Vu la procédure suivante
:
Par une requête, enregistrée le 30 juillet
2024, la société par actions simplifiée (SAS) Damin soumet au juge des référés un litige, sur le fondement des dispositions des articles
L. 551-1 et
L. 551-2 du code de justice administrative, relatif à la procédure, lancée par le département de la Côte-d'Or, de passation du lot
n° 1 du marché ayant pour objet la rénovation du pôle vie scolaire et l'aménagement d'une salle multimédia au sein du bâtiment C - externat du collège La Croix des Sarrasins à Auxonne dans la Côte-d'Or, et demande, en outre, au juge des référés d'enjoindre au département de la Côte-d'Or de différer la signature du contrat jusqu'au terme de la procédure.
Elle soutient que :
- son offre pour le lot
n° 1 n'a pas été retenue, alors que son prix était le plus bas, qu'il lui a été répondu par téléphone qu'elle avait perdu trois points sur le critère technique en l'absence de mention de la fréquence d'enlèvement des bennes à déblais et que cette question ne figurait ni dans le règlement de consultation ni sur la trame du mémoire technique ;
- elle n'a pas eu de réponse à sa demande écrite du 29 juillet
2024 des motifs de rejet de son offre.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2
août 2024, le département de la Côte-d'Or conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- à titre principal, la requête est irrecevable, dès lors que les seules conclusions à fin d'injonction présentées sont elles-mêmes dépourvues d'objet, eu égard aux dispositions de l'article
L. 551-4 du code de justice administrative ;
- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.
La requête a été communiquée le 31 juillet
2024 à la société à responsabilité limitée Entreprise Argenton Bernard, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la commande publique ;
- le code de justice administrative.
Le président du tribunal a désigné M. Hugez, en qualité de juge des référés, en vertu des dispositions de l'article
L. 511-2 du code de justice administrative, par une décision du 1erseptembre 2023.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique, tenue en présence de Mme Lelong, greffière :
- le rapport de M. Hugez, juge des référés,
- les observations de Mme B et de M. A, représentant le département de la Côte-d'Or, qui s'en rapportent au mémoire produit.
Considérant ce qui suit
:
1. Le 12 février 2024, le département de la Côte-d'Or a lancé une consultation, selon la procédure adaptée, en vue de la passation d'un marché, décomposé en six lots, ayant pour objet la rénovation du pôle vie scolaire et l'aménagement d'une salle multimédia au sein du bâtiment C - externat du collège La Croix des Sarrasins à Auxonne dans la Côte-d'Or. Le 26 juillet
2024, le département a informé la société par actions simplifiée (SAS) Damin que son offre, s'agissant du lot
n° 1, en sous-traitance avec la société D3, avait été rejetée et que ce lot avait été attribué à la société Argenton, en sous-traitance avec les entreprises Valgo et Labeaune. La société Damin, eu égard à la portée des moyens soulevés, doit être regardée comme demandant au juge des référés, sur le fondement des articles
L. 551-1 et
L. 551-2 du code de justice administrative, d'annuler partiellement la procédure de passation du marché. Elle demande en outre au juge des référés d'enjoindre au département de la Côte-d'Or de différer la signature du contrat jusqu'au terme de la procédure.
Sur les conclusions à fin de suspension de la signature du marché :
2. Aux termes de l'article
L. 551-4 du code de justice administrative : " Le contrat ne peut être signé à compter de la saisine du tribunal administratif et jusqu'à la notification au pouvoir adjudicateur de la décision juridictionnelle. ".
3. Il résulte des dispositions précitées de l'article
L. 551-4 du code de justice administrative que les conclusions de la requête tendant à ce qu'il soit enjoint au département de la Côte-d'Or de différer la signature du contrat jusqu'au terme de la procédure sont dépourvues d'objet.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
4. D'une part, aux termes du premier alinéa de l'article
L. 551-1 du code de justice administrative : " Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu'il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par les pouvoirs adjudicateurs de contrats administratifs ayant pour objet l'exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d'exploitation, la délégation d'un service public ou la sélection d'un actionnaire opérateur économique d'une société d'économie mixte à opération unique. ". Aux termes du I de l'article
L. 551-2 du même code : " Le juge peut ordonner à l'auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre l'exécution de toute décision qui se rapporte à la passation du contrat, sauf s'il estime, en considération de l'ensemble des intérêts susceptibles d'être lésés et notamment de l'intérêt public, que les conséquences négatives de ces mesures pourraient l'emporter sur leurs avantages. / Il peut, en outre, annuler les décisions qui se rapportent à la passation du contrat et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations. ".
5. Il appartient au juge administratif, saisi en application de l'article
L. 551-1 du code de justice administrative, de se prononcer sur le respect des obligations de publicité et de mise en concurrence incombant à l'administration. En vertu de cet article, les personnes habilitées à agir pour mettre fin aux manquements du pouvoir adjudicateur à ses obligations de publicité et de mise en concurrence sont celles qui sont susceptibles d'être lésées par de tels manquements. Il appartient, dès lors, au juge des référés précontractuels de rechercher si l'opérateur économique qui le saisit se prévaut de manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l'avoir lésé ou risquent de le léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant un opérateur économique concurrent.
6. D'autre part, aux termes du premier alinéa de l'article
L. 2152-7 du code de la commande publique : " Le marché est attribué au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l'offre économiquement la plus avantageuse sur la base d'un ou plusieurs critères objectifs, précis et liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution. Les modalités d'application du présent alinéa sont prévues par voie réglementaire. ". Aux termes de l'article
R. 2152-11 du même code : " Les critères d'attribution ainsi que les modalités de leur mise en œuvre sont indiqués dans les documents de la consultation. ".
7. Il résulte des dispositions précitées que, pour assurer le respect des principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, l'information appropriée des candidats sur les critères d'attribution d'un marché public est nécessaire dès l'engagement de la procédure d'attribution. Le pouvoir adjudicateur est ainsi tenu d'informer dans les documents de consultation les candidats des critères de sélection des offres ainsi que de leur pondération ou hiérarchisation. S'il décide, pour mettre en œuvre ces critères de sélection des offres, de faire usage de sous-critères également pondérés ou hiérarchisés, il doit porter à la connaissance des candidats la pondération ou la hiérarchisation de ces sous-critères dès lors que, eu égard à leur nature et à l'importance de cette pondération ou hiérarchisation, ils sont susceptibles d'exercer une influence sur la présentation des offres par les candidats et doivent, en conséquence, être eux-mêmes regardés comme des critères de sélection. En revanche, il n'est pas tenu d'informer les candidats de la méthode de notation des offres lorsqu'il se borne à mettre en œuvre les critères annoncés.
8. En premier lieu, il résulte de l'instruction que les candidats ont été informés des trois critères, affectés respectivement de 20, 10 et 10 points, que le département de la Côte-d'Or a déterminés pour l'appréciation de la valeur technique des offres, pondérée à 40 sur 100, à savoir les " dispositions spécifiques en matière de sécurité vis-à-vis du personnel du collège, des professeurs et des collégiens ", les " dispositions spécifiques de limitation des nuisances au collège pendant les heures de fonctionnement du collège " et les " dispositions spécifiques prises par l'entrepreneur pour assurer la gestion de tous les déchets et la propreté du chantier ". Il résulte également de l'instruction que, s'agissant du dernier de ces trois critères, le département a notamment évalué la fréquence d'évacuation des déchets, et a retiré trois points à l'entreprise requérante, en l'absence d'éléments sur ce point dans son mémoire technique. En procédant ainsi, dès lors que la fréquence d'enlèvement des déchets est un des éléments constitutifs de la gestion des déchets d'un chantier, a fortiori dans le cas de déchets potentiellement dangereux, comme ceux d'un marché de curage et de désamiantage, le département de la Côte-d'Or n'a pas modifié ses attentes définies, dans le règlement de la consultation et le cadre de mémoire technique, par les critères de sélection et n'a donc pas évalué les offres sur un nouveau critère distinct du troisième critère précité, mais s'est borné à prendre, au rang des éléments d'appréciation de ce critère, la fréquence d'enlèvement des déchets. Le moyen tiré de ce que le département de la Côte-d'Or aurait méconnu le principe de transparence des procédures et le principe d'égalité de traitement entre les candidats doit donc être écarté.
9. En deuxième lieu, le moyen tiré de ce que la société requérante n'aurait pas reçu de réponse à sa demande d'explication écrite du 29 juillet
2024 est, en tout état de cause, dépourvu d'objet, dès lors qu'une telle réponse lui a été adressée le 30 juillet
2024 et lui a été, au demeurant, communiquée dans le cadre de la présente instance.
10. Il résulte de ce qui précède que la société par actions simplifiée Damin n'est pas fondée à demander l'annulation partielle de la procédure de passation, par le département de la Côte-d'Or, du lot
n° 1 " démolitions - curage - désamiantage " du marché tendant à la rénovation du pôle vie scolaire et à l'aménagement d'une salle multimédia au sein du bâtiment C - externat du collège La Croix des Sarrasins à Auxonne.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de la société par actions simplifiée Damin est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la société par actions simplifiée Damin, au département de la Côte-d'Or et à la société à responsabilité limitée Entreprise Argenton Bernard.
Fait à
Dijon, le
13 août 2024.
Le juge des référés,
I. Hugez
La République mande et ordonne au préfet de la Côte-d'Or, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,