Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SARL Floraloc a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009 et du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2011.
Par un jugement n° 1306030 du 18 décembre 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 1er février 2016, la SARL Floraloc, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 décembre 2015 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la proposition de rectification du 28 juin 2012 est insuffisamment motivée notamment en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée ;
- il n'a pas été donné suite à sa demande de rencontre du supérieur hiérarchique du vérificateur ;
- au cours de la vérification de comptabilité, l'administration fiscale n'a pas fait preuve de discernement et de loyauté ;
- la vérification de comptabilité et la reconstitution de son chiffre d'affaires n'ont pas été effectuées dans le respect du contradictoire ;
- le procès-verbal de défaut de présentation de comptabilité est irrégulier en la forme ;
- elle justifie des charges de loyer, de véhicules et d'honoraires de gestion et d'animation ;
- les pénalités sont " exorbitantes " et le caractère intentionnel des infractions n'est pas démontré.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juin 2016, le ministre chargé du budget conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Floraloc ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Haïli,
- et les conclusions de M. Maury, rapporteur public.
1. Considérant que la SARL Floraloc relève appel du jugement du 18 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009 et du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2011 à la suite d'une vérification de comptabilité de son activité de location de machines et d'équipements à destination d'un groupe de sociétés ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article
L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter, outre la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base des redressements, ceux des motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés qui sont nécessaires pour permettre au contribuable de formuler ses observations de manière entièrement utile ;
3. Considérant que la proposition de rectification du 28 juin 2012, dont la société n'établit pas, à supposer qu'elle ait entendu soulever ce moyen, que l'accusé de réception du 30 juin suivant aurait été signé par une personne n'ayant pas qualité pour ce faire, énonce les motifs de droit et de fait qui fondent les chefs de rectification, indique la nature des impositions visées, les années et la période en cause et mentionne les irrégularités dont le vérificateur a estimé qu'était entachée la comptabilité de l'entreprise ; que, s'agissant plus particulièrement des rectifications en matière de taxe sur la valeur ajoutée, le vérificateur a exposé précisément les règles régissant le droit à déduction, le fait générateur et l'exigibilité de cette taxe ainsi que les motifs des rehaussements ; que, dans ces conditions, la proposition de rectification, qui a permis au contribuable de formuler ses observations de manière utile et contradictoire, satisfait aux exigences de motivation découlant des dispositions précitées de l'article
L. 57 du livre des procédures fiscales ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article
L. 10 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable : " (...) Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié : les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration " et que le paragraphe 5 du chapitre III de cette charte précise : " Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur principal (...). Si après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur départemental qui est un fonctionnaire de rang élevé spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur " ;
5. Considérant qu'en réponse à la proposition de rectification du 28 juin 2012, la SARL Floraloc a adressé à l'administration fiscale, par courrier du 25 août 2012, des observations en indiquant qu'elle entendait " exercer tous recours utiles auprès de toutes instances et personnes afin (...) de contester utilement les rectifications et les sanctions proposées " et, en réplique à la réponse aux observations du contribuables, un courrier du 16 octobre 2012 dans lequel elle indiquait " regretter les termes de votre courrier (...) qui ne me semble pas prendre en compte certaines de mes remarques ce qui m'amène nécessairement à les maintenir et à les réitérer par la présente " ; que, contrairement à ce que soutient la société requérante, ces courriers ne sauraient, par leur formulation, être regardés comme demandant que le différend l'opposant à l'administration fiscale soit porté devant l'interlocuteur départemental ; que, par suite, le moyen par lequel la société soutient que la procédure d'imposition aurait été viciée, faute pour l'administration fiscale d'avoir donné suite à une telle demande, doit être écarté ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article
L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables (...) " et qu'aux termes de l'article
L. 13 A du même livre : " Le défaut de présentation de la comptabilité est constaté par procès-verbal que le contribuable est invité à contresigner (...) " ;
7. Considérant, d'une part, qu'au terme des opérations de vérification de comptabilité, l'administration fiscale a dressé, le 18 juin 2012, un procès-verbal de défaut de présentation de comptabilité ; qu'en se bornant à alléguer que l'administration fiscale " se doit d'appliquer les textes fiscaux avec discernement et se doit d'apprécier les situations avec impartialité, réalisme et cohérence ", la société requérante, qui n'a présenté ni comptabilité ni pièces justificatives, n'assortit pas ses moyens tirés du déroulement illégal de la vérification de comptabilité et de ce que l'administration fiscale aurait fait preuve de manque de discernement et de loyauté de précisions suffisantes pour permettre au juge de l'impôt d'en apprécier la pertinence ; que les paragraphes 1 et 2 de la documentation administrative 13 J-431 à jour au 10 août 1998, dont la société entend se prévaloir pour soutenir que l'administration fiscale n'a pas " confronté à la réalité les écritures déclaratives ", traitent de questions relatives à la procédure d'imposition et ne peuvent être regardés comme comportant une interprétation de la loi fiscale au sens de l'article
L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
8. Considérant, d'autre part, que l'établissement d'un procès-verbal en application des dispositions de l'article
L. 13 A du livre des procédures fiscales ne constitue pour le vérificateur qu'une simple faculté, destinée à lui faciliter l'administration de la preuve ; que d'éventuelles irrégularités entachant ce procès-verbal au regard des exigences prévues par les dispositions précitées de l'article
L. 13 A, si elles privent celui-ci de sa valeur probante, sont sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ; qu'au demeurant, le procès-verbal en cause a été contresigné par le gérant de la société ; qu'aucune disposition du livre des procédures fiscales n'impose sa rédaction immédiate après la constatation du défaut de présentation de la comptabilité et la mention de l'heure de son édiction ; que, par suite, les dispositions de l'article
L. 13 A du livre des procédures fiscales n'ont pas été méconnues ; qu'en outre, les termes du paragraphe 8 de la doctrine 4 G-3342 à jour au 25 juin 1998 ne comportent aucune interprétation formelle de la loi fiscale, au sens et pour l'application de l'article
L. 80 A du livre des procédures fiscales, dont la société pourrait se prévaloir ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la SARL Floraloc a été assujettie au titre des années 2008 et 2009 :
9. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article
39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) " ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article
38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;
10. Considérant, en premier lieu, qu'en l'absence de production de toute pièce justificative telle qu'un bail, la société requérante ne justifie pas que la somme de 6 000 euros correspondrait au montant d'un loyer annuel qui aurait été versé pour la disposition d'un établissement administratif et serait déductible ; que la circonstance que la charge représentée par le loyer annuel de 12 000 euros versé par la société pour l'occupation de son siège social n'a pas été remise en cause par l'administration fiscale est, à cet égard, indifférente dès lors que cette charge avait été quant à elle assortie de justificatifs suffisants ;
11. Considérant, en deuxième lieu, que, indépendamment des possibilités de refacturation de certaines charges dans un groupe informel de sociétés, que l'administration fiscale n'a pas entendu remettre en cause, la société requérante ne justifie pas les charges afférentes à l'utilisation de différents véhicules, les documents comptables qu'elle produit n'étant pas accompagnés de justificatifs à l'exception de la copie de la carte grise d'un véhicule dont elle n'est pas propriétaire et dont il n'est pas établi que les charges lui auraient été refacturées ;
12. Considérant, en troisième lieu, que la société requérante ne verse à l'instance aucun document de nature à justifier la réalité des frais de prestation intra-groupe liés à la rémunération des prestations intellectuelles de développement et d'animation qu'elle aurait engagés ; qu'il en va de même s'agissant de frais de " greffe " allégués par la société ; que, par suite, l'administration fiscale a réintégré à bon droit le montant de ces charges non justifiées dans les résultats imposables de la société ;
En ce qui concerne le rappel de taxe sur la valeur ajoutée réclamé à la SARL Floraloc au titre de la période du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2011 :
13. Considérant qu'aux termes de l'article
271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération (...) " ; qu'aux termes de l'article
272 du même code : " (...) 2. La taxe sur la valeur ajoutée facturée dans les conditions définies au 4 de l'article 283 ne peut faire l'objet d'aucune déduction par celui qui a reçu la facture (...) " et qu'aux termes de l'article
283 du même code : " (...) 4. Lorsque la facture ne correspond pas à la livraison d'une marchandise ou à l'exécution d'une prestation de services, ou fait état d'un prix qui ne doit pas être acquitté effectivement par l'acheteur, la taxe est due par la personne qui l'a facturée (...) " ;
14. Considérant qu'en l'absence de factures relatives aux dépenses que la société requérante soutient avoir engagées, l'administration a pu légalement refuser la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée pratiquée par la société, qui ne peut utilement demander cette déduction au titre du seul réalisme économique ;
Sur l'application des majorations de 40 % pour manquement délibéré au rappel de taxe sur la valeur ajoutée :
15. Considérant qu'aux termes de l'article
1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " et qu'aux termes de l'article
L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée (...), la preuve de la mauvaise foi (...) incombe à l'administration " ;
16. Considérant que l'administration fiscale a appliqué au rappel de taxe sur la valeur ajoutée collectée à raison de la discordance de chiffre d'affaires constatée au titre de la période du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2011 pour un montant de 21 638 euros correspondant à douze écritures mensuelles, la majoration pour manquement délibéré prévue par les dispositions précitées de l'article
1729 du code général des impôts ; qu'en indiquant sans être sérieusement contredite, d'une part, que la société requérante avait inscrit à un compte courant d'associé ouvert dans ses propres écritures au nom de la SARL Magic Flower le montant de prestations facturées à cette dernière et, d'autre part, que le gérant de la société requérante était aussi celui de la SARL Magic Flower et ne pouvait ignorer l'existence des prestations facturées et de la taxe sur la valeur ajoutée exigible, l'administration fiscale établit la volonté délibérée de la société d'éluder l'impôt et justifie avoir appliqué à bon droit les pénalités pour manquement délibéré dont le taux légal de 40 % ne présente pas un caractère exagéré ;
17. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SARL Floraloc n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL Floraloc est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Floraloc et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.
Délibéré après l'audience du 18 mai 2017, où siégeaient :
- M. Bédier, président,
- Mme Paix, président assesseur,
- M. Haïli, premier conseiller.
Lu en audience publique le 1er juin 2017.
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N° 16MA00377