Chronologie de l'affaire
Conseil de Prud'hommes de Paris 04 juin 1992
Cour de cassation 21 juin 1995
Cour d'appel de Paris (21e Chambre, Section A) 09 septembre 1998
Cour de cassation 19 juin 2001

Cour de cassation, Chambre sociale, 19 juin 2001, 98-45621

Mots clés société · france · air · retraites · pourvoi · préjudice · retraite · procédure civile · pension · calcul · demandeurs · succession · salaire · position · compagnie

Synthèse

Juridiction : Cour de cassation
Numéro affaire : 98-45621
Dispositif : Rejet
Décision précédente : Cour d'appel de Paris (21e Chambre, Section A), 09 septembre 1998
Président : Président : M. GELINEAU-LARRIVET conseiller
Rapporteur : Mme Quenson
Avocat général : M. Lyon-Caen

Chronologie de l'affaire

Conseil de Prud'hommes de Paris 04 juin 1992
Cour de cassation 21 juin 1995
Cour d'appel de Paris (21e Chambre, Section A) 09 septembre 1998
Cour de cassation 19 juin 2001

Texte

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

I - Sur le pourvoi n° N 98-45.621 formé par la compagnie nationale Air France, devenue société Air France, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 9 septembre 1998 par la cour d'appel de Paris (21e Chambre, Section A) , en ce qu'il a été rendu au profit :

1 / de M. Robert X..., demeurant ...,

2 / de Mme Hélène Y..., demeurant Résidence Pin Soleil, bâtiment 3, ...,

3 / de M. Gérard Z..., demeurant ...,

4 / de M. Guy A..., demeurant ...,

5 / de M. Gilbert C..., demeurant ...,

6 / de M. André D..., demeurant ...,

7 / de M. Roger F..., demeurant ...,

8 / de M. René H..., demeurant ...,

9 / de Mme Francine J..., demeurant ...,

10 / de M. Guy K..., demeurant Résidence Les Hauts de Bures, 4, rue H. Villa Lobos, 91440 Bures-sur-Yvette,

11 / de M. Pierre K..., demeurant chez Mme XW... Hugues à Chazelle-l'Echo, 21390 Fontangy,

12 / de M. René L..., demeurant Métairie Rouge, En Puignier, 81700 Puylaurens-en-Puignier,

13 / de Mme R..., demeurant à Félines, 82160 Caylus,

14 / de M. Robert O..., demeurant ...,

15 / de M. Robert P..., demeurant 7, Square Charles Péguy, 91250 Saint-Germain-lès-Corbeil,

16 / de M. Ernest Q..., demeurant ...,

17 / de Mme Nicole S..., demeurant ...,

18 / de M. Maxime T..., demeurant Résidence Marco Polo Gabare A, boulevard des Ecureuils, 06210 Mandelieu La Napoule,

19 / de M. Henri V..., demeurant ...,

20 / de M. Robert XX..., demeurant ...,

21 / de M. Gérard XZ..., demeurant ...,

22 / de M. François XA..., demeurant à Data, 46200 Meyronne,

23 / de M. Robert XE..., demeurant ..., 91200

Athis-Mons,

24 / de M. Roger XD..., demeurant ...,

25 / de M. Jacques XF..., demeurant ...,

26 / de M. Jeannot XY..., demeurant ...,

27 / de M. René I..., demeurant ...,

28 / de M. Jean B..., demeurant ...,

29 / de Mme veuve Jeannine G..., agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante de la succession de Roger G..., décédé le 6 mars 1998, demeurant ..., bâtiment Vénus, 94400 Vitry-sur-Seine,

30 / de Mme veuve U..., agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante de la succession de Roger G..., demeurant Moulin de Précy, 58120 Château-Chinon,

31 / de M. Georges XC..., demeurant ...,

32 / de M. Rolland M..., demeurant ...,

33 / de M. Amédée E..., demeurant ..., Les Iris, 06200 Nice,

34 / de M. Jacques XB..., demeurant 29, allée du Parc de la Messinière, 44380 Pornichet,

défendeurs à la cassation ;

II - Sur le pourvoi n° E 98-45.637 formé par :

1 / M. Robert X...,

2 / Mme Hélène Y...,

3 / M. Gérard Z...,

4 / M. Guy A...,

5 / M. Gilbert C...,

6 / M. André D...,

7 / M. Roger F...,

8 / M. René H...,

9 / Mme Francine J...,

10 / M. Guy K...,

11 / M. Pierre K...,

12 / M. René L...,

13 / Mme R...,

14 / M. Robert O...,

15 / M. Robert P...,

16 / M. Ernest Q...,

17 / M. Maurice S..., pris en sa qualité d'héritier de sa mère décédée, Nicole S...,

18 / M. Henri V...,

19 / M. Roger XX...,

20 / M. Gérard XZ...,

21 / M. François XA...,

22 / M. Robert XE...,

23 / M. Roger XD...,

24 / M. Jacques XF...,

25 / M. Jeannot XY...,

26 / M. René I...,

27 / M. Maxime T...,

28 / M. Jean B...,

29 / Mme veuve Jeannine G..., agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante de la succession de Roger G..., décédé,

30 / Mme veuve U..., agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante de la succession de Roger G..., décédé,

31 / M. Georges XC...,

32 / M. Rolland M...,

33 / M. Amédée E...,

34 / M. Jacques XB...,

en cassation du même arrêt, en ce qu'il a été rendu au profit :

1 / de la compagnie Air France, devenue société Air France, dont le siège est ...,

2 / de la compagnie nationale Air France, devenue société Air france, Direction des affaires juridiques, dont le siège est ...,

défenderesses à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 9 mai 2001, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Quenson, conseiller rapporteur, MM. Merlin, Le Roux-Cocheril, Brissier, Finance, Mme Lemoine Jeanjean, conseillers, M. Poisot, Mmes Maunand, Bourgeot, MM. Soury, Liffran, Besson, Mme Nicolétis, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Marcadeux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Quenson, conseiller, les observations de Me Cossa, avocat de la compagnie nationale Air France, devenue société Air France, de la SCP Tiffreau, avocat de MM. X..., Z..., A..., C..., D..., F..., H..., Guy et Pierre K..., L..., O..., P..., Q..., T..., Ménétrier, XX..., XZ..., XA..., XE..., XD..., XF..., XY..., I..., Boy, XC..., Glorieux, E... et XB... et de Mmes Y..., J..., Le Devehat, Martel, G..., ès qualités, et U..., ès qualités, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu leur connexité, joint les pourvois n° E 98-45.637 et N 98-45.621 ;

Attendu que M. X... et 32 autres salariés, qui appartiennent au personnel au sol de la compagnie Air France (devenue société Air France) ont demandé, à des dates variant entre le 1er avril 1984 et le 1er juin 1987 alors qu'ils avaient entre 57 et 60 ans, à être placés en position dite de dégagement ; que, lors de leur admission à la retraite, leur pension a été calculée sur le traitement correspondant à la moyenne des niveaux hiérarchiques des trois dernières années d'activité avant leur mise en dégagement ; qu'estimant qu'elle aurait dû être calculée sur le dernier traitement perçu avant la liquidation de la pension de retraite, ils ont saisi la juridiction prud'homale ; que, par jugement du 4 juin 1992, le conseil de prud'hommes de Paris a condamné la société Air France à verser à chacun d'eux la somme de 7 000 francs de provision sur le préjudice et ordonné une expertise ; que, par arrêt du 22 septembre 1993, la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement concernant M. X..., Mme Y..., M. Z..., M. A..., M. C..., M. D..., M. H..., Mme J..., M. Guy K..., M. Pierre K..., M. L..., Mme N..., M. O..., M. P..., M. XF..., Mme S..., M. V..., M. XX..., M. XZ..., M. XA..., M. XE..., M. XD..., l'a confirmé partiellement en ce qui concerne la provision allouée à M. Q..., M. B..., M. E..., Mme G..., M. G..., M. I..., M. M..., M. U..., M. XY..., M. XC... à l'égard desquels l'expertise est ordonnée avant-dire droit ; que, par arrêt du 21 juin 1995, la Chambre sociale de la Cour de Cassation a déclaré le pourvoi de la compagnie Air France irrecevable en ce qu'il était dirigé contre MM. Q..., B..., E..., G..., I..., Glorieux, U..., XY..., XC... et contre Mme G... ; qu'elle a rejeté le pourvoi pour le surplus ;

Sur la fin de non-recevoir soulevée par la société Air France contre le pourvoi n° E 98-45.637 en ce qu'il a été formé par Mmes G... et U... :

Vu l'article 380-1 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu qu'aux termes de cet article, la décision de sursis rendue en dernier ressort peut être attaquée par la voie du pourvoi en cassation, mais seulement pour violation de la règle de droit ;

Attendu que l'arrêt attaqué a sursis à statuer sur les demandes de Mme G... et U..., en invitant celles-ci à les chiffrer et à préciser leur qualité ainsi qu'à appeler éventuellement en cause les héritiers, sans trancher à leur égard partie du principal ;

D'où il suit que le pourvoi, en ce qu'il a été formé par ces deux personnes, n'est pas recevable ;

Sur le premier moyen

du pourvoi n° W 98-45.621 d'Air France :

Attendu que la société Air France fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 9 septembre 1998) d'avoir rejeté l'exception d'irrecevabilité tirée par elle de ce que les demandes auraient dû être dirigées non contre elle, mais contre la CRAF (Caisse des retraites d'Air France), alors, selon le moyen :

1 / que l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 22 septembre 1993 s'était borné dans son dispositif à confirmer en tout ou partie le jugement du 4 juin 1992 qui s'était lui-même borné sans son dispositif à condamner la société Air France à verser à chaque demandeur une provision de 7 000 francs et à ordonner une expertise ;

que, dès lors, en considérant qu'il résultait de l'arrêt de la Cour de Cassation du 21 juin 1995 ayant rejeté le pourvoi formé contre l'arrêt précité que le bien-fondé en son principe des demandes était définitivement jugé en ce qui concerne certains salariés de telle sorte que seul restait en litige le montant de leur préjudice, la cour d'appel a, en violation de l'article 1351 du Code civil, méconnu les limites de la chose jugée tant par l'arrêt de la Cour de Cassation du 21 juin 1995 que par l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 22 septembre 1993 et le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 4 juin 1992 ;

2 / que du même coup, la cour d'appel a, en violation de l'article 1134 du Code civil, dénaturé son arrêt du 22 septembre 1993 et en tant que de besoin le jugement du 4 juin 1992, en affirmant, contre les termes du dispositif de ces décisions, qu'elles avaient jugé le bien-fondé en son principe des demandes ;

3 / que l'exception d'irrecevabilité d'une demande est une fin de non-recevoir qui peut être invoquée en tout état de cause ; que dès lors, en se prononçant comme elle l'a fait en présence d'une fin de non-recevoir soulevée alors que le litige était toujours pendant devant elle, sa précédente décision ordonnant une expertise n'ayant pas mis fin à l'instance, la cour d'appel a violé l'article 123 du nouveau Code de procédure civile ;

4 / que la Cour de Cassation ayant jugé dans son arrêt du 21 juin 1995 que le nouveau règlement de retraite, en date du 31 décembre 1986, n'a pu avoir d'incidence sur la situation des agents mis en position de dégagement avant le 1er juillet 1987, lesquels devaient voir leur retraite liquidée sur la base de leur coefficient hiérarchique de la réglementation antérieure, il importe peu que la société Air France ait élaboré ce nouveau règlement et d'une façon générale les réglementations de retraite applicables à ses agents ; qu'il importe en revanche que leur application lors de la liquidation des pensions est le fait de la CRAF qui, dotée de la personnalité juridique et de l'autonomie de gestion, a statutairement seule compétence pour y procéder ; que dès lors, en rejetant l'exception d'irrecevabilité des demandes formées contre la société Air France à l'occasion d'un litige portant sur la liquidation des retraites, au motif inopérant que celle-ci élabore dans le détail l'application de la réglementation des retraites et que c'est son conseil d'administration qui a décidé la modification du régime de retraite à l'origine du litige, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 31 et 122 du nouveau Code de procédure civile ;

5 / qu'en ne tirant pas de ses propres constatations relatives à la personnalité juridique et à l'autonomie de gestion de la CRAF les conséquences légales qui s'en évinçaient nécessairement quant à la compétence exclusive de cette dernière pour liquider les retraites litigieuses conformément aux dispositions réglementaires applicables, ce dont il résultait que les demandes devaient être formées contre elle et non contre la société Air France, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;

6 / que la société Air France faisant valoir que l'action ne pouvait être dirigée contre elle, mais devait l'être contre la CRAF, c'était aux demandeurs d'appeler cette dernière dans la cause, fût-ce à titre subsidiaire ; que dès lors, dans la mesure où elle s'est fondée, pour rejeter l'exception d'irrecevabilité soulevée par la société Air France, sur la circonstance inopérante que celle-ci n'avait pas appelé ladite Caisse dans la cause, la cour d'appel a une nouvelle fois privé sa décision de base légale au regard des articles 31 et 122 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel a relevé que la société Air France élabore dans le moindre détail l'application de la réglementation en matière de retraites, que les pouvoirs de la CRAF consistent uniquement à liquider les pensions sur les bases générales définies par Air France et à en assurer le paiement, que la modification du régime de retraites à l'origine du litige a été décidé par le conseil d'administration d'Air France, qu'il n'était pas contesté que c'est Air France qui a demandé d'appliquer aux salariés mis en position de dégagement antérieurement au 1er juillet 1987 le nouveau régime de calcul des retraites en violation de l'avenant du 1er janvier 1987 qui avait maintenu les dispositions antérieures pour les salariés placés dans cette position jusqu'au 1er juillet 1987 inclus ; qu'elle a décidé à bon droit, par ce seul motif, de rejeter la fin de non-recevoir opposée par la société Air France aux demandes des salariés ;

Sur le deuxième moyen

du pourvoi n° N 98-45.621 d'Air France :

Attendu que la société Air France fait encore grief à l'arrêt d'avoir confirmé en son principe le jugement ayant condamné la société Air France à payer diverses sommes à titre de dommages-intérêts à M. X... et 32 autres de ses anciens agents, dit que la société devra payer chaque mois à M. X... et 16 autres une somme d'argent égale à la différence entre la pension de retraite qu'ils perçoivent de la CRAF et celle qu'ils auraient perçue si la pension avait été revalorisée sur la base du niveau hiérarchique qui était le leur au moment de leur admission à la position de dégagement et faisant droit aux demandes de réévaluation du préjudice, condamné la société Air France à payer en deniers ou quittance diverses sommes à M. X... et 25 autres, alors, selon le moyen :

1 / que la liquidation des retraites des agents de la société Air France étant de la seule et unique compétence de la CRAF, la responsabilité de la première ne peut être engagée envers les demandeurs du fait que la seconde n'a pas liquidé leurs pensions de retraite sur la base de la réglementation qui leur était demeurée applicable pour déterminer la coefficient hiérarchique à prendre en compte ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ;

2 / que, selon l'arrêt de la Cour de Cassation du 21 juin 1995, il résulte nécessairement des textes réglementaires applicables que les agents de la société Air France demandeurs à l'action ont droit à une retraite liquidée sur la base de leur coefficient hiérarchique résultant de la réglementation en vigueur antérieurement à celle du 31 décembre 1986, du seul fait qu'ils ont été placés en position de dégagement avant le 1er juillet 1987 ; qu'il s'ensuit qu'un engagement contractuel de la société Air France dans le même sens, à le supposer établi, n'aurait rien ajouté aux droits objectifs que les intéressés tenaient de la simple application de ces textes et aurait donc été inopérant ; que dès lors, en retenant la responsabilité contractuelle de celle-ci sur le fondement du non-respect d'un tel engagement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;

3 / que la cour d'appel a déduit l'existence d'une promesse faite aux demandeurs par la société Air France de maintenir le régime des retraites en vigueur lors de leur mise en position de dégagement, de l'existence d'une "articulation" entre cette position et l'admission à la retraite et de ce qu'un homme raisonnable n'aurait pas compromis le niveau de sa retraite en contrepartie des avantages financiers du dégagement ; que, cependant, selon l'arrêt de la Cour de Cassation du 21 juin 1995, l'"articulation" entre la position de dégagement et l'admission à la retraite résulte de la simple application des textes qui s'imposent objectivement, tandis que la référence à ce "qu'un homme raisonnable" n'aurait pas fait est tout au plus de nature à établir ce que les intéressés pouvaient raisonnablement croire, voire vouloir, lorsqu'ils ont demandé à bénéficier d'une position de dégagement ; qu'en se déterminant ainsi sur des considérations impuissantes à caractériser une quelconque promesse de la société Air France et donc une faute de sa part pour ne l'avoir pas tenue, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du Code civil ;

Mais attendu, d'abord, que la réponse au premier moyen rend inopérante la première branche de ce moyen ;

Et attendu, ensuite, que, sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi et de manque de base légale, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve par la cour d'appel qui a constaté l'engagement de la société Air France de maintenir aux salariés le régime de retraites en vigueur lors de leur mise en position de dégagement ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le premier moyen

du pourvoi n° E 98-45.637 des salariés :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté partiellement les personnels au sol de la société Air France de leur demande en paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par l'inexactitude de leur pension de retraite à l'issue de la période de dégagement et par le retard apporté au versement de la différence due, alors, selon le moyen :

1 / qu'il résulte des constatations de l'expert judiciaire que "le G2 mensuel est extrait d'un document dénommé Gesper qui est établi par la compagnie Air France (...) Des documents fournis, il apparaît que Air France et la Caisse de retraite appliquent le G2 au titre du calcul de la pension de dégagement ; il est donc logique d'utiliser également le G2 pour le calcul de la pension de retraite" ; qu'ainsi, l'expert judiciaire avait constaté l'existence et l'application du système de référence "Gesper", comportant le "G2" ; qu'en omettant de s'en expliquer, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 2 de l'annexe III de la réglementation du personnel au sol, applicable aux demandeurs pour avoir pris effet le 1er avril 1984 avant leur demande de bénéfice du dégagement des effectifs ;

2 / qu'au surplus, dans leurs conclusions d'appel, les demandeurs soutenaient que "le G2 mensuel qui se trouve reporté sur tous les documents de la compagnie Air France, n'est autre que le moyen de calculer le salaire à partir d'un document qui s'intitule Gesper, qui signifie gestion personnel ; que la compagnie Air France édite à chaque modification salariale un document intitulé "Gesper rémunération mensuelle brute" et qui donne le montant du salaire brut mensuel de base en tenant compte de la catégorie, de l'échelle et du coefficient hiérarchique ; que ce document qui permet de connaître le salaire de référence à partir duquel on doit calculer la pension de retraite de chaque agent puisqu'il s'agit de la référence salariale (...) Pour des raisons incompréhensibles, la compagnie Air France, qui utilise le Gesper dans tous ses calculs de salaire, conteste que cette référence puisse s'appliquer pour le calcul des retraites ; et pourtant, c'est toujours le Gesper qu'elle utilise comme base de calcul pour déterminer tant la pension mensuelle de dégagement que la pension mensuelle de retraite" ;

qu'en omettant de répondre à ce moyen pertinent, en ce qu'il démontrait l'application par la société Air France du "Gesper", la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

3 / qu'au reste, en omettant de s'expliquer sur les bases de calcul de préjudice prises en compte par l'expert judiciaire, à l'effet de vérifier, notamment, si, ce que contestait les demandeurs dans leurs conclusions demandant le bénéfice du "supplément Gesper" évoqué au rapport d'expertise, le traitement de base retraite retenu avait bien eu pour assiette le dernier traitement mensuel versé au titre du dégagement et calculé en fonction du dernier niveau hiérarchique atteint lors de la liquidation de la retraite et si la durée du dégagement avait bien été validée au titre de la retraite, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil et de l'article 2 de l'annexe III de la réglementation du personnel au sol, applicable aux salariés demandeurs pour avoir pris effet le 1er avril 1984 avant leur demande de bénéfice du dégagement des effectifs ;

4 / qu'enfin, dans leurs conclusions d'appel, les demandeurs soutenaient que "la notification, envoyée par la compagnie Air Franceà chaque agent, de la pension de dégagement à l'époque de son départ en retraite (...) contient des éléments qui ne changeront pas (...) et qui permettent de connaître à la fois le montant du traitement de base à l'époque du départ en dégagement (v. le G2 du Gesper à I'époque) et le traitement de base à retenir pour le calcul de la pension de retraite (v. Ie G2 du Gesper applicable à la date du départ en retraite)" ; que, par ailleurs, le dossier de plaidoirie comportait autant de fiches de calculs que de salariés demandeurs, détaillant le montant de la pension de retraite exactement calculée, en prenant en compte le G2 du Gesper applicable, non pas à la date de prise d'effet du dégagement et augmenté d'éléments applicables à l'ensemble du personnel, mais à la date d'expiration du dégagement et de prise d'effet de la retraite ; qu'en omettant de s'expliquer sur ce qui précède, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil et de l'article 2 de l'annexe III de la réglementation du personnel au sol, applicable aux salariés demandeurs pour avoir pris effet le 1er avril 1984 avant leur demande de bénéfice du dégagement des effectifs ;

5 / qu'il résulte des propres constatation de l'arrêt attaqué que "le paiement différé d'un capital au lieu et place d'une rente mensuelle leur cause" (aux salariés demandeurs) "un préjudice non totalement réparé par l'octroi des intérêts de retard" ; qu'en se bornant à déclarer, par voie de disposition générale et forfaitaire, que "ce préjudice sera suffisamment réparé en évaluant les dommages-intérêts au 30 septembre 1998 alors, qu'ils devaient l'être au 9 septembre 1998 et en arrondissant au franc supérieur toutes les sommes d'argent prises en compte dans les calculs", la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard du principe de la réparation intégrale du préjudice et de l'article 1382 du Code civil ;

6 / qu'au surplus, en fixant le point de départ des intérêts légaux "à compter de la date du jugement entrepris à concurrence des sommes allouées par les premiers juges et à compter de ce jour pour le surplus"; quand les intérêts légaux étaient dus à compter de la première échéance erronée de pension de retraite ou, le cas échéant, de la mise en demeure ou, à défaut, de la citation introductive d'instance prud'homale, la cour d'appel a violé les articles 1147, 1153 et 1153-1 du Code civil ;

Mais attendu, d'abord, qu'appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments qui lui étaient soumis, la cour d'appel a constaté qu'il n'était pas établi que le système de référence Gesper ait été utilisé pour le calcul des retraites ;

Attendu, ensuite, que l'appréciation du montant du préjudice par les juges du fond est souveraine ;

Attendu, enfin, que la condamnation à des dommages-intérêts emporte intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n'en décide autrement ;

Qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

:

Déclare IRRECEVABLE le pourvoi n° E 98-45.637 en ce qu'il a été formé par Mmes G... et U... ;

REJETTE les pourvois pour le surplus ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette l'ensemble des demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf juin deux mille un.