Chronologie de l'affaire
Tribunal administratif de Melun 05 avril 2012
Cour administrative d'appel de Paris 17 octobre 2013

Cour administrative d'appel de Paris, 5ème Chambre, 17 octobre 2013, 12PA02394

Mots clés contributions et taxes · impôts sur les revenus et bénéfices Revenus et bénéfices imposables · société · taxe · preuve · factures · service · sous-traitance · impôt · entreprise · registre du commerce · réintégration · soutenir

Synthèse

Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro affaire : 12PA02394
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Melun, 05 avril 2012, N° 0806316/3-0806777/3
Président : Mme ADDA
Rapporteur : M. Alain VINCELET
Rapporteur public : Mme DHIVER
Avocat(s) : MARTIN

Chronologie de l'affaire

Tribunal administratif de Melun 05 avril 2012
Cour administrative d'appel de Paris 17 octobre 2013

Texte

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 4 juin 2013 et régularisée le 5 juin 2013 par la production de l'original, présentée pour société à responsabilité limitée C.G.M., dont le siège est 405 rue Raoul Delattre à Villeneuve-le-Roy (94290), par MeA... ; la société C.G.M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0806316/3-0806777/3 du 5 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 septembre 2013 :

- le rapport de M. Vincelet, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Dhiver, rapporteur public ;

1. Considérant que l'administration a assujetti la société C.G.M., qui exerce une activité de prestataire de services en matière de peinture et d'aménagement de locaux, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution à cet impôt au titre des années 2004 et 2005 en conséquence de la réintégration dans ses bases d'imposition des dites années, de charges de sous-traitance injustifiées ainsi que de frais de mission, de réception et de location de voitures qu'elle a regardés comme non exposés dans l'intérêt de l'entreprise ; qu'elle lui a également assigné, au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée résultant, d'une part, d'une insuffisance de taxe déclarée, d'autre part, du refus de déduction de la taxe figurant sur les factures de sous-traitance ainsi que de la taxe qui grevait les frais de location de véhicules ; que la société C.G.M. demande l'annulation du jugement du 5 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes en décharge de ces impositions supplémentaires ;

Sur les rappels d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée résultant du refus de déduction des factures de sous-traitance :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment, les frais généraux de toute nature (...) " ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

3. Considérant qu'en vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis ; que la seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense ; que le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration ;

4. Considérant, d'autre part, qu'en vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts et de l'article 230 de l'annexe II à ce code alors en vigueur, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de services ; que dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance ; que si l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération ;

5. Considérant que la société C.G.M. avait déduit, d'une part, de ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés, le montant de factures émises par six sous-traitants, les entreprises Garnier, E.M.B., Prosanit, Abdelkader Alexia, Multiservices et Iaconelli d'autre part, de la taxe sur la valeur ajoutée dont elle était redevable à raison de ses propres opérations, le montant de la taxe grevant les factures émises par ces sous-traitants, à l'exception de l'entreprise Iaconelli ; que, pour s'opposer à la déduction des charges et de la taxe sur la valeur ajoutée y afférente, l'administration, sans contester la régularité des factures émises par ces entreprises et produites devant elle par la société C.G.M., s'est fondée sur ce que ces entreprises étaient inconnues ou avaient été radiées du registre du commerce et des sociétés et n'avaient par ailleurs pas satisfait à leurs obligations déclaratives ; que, ce faisant, l'administration doit être regardée comme ayant produit des éléments de nature à laisser penser que les versements avaient été effectués dans un intérêt autre que celui de l'entreprise ; que, si la requérante allègue que la société Multiservices aurait été inscrite au registre du commerce, elle ne l'établit pas ; que, par ailleurs, la circonstance alléguée que la loi relative à la sous-traitance ne l'obligeait pas à vérifier l'existence juridique de ses sous-traitants lorsqu'ils émettaient des factures d'un montant inférieur à 3 049 euros est en elle-même insusceptible d'établir la réalité des prestations qu'ils auraient réalisées à son profit ; qu'ainsi la requérante n'établit pas la déductibilité des charges figurant sur les factures et de la taxe sur la valeur ajoutée qui les grevait ;

Sur les rappels d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée résultant du refus de déduction des frais de location de véhicule :

6. Considérant que pour remettre en cause la déductibilité des frais de location de véhicules et de la taxe sur la valeur ajoutée y afférente, l'administration a relevé que les factures correspondantes avaient été émises par une agence d'Orléans, localité dans laquelle ou à proximité de laquelle la société n'avait pas de chantier, et qu'une des factures concernait la location d'un véhicule de luxe et avait été émise au nom d'un de ses employés pendant une période de congé ; qu'en se bornant à soutenir, d'une part et sans produire le moindre commencement de preuve, qu'elle prenait en fait possession des véhicules à proximité de son siège social, d'autre part, que le libellé de la facture au nom d'un de ses employés résulterait d'une erreur commise par le loueur, la requérante n'établit pas que les locations ont été effectuées dans son intérêt; qu'ainsi, la charge correspondante et la taxe sur la valeur ajoutée s'y rapportant n'étaient pas déductibles ;

Sur les rappels d'impôt sur les sociétés résultant de la réintégration des frais de mission et de réception :

7. Considérant qu'au titre des années 2004 et 2005, la société requérante a comptabilisé en frais de mission et de réception et déduit de ses résultats imposables les sommes respectives de 11 288 euros et de 16 722 euros, qui incluaient les montants de 722 euros et de 1 406 euros correspondant à des dépenses exposées en Corse ; que le service en a refusé la déduction au motif qu'une partie de ces sommes n'était pas appuyée de pièces justificatives et que les pièces produites à l'effet de justifier la réalité des autres frais étaient dépourvues de précisions suffisantes et ne permettaient pas d'établir qu'elles avaient été engagées dans l'intérêt de l'entreprise ; que la requérante ne fournit aucune précision et ne produit aucun justificatif susceptible de constituer un commencement de preuve de la réalité de ces dépenses et de leur engagement dans son intérêt alors que le service fait par ailleurs valoir, ainsi qu'il est en droit de le faire, que le montant de ces dépenses excédait celui de ses bénéfices déclarés des années concernées ; que, dans ces conditions, l'intéressée n'apporte pas la preuve qui lui incombe de la déductibilité de ses frais ; que l'instruction de la direction générale des impôts 5 G 2356 ne contient aucune interprétation de la loi fiscale ;

Sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) " ; qu'aux termes de l'article 266 du même code : " La base d'imposition est constituée : (...) a) pour les livraisons de biens, les prestations de service ( ...), par toutes les sommes , biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de ces opérations (...) " ; qu'aux termes enfin de l'article 269 : " (...) 2. La taxe est exigible : c) Pour les prestations de services, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération (...) " ;

9. Considérant que les rappels en cause sont fondés sur la discordance constatée entre le montant du chiffre d'affaires mentionné sur les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée et le total des crédits bancaires de la société identifiés par le vérificateur comme provenant de ses clients ; que la société ne conteste pas que les crédits émanaient de ses clients et constituaient dès lors des recettes professionnelles, mais se borne à soutenir sans aucune précision que tous les crédits concernés ne correspondent pas nécessairement à la rémunération d'une prestation de services ; que, dans ces conditions, l'administration établit le bien-fondé du rappel de taxe auquel elle a procédé ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société C.G.M. n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande en décharge des impositions contestées ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE :



Article 1er : La requête de la société C.G.M. est rejetée.

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N° 12PA02394

Classement CNIJ :

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