N° RG 22/00975 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JBBN
COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE DE LA PROXIMITE
ARRET DU 15 SEPTEMBRE 2022
DÉCISION DÉFÉRÉE :
21/00811
Jugement du JUGE DE L'EXECUTION DU HAVRE du 14 Mars 2022
APPELANT :
Monsieur [M] [B]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représenté par Me Pierre VARGUES de la SELARL VARGUES ET ASSOCIES, avocat au barreau du HAVRE
INTIMEE :
S.A.R.L. RENAUX LAINE SARL au capital de 10.000€, immatriculée au RCS du HAVRE sous le numéro 508 404 712
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Laurent LEPILLIER de la SELARL LEPILLIER BOISSEAU, avocat au barreau du HAVRE substituée par Me Anais LEBLOND, avocat au barreau du HAVRE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article
805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 09 Juin 2022 sans opposition des avocats devant Madame GERMAIN, Conseillère, rapporteur.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame GOUARIN, Présidente
Madame TILLIEZ, Conseillère
Madame GERMAIN, Conseillère
Madame DUPONT, greffière lors des débats et de la mise à disposition
DEBATS :
A l'audience publique du 09 Juin 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 15 Septembre 2022
ARRET :
Contradictoire
Prononcé publiquement le 15 Septembre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article
450 du Code de procédure civile,
signé par Madame GOUARIN, Présidente et par Madame DUPONT, Greffière.
Exposé des faits et de la procédure
M. [M] [B] a donné à bail un fonds de commerce de garage automobile dans les locaux situé [Adresse 1] à la SARL Renaux Laine, suivant bail commercial du 30 décembre 2008 à effet au 1er janvier 2009.
Par jugement du tribunal judiciaire du Havre du 30 janvier 2020, M. [M] [B] a notamment été condamné sous le bénéfice de l'exécution provisoire:
- à faire réaliser les travaux de réfection complète de la toiture, en ce compris le terrasson Ouest, tels que décrits et chiffrés dans le devis Berdeaux [N] du 4 janvier 2017 et [W] du 23 avril 2015, dans le délai de trois mois suivant la signification de la décision à intervenir, puis sous astreinte de
200 euros par jour de retard pendant un nouveau délai de trois mois à compter de l'expiration d'un délai de six mois à compter de la notification de la décision, prévoyant à défaut d'exécution dans ce second délai de trois mois, la condamnation de M. [M] [B] à lui payer la somme de
84 284,12 euros ;
- à faire réaliser les travaux de réfection complète de la façade, tels que décrits et chiffrés dans le devis de la société Stéphane Laine du 27 février 2017, dans le délai de trois mois suivant la signification de la décision à intervenir, puis sous astreinte de 50 euros par jour de retard pendant trois mois à compter de l'expiration d'un délai de six mois à compter de la signification de la décision, prévoyant à défaut d'exécution dans ce second délai de trois mois, la condamnation de M. [M] [B] à lui payer la somme de 1259,58 euros ;
- à faire réaliser les travaux d'isolation des canalisations tels que décrits et chiffrés dans l'expertise judiciaire dans le délai de trois mois suivant la signification de la décision à intervenir, puis sous astreinte de 20 euros par jour de retard pendant trois mois à compter de l'expiration d'un délai de six mois à compter de la signification de la décision, prévoyant, à défaut
d'exécution dans ce second délai de trois mois, la condamnation de M. [M] [B] à lui payer la somme de 10 700 euros.
Ce jugement signifié à M. [M] [B] le 24 février 2020 a été confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Rouen du 11 février 2021 qui lui a été signifié le 23 février 2021.
Suivant acte du 4 mai 2021, la SARL Renaux Laine a fait citer M. [M] [B] devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire du Havre afin d'obtenir :
- sa condamnation à lui payer la somme de 24 300 euros au titre de la liquidation des astreintes provisoires prononcées par le jugement du 30 janvier 2020 ;
- la fixation d'une astreinte définitive de 1 000 euros par jour de retard à compter du mois suivant la signification de la décision à intervenir pour le contraindre à exécuter l'ensemble des travaux auxquels il a été condamné;
- sa condamnation à lui payer la somme de 4 000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
- sa condamnation à supporter la charge des dépens et à lui verser une
indemnité de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile,
- la majoration des montants alloués dans le jugement du droit de recouvrement ou d'encaissement par huissier supporté par le créancier en application de l'article 10 du décret 96-1080 du 12 décembre 1996 à défaut de paiement dans les 15 jours suivant la notification de la décision.
Par jugement contradictoire du 14 mars 2022, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire du Havre a :
- condamné M. [M] [B] à payer à la SARL Renaux Laine la somme de 4 500 euros avec intérêts légaux à compter du jugement, au titre de la liquidation de l'astreinte provisoire prononcée contre lui au titre des travaux de réfection complète de la façade de l'immeuble loué à la SARL Renaux Laine ;
- condamné M. [M] [B] à payer à la SARL Renaux Laine la somme de 1 800 euros avec intérêts légaux à compter du jugement, au titre de la liquidation de l'astreinte provisoire prononcée contre lui au titre des travaux d'isolation des canalisations de l'immeuble loué à la SARL Renaux Laine ;
- condamné M. [M] [B] à payer à la SARL Renaux Laine la somme de
18 000 euros avec intérêts légaux à compter du jugement, au titre de la liquidation de l'astreinte provisoire prononcée contre lui au titre des travaux de réfection complète de la toiture de l'immeuble loué à la SARL Renaux Laine, en ce compris le terrasson Ouest tels que décrits et chiffrés dans le devis Berdeaux [N] du 4 janvier 2017 et [W] du 23 avril 2015 ;
- condamné M. [M] [B] à exécuter l'intégralité des travaux de réfection complète de la toiture, en ce compris le terrasson Ouest, de réfection de la façade et d'isolation des canalisations, pour lesquels il a été condamné par jugement du tribunal judiciaire du Havre du 30 janvier 2020, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Rouen du 11 février 2021, dans les conditions prévues par ces décisions, sous astreinte définitive de 500 euros par jour de retard dans un délai de trois mois, passé un délai de quatre mois à compter de la signification du présent jugement ;
- condamné M. [M] [B] à payer à la SARL Renaux Laine la somme de 1500 euros à titre de dommages et intérêts ;
- débouté M. [M] [B] de l'ensemble de ses demandes ;
- condamné M. [M] [B] aux dépens en ce compris l'intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement prévus à l'article
L111-8 du code des procédures civiles d'exécution à défaut de réglement dans le mois suivant la signification du jugement
- condamné M. [M] [B] à payer à la SARL Renaux Laine la somme de 2000 euros au titre de l'article
700 du code de procédure civile.
Par déclaration reçue le 18 mars 2022, M. [M] [B] a relevé appel de toutes les dispositions de cette décision.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 juin 2022.
Suivant note envoyée électroniquement le 21 juin 2022, la cour a demandé aux parties de faire valoir leurs observations quant à l'impossibilité pour elle de prononcer une nouvelle astreinte au titre des travaux de réfection du toit, de la façade et des canalisations, dès lors que le juge de l'exécution ne peut modifier le dispositif de la decision de justice qui sert de fondement aux poursuites.
La SARL Renaux Laine a fait valoir ses observations suivant note reçue le 30 juin 2022 et M. [B] suivante note reçue le 1er juillet 2022.
Exposé des prétentions des parties
Par dernières conclusions reçues le 9 juin 2022 , M. [M] [B] demande à la cour de :
- infirmer la décision en toutes ses dispositions ;
- débouter la société Renaux Laine de l'ensemble de ses demandes.
A titre reconventionnel M. [M] [B] demande à la cour de juger :
- qu'il sera autorisé à faire exécuter les travaux de couverture sur le bâtiment
exploité par la Société Renaux Laine selon les devis des Entreprises Marelle et Baudoin Henry,
- que la Société Renaux Laine sera tenue de fournir un calendrier d'exécution des travaux en dehors des périodes de vacances des Entreprises fournisseurs et intervenantes,
- que la Société Renaux Laine sera tenue d'établir un plan d'évacuation complet de ses employés et de ses matériels en prévention des risques d'exposition à l'amiante,
- qu'a défaut d'intervention possible des Sociétés Marelle et Baudoin Henry, du fait de cette dernière, elle sera tenue d'établir un calendrier qui tient compte non seulement des procédures administratives réglementaires à mettre en place, des délais d'approvisionnement des Entreprises intervenantes et de la réception des avis favorables de l'ensemble des organismes administratifs requis par la législation et les recommandations de L'OPPBTP ;
- qu'elle sera tenue au paiement d'une astreinte de 1000 euros par jour de retard a compter de la décision a intervenir en cas de non remise de l'ensemble de ces documents et autres procédures sollicitées ci-avant ;
- que cette astreinte commencera à courir à compter de la signifcation de l'arrêt à intervenir ;
- que toute action et instance lui sera refusée à quelque titre que ce soit en rapport avec le litige dont s'agit, impliquant tant les procédures abouties que les procédures en cours, tant qu'elle n'aura pas satisfait aux dispositions de la decision à intervenir,
A titre subsidiaire :
- désigner tel expert qu'il plaira à la cour de nommer, avec pour mission notamment de dire si les travaux résultant des devis présentés tant par
M. [B] que par la société Renaux Laine sont conformes à la législation actuelle concernant les travaux de désamiantage et de dire si les travaux, ordonnés tant par le tribunal que par la cour au regard de cette législation, peuvent étre exécutés par phases et si à l'occasion de celles-ci une co-activité est autorisée. Dans la négative, dire si les travaux prévus par la société Marelle peuvent être exécutés en co-activité ;
- condamner en tout état de cause, la société Renaux Laine au paiement d'une somme de1 5.000 euros à titre des dommages et interéts pour procedure abusive ;
- condamner la société Renaux Laine au paiement d'une indemnité de
10 000 euros au titre de l'article
700 du code de procédure civile ;
- condamner aux entiers dépens de premiere Instance et d'appel et aux frais de recouvrement nécessités pour l'exécution de la décision a intervenir.
Par dernières conclusions reçues le 9 juin 2022, la SARL Renaux Laine demande à la cour de :
- confirmer le jugement du juge de l'exécution du 14 mars 2022 en toutes ses dispositions ;
En conséquence,
- débouter M. [M] [B] de l'ensemble de ses demandes,
Y ajoutant,
- condamner M. [M] [B] au paiement d'une indemnité de 3 500 euros au titre de l'article
700 du code de procédure civile ;
- condamner M. [M] [B] aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de la SELARL Lepillier Boisseau.
En application des dispositions de l'article
455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux dernières conclusions des parties pour l'exposé des moyens de celles-ci.
MOTIVATION
Sur la demande de liquidation des astreintes
M. [M] [B] reproche au premier juge de l'avoir condamné au paiement de la somme de 24 300 euros au titre de la liquidation des astreintes provisoires relatives aux travaux de réfection de façade, d'isolation des canalisations et de réfection de la toiture, sans avoir tenu compte de la chronologie des faits et de ses différentes tentatives d'intervention et sans avoir tenu compte du comportement de la SARL Renaux Laine, constitutif d'une cause étrangère l'ayant empêché d'exécuter le jugement du 30 janvier 2020 confirmé par l'arrêt du 11 février 2021.
Il soutient en effet, que les travaux concernant la toiture, nécessitent préalablement des travaux de désamiantage devant être réalisés conformément aux dispositions édictées selon le décret n° 20/2-639 du 4 mai 2012 relatives aux risques d'exposition à l'amiante qui imposent un certain nombre de démarches administratives préalables aux travaux et notamment l'obligation de délivrer à l'ensemble des organismes un plan de démolition, de retrait ou d'encapsulage sur tout support adapté et en outre compte tenu de la surface à traiter, interdisant toute co-activité supposant la cessation complète de toute activité de la Société Renaux-Laine, la libération complète des lieux et la protection de l'ensemble des matériels et équipements d'exploitation restés sur place.
Il fait valoir que malgré plusieurs sommations envoyées à la société Renaux-Laine d'avoir à cesser son activité afin de permettre la réalisation de désamiantage puis la réfection des travaux, le preneur ne s'est jamais exécuté, ce qui constitue une cause étrangère l'ayant empêché de se conformer au jugement du 30 janvier 2020.
La société Renaux Laine en réplique soutient que compte tenu de la période juridiquement protégée (du 12 mars 2020 au 23 juin 2020) en vertu de l'ordonnance N° 2020-304 du 25 mars 2020, le délai de trois mois pour l'exécution des travaux a commencé à courir à compter du 24 février 2020 jusqu'au 12 mars 2020, puis du 24 juin 2020 jusqu'au 7 septembre 2020 ; que l'astreinte provisoire a commencé à courir à compter du 7 décembre 2020 jusqu'au 7 mars 2021 ; que M. [B] n'a pas entrepris les travaux mis à sa charge.
Elle fait valoir que la législation sur l'amiante qui était connue des parties, ne peut constituer une cause extérieure justifiant l'absence de réalisation des travaux dans les délais requis.
Elle soutient que M. [B] est mal fondé à vouloir justifier son inaction dans la commande des travaux par le fait que s'agissant d'une toiture amiantée, ces travaux nécessiteraient de respecter les dispositions règlementaires en la matière, puisqu'en effet M. [B] a fait établir le 5 mars 2020 un devis prenant en compte les nouvelles obligations en matière de désamiantage.
Elle prétend que dans la mesure où M. [B] ne lui a jamais communiqué les devis sur le fondement desquels il entendait faire réaliser les travaux, elle n'a pu accepter une intervention dans ses locaux, sans savoir exactement qui allait les réaliser et quels travaux allaient être mis en oeuvre, alors que l'expert judiciaire a entériné des travaux bien précis. N'ayant aucune garantie ni réponse de son bailleur, elle n'a pas été mise en mesure de répondre favorablement aux demandes de ce dernier qui exigeait la fermeture totale de la société durant les travaux.
En outre et entre le mois d'août 2020 et le mois de mars 2021, M. [B] ne s'est plus manifesté. Elle précise qu'elle a donné ses dates de disponibilité le 11 mai 2020 durant l'été, mais les dates ont été refusées par courrier de son conseil du 5 juin 2020.
Puis par sommation interpellative du 12 avril 2021, le bailleur lui a demandé de prendre toutes ses dispositions pour libérer intégralement les lieux avant le 29 mai 2021. Toutefois outre qu'il ne lui était pas possible de libérer les lieux avant cette date, elle a informé son bailleur que les travaux pouvaient être faits par tranches, sans qu'il soit nécessaire de procéder à la fermeture du garage.
Elle soutient que de nouveau interrogée, l'entreprise Berdeaux [N], sur le fondement du devis duquel les travaux ont été ordonnés, a confirmé que les opérations de désamiantage peuvent être réalisés en 5 phases par l'extérieur du bâtiment.
Elle fait valoir qu'à ce jour rien n'est encore déterminé quant aux dates d'intervention des entreprises puisque M. [B] conditionne ces interventions à des modalités non retenues par l'expert, à savoir le nettoyage de la toiture par le preneur et l'arrêt complet de l'activité.
Sur les travaux relatifs à la réfection de la façade et les travaux d'isolation des canalisations.
Il est constant que le jugement du 30 janvier 2020 confirmé par arrêt du 11 février 2021, a condamné M. [B] à faire réaliser outre la réfection complète de la toiture, celle de la façade tels que décrits et chiffrés dans le devis de la société Stéphane Laine du 27 février 2017 et d'isolation des canalisations tels que décrits et chiffrés dans l'expertise judiciaire, dans le délais de trois mois de la signification du jugement, puis passé ce délai et à défaut d'exécution, sous astreinte de 50 euros pour les premiers travaux et de 20 euros pour les seconds par jour de retard durant trois mois, six mois après la signification du jugement.
Le jugement a été signifié à M. [B] le 24 février 2020 . Le délai a donc commencé à courir à compter de cette date jusqu'au 12 mars 2020 date à compter de laquelle comme en première instance la société Renaux Laine propose de la suspendre jusqu'au 23 juin 2020 en raison de l'état d'urgence sanitaire, qui faisait obstacle à leur réalisation, pour reprendre du 24 juin jusqu'au 7 septembre 2020, de sorte que l'astreinte a commencé à courir à compter du 7 décembre 2020 ( six mois après la signification du jugement en tenant compte de la période de suspension) jusqu'au 7 mars 2021.
Il est constant que ces travaux n'ont jamais été réalisés, M. [B] ne le contestant pas, se bornant à évoquer les raisons l'ayant empêché à faire réaliser les travaux de toiture sans jamais développer de moyens relativement aux travaux de façade et de canalisation, ni invoquer de cause étrangère ayant fait obstacle à la réalisation de ces travaux complémentaires.
C'est donc par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a liquidé les astreintes relatives à ces travaux à hauteur de 4 500 euros pour la façade et à 1800 euros pour les canalisations.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné M. [B] à payer ces sommes à la société Renaux Laine.
Sur les travaux relatifs à la toiture
Selon l'article
L131-4 du code des procédures civiles d'exécution, le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés rencontrées pour l'exécuter. (...)
L'astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère.
Il est acquis aux débats, que les travaux concernant la réfection de la toiture n'ont pas été réalisés dans les délais impartis par le jugement du 30 janvier 2020 confirmé par arrêt du 11 février 2021.
Conformément aux calculs repris ci-dessus, M. [B] devait réaliser les travaux avant le 7 septembre 2020, puis un nouveau délai lui était accordé pour le calcul de l'astreinte de six mois, à compter de la signification du jugement, intégrant la période d'urgence sanitaire. Ainsi l'astreinte courait à défaut de réalisation de ces travaux à compter du 7 décembre 2020 jusqu'au 7 mars 2021.
Pour justifier la non réalisation de ces travaux, M. [B] invoque tout d'abord l'état d'urgence sanitaire, lequel aurait interdit toute intervention durant 18 mois.
Toutefois c'est par une juste appréciation de la cause que le premier juge a relevé que l'état d'urgence sanitaire ne peut être considéré comme une cause étrangère à l'origine de la non réalisation des travaux, dès lors que M. [B] n'a fait réaliser qu'un devis le 5 mars 2020 par la société Euro Couverture pour le retrait de l'amiante tandis que les deux autres devis sont intervenus au delà du délai d'astreinte, soit le 15 mars 2021 par l'entreprise Marelle et le 21 mai 2021 par la société Baudouin. L'état d'urgence sanitaire qui s'est terminé le 12 mai 2020 n'est donc pas à l'origine de l'inexécution des travaux, M. [B] ayant eu largement le temps de consulter d'autres entreprises s'il le souhaitait, avant le 7 mars 2021 et de commander les travaux.
M. [B] invoque par ailleurs et surtout les contraintes liées au désamiantage résultant des travaux de toiture et le comportement de la société Renaux Laine, laquelle soutient que les travaux peuvent intervenir par phases, sans fermeture du garage, alors que selon M. [B], de tels travaux ne peuvent être réalisés sans la libération totale des lieux de tous occupants, le déménagement des installations et la cessation de toute activité pendant la période des travaux.
L'analyse chronologique des échanges et pièces versées aux débats, permet toutefois de relever que M. [B] qui devait faire réaliser les travaux de toiture tels que décrits et chiffrés dans le devis Berdeaux [N] du 4 janvier 2017 et [W] du 23 avril 2015, ne s'est rapproché de la première entreprise que le 3 juin 2020. Antérieurement, il a fait établir un devis par la société Euro Couverture le 5 mars 2020, concernant la phase préalable de désamiantage. Par l'intérmédiaire de son conseil, il a par courrier du 13 mars 2020 invité la société Renaux Laine à lui communiquer dans un délai de dix jours la période qui serait la moins pénalisante pour elle, précisant que durant ces travaux qui devaient durer 15 jours sur trois semaines calendaires, l'entreprise Renaux Laine devait suspendre toute activité. Le devis n'était toutefois pas joint à cette lettre et il n'était pas fait état des travaux de réfection proprement dits, mais uniquement de la phase de désamiantage.
La société Renaux Laine n'ayant pas répondu, une nouvelle lettre de rappel était envoyée à cette dernière le 7 mai 2020.
A cette date, la société Berdeaux [N] n'était toujours pas contactée par M. [B].
Le 11 mai, le preneur répondait par l'intermédiaire de son conseil, pour lui indiquer les dates auxquelles le garage fermerait l'atelier carosserie et les deux ponts élévateurs soit du 20 au 31 juillet 2020, et du 10 au 21 août 2020 ce qui correspondait aux délais repris au devis d'Euro Couverture.
Cette réponse ne satisfaisait toutefois pas M. [B] lequel par courrier de son conseil du 5 juin 2020, lui répondait que cette proposition était incohérente et que l'activité devait cesser totalement.
Or à cette même date, M. [B] avait connaissance de ce que les travaux pouvaient se faire par phases, sans nécessité d'une suspension d'activité totale.
En effet, par courrier du 4 juin 2020, l'entreprise Berdeaux [N], qui avait été contactée la veille par M. [B], lui indiquait que son devis n'était plus d'actualité, que des prestations devaient s'ajouter compte tenu de la législation sur l'amiante dans les lieux accueillant du public, mais surtout, et quand bien même il était précisé que les travaux ne pourraient être réalisés aux dates proposées, il n'était nullement imposé une cessation totale de l'activité. L'activité du garage était prise en compte par le gérant de la société Berdeaux [N],qui indiquait toutefois que les travaux ne pourraient pas intervenir avant 2021, sans autre précision sur la date.
Ainsi dans son courrier du 4 juin 2020, M. [N] gérant de la société Berdeaux rappelait qu'il existait trois possibilités : celle avec continuation de l'activité et deux solutions avec cessation d'activité. Aucune de ces solutions ne pouvaient toutefois intervenir dans les délais et dates communiquées.
Pour autant et alors qu'il avait connaissance de la possibilité de réaliser les travaux sans cessation d'activité, dans son courrier du 5 juin 2020, le conseil de M. [B] conditionnait l'exécution de ceux-ci à une fermeture totale du garage. A la suite de ce courrier resté certes sans réponse, et alors qu'il avait connaissance du retard que prendraient les travaux compte tenu de la nouvelle législation en vigueur, M. [B] ne recontactera aucune des deux entreprises, que ce soit Euros Construction ou Berdeaux [N], ni son preneur la société Renaux Laine.
Bien qu'ayant connaissance de la complexité à mettre en oeuvre ces travaux tenant au désamiantage et alors que dès le 4 mars 2020 il avait connaissance de ce que ces travaux seraient nécessairement retardés et ne pourraient pas intervenir avant 2021, M. [B] est resté inactif. Il ne se rapprochera de la société Marelle, entreprise de désamiantage, que le 15 mars 2021 et de la société Baudouin Henry couvreur, que le 22 mars 2021, soit en tout état de cause, après la date à laquelle les travaux devaient être réalisés et après l'expiration du délai d'astreinte.
Ainsi entre le courrier du 5 juin 2020 et les devis des 15 et 22 mars 2021, M. [B] ne se préoccupera plus des travaux auxquels il a été condamné avec exécution provisoire, ne démontrant nullement avoir réalisé quelque démarche administrative préalablement aux opérations de désamiantage.
Ce n'est que par sommation interpellative du 12 avril 2021 qu'il se rapprochera de nouveau de la société Renaux Laine, lui imposant de nouveau de prendre toutes ses dispositions pour libérer intégralement les lieux au plus tard le 29 mai 2021.
Il en résulte que, quand bien même les travaux n'auraient pu être réalisés avant 2021, en tout état de cause seule la passivité de M. [B] durant dix mois, malgré l'urgence de la situation est à l'origine de l'inexécution des travaux, sans même que la société Renaux Laine puisse être assurée d'une
exécution conforme aux dispositions du jugement confirmé par l'arrêt du 11 février 2021, les différents courriers et sommation n'étant pas accompagnés des devis, lesquels ont de surcroît été réalisés par des entreprises autres que celles entérinées par l'expert.
M. [B] ne peut donc imputer à la société Renaux Laine le retard pris dans l'exécution des travaux, celle-ci ayant communiqué des dates et ayant ensuite été laissée sans aucune nouvelle durant plus de 10 mois.
Aucune cause étrangère n'étant dès lors rapportée pour justifier l'inexécution des travaux, le jugement sera confirmé en ce qu'il a liquidé l'astreinte à la somme de 18 000 euros et a condamné M. [B] au paiement de cette somme.
Sur la nouvelle astreinte
La SARL Renaux Laine prétend qu'il ne lui appartient pas de faire exécuter les travaux litigieux, quand bien même M. [B] paierait les sommes mentionnées au dispositif du jugement du 30 janvier 2022, eu égard à leur ampleur.
M. [B] fait valoir que l'article R121-1 du code de l'exécution interdit au juge de l'exécution de modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites et qu'il a été condamné à défaut d'exécution des travaux, à en verser le coût à hauteur de 84 284,12 euros, montant qu'il accepte de régler sous quinzaine.
Il est constant qu'aucun des travaux mis à la charge de M. [B] n'a été réalisé à ce jour, les parties étant en désaccord sur la nécessité ou pas de suspendre toute activité de garage, étant précisé que la société Renaux Laine verse aux débats un courrier de la société Berdeaux [N] du 2 juin 2022 aux termes duquel M. [N] confirme que l'entreprise peut intervenir depuis l'extérieur avec un isolement de la toiture en plaques polycarbonates en complément du film de propreté en sous-face de toiture, avec des zones de cantonnement à l'intérieur du garage comme vu le 3 août 2020, afin de déterminer un phasage pour poursuivre une activité, certes réduite, en 5 phases.
Toutefois il n'appartient pas au juge de l'exécution de modifier une décision de justice. Or il résulte de la lecture du dispositif du jugement du 30 janvier 2020 confirmé par arrêt du 11 février 2021, qu'à l'issue du délai de contrainte, et à défaut pour M. [B] de s'être exécuté, ce dernier est condamné à verser le montant correspondant aux travaux à réaliser à la société Renaux Laine, afin que celle-ci fasse exécuter elle-même lesdits travaux.
Le jugement indique en effet qu'à défaut d'exécution dans ce délai de trois mois, M. [M] [B] est condamné à verser à la société Renaux Laine les sommes de 84 284,12 euros, de 1259,58 euros et de 10 700 euros, ces montants correspondants aux devis des travaux entérinés par l'expert. Le jugement précise en outre : dit que l'ensemble des sommes allouées ci-dessus sera indexée en fonction de la variation de l'indice du coût de la construction BT01, l'indice de base étant celui en vigueur au mois d'avril 2017, date du dépôt du rapport d'expertise et le dernier indice à prendre en considération celui en vigueur à la date du jugement.
Il en résulte donc qu'une fois passé le délai d'astreinte, M. [B] doit verser les sommes qui correspondent au montant des travaux tels que préconisés par l'expert, afin de permettre à la société Renaux Laine de faire réaliser elle-même lesdits travaux, sans plus devoir attendre que son bailleur les commande et les fasse faire.
Il s'ensuit que le juge de l'exécution du tribunal judiciaire du Havre ne pouvait condamner M. [B] à faire réaliser les travaux sous une nouvelle astreinte, mais devait constater qu'il devait verser le montant du coût des travaux de réalisation de ceux-ci, la société Renaux Laine faisant son affaire personnelle desdits travaux.
Le jugement sera donc infirmé de ce chef.
Sur la demande d'expertise
Dans la mesure où la société Renaux Laine doit faire son affaire personnelle des travaux de toiture, la demande d'expertise est sans objet.
Sur la demande de dommages et intérêts et les droits proportionnels de recouvrement
L'article
954 alinéa 3 du code de procédure civile dispose que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
En l'espèce M. [B] demande d'infirmer toutes les dispositions du jugement mais ne développe aucun moyen s'agissant de la demande de dommages et intérêts formée en première instance par la société Renaux Laine.
La cour ne peut en conséquence que confirmer le jugement frappé d'appel sur ce point.
Il en est de même des dispositions relatives au droits proportionnels de recouvrement.
Sur les frais et dépens
Les dispositions du jugement déféré à ce titre seront confirmées.
La charge des dépens d'appel sera supportée par M. [B] conformément aux dispositions de l'article
696 du code de procédure civile.
En outre il serait inéquitable de laisser à la charge de l'intimée les frais irrépétibles exposés à l'occasion de l'instance d'appel.
Aussi M. [B] sera-t- il condamné à lui verser la somme de 2500 euros sur le fondement des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile et débouté de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
Confirme le jugement rendu le 14 mars 2022 par le tribunal judiciaire du Havre en toutes ses dispositions à l'exception de celles ayant condamné M. [M] [B] à exécuter l'intégralité des travaux de réfection complète de la toiture, en ce compris le terrasson Ouest, de réfection de la façade et d'isolation des canalisations, pour lesquels il a été condamné par jugement du tribunal judiciaire du Havre du 30 janvier 2020, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Rouen du 11 février 2021, dans les conditions prévues par ces décisions, sous astreinte définitive de 500 euros par jour de retard dans
un délai de trois mois, passé un délai de quatre mois à compter de la signification du présent jugement,
Statuant à nouveau des chefs du jugement infirmés
Déboute la société Renaux Laine de sa demande tendant à voir condamner M. [B] à exécuter les travaux de toiture, de façade et d'isolation de canalisations sous astreinte,
Y ajoutant,
Dit sans objet la demande d'expertise,
Condamne M. [M] [B] aux dépens d'appel et autorise la SELARL Lepillier Boisseau à les recouvrer conformément à l'article
699 du code de procédure civile,
Condamne M. [M] [B] à verser à la société Renaux Laine la somme de 2500 euros au titre de l'article
700 du code de procédure civile,
Déboute M. [M] [B] de sa demande d'indemnité au titre de l'article
700 du code de procédure civile.
La greffièreLa présidente
C. DupontE. Gouarin
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