d'existence de la contrefaçon de marque. Ainsi, les demandeurs fondaient leur action sur l'atteinte à leurs droits sur leurs marques française et communautaire « Chococookie » et imputaient à la SA WAGRAM FINANCES des actes de contrefaçon. S'il est exact que la contrefaçon est un fait juridique susceptible d'être prouvé par tout moyen et que la saisie-contrefaçon est un moyen de preuve facultatif non exclusif du recours aux autres modes de preuve dont les constatations d'un huissier de justice n'usant pas des pouvoirs exorbitants du droit commun propres à la saisie-contrefaçon, toute action civile au sens de l'article L 716-3 du code de la propriété intellectuelle de nature à affecter au fond les droits du titulaire d'une marque relève de la compétence exclusive du tribunal de grande instance territorialement compétent, l'article R 716-2 du code de la propriété intellectuelle prévoyant la compétence du président du tribunal de grande instance compétent pour connaître du fond. Or, la mesure de constat sollicitée par les époux V et la SARI. FRENCH C S était indissociablement liée à des actes de contrefaçon de marque imputés à la SA WAGRAM FINANCES. Aussi la juridiction compétente pour connaître de l'affaire au fond était-elle le tribunal de grande instance en application de l'article 1.716-3 du code de la propriété intellectuelle. Et la protection d'une marque communautaire étant en débat et commandant un examen concentré des demandes des parties, le tribunal de grande instance matériellement compétent à ce titre conformément aux articles R 717-11 du code de la propriété intellectuelle et R 211-7 du code de l'organisation judiciaire est celui de PARIS, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté. Dès lors, seul le président de ce tribunal était compétent au sens de l'article 812 du code de procédure civile pour ordonner sur requête une mesure d'instruction in futurum quelconque.

En conséquence

, l'ordonnance du 16 mai 2013 rendue par président du tribunal de commerce de BORDEAUX, incompétent matériellement, est nulle, peu important qu'il n'ait pas été saisi d'une demande de rétractation. La nullité de l'ordonnance le désignant privant de pouvoir l'huissier qui l'exécute, le procès-verbal de constat du 5 juin 2013 dressé sur son fondement sera annulé pour vice de fond, l'examen du moyen tiré de l'existence d'une saisie-contrefaçon déguisée, qui ne manque d'ailleurs pas de pertinence au regard de la nature de la mission de l'huissier de justice, étant inutile. Les demandeurs s'appuyant sur d'autres preuves que le constat annulé, la déchéance de leurs droits sur les marques françaises « chococookie » et « chocococo » et la nullité de leurs marques françaises et communautaires doivent être examinées, l'appréciation des conditions de validité des marques devant à cet égard précéder celle de leur usage. 2°) Sur la nullité pour défaut de distinctivité des marques françaises et communautaires « Chococookie » et « Chocococo » -Sur les marques françaises Conformément à l'article L 714-3 du code de la propriété intellectuelle, est déclaré nul par décision de justice l'enregistrement d'une marque qui n'est pas conforme aux dispositions des articles 1.711-1 et à L 711- 4, la décision d'annulation ayant un effet absolu. Et, en vertu de l'article I, 711-2 du code de la propriété intellectuelle, le caractère distinctif d'un signe de nature à constituer une marque s'apprécie à l'égard des produits ou services désignés. Sont dépourvus de caractère distinctif: a) Les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service : b) Les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l'espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l'époque de la production du bien ou de la prestation de service : c) Les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature ou la fonction du produit, ou conférant à ce dernier sa valeur substantielle. Le caractère distinctif peut, sauf dans le cas prévu au c). être acquis par l'usage. Ainsi, pour remplir sa fonction essentielle d'identification, une marque doit être distinctive, caractère indépendant de l'originalité ou de la nouveauté qui suppose que les éléments entrant dans sa composition soient arbitraires par rapport aux produits ou services qu'elle désigne et soient perçus par le consommateur comme pouvant identifier l'origine du produit. La réalité du caractère distinctif doit être appréciée au jour du dépôt des marques pour chacune d'elle. Les marques françaises « CHOCOCOOKIE » portant le numéro d'enregistrement INP1 03.3.228.721 et « CHOCOCOCO » portant le numéro d'enregistrement INPI 03.3.228.719 ont été déposées par les époux V le 3 juin 2003 pour le seul café aromatisé de la classe 30. Toutes deux sont des signes verbaux constitués de la juxtaposition de « choco », abréviation usuelle de chocolat, ainsi que du mot d'origine anglaise intégré dans la langue française « cookie » pour la première, qui désigne un biscuit rond dont la pâte comporte des éclats de chocolats ou de fruits secs, et du mot « coco » pour la seconde, démembrement du mot composé nommant le fruit noix de coco. Chacun des termes employés renvoie explicitement et immédiatement à l'objet auquel il correspond dans la langue française et désigne de manière univoque une saveur précise dans l'esprit du consommateur de boissons aromatisées normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, l'association gustative opérée étant en outre habituelle dans un cas comme dans l'autre. Les termes accolés pris séparément sont ainsi purement descriptifs de la substance du produit enregistré. Faute de résider dans le choix des termes isolés qui sont la désignation nécessaire des arômes ajoutés, l'arbitraire caractérisant la distinctivité ne peut résulter que de l'appréciation globale du néologisme allégué qui en ferait, selon les demandeurs, des dénominations évocatrices. Mais, la juxtaposition opérée ne crée aucun écart perceptible entre la formulation du syntagme déposé et la terminologie usuelle pour désigner le produit enregistré et ne recèle ainsi aucun arbitraire susceptible de caractériser la distinctivité des marques litigieuses, le consommateur moyen ne pouvant déduire de leur lecture ou de leur prononciation que la définition de la substance ou de la qualité du produit qu'il acquière et non l'identification de son origine commerciale. Stricte addition d'éléments descriptifs, les marques françaises « chococookie » et « chocococo » sont purement descriptives de la substance et de la qualité des produits, la réservation de ces éléments communs combinés au profit d'un seul commerçant étant en outre susceptible d'interdire toute activité concurrentielle. En conséquence, le dépôt se limitant au café aromatisé de la classe 30, les marques françaises litigieuses seront annulées pour le café aromatisé de la classe 30, l'examen de leur éventuelle déchéance étant inutile. - Sur les marques communautaires En vertu de l'article 7 du Règlement (CE) N° 207/2009 du 26 février 2009 sur la marque communautaire, sont notamment refusés à l'enregistrement: a) les signes qui ne sont pas conformes à l'article 4 visant les signes susceptibles de représentation graphique et propres à distinguer les services ou les produits d'une entreprise de ceux d'une autre entreprise; b) les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif; c) les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d'indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l'espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l'époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d'autres caractéristiques de ceux-ci; e) les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature même du produit. La SARL FRENCH C S a déposé le 22 août 2012 la marque communautaire « Chococookie » sous le numéro d'enregistrement 11132701 désignant des produits des classes 29,30,32 et 43 puis, le 6 février 2013, la marque communautaire « Chocococo » sous le numéro d'enregistrement 11548542 désignant des produits de la même classe. L'analyse du caractère distinctif des marques françaises déposées par les époux V est applicable aux signes verbaux identiques composant les deux marques communautaires semi-figuratives litigieuses. L'élément verbal de ces dernières est en conséquence descriptif. Ces marques comportent en outre un élément figuratif résidant dans le dessin, au centre et en arrière-plan du signe verbal, d'une tablette de chocolat en diagonale en partie masquée par une demie noix de coco de profil et dont l'intérieur est visible pour la marque « chocococo » et par un cookie de face en partie occulté par l'élément verbal pour la marque « chococookie » selon des couleurs servant à décrire usuellement celles des objets représentés. A son tour, un tel élément, qui n'est que la représentation illustrative des composants des arômes désignés, est, dans un cas comme dans l'autre, purement descriptif de la substance et de la qualité des produits litigieux, soit le café, le thé, le cacao et les succédanés du café relevant de la classe 30, et n'ajoute rien au signe verbal qui est par ailleurs l'élément dominant de la marque complexe. En conséquence, les marques communautaires litigieuses, non distinctives, seront annulées pour le café, le thé, le cacao et les succédanés du café relevant de la classe 30. La présente décision, une fois devenue définitive, sera transmise à l'INPI et à l'OHMI pour inscription sur les registres. 3°) Sur la contrefaçon Conformément à l'article L 716-1 du code de la propriété intellectuelle, l'atteinte portée au droit du propriétaire de la marque constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur. Constitue une atteinte aux droits de la marque la violation des interdictions prévues aux articles L 713-2, L 713-3 et L 713-4 du même code. Et, en application de l'article L 716-5 du code de la propriété intellectuelle, l'action civile en contrefaçon est engagée par le propriétaire de la marque. La nullité des marques privent les demandeurs de leur intérêt à agir en contrefaçon pour les produits visés par la nullité. Aussi, les demandes en contrefaçon de la SARL FRENCH C S et des époux V sont irrecevables pour défaut de droit d'agir au sens des articles 32 et 122 du code de procédure civile. 4°) Sur la concurrence déloyale Connexe à l'action relative aux marques litigieuses, la demande au titre de la concurrence déloyale relève à son tour de la compétence du tribunal de grande instance de PARIS. En vertu des dispositions des articles 1382 et 1383 du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, chacun étant responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence. La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce qui implique qu'un signe qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit sous certaines conditions tenant à l'absence de faute par la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit, circonstance attentatoire à l'exercice paisible et loyal du commerce. L'appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté d'usage, l'originalité et la notoriété de la prestation copiée. La SA WAGRAM FINANCES d'un côté et la SARL FRENCH C S et les époux V de l'autre sont en situation de concurrence pour être des acteurs intervenant sur le même marché français de vente de cafés et boissons chocolatées aromatisées. Le défaut de distinctivité des marques annulées en raison du caractère purement descriptif des signes qui les composent et de la nécessité de leur utilisation pour désigner la qualité des produits auxquels ils s'appliquent implique dans l'esprit du consommateur moyen une indifférence radicale à leur égard dans le choix, autre que celui des arômes, des boissons qu'ils achètent : le signe dépourvu de caractère distinctif n'assurant aucune fonction d'identification, aucune confusion par le consommateur sur l'origine commerciale des produits n'est envisageable. D'ailleurs, ainsi que le soutient la SA WAGRAM FINANCES, son utilisation des termes « choco cookie », notamment liée à l'utilisation d'un sirop à l'arôme chocolat cookie, et « choco'coco » est à son tour descriptive des arômes des boissons qu'elle commercialise et n'est pas destinée, faute d'être faite à titre de marque, à permettre au consommateur de déterminer la provenance commerciale des boissons achetées. En conséquence, aucune faute ne peut être imputée à la SA WAGRAM FINANCES dans le seul usage des signes verbaux constituant les marques annulées, les demandeurs, qui ne justifient d'aucun investissement particulier et ne prouve pas la valeur économique spécifique des dénominations litigieuses, ne démontrant par ailleurs pas le principe du préjudice qu'ils allèguent. Les demandes indemnitaires et d'interdiction présentées par la SARL FRENCH C S et les époux V seront dès lors rejetées. 5°) Sur la procédure abusive En application de l'article 1382 du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. En l'absence d'abus de leur droit d'agir en justice caractérisé par une légèreté blâmable ou une intention de nuire imputable aux demandeurs qui se sont mépris sur la réalité et l'étendue de leurs droits, la demande reconventionnelle de la SA WAGRAM FINANCES sera rejetée. 6°) Sur les demandes accessoires La solution du litige rend sans objet le prononcé de l'exécution provisoire de la présente décision au sens de l'article 515 du code de procédure civile. Succombant au litige, les époux V et la SARL FRENCH C S, dont les demandes au titre des frais irrépétibles seront rejetées, supporteront les entiers dépens de l'instance et seront condamnés in solidum payer à la SA WAGRAM FINANCES la somme de 8.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et mis à la disposition parle greffe le jour du délibéré, Annule l'ordonnance du 16 mai 2013 rendue par président du tribunal de commerce de BORDEAUX ; Annule en conséquence le procès-verbal de constat dressé le 5 juin 2013 par Maître DE D ; Prononce la nullité des marques françaises « CHOCOCOOKIE » n° 3228721 et « CHOCOCOCO » n° 3228719 déposées le 3 juin 2003 par Monsieur Daniel V et Madame Fabienne M épouse V pour le café aromatisé de la classe 30 ; Prononce la nullité des marques communautaires « CHOCOCOOKIE » CTM 011132701 et « CHOCOCOCO » CTM 11548542 respectivement déposées le 22 août 2012 et le 6 février 2013 par la SARL FRENCH C S pour le café, le thé, le cacao et les succédanés du café relevant de la classe 30 : Ordonne la communication de la présente décision, une fois celle-ci devenue définitive, à l'INPI, à l'initiative de la partie la plus diligente, et à l'OHMI, par le greffe, pour inscription sur leurs registres ; Déclare irrecevables les demandes en contrefaçon présentées par Monsieur Daniel V. Madame Fabienne M et la SARL FRENCH C S : Rejette les demandes au titre de la concurrence déloyale et les demandes d'interdiction subséquentes présentées par Monsieur Daniel V. Madame Fabienne M et la SARL FRENCH C S : Rejette la demande au titre de la procédure abusive présentée par la SA WAGRAM FINANCES : Condamne in solidum Monsieur Daniel V. Madame Fabienne M et la SARL FRENCH C S à payer à la SA WAGRAM FINANCES la somme de HUIT MILLE CINQ CENTS EUROS (8 500 €) en application de l'article 700 du code de procédure civile ; Rejette les demandes présentées par Monsieur Daniel V. Madame Fabienne M et la SARL FRENCH C S au titre des frais irrépétibles : Condamne in solidum Monsieur Daniel V. Madame Fabienne M et la SARL FRENCH C S à supporter les entiers dépens de l'instance.