Chronologie de l'affaire
Tribunal de Grande Instance de Versailles 29 avril 2014
Cour d'appel de Versailles 11 décembre 2014
Cour de cassation 16 mars 2016

Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 11 décembre 2014, 14/04253

Mots clés procédure civile · association · tiers · enfance · juristes · intervention · vestiaire · prétention · adoption · intervenir · intérêt · volontaire · publicité · principal · recevabilité

Synthèse

Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro affaire : 14/04253
Dispositif : Autre décision avant dire droit
Décision précédente : Tribunal de Grande Instance de Versailles, 29 avril 2014
Président : Madame Odile BLUM

Chronologie de l'affaire

Tribunal de Grande Instance de Versailles 29 avril 2014
Cour d'appel de Versailles 11 décembre 2014
Cour de cassation 16 mars 2016

Texte

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 26G

1re chambre 1re section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 11 DECEMBRE 2014

R.G. N° 14/04253

AFFAIRE :

[J] [L] [I] [W] épouse [M]

...

C/

MINISTERE PUBLIC

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 Avril 2014 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

Chambre du conseil

N° RG : 13/8030

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

[J] [L] [I] [W] épouse [M],

[Y], [D] [M],

Me FERCHAUX-LALLEMENT de la SARL LM AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES,

MINISTERE PUBLIC

Me LE GOUVELLO

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE ONZE DECEMBRE DEUX MILLE QUATORZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [J] [L] [I] [W] épouse [M]

née le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 2] (91)

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentant : Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT de la SARL LM AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 629 -

présente, assistée de Maitre GUISEPPI, substituant Me Bénédicte DEVAUX, Plaidant, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, vestiaire : PC 148

Madame [Y], [D] [M]

née le [Date naissance 2] 1978 à [Localité 3] (GRANDE BRETAGNE)

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentant : Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT de la SARL LM AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 629 - présente, assistée de Maitre GUISEPPI plaidant, substituant Me Bénédicte DEVAUX, , avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, vestiaire : PC 148

APPELANTES

*********************

Association JURISTES POUR L'ENFANCE - JPE, dont le siège social est sis [Adresse 1], prise en la personne don son président, M. [C] [E].

INTERVENANTE VOLONTAIRE, représentée par Maitre Adeline Le GOUVELLO de la PORTE, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire 615

EN PRESENCE DU MINISTERE PUBLIC

représenté par Monsieur le Procureur Général lui même représenté à l'audience par Madame Sylvie SCHLANGER, substitut général à qui la cause a été communiquée.

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue le 10 Novembre 2014, Madame Odile BLUM, président, ayant été entendu en son rapport, en chambre du conseil, en présence du ministère public, devant la cour composée de :

Madame Odile BLUM, Président,

M. Dominique PONSOT, Conseiller,

Madame Anne BEAUVOIS, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT

Vu la requête du 11 octobre 2013 de Mme [W] épouse [M] aux fins d'adoption plénière de l'enfant de sa conjointe ;

Vu le jugement rendu en matière gracieuse le 29 avril 2014 par le tribunal de grande instance de Versailles qui a débouté Mme [W] de sa demande ;

Vu la déclaration d'appel de cette décision déposée le 15 mai 2014 par Mme [W] au greffe du tribunal de grande instance de Versailles ;

Vu l'intervention volontaire de l'association Juristes pour l'enfance - Jpe, par conclusions déposées au greffe le 22 juillet 2014 ;

Vu la convocation des parties à l'audience du 10 novembre 2014 pour qu'il soit statué préalablement au fond, sur la recevabilité de l'intervention volontaire ;

Vu les dernières conclusions du 7 novembre 2014, développées oralement à l'audience, de Mme [J] [W] et de Mme [Y] [M], son épouse, qui demandent à la cour, au visa des articles 554 et suivants, 31 et suivants, 1170 et 1174 du code de procédure civile et 9 du code civil, de :

- dire irrecevable l'intervention volontaire de l'association Juristes pour l'enfance -Jpe,

- dire qu'il n'y a pas lieu à communication des pièces et éléments de procédure du dossier à cette association,

- au surplus, dire abusive l'intervention de l'association,

- condamner l'association Juristes pour l'enfance - Jpe à payer la somme de 10.000 € en réparation du préjudice moral de Mme [W],

- renvoyer à une prochaine audience pour statuer sur le fond,

- condamner l'association Juristes pour l'enfance -Jpe au paiement de la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Vu les dernières conclusions du 6 novembre 2014, développées oralement à l'audience, de l'association Juristes pour l'enfance - Jpe qui demande à la cour de :

- débouter Mme [W] de ses demandes,

- la déclarer recevable en son intervention volontaire,

- condamner Mme [W] à lui payer 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, dont distraction ;

Vu l'avis, exprimé oralement à l'audience, du ministère public, partie jointe, qui estime irrecevable l'intervention volontaire de l'association Juristes pour l'enfance - Jpe, pour défaut d'intérêt direct et personnel à agir dans ce domaine privé et familial ;

SUR QUOI, LA COUR,


Considérant que

l'association Juristes pour l'enfance - Jpe expose que toute association déclarée peut agir en justice pour assurer la défense d'intérêts collectifs lorsque ceux-ci entrent dans son objet social et intervenir volontairement à une procédure existante ainsi que l'article 66 du code de procédure civile le prévoit ;

Qu'elle fait valoir qu'elle est une association régulièrement déclarée depuis six ans, qu'elle a modifié son objet qui inclut la défense des droits naturels de chaque enfant, que conformément à son objet social, elle a déjà initié diverses procédures tant civiles et administratives que pénales afin d'assurer la défense de l'intérêt de l'enfant et a été déclarée recevable en son intervention devant diverses juridictions dont la Cour de cassation qui a rendu le 22 septembre 2014 deux avis au visa de ses écritures, qu'elle doit en conséquence être déclarée recevable à intervenir devant la cour d'appel ;

Que l'association Juristes pour l'enfance - Jpe précise intervenir à titre principal ainsi que l'article 554 du code de procédure civile lui en offre la possibilité, qu'elle a intérêt à intervenir à ce titre et élève une prétention à son profit, celle de ne pas voir prononcer une adoption qui constituerait un détournement de cette institution et une fraude à l'adoption, que son intervention n'est pas incompatible avec la matière gracieuse, qu'il n'existe en effet aucun obstacle à ce qu'un tiers puisse intervenir à la procédure d'adoption ni à ce que cette intervention soit le fait d'une association qui défend les intérêts collectifs qu'elle entend protéger, que, de fait, des associations telles que l'association familiale nationale des familles adoptives et l'association Enfance et famille d'adoption ont été jugées recevables à intervenir dans des procédures d'adoption, que la Cour de cassation, elle-même, l'a déclarée recevable dans la procédure d'avis portant sur la question de l'adoption en fraude des règles légales françaises relatives à la procréation médicale assistée ; qu'elle ajoute que si les débats et l'instruction de l'affaire sont menés en chambre du conseil, le jugement est prononcé en audience publique, la publicité étant un principe fondamental de la justice, que les tiers peuvent en vertu des articles 11-3 de la loi n°72-626 du 5 juillet 1972 et 1440 du code de procédure civile, avoir communication des jugements d'adoption, cette publicité étant d'ailleurs particulièrement importante en la matière puisqu'elle permet en aval aux tiers de s'opposer à ce jugement par la procédure de tierce opposition ; qu'elle soutient enfin qu'en intervenant dans cette procédure d'adoption relevant de la matière gracieuse, elle a élevé le contentieux et que les règles de la procédure contentieuse des articles 899 et suivants du code de procédure civile doivent désormais trouver application ;

Considérant, cela étant posé, qu'aux termes de l'article 66 du code de procédure civile, constitue une intervention, la demande dont l'objet est de rendre un tiers partie au procès engagé entre les parties originaires ; que selon l'article 329 du même code, l'intervention est principale lorsqu'elle élève une prétention au profit de celui qui la forme et elle n'est recevable que si son auteur a le droit d'agir relativement à cette prétention ;

Que par ailleurs, l'article 31 du code de procédure civile dispose que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention tandis que l'article 554 du même code de procédure civile précise que peuvent intervenir en cause d'appel, dès lors qu'elles y ont intérêt, les personnes qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité ;

Considérant qu'en l'espèce, il est déféré à la cour le jugement ayant débouté Mme [W] de sa demande d'adoption de l'enfant de sa conjointe ; que cette instance relève, en matière gracieuse, de l'état des personnes ;

Considérant que l'association Juristes pour l'enfance - Jpe entend intervenir à titre principal pour élever le contentieux en appel alors que le ministère public est demeuré partie jointe ; que sa demande tend à s'opposer à l'adoption sollicitée et à la confirmation du jugement ; qu'elle n'élève donc aucune prétention à son profit ;

Que par ailleurs, étant tiers au jugement qui ne lui a pas été notifié, elle ne justifie d'aucun lien avec l'enfant, la demanderesse à l'adoption ou sa conjointe qui lui permettrait de s'immiscer dans la procédure d'adoption ; qu'elle n'invoque aucun autre intérêt à intervenir dans cette affaire privée que celui né, selon elle, de la défense des intérêts collectifs dont elle se prévaut ; qu'un tel intérêt n'est pas légitime au regard de la nature de l'affaire relative à l'état d'un enfant, instruite et débattue en chambre du conseil, après avis du ministère public ;

Que l'association Juristes pour l'enfance - Jpe n'est pas fondée à se prévaloir de la recevabilité de son intervention dans des instances d'une autre nature que la présente instance ni de ce que ses conclusions ont pu être reçues par la Cour de cassation qui, saisie pour avis par les tribunaux de grande instance de Poitiers et d'Avignon, n'a pas eu à connaître précisément des affaires soumises à ces tribunaux ;

Que le surplus de son argumentation devenant inopérant, l'association Juristes pour l'enfance - Jpe sera déclarée irrecevable en son intervention ; que la demande relative à la communication des pièces devient sans objet ;

Considérant enfin, que l'association Juristes pour l'enfance - Jpe relève exactement que si l'affaire en matière d'adoption doit être instruite et débattue en chambre du conseil, le jugement est rendu en audience publique ce qui conduit les tiers à en avoir connaissance ; que Mme [W] et Mme [M], qui se sont précisément refusées à communiquer leurs pièces à l'association intervenante, ne justifient pas que celle-ci ait porté atteinte à leur vie privée ; qu'elles ne démontrent pas plus que l'intervention volontaire de l'association en appel procède d'agissements fautifs de sa part ni d'un abus de droit ; que Mme [W] sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts ;

Considérant que l'association Juristes pour l'enfance - Jpe qui succombe sur son intervention, conservera à sa charge les dépens y afférents ; que vu l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 2.000 € sera allouée à Mme [W] pour les frais irrépétibles qu'elle a exposés pour lui répliquer ;

PAR CES MOTIFS



Statuant publiquement après débats en chambre du conseil et contradictoirement,

Déclare l'association Juristes pour l'enfance - Jpe irrecevable en son intervention ;

Déboute Mme [W] et Mme [M] de leur demande de dommages et intérêts et dit sans objet la demande de refus de communication de pièces ;

Déboute l'association Juristes pour l'enfance - Jpe de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamne à payer à ce titre à Mme [W] la somme de 2.000 € ;

Laisse à la charge de l'association Juristes pour l'enfance - Jpe les dépens afférents à son intervention.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Odile BLUM, Président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,Le PRESIDENT,