Vu la procédure suivante
:
Par une requête enregistrée le 5 juin 2020, Mme B A, représentée par la SELARL Cabinet Coudray, demande au tribunal :
1°) d'annuler l'arrêté du 14 novembre 2019 par lequel le directeur académique des services de l'Education nationale de la Loire-Atlantique l'a placée en congé de maladie ordinaire du 1er novembre 2019 au 19 novembre 2019 ainsi que l'arrêté du 14 novembre 2019 par lequel il l'a placée en disponibilité d'office du 20 novembre 2019 au 19 mai 2020 ;
2°) d'annuler la décision de refus du congé de longue maladie révélée par les arrêtés précités du 14 novembre 2019 ;
3°) d'annuler l'arrêté du 11 février 2020 en ce qu'il renouvelle sa mise en disponibilité d'office et en ce qu'il rejette implicitement son recours gracieux ;
4°) d'enjoindre à l'administration de faire droit à sa demande de congé de longue maladie, à compter du 20 novembre 2018, et le cas échant de reconstituer sa carrière en conséquence, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir ou à titre subsidiaire de réexaminer sa demande de congé de longue maladie à compter du 20 novembre 2018, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les arrêtés du 14 novembre 2019 et du 11 février 2020 ont été signés par une autorité incompétente ;
- les arrêtés du 14 novembre 2019 et l'arrêté du 11 février 2020 ne comportent aucune motivation en fait et en droit, alors qu'ils lui refusent implicitement un congé de longue maladie ;
- la composition du comité médical est irrégulière au regard de l'article 5 du décret n°86-442 du 14 mars 1986 dès lors que n'y a pas siégé un médecin spécialiste de l'affection pour laquelle est demandé le congé de longue maladie ;
- les arrêtés du 14 novembre 2019 sont entachés d'une erreur d'appréciation dès lors qu'elle a arrêté de travailler à la suite d'un syndrome anxio-dépressif majeur et significatif et d'un épuisement professionnel, qu'elle fait l'objet d'un suivi et d'un traitement et que le médecin expert a conclu qu'elle devait bénéficier d'un congé de longue maladie à compter du 20 novembre 2018 ;
- il résulte des termes du courrier du 13 novembre 2019 que l'administration s'est crue à tort liée par l'avis émis par le comité médical ;
- compte tenu de l'erreur d'appréciation entachant le refus de congé de longue maladie, les décisions du 14 novembre 2019 la plaçant en congé de maladie ordinaire puis en disponibilité d'office à compter du 20 novembre 2019, alors qu'elle devait être placée en congé de longue maladie à compter du 20 novembre 2018, sont entachés d'une erreur de droit car ses droits statutaires à congés de maladie prévus au premier alinéa du 3° de l'article 34 de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 n'étaient pas expirés et qu'il pouvait être procédé à son reclassement dans l'immédiat ; à tout le moins, elle aurait dû être placée en congé de préparation au reclassement à compter du 20 novembre 2019 en lieu et place de son placement en disponibilité d'office ;
- en méconnaissance de l'article 9 du décret n°86-442 du 14 mars 1986, l'arrêté du 11 février 2020 a été pris sans attendre l'avis du comité médical supérieur, alors qu'elle avait introduit un recours gracieux contre le refus d'octroi d'un congé de longue maladie, et son placement en disponibilité d'office ;
- dès lors que l'arrêté du 11 février 2020 rejette implicitement son recours gracieux formé contre les arrêtés du 14 novembre 2019, cet arrêté est entaché des mêmes illégalités internes que ces arrêtés ;
- il résulte des termes du courrier du 13 février 2020 que l'administration s'est crue à tort liée par l'avis émis par le comité médical.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 février 2021, le recteur de l'académie de Nantes conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- les conclusions à fin d'injonction tendant à ce qu'il soit fait droit à la demande de congé de longue maladie sont irrecevables ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Milin, première conseillère ;
- les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique ;
- les observations de Me Saulnier, avocate de la requérante.
Considérant ce qui suit
:
1. Mme A, professeure des écoles de classe normale enseignant en classe préélémentaire à l'école de la Pierre Bleue à Nozay, a été placée en congé de maladie ordinaire à compter du 20 novembre 2018. A une date qui ne ressort pas avec précision des pièces du dossier, elle a demandé à bénéficier d'un congé de longue maladie. Par un courrier du 13 novembre 2019, le directeur académique des services de l'Education nationale de la Loire-Atlantique a refusé de faire droit à cette demande et il a, par deux arrêtés du 14 novembre 2019, placé Mme A en congé de maladie ordinaire pour la période du 1er novembre 2019 au 19 novembre 2019 puis en disponibilité d'office après expiration de ses droits statutaires à congé de maladie ordinaire pour la période du 20 novembre 2019 au 19 mai 2020. Par un courrier en date du 16 décembre 2019, Mme A a formé un recours gracieux contre la décision du 13 novembre 2019. Par un arrêté du 11 février 2020, le directeur académique des services de l'Education nationale de la Loire-Atlantique a maintenu Mme A en disponibilité d'office après expiration de ses droits statutaires à congé de maladie pour la période du 20 mai 2020 au 31 août 2020. Par la présente requête, Mme A demande au tribunal d'annuler les deux arrêtés du 14 novembre 2019 et l'arrêté du 11 février 2020.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Par un arrêté du 7 novembre 2019, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de l'Etat dans la région, le recteur de l'académie de Nantes a donné délégation à M. C, directeur académique des services de l'éducation nationale dans le département de la Loire-Atlantique, à l'effet de signer les décisions relatives " à la gestion des professeurs des écoles ", et a prévu, en cas d'absence ou d'empêchement de M. C, que cette délégation sera exercée par Mme E et par M. D, respectivement directrice académique adjointe et directeur académique adjoint des services de l'éducation nationale de la Loire-Atlantique et que, en cas d'absence ou d'empêchement de Mme E et par M. D, cette délégation sera exercée par M. Rouette, secrétaire général de la direction des services départementaux de l'éducation nationale de la Loire-Atlantique. Dès lors, et en l'absence de contestation de l'absence ou empêchement simultané de M. C et de Mme E et M. D, les arrêtés attaqués du 14 novembre 2019 et du 11 février 2020, plaçant Mme A en congé de maladie ordinaire puis en mise en disponibilité et prolongeant celle-ci étaient au nombre des actes que M. Rouette pouvait signer. Ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des arrêtés attaqués doit être écarté.
3. Aux termes de l'article 34 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le fonctionnaire en activité a droit () 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et qu'elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / (). ". Aux termes de l'article
L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : () / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; / (). ". Il résulte de la combinaison des dispositions précitées que le refus d'un congé de longue maladie est au nombre des décisions qui doivent être motivées.
4. La requérante fait grief aux arrêtés du 14 novembre 2019 et du 11 février 2020, qui refuseraient implicitement selon elle de faire droit à sa demande de congé de longue maladie, de ne pas être motivés sur ce point. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que c'est la décision du 13 novembre 2019 mentionnée au point 1 et par une décision du 13 février 2020, décisions dont Mme A ne demande pas l'annulation, que le directeur académique des services de l'Education nationale de la Loire-Atlantique a formalisé, d'une part, son refus d'octroyer un congé de longue maladie à Mme A et, d'autre part, le rejet de son recours gracieux. En tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que ces décisions font état des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que les décisions refusant le bénéfice d'un congé de longue maladie ne seraient pas motivées doit être écarté.
5. L'article 7 du décret n°86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " " Les comités médicaux sont chargés de donner à l'autorité compétente, dans les conditions fixées par le présent décret, un avis sur les contestations d'ordre médical qui peuvent s'élever à propos de l'admission des candidats aux emplois publics, de l'octroi et du renouvellement des congés de maladie, de longue maladie et de longue durée et de la réintégration à l'issue de ces congés. Ils sont consultés obligatoirement en ce qui concerne :/ 1. La prolongation des congés de maladie au-delà de six mois consécutifs ; / 2. L'octroi des congés de longue maladie et de longue durée ;(). ". L'article 6 de ce décret prévoit que la composition du comité médical départemental est semblable à celle du comité médical ministériel prévu à l'article 5 du même décret, lequel dispose que " ce comité comprend deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, pour l'examen des cas relevant de sa qualification, un spécialiste de l'affection pour laquelle est demandé le bénéfice du congé de longue maladie ou de longue durée prévu à l'article 34 (3e et 4e) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée. ".
6. Il ressort des pièces du dossier que siégeaient aux séances du 7 novembre 2019 et du 6 février 2020 au cours desquelles ont été examinées la demande de congé de longue maladie de Mme A, outre deux praticiens de médecine générale, un médecin spécialiste dont le recteur soutient en défense, sans être contesté, qu'il s'agit d'un médecin psychiatre, soit un spécialiste de l'affection pour laquelle était demandé le bénéfice du congé de longue maladie. Il suit de là que le moyen tiré de l'irrégularité de la composition du comité médical ayant rendu un avis sur la demande de congé de longue maladie de Mme A doit être écarté.
7. L'article 9 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires prévoit que : " Le comité médical supérieur, saisi par l'autorité administrative compétente, soit de son initiative, soit à la demande du fonctionnaire, peut être consulté sur les cas dans lesquels l'avis donné en premier ressort par le comité médical compétent est contesté. ". Si Mme A a formé, par un courrier du 16 décembre 2019, un recours gracieux contre la décision du 13 novembre 2019 prise après avis du comité médical départemental, il ne ressort pas des termes de ce courrier qu'elle ait entendu faire saisir le comité médical supérieur, saisine à laquelle n'a d'ailleurs pas procédé le directeur académique des services de l'Education nationale de la Loire-Atlantique. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 11 février 2020 serait entaché d'un vice de procédure en ce que le directeur académique des services de l'Education nationale de la Loire-Atlantique " n'a pas attendu l'avis du comité médical supérieur " pour statuer sur le recours gracieux formé par Mme A doit être écarté.
8. Il ressort des pièces du dossier que, par ses décisions du 13 novembre 2019 et du 13 février 2020, le directeur académique des services de l'Education nationale de la Loire-Atlantique a entendu s'approprier les avis émis par le comité médical départemental, ce qu'il lui était loisible de faire sans méconnaître l'étendue de sa compétence. Il suit de là que le moyen tiré de ce que le directeur académique des services de l'Education nationale de la Loire-Atlantique se serait cru lié par les avis du comité médical départemental et n'aurait pas exercé l'étendue de sa compétence doit être écarté.
9. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d'Etat, dans sa version applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : () / 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / (). "
10. La requérante soutient que les arrêtés du 14 novembre 2019 sont, en ce qu'ils lui refusent le bénéfice d'un congé de longue maladie, entachés d'une erreur d'appréciation. Toutefois, comme il a été dit, c'est par la décision du 13 novembre 2019 que le directeur académique des services de l'Education nationale de la Loire-Atlantique a refusé d'octroyer à Mme A le congé de longue maladie sollicité. Cette décision a été prise après la consultation du comité médical départemental de la Loire-Atlantique qui a rendu le 7 novembre 2019 un avis défavorable à la demande de placement en congé de longue maladie de Mme A " pour absence de gravité de la pathologie et absence de suivi spécifique. ".
11. Pour établir que sa situation relevait, à la date des décisions attaquées, d'un placement en congé de longue maladie, Mme A produit un certificat de sa médecin généraliste, daté du 26 novembre 2019, duquel il ressort que la requérante " présente un syndrome anxio-dépressif évoluant depuis début 2017. Son activité professionnelle semble avoir des répercussions sur sa santé mentale. Elle se sent actuellement dans l'incapacité de reprendre son activité professionnelle. Elle a entrepris des démarches auprès de l'éducation nationale mais pour le moment aucune possibilité ne s'offre à elle pour s'éloigner d'un poste d'enseignement. / Actuellement, elle est sous antidépresseur sédatif et anxiolytiques. / Elle est suivie par une psychologue régulièrement depuis le mois d'octobre 2018. Une prise en charge par en hypno thérapie est en cours depuis le mois de janvier 2019. Un suivi par un psychiatre a été débuté en novembre 2019. ". La requérante produit également un certificat d'une médecin psychiatre, non daté mais qui doit d'après le contenu du certificat susmentionné de la médecin généraliste, avoir été établi de novembre 2019 au plus tôt, duquel il ressort que l'intéressée a présenté au printemps et à l'automne 2017 un " état dépressif majeur et significatif avec comorbidité anxieuse " notablement amélioré par la mise en place d'une prise en charge associant psychothérapie et traitement psychotrope ainsi que l'éloignement du contexte professionnel, " la symptomatologie persist[ant] néanmoins sous la forme d'un trouble anxieux, nettement réactivé à l'évocation du contexte professionnel ". La praticienne conclut à un " syndrome anxio-dépressif majeur et significatif dont le facteur déclenchant paraît être une impossibilité à exercer un enseignement présentiel ", et que " s'il faut actuellement noter une stabilisation notable de la symptomatologie dépressive, il persiste un trouble anxieux lié à son poste actuel d'enseignante et significativement réactivé à l'évocation de celui-ci " et que " la demande de congés de longue maladie [] apparaît justifiée afin de consolider une amélioration clinique encore fragile mais également nécessaire pour lui permettre de procéder à une réorientation professionnelle indispensable. ". Par ailleurs, le rapport de contre-visite du 3 octobre 2019 conclut à " un trouble dépressif d'intensité moyenne en lien avec un état d'épuisement professionnel " et préconise le bénéfice d'un congé de longue maladie, après avoir relevé que, après un épisode d'épuisement professionnel ayant conduit à l'arrêt du travail par Mme A, " ce jour le contact est adapté, le discours est cohérent. () Les troubles du sommeil se sont améliorés sous mirtazapine, l'anxiété et les ruminations sont encore présentes particulièrement lorsqu'elle est confrontée au milieu scolaire même en tant que parent. / L'humeur est syntone. Il n'y a pas d'idée suicidaire, pas de trouble de l'appétit. ". Est également versée à l'instance une attestation non datée de la psychologue clinicienne qui suit Mme A depuis le mois de juin 2017 et de laquelle il ressort que l'intéressée présentait " alors " " un sentiment de non-accomplissement au travail, de ne pas parvenir à répondre aux attentes ", " une fatigue émotionnelle ", " une perte de confiance en soi ", " des troubles du sommeil, de l'appétit ", " une action neurovégétative avec des troubles de la concentration " et que " l'évocation de la reprise de l'enseignement fait surgir des angoisses qui persistent encore aujourd'hui. ". La requérante produit une attestation du 16 décembre 2019 par laquelle une hypnothérapeute atteste " avoir entamé un accompagnement thérapeutique avec Mme B A, à sa demande, le 1er mars 2019, suite à un arrêt de travail pour épuisement professionnel. ". Enfin, il ressort d'une ordonnance du 26 novembre 2019 versée au dossier que Mme A se voyait prescrire à cette date un antidépresseur.
12. Si les documents produits établissent chez Mme A l'existence d'un syndrome anxio-dépressif majeur ayant évolué, grâce à sa cessation d'activité d'enseignante, en trouble anxieux réactivé à la perspective d'une reprise d'activité sur des missions d'enseignement, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu des troubles que présentait Mme A à la date des décisions attaquées, dont l'intensité avait notablement diminué depuis son placement initial en congé de maladie ordinaire, grâce à l'éloignement de son poste de travail générateur d'angoisse, qu'au sens des dispositions précitées de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, l'affection dont souffre Mme A présenterait " () un caractère invalidant et de gravité confirmée () ", la décision de refus d'attribution d'un congé de longue maladie n'ayant au demeurant ni pour objet, ni pour effet, en l'espèce, de contraindre Mme A à assurer, de nouveau, des missions d'enseignement présentiel. Dans ces conditions, par les décisions des 13 novembre 2019 et 13 février 2020 refusant le bénéfice d'un congé de longue maladie à Mme A, le directeur académique des services de l'Education nationale de la Loire-Atlantique, n'a pas fait une inexacte appréciation de la situation de Mme A au regard des dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 en lui refusant l'attribution d'un congé de longue maladie.
13. Aux termes de l'article 51 de la loi du 11 janvier 1984 : " La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son administration ou service d'origine, cesse de bénéficier, dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite. () / La disponibilité est prononcée, soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux 2°, 3° et 4° de l'article 34. (). ". L'article 43 du décret n°85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive de fonctions, dans sa version applicable au litige dispose que : " La mise en disponibilité ne peut être prononcée d'office qu'à l'expiration des droits statutaires à congés de maladie prévus au premier alinéa du 2°, au premier alinéa du 3° et au 4° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et s'il ne peut, dans l'immédiat, être procédé au reclassement du fonctionnaire dans les conditions prévues à l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée. ". Ce dernier article dispose que " Lorsqu'un fonctionnaire est reconnu, par suite d'altération de son état de santé, inapte à l'exercice de ses fonctions, le poste de travail auquel il est affecté est adapté à son état de santé. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ce fonctionnaire peut être reclassé dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois en priorité dans son administration d'origine ou, à défaut, dans toute administration ou établissement public mentionnés à l'article 2 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, s'il a été déclaré en mesure de remplir les fonctions correspondantes. ". Il résulte de ces dispositions qu'eu égard notamment à l'objectif, spécifié à l'article L. 911-19 du code de l'éducation, de préparer, le cas échéant, la réorientation professionnelle d'un enseignant déclaré inapte à l'exercice de ses fonctions, l'intéressé ne peut faire l'objet d'un reclassement dans un emploi d'un autre corps de niveau équivalent ou inférieur qu'à la condition qu'il ait été constaté que l'adaptation d'un poste de travail à son état de santé, y compris, au besoin, dans une activité professionnelle différente, n'est pas possible.
14. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le comité médical du 7 novembre 2019 a émis un avis favorable au placement en congé de maladie ordinaire puis, à l'expiration des droits à ce type de congé, à la mise en disponibilité de Mme A. S'il n'a pas pris explicitement de position sur l'aptitude de cette dernière, le comité doit être regardé, en recommandant la mise en congé de maladie ordinaire, comme reconnaissant que l'intéressée n'était pas apte à reprendre dans l'immédiat l'emploi qu'elle occupait antérieurement mais qu'elle n'était pas pour autant inapte à toutes fonctions. D'autre part, Mme A a saisi son administration, le 12 septembre 2019, d'une demande de reclassement dans un corps administratif, puis, le 6 novembre, d'une demande d'affectation sur un poste adapté de courte durée. Dans ces conditions, à la date du 14 novembre 2019 à laquelle l'administration avait implicitement rejeté la demande de reclassement sans examiner si le reclassement demandé était impossible ou proposer des postes comme il lui incombait en application de l'article 3 du décret et à laquelle elle n'avait pas encore statué sur la demande d'affectation sur un poste adapté, la seconde condition nécessaire pour prononcer une mise en disponibilité, tenant à l'impossibilité de procéder, dans l'immédiat, au reclassement du fonctionnaire, ne pouvait être regardée comme remplie. Il en va de même à la date du 11 février 2020 à laquelle a été pris l'arrêté de renouvellement de mise en disponibilité puisque ce n'est que par une décision du 13 mars 2020 que l'administration a statué sur la demande de poste adapté présentée par Mme A. Il suit de là que la requérante est fondée à soutenir que les décisions du 14 novembre 2019 et du 11 février 2020 méconnaissent les conditions cumulatives de mise en disponibilité posées aux articles 51 de la loi du 11 janvier 1984 et 43 du décret du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive de fonctions.
15. Il résulte de ce qui précède que l'arrêté du 14 novembre 2019 du directeur académique des services de l'éducation nationale de la Loire-Atlantique mettant Mme A en disponibilité d'office et l'arrêté du 11 février 2020 prolongeant cette mise en disponibilité doivent être annulés.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
16. Le motif d'annulation retenu implique seulement le réexamen de la situation de Mme A. Par suite, il y a seulement lieu d'enjoindre à l'administration d'agir en ce sens, et de prendre une nouvelle décision sur sa situation dans un délai de quatre mois à compter de la notification du jugement à intervenir. Par voie de conséquence, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au directeur académique des services de l'éducation nationale de la Loire-Atlantique de faire droit à sa demande de congé de longue durée de Mme A doivent être rejetées, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense.
Sur les frais liés au litige :
17. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative à verser à Mme A.
D E C I D E :
Article 1er : Les arrêtés du 14 novembre 2019 et du 11 février 2020 du directeur académique des services de l'éducation nationale de la Loire-Atlantique mettant Mme A en disponibilité d'office sont annulés.
Article 2 : Il y a lieu d'enjoindre au directeur académique des services de l'éducation nationale de la Loire-Atlantique de réexaminer la situation de Mme A et d'y statuer de nouveau sur sa demande, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent jugement.
Article 3 : L'Etat versera à Mme A la somme de 1 200 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent jugement sera notifié à Mme B A et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Copie en sera adressée à la rectrice de l'académie de Nantes.
Délibéré après l'audience du 16 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Gourmelon, présidente,
Mme Milin, première conseillère,
M. Cordrie, conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 décembre 2023.
La rapporteure,
C. MILIN
La présidente,
V. GOURMELON
La greffière,
F. ARLAIS
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,