Cour d'appel de Versailles, Chambre 3, 12 mars 2020, 18/07547

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Versailles
  • Numéro de pourvoi :
    18/07547
  • Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
  • Décision précédente :tribunal de grande instance de Nanterre, 3 septembre 2010
  • Lien Judilibre :https://www.courdecassation.fr/decision/5fd9436ecc4feb2a2f2c16fe
  • Président : Madame Marie-José BOU
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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2022-01-20
Cour d'appel de Versailles
2020-03-12
Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
2018-10-18
tribunal de grande instance de Nanterre
2010-09-03

Texte intégral

COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 58E 3e chambre

ARRET

N° CONTRADICTOIRE DU 12 MARS 2020 N° RG 18/07547 N° Portalis DBV3-V-B7C-SYC3 AFFAIRE : F..., L... S... C/ CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE PAU ... Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Octobre 2018 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE N° Chambre : 2ème N° RG : 15/15305 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : Me Frédéric LE BONNOIS de la SELAS CABINET REMY LE BONNOIS Me Jean-michel HOCQUARD Me Philippe RAVAYROL Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS LE DOUZE MARS DEUX MILLE VINGT, La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : Monsieur F..., L... S... né le [...] à BORDEAUX (33) de nationalité Française [...] [...] [...] Représentant : Me Frédéric LE BONNOIS de la SELAS CABINET REMY LE BONNOIS, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0299 APPELANT **************** 1/ CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE PAU [...] [...] prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège Représentant : Me Jean-michel HOCQUARD, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0087 - N° du dossier 330518 INTIMEE 2/ SA MMA IARD N° SIRET : 440 048 882 [...] [...] prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège venant aux droits de la société COVEA FLEET 3/ SA MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES N° SIRET : 775 652 126 [...] [...] venant aux droits de la société COVEA FLEET prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège Représentant : Me Philippe RAVAYROL, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0155 - N° du dossier 2008142 INTIMEES 4/ SARL S O N D E F O R (SONDAGES ET FORAGES) RCS n° 387 613 334 [...] [...] [...] prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 1860900 Représentant : Me Stéphane PILON de la SELARL JOUTEUX CARRE-GUILLOT PILON, Plaidant, avocat au barreau de POITIERS INTIMEE **************** Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 Janvier 2020 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Françoise BAZET, Conseiller chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Marie-José BOU, Président, Madame Françoise BAZET, Conseiller, Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller, Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT, --------- FAITS ET PROCÉDURE Le 19 mars 2004 sur un chantier HLM sur la commune d'Urrugne (64) , M. S... , né le [...] , a été grièvement blessé par la chute du mât d'une foreuse appartenant à la société Fondefor Loc, louée à la société Sondefor. Il s'agit d'un accident du travail. La société Sondefor bénéficie d'une assurance automobile souscrite auprès de la société Covea Fleet (devenue en cours de procédure les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles). Le 15 septembre 2009, le tribunal correctionnel de Bayonne a notamment dit que la société Covea Fleet devait garantir la société Sondefor des conséquences de cet accident de la circulation. Par jugement du 3 septembre 2010, le tribunal de grande instance de Nanterre a : - dit que M. S... est bien fondé à solliciter auprès de la société Covea Fleet la réparation intégrale des conséquences dommageables de l'accident survenu le 19 mars 2004 sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985, - débouté M S... de sa demande de provision, - mis la société Sondefor et la société Covea Risks hors de cause, - sursis à statuer sur la liquidation des préjudices de M. S... , - sursis à statuer sur la demande de la CPAM de Bayonne. Par jugement de ce même tribunal du 28 mars 2013, le docteur P... a été désigné en qualité d'expert. L'expert a procédé à sa mission et a rendu son rapport le 22 décembre 2014. Au vu de ce rapport, par actes du 12 novembre 2015, M S... a assigné la société Sondefor, la MMA Iard et la MMA Iard Assurances Mutuelles ( les MMA) et la CPAM de Bayonne devant le tribunal de grande instance de Nanterre. Par jugement du 18 octobre 2018, le tribunal a : - rejeté la demande de mise hors de cause de la société Sondefor, - condamné in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles venant aux droits de Covea Fleet à payer à M S... les sommes suivantes, à titre de réparation de son préjudice corporel, provisions non déduites, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour : ' dépenses de santé restées à charge : 345,28 euros ' frais divers : 16 363,25 euros ' tierce personne temporaire : 96 188 euros ' tierce personne permanente : 510 468 euros ' déficit fonctionnel temporaire : 40 687 euros ' souffrances endurées : 40 000 euros ' préjudice esthétique temporaire : 3 000 euros ' déficit fonctionnel permanent : 106 137,94 euros ' préjudice esthétique : 6 000 euros ' préjudice d'agrément : 6 000 euros ' préjudice sexuel : 10 000 euros ' préjudice d'établissement : 10 000 euros - réservé l'aménagement du logement, - dit que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1154 du code civil, - condamné in solidum les MMA à payer à M S... les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant de l'offre effectuée le 22 mai 2015, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, à compter du 22 mai 2015 et jusqu'au 10 juin 2015, - condamné in solidum les MMA à payer à la CPAM de Bayonne la somme de 651 029,27 euros avec intérêts au taux légal sur la somme de 640 098,12 euros à compter du 1er septembre 2016, date de la première demande, et pour le surplus à compter du 22 septembre 2017 ; ces intérêts formant anatocisme à l'expiration d'une année, - condamné in solidum les MMA aux dépens qui comprendront les frais d'expertise, - condamné in solidum les MMA à payer à M. S... la somme de 4 000 euros, et à la CPAM la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, - condamné in solidum les MMA à payer l'indemnité forfaitaire de gestion de 1 055 euros à la CPAM de Bayonne, - ordonné l'exécution provisoire du jugement à concurrence de la moitié de l'indemnité allouée et en totalité en ce qui concerne les frais irrépétibles et les dépens, - rejeté pour le surplus. M. S... a interjeté appel de ce jugement par acte du 6 novembre 2018. Il demande à la cour par dernières écritures du 26 juin 2019, de : - le juger recevable et bien fondé en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions en cause d'appel, - rejeter les demandes, fins et conclusions des MMA, - confirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum les MMA à lui payer les sommes suivantes : ' dépenses de santé restées à charge : 345,28 euros ' frais divers, sans les frais de recouvrement : 16 363,25 euros ' souffrances endurées: 40 000 euros ' préjudice esthétique temporaire : 3 000 euros ' préjudice esthétique : 6 000 euros ' préjudice d'agrément : 6 000 euros ' préjudice sexuel : 10 000 euros ' article 700 du code de procédure civile : 4 000 euros - confirmer le jugement en ce qu'il a réservé l'aménagement du logement, - infirmer le jugement pour le surplus et condamner in solidum les MMA à lui payer les indemnités suivantes : ' frais de recouvrement : 513,76 euros ' tierce personne avant consolidation : 128 250 euros ' tierce personne après consolidation : 747 461,52 euros ' pertes de revenus après consolidation : 558 024,44 euros (à titre subsidiaire, cette indemnité sera fixée à 302 092,64 euros) ' déficit fonctionnel temporaire : 48 825 euros ' déficit fonctionnel permanent : 163 400 euros ' préjudice d'établissement : 30 000 euros ' article 700 du code de procédure civile en cause d'appel : 15 000 euros ' les entiers dépens avec recouvrement direct - condamner les MMA à lui payer les intérêts légaux sur la totalité des sommes allouées au titre du préjudice subi à compter de la première demande, soit par conclusions notifiées par RPVA le 5 septembre 2016, ces intérêts formant anatocisme à l'expiration d'une année conformément à l'article 1343-2 du code civil, - condamner les MMA à lui payer les intérêts au double du taux légal sur la totalité des indemnités que fixera la cour, en ce comprise la créance des organismes sociaux, provisions non déduites, à compter du 20 11 2004, jusqu'à ce que l'arrêt à intervenir devienne définitif, par application des articles L211-9 et L211-13 du code des assurances, - juger que la sanction prononcée au titre du doublement des intérêts légaux sera assortie de l'anatocisme à compter du 20 novembre 2005, - statuer ce que de droit sur les demandes de la société Sondefor à l'égard des MMA, - rendre l'arrêt à intervenir commun à la CPAM de Bayonne et à PRO BTP. Par dernières écritures du 29 avril 2019, les MMA demandent à la cour de : - statuant sur la recevabilité de l'appel, au fond, le dire mal fondé, - les recevoir en leur appel incident, les y déclarer recevables et bien fondées, - réformer le jugement en ce qu'il a statué sur les postes de préjudice de la tierce personne temporaire et permanente et du préjudice d'établissement, Statuant à nouveau, - débouter M S... de sa demande présentée au titre de la somme de 513,76 euros concernant la note de frais du cabinet basque de recouvrement, - juger que le besoin d'assistance d'une tierce personne ne saurait excéder 3 heures par semaine, l'expert judiciaire ayant surévalué ce besoin en le portant à 15 heures par semaine, - juger que le coût horaire de la tierce personne ne saurait excéder 15 euros de l'heure, - débouter M S... de sa demande de réformation du jugement présentée au titre de la perte de gains professionnels futurs, - débouter M S... de sa demande de réformation du jugement présentée au titre du déficit fonctionnel temporaire, - débouter M. S... de sa demande de réformation du jugement présentée au titre du déficit fonctionnel permanent, - juger que M S... ne justifie pas de l'existence d'un préjudice d'établissement, - débouter M S... de sa demande de réformation du jugement présentée au titre des sanctions de l'article L 211-13 du code des assurances, - subsidiairement sur ce chef, - juger que le délai de 8 mois pour présenter une offre d'indemnisation provisionnelle, à compter de l'accident, n'a pu commencer à courir au plus tôt qu'à compter du jugement rendu le 15 septembre 2009 par le tribunal correctionnel de Bayonne, - juger que la pénalité de l'article L211-13 du code des assurances sera réduite par la cour d'appel en raison de circonstances non imputables à l'assureur, - juger que la pénalité de l'article L211-13 du code des assurances ne saurait courir à l'encontre des sociétés MMA après le 10 juin 2015, date de l'offre d'indemnisation, ou subsidiairement de celle du 4 avril 2016, date des conclusions des intimées valant offre d'indemnisation, - débouter M S... de sa demande présentée au titre des dépens et des frais irrépétibles . Par dernières écritures du 23 avril 2019, la société Sondefor demande à la cour de : - déclarer recevable et fondé son appel incident, - infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a rejeté sa demande de mise hors de cause et statuant à nouveau sur ce point, - la mettre hors de cause, - confirmer le jugement en ses autres dispositions, En toutes hypothèses, - constater qu'aucune demande n'est formulée contre elle, - juger que les MMA devront prendre en charge, en l'acquit de Sondefor, toutes les sommes qui pourraient être mises à sa charge à quelque titre que ce soit, au profit de M S... ou toute autre partie au litige, - condamner les MMA à la garantir de l'intégralité des condamnations prononcées à son encontre en principal, intérêts, frais, dépens, article 700 du code de procédure civile et sommes de toute nature, En tout état de cause, - condamner in solidum et à défaut solidairement les MMA et toute partie succombante à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens, avec recouvrement direct. Par dernières écritures du 26 avril 2019, la CPAM de Bayonne demande à la cour de : - confirmer le jugement en toutes ses dispositions relatives à la CPAM de Bayonne, En tout état de cause, - constater que les MMA sont également redevables de l'indemnité forfaitaire prévue à l'alinéa 8 de l'article L454-1 du code de la sécurité sociale, dont le montant a été actualisé par arrêté du 27 décembre 2018 à la somme de 1 080 euros, et les condamner in solidum à en assurer le versement auprès de la CPAM de Bayonne, - condamner in solidum les MMA à lui régler la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens avec recouvrement direct. La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation. L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 janvier 2020.

SUR QUOI,

LA COUR Les dispositions du jugement du tribunal de grande instance de Nanterre du 3 septembre 2010 déclarant la société Covea Fleet -aux droits de laquelle viennent les MMA- tenue de réparer les conséquences dommageables de l'accident survenu le 19 mars 2004 sont définitives. - Sur les préjudices de M. S... Ne sont pas discutées devant la cour les sommes allouées au titre des préjudices suivants : les dépenses de santé actuelles (345,20 euros), les souffrances endurées (40 000 euros), le préjudice esthétique, temporaire et permanent (3000 et 6000 euros), le préjudice d'agrément (6000 euros) et le préjudice sexuel (10 000 euros), lesquelles seront confirmées. Les préjudices de M. S... seront liquidés sur la base du rapport de l'expert judiciaire, M. P..., dont les conclusions sont les suivantes : DFT à 100 % : - du 19 mars 2004 au 23 juillet 2004 - le 11 février 2005 - du 8 septembre 2005 au 16 septembre 2005 - du 16 septembre 2005 au 7 octobre 2005 - du 23 mars 2009 au 1er juillet 2009 - du 27 octobre 2009 au 30 octobre 2009 - du 30 octobre 2009 au 12 janvier 2010 - du 14 janvier au 5 mars 2010 DFT à 75 % : du 24 juillet 2004 au 7 septembre 2005 (hors le 11 février 2005). DFT à 50% : hors les périodes précédentes et jusqu'à la consolidation. Incapacité professionnelle : du 19 mars 2004 au 2 juillet 2011 Consolidation : 2 juillet 2011 Souffrances endurées : 5,5 / 7 Préjudice esthétique : 2,5 / 7 Déficit fonctionnel permanent : 43 % Préjudice professionnel : pas d'activité professionnelle possible Préjudice d'agrément : pas d'activité impliquant la course, le port de charges et l'accroupissement préjudice sexuel : perte de la capacité de la réalisation naturelle de l'acte sexuel tierce personne : 15 heures par semaine à vie Frais futurs : consultation urologue et rééducateur 1 fois par an et 15 séances de kinésithérapie 2 fois par an pendant 5 ans - Sur les préjudices patrimoniaux * les frais divers Le tribunal les a accueillis pour la somme de 16 363,25 euros, acceptée à hauteur de cour, par les MMA. Le désaccord entre les parties porte sur une demande faite par M. S... tendant à la prise en charge par l'assureur de la somme de 513,76 euros qui correspond selon lui à des frais de recouvrement, que le tribunal a écartée au motif que ces frais n'avaient pas vocation à être pris en charge par l'assureur. M. S... soutient que ces frais sont en lien direct avec l'accident car il a dû engager des dépenses lors de son séjour en centre de rééducation alors qu'il ne pouvait les assumer faute de versement de provision par l'assureur. Les MMA répliquent qu'elles ne sauraient être tenues des frais de recouvrement consécutifs à la négligence de M. S... qui n'a pas réglé les factures dans le délai imparti. La pièce n° 4 versée par M. S... établit que la demande ne porte pas en réalité, pour l'essentiel, sur des frais de recouvrement. En effet, le Cabinet Basque de Recouvrement était mandaté pour recouvrer des dépenses afférentes au séjour de M. S... au centre de rééducation fonctionnelle "[...] " à hauteur de 388 euros (nuits et repas) en avril et juin 2004. Ce séjour est mentionné par l'expert et est en rapport avec l'accident. Il y a lieu de juger que M. S... est fondé à demander le paiement de la somme de 388 euros, à l'exclusion des frais de recouvrement demandés par le Cabinet de recouvrement. La somme allouée au titre des frais divers est ainsi portée à 16 751,25 euros. * la tierce personne temporaire L'expert a chiffré les besoins en aide humaine à 15 heures par semaine, contestés par les MMA qui voudraient les voir réduits à 3 heures par semaine. Il apparaît à la lecture du rapport d'expertise que les discussions à ce sujet furent soutenues, à l'occasion des deux réunions qui se sont tenues. A la suite des dires adressés par les conseils des parties, l'expert n'a pas procédé à une évaluation globale et sans nuance de ces besoins. Il les a au contraire détaillés, s'agissant de l'entretien du logement, du linge, de la préparation des repas et de l'aide au transport. Si M. S... peut se déplacer en scooter, ce n'est que pour de courtes distances. Ce mode de déplacement ne lui permet en tout état de cause pas d'effectuer des courses volumineuses, M. S... ayant indiqué que sa soeur s'en chargeait deux fois par mois. Il sera rappelé que l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce-personne ne saurait être réduite en cas d'assistance bénévole par un proche de la victime. Toutefois il sera jugé que l'estimation des besoins nécessités par le repassage et l'entretien du linge, 2 heures par semaine, est excessive et sera ramenée à 1 heure, tout comme celle concernant les "grosses courses", 2 heures par semaine, qui sera également ramenée à 1 heure par semaine. L'aide à la préparation des repas et à la vaisselle que l'expert a évaluée à 7 heures par semaine est également excessive pour une personne seule et doit être ramenée à 4 heures. Le besoin en aide humaine sera donc fixé à 10 heures par semaine. S'agissant d'une aide non qualifiée, le taux horaire, dont M. S... demande qu'il soit de 25 euros et les MMA de 15 euros, sera fixé à 16 euros, pour la période allant de l'accident à la date du prononcé de l'arrêt, soit six ans. Le calcul sera effectué sur la base de 57 semaines afin de tenir compte des congés payés, ce qui n'est pas discuté par les MMA. M. S... est ainsi fondé à demander la somme de 54 720 euros ([10 x 57] x 6 : 3420 x 16). Le jugement sera infirmé de ce chef. * la tierce personne permanente Il y a lieu de procéder à la capitalisation de ce besoin, en recourant, ainsi que le demande M. S... , au barème publié à la Gazette du Palais en 2018, qui apparaît plus adapté au regard du contexte économique, social et financier actuel. S'agissant d'un homme âgé de 50 ans, le point de rente à titre viager est de 27,687. La somme allouée à M. S... s'élève donc à 252 505,44 euros ([570 heures par an x 16] x 27,687). Le jugement sera infirmé de ce chef. * les pertes de gains professionnels futurs Le tribunal les a évaluées à 457 140,69 euros et a constaté que, déduction faite des arrérages et du capital représentatif de la rente versée par l'organisme social, il ne revenait rien à M. S... . A la suite de l'accident, M. S... a fait l'objet d'un reclassement qui n'a pu être maintenu. L'expert note que du fait de ses douleurs, il ne peut avoir une activité professionnelle quelconque et n'est moralement pas capable de l'envisager du fait de sa dépression et de sa dépendance morphinique. M. S... a fait l'objet d'un licenciement pour inaptitude le 15 novembre 2011 et s'est inscrit au Pôle Emploi. Le salaire de référence a été à bon droit fixé par le tribunal à 1254,53 euros correspondant au dernier salaire perçu avant l'accident. M. S... évoque une actualisation de ce salaire en demandant que ce revenu soit remplacé par le revenu moyen des français, soit 2225 euros. Toutefois cette proposition n'est pas justifiée puisque la détermination des pertes de gains professionnels se fait in concreto sur la base des salaires réellement perçus par l'intéressé. La demande subsidiaire que forme M. S... tendant à une actualisation de ce salaire sur la base du SMIC moyen augmenté de 20 % n'est pas davantage pertinente. La consolidation est fixée au 2 juillet 2011. La CPAM de Bayonne a versé des indemnités journalières jusqu'à cette date. Les MMA ne discutent pas le fait que M. S... n'a pu, après des tentatives de reclassement non couronnées de succès, reprendre une activité professionnelle. De la consolidation au 1er mars 2020, la perte de gains s'est élevée à la somme de 129 216,59 euros (1254,53 euros x 103 mois). Postérieurement au 1er mars 2020, il y a lieu de procéder à la capitalisation de la perte de gains, sur la base d'un point de rente à titre viager de 27,687. La perte est donc de 416 810,06 euros (1254,53 x 12 x 27,687). La perte totale s'élève à 546 026,65 euros. Il y a lieu d'imputer sur cette somme les arrérages de la rente et le capital représentatif de cette rente, ce que ne conteste pas l'appelant. Toutefois celui-ci soutient que seuls les arrérages échus à compter du 3 juillet 2011 devraient en être déduits car les arrérages échus avant cette date ont été imputés sur les pertes de revenus avant consolidation. Or, il n'y pas eu d'imputation de ces arrérages. Les arrérages de la rente s'élèvent à 149 287,35 euros et son capital représentatif à 332 415,40 euros, soit la somme totale de 481 702,75 euros et un solde revenant à M. S... de 64 323,90 euros. Le jugement sera infirmé de ce chef. - Sur les préjudices extra - patrimoniaux * le déficit fonctionnel temporaire Le tribunal a justement fixé l'indemnisation de ce déficit sur la base de 25 euros par jour. Ce poste de préjudice appelle réparation à hauteur de la somme de 40 687 euros, se décomposant comme suit : déficit fonctionnel temporaire total : 388 jours x 25 = 9 700 euros déficit fonctionnel temporaire 75 % : 410 jours x 25 x 0,75 =7 687 euros déficit fonctionnel temporaire 50 %: 1 864 jours x 25 x 0,50 = 23 300 euros Le jugement sera confirmé de ce chef. * le déficit fonctionnel permanent. Il est fixé par l'expert à 43 %, qui a observé que M. S... conservait des séquelles extrêmement douloureuses, nécessitant un traitement morphinique dont il est devenu dépendant. Le jugement sera approuvé d'avoir indemnisé ce préjudice à hauteur de 130 700 euros. Toutefois cette somme revient intégralement à M. S... puisqu'il ne subsiste à ce stade aucune créance de la CPAM à imputer. Le jugement sera donc infirmé. * le préjudice d'établissement Le tribunal, pour retenir l'existence d'un tel préjudice et allouer à ce titre la somme de 10 000 euros, a retenu que M. S... s'était marié en 1999 et avait eu une fille en 1996, que son impuissance avait eu des conséquences sur sa vie de couple, que depuis son divorce en 2007 il n'avait pu nouer de relation amoureuse, étant préoccupé par ses douleurs. M. S... demande que l'indemnisation de ce préjudice soit portée à 30 000 euros, rappelant qu'au moment de l'accident, il n'était âgé que de 33 ans et qu'à ce jour ses chances de fonder une famille sont anéanties. Les MMA s'opposent à toute indemnisation, faisant valoir que M. S... a déjà réalisé un projet de vie familiale et qu'il voit d'ailleurs régulièrement sa fille. Ce préjudice réside dans la perte de l'espoir de réaliser tout projet personnel de vie, et notamment fonder une famille, d'élever des enfants, en raison de la gravité du handicap. Il est constant que M. S... a été marié et a eu une fille née en 1996. Il était âgé lors de l'accident de 33 ans. Il a divorcé en 2007 et il peut être cru lorsqu'il affirme que ce divorce a pour origine l'accident et ses conséquences sur sa personne. Du fait de la dissolution d'une précédente union, survenue alors que M. S... était âgé de 37 ans, le préjudice d'établissement recouvre la perte de chance pour celui-ci de réaliser un nouveau projet de vie familiale. Ce préjudice appelle réparation à hauteur de 10 000 euros. Le jugement sera confirmé de ce chef. - Sur le doublement des intérêts Aux termes de l'article L 211-9 du code des assurances, une offre d'indemnité, comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice, doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans le délai maximal de 8 mois à compter de l'accident. Cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime. L'offre définitive doit alors être faite dans un délai de 5 mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation. En tout état de cause, le délai le plus favorable à la victime s'applique. A défaut d'offre dans les délais impartis par l'article L 211-9 du code des assurances, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge, produit, en vertu de l'article L 211-13 du même code, des intérêts de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif. C'est par de justes motifs que la cour adopte que le tribunal a retenu que l'assureur aurait dû faire une offre avant le 22 mai 2015 et que cette offre n'a été faite que le 10 juin 2015. Cette offre qui reprend les postes de préjudices de l'expert doit être tenue pour suffisante. Le tribunal a donc, à bon droit jugé que le montant de cette offre, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, produira intérêts au double du taux de l'intérêt légal du 22 mai 2015 au 10 juin 2015 et a par ailleurs fait droit à la demande de capitalisation des intérêts, dans les conditions prévues par l'article 1154 ancien du code civil, auquel les articles L211-9 et L211-13 du code des assurances ne dérogent pas. Il n'est pas justifié par les MMA de circonstances particulières de nature à conduire à l'application de l'article L 211-13 du code des assurances qui dispose que la pénalité peut être réduite par le juge en raison de circonstances non imputables à l'assureur. Les sommes allouées, de nature indemnitaire, produisent intérêts au taux légal à compter du 18 octobre 2018, date du jugement et M. S... n'est pas fondé à demander qu'ils courent à compter de ses conclusions notifiées le 5 septembre 2016. - Sur les demandes formées par la société Sondefor Il y a lieu de constater qu'aucune demande n'est formée à son encontre. Ce constat suffit sans qu'il y ait lieu de prononcer sa mise hors de cause. - Sur les demandes formées par la CPAM de Bayonne Les dispositions du jugement accueillant les demandes de la CPAM de Bayonne ne font l'objet d'aucune critique de la part des MMA et seront confirmées. Les MMA seront condamnées in solidum à payer à la CPAM de Bayonne l'indemnité forfaitaire de gestion, prévue à l'alinéa 8 de l'article L.454-1 du code de la sécurité sociale et fixée par arrêté du 27 décembre 2018 à 1080 euros. - Sur les mesures accessoires L'appelant ne verse aux débats aucune pièce justifiant de la mise en cause de Pro BTP, de sorte que l'arrêt ne lui sera pas déclaré commun. Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux indemnités de procédure seront confirmées. Les MMA, qui succombent, seront condamnées in solidum aux dépens d'appel, avec recouvrement direct. Elles verseront, en remboursement de leurs frais irrépétibles d'appel, à M. S... la somme de 3000 euros et à la CPAM de Bayonne celle de 2000 euros. L'équité ne commande pas l'application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la société Sondefor.

PAR CES MOTIFS

La cour, Infirme le jugement en ses dispositions relatives aux frais divers, à la tierce personne -temporaire et permanente- aux pertes de gains professionnels futurs, au déficit fonctionnel permanent. Statuant à nouveau des chefs infirmés : Après application des dispositions de la loi du 21 décembre 2006 relatives au recours des tiers payeurs poste par poste, mais provisions non déduites : Fixe à la somme de 16 751,25 euros les frais divers, Fixe à la somme de 54 720 euros la tierce personne temporaire, Fixe à la somme de 252 505,44 euros la tierce personne permanente, Fixe à la somme de 64 323,90 euros la perte de gains professionnels futurs, Fixe à la somme de 130 700 euros le déficit fonctionnel permanent, Condamne in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles au paiement des dites sommes sous réserve des provisions versées et non déduites, Le confirme pour le surplus, Y ajoutant, Dit n'y avoir lieu à déclarer le présent arrêt commun à Pro BTP, Condamne in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à payer à la CPAM de Bayonne la somme de 1080 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, Condamne in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à payer, en remboursement de leurs frais irrépétibles d'appel, à M. S... la somme de 3000 euros et à la CPAM de Bayonne la somme de 2000 euros, Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la société Sondefor, Condamne in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Marie-José BOU, Président et par Madame Claudine AUBERT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Le Greffier, Le Président,