1. |
Dans les griefs que la Commission a développés à l'endroit de l'Irlande du chef des mesures dont s'agit en l'espèce, le règlement no 101/76 du Conseil, du 19 janvier 1976, établissant une politique commune des structures dans le secteur de la pêche (JO no L 20 du 28 janvier 1976, p. 19) joue un rôle très important. L'article 4 de ce règlement — nous ne voulons pas approfondir ici l'ensemble des dispositions de cet acte —, parle de l'établissement d'une réglementation commune pour l'exercice de la pêche dans les eaux maritimes et la coordination des politiques de structures des États membres dans ce domaine. L'article 2 du règlement prévoit que le régime appliqué par chacun des États membres à l'exercice de la pêche dans les eaux maritimes relevant de sa souveraineté ou de sa juridiction ne peut entraîner de différences de traitement à l'égard d'autres États membres et que les États membres assurent l'égalité des conditions d'accès et d'exploitation des fonds situés dans les eaux visées à l'article 2, alinéa 1, pour tous les navires de pêche battant pavillon d'un des États membres et immatriculés sur le territoire de la Communauté. En outre, l'article 4 est libellé comme suit: «Lorsque l'exercice de la pêche dans les eaux maritimes des États membres visées à l'article 2 expose certaines de leurs ressources au risque d'une exploitation trop intensive, le Conseil, statuant sur proposition de la Commission selon la procédure prévue à l'article 43, paragraphe 2, du traité peut arrêter les mesures nécessaires à leur conservation. Ces mesures peuvent notamment comporter des restrictions en matière de capture de certaines espèces, de zones, de périodes, des méthodes et d'engins de pêche.» Le gouvernement irlandais objecte principalement à cela que ces dispositions, notamment l'article 2, ne visent que les eaux qui se trouvaient sous la souveraineté des États membres à l'époque de l'adoption du règlement. Il se fonde à cet égard sur le libellé de l'article 2, paragraphe 3, qui est le suivant: «Les eaux maritimes visées au présent article sont celles ainsi désignées par les lois en vigueur dans chaque État membre.» Or, fait-il valoir, à l'époque dont il s'agit en l'espèce la zone des 200 milles n'avait pas encore été fixée et les eaux territoriales étaient limitées — pour l'Irlande — à 12 milles. Comme d'autre part, poursuit le gouvernement irlandais, il est établi que les mesures de sauvegarde irlandaises devaient principalement être appliquées en dehors de cette zone, celles-ci ne sauraient être appréciées au regard du règlement no 101/76 aussi longtemps qu'une modification de la situation juridique n'a pas précisé que les dispositions du règlement en question sont également applicables aux eaux territoriales élargies. En soi, ce point litigieux pourrait être laissé de côté s'il s'agissait seulement de savoir si les mesures irlandaises sont contraires au principe de non-discrimination. En effet, cette question pourrait également s'apprécier — et il nous faudra encore y revenir par la suite — indépendamment du règlement no 101/76, puisque — comme nous l'avons vu — l'annexe VI aux résolutions de La Haye contient, elle aussie une interdiction de discrimination tout comme l'article 7 du traité de la CEE qui, même de l'avis du gouvernement irlandais, est applicable à l'ensemble des eaux relevant de la souveraineté de l'Irlande. Nous tenons néanmoins à approfondir la question, étant donné que le règlement no 101/76 joue également un rôle à d'autres égards, de l'avis de la Comission, et qu'il est difficile d'admettre que la définition contenue à l'article 2, paragraphe 3, vise seulement l'interdiction de discrimination, et non pas les autres principes contenus dans le règlement. Nous tenons la thèse surprenante du gouvernement irlandais pour erronée, et cela pour les raisons suivantes. En premier lieu, nous avons l'impression que ce qu'il est possible de déduire du règlement no 101/76 lui-même constitue plutôt le contre-pied de la thèse défendue par l'Irlande. Le texte de l'article 2, paragraphe 3, que nous avons déjà cité, est libellé d'une façon tellement générale que, conformément au principe selon lequel le domaine territorial du marché commun se détermine selon le territoire de chacun des États membres, —nous ne voulons aucunement développer ici des considérations empruntées au droit des gens — il peut être entendu sans plus en ce sens que ce qui importe, ce sont non pas les dispositions nationales en vigueur au moment de l'adoption du règlement, mais celles applicables lors de la période considérée. La définition de l'article 2, paragraphe 3, est valable pour l'ensemble du règlement, l'opinion contraire aboutirait à la conclusion entièrement inacceptable qu'en cas d'extension des eaux territoriales, à défaut d'une modification formelle du règlement il ne serait possible d'appliquer une politique commune en matière structurelle qu'à une partie minime des eaux communautaires, c'est-à-dire dans une mesure qui, en raison même de la nature des choses, ne permettrait pas de prendre des dispositions utiles. Il nous semble également qu'il importe de rappeler l'article 102 de l'acte relatif aux conditions d'adhésion et aux adaptations des traités qui est libellé comme suit: «Au plus tard à partir de la sixième année d'adhésion, le Conseil, statuant sur proposition de la Commission, détermine les conditions d'exercice de la pêche en vue d'assurer la protection des fonds et la conservation des ressources biologiques de la mer.» Il ne fait aucun doute que cette disposition prévoit une compétence communautaire pour l'ensemble des eaux territoriales sans égard à des situations précises et, partant, il semble qu'il soit incompatible avec celle-ci de soutenir qu'il pourrait exister des eaux territoriales exorbitantes à la compétence communautaire et pour lesquelles l'exercice de la pêche et la protection des fonds ne pourraient être assurés que par des mesures purement nationales. Nous croyons, en outre, qu'il faut attribuer une importance toute particulière à ce qui peut se déduire des résolutions de La Haye dans leur ensemble aux fins du problème qui nous intéresse en l'espèce. On constate tout d'abord qu'il y est question de la création d'une zone de pèche de 200 milles à l'intérieur de la Communauté et que l'extension des limites de pêche s'est opérée par une action concertée; que l'extension de compétence remonte donc à un acte de la Communauté. Telle est la raison pour laquelle il a été prévu que les droits de pêche des pays tiers dans ces zones seraient réglés par la voie de conventions bilatérales conclues avec la Communauté et c'est pourquoi aussi la Commission a été chargée de mener les négociations. Cela explique également pourquoi il est question à l'annexe VII de ressources communes et de mesures communautaires pour ce qui est du régime interne et de l'ensemble des eaux maritimes relevant de la souveraineté des États membres; il est donc admis que les dispositions relatives à la politique commune sont applicables à l'ensemble des eaux maritimes relevant de la souveraineté des États membres. En outre, il est clair que l'annexe VI, que nous avons déjà citée et dans laquelle il est question de mesures de conservation communes qui sont précisément en cours d'élaboration et selon laquelle les mesures unilatérales ne sont admises que sous certaines conditions, se rapporte à l'ensemble des eaux territoriales relevant de la souveraineté des États membres, ce qui implique nécessairement que les auteurs de ce texte ont admis dans ce domaine l'idée d'une autorité communautaire ainsi que l'applicabilité de l'article 4 du règlement no 101/76. Enfin, il est intéressant de noter non seulement que l'arrêt de la Cour dans les affaires 3, 4 et 6/76 (Kramer et autres, arrêt du 14 juillet 1976, Recueil 1976, p. 1279) — sur lequel nous reviendrons par la suite — affirme qu'il résulte de la nature des choses que la compétence réglementaire «ratione materiae» de la Communauté s'étend aussi à la pêche en haute mer — dans la mesure où une compétence analogue appartient aux États, en vertu du droit international public —, mais encore qu'il est possible de réfuter la thèse défendue par le gouvernement irlandais par référence à des réglementations adoptées ultérieurement, et notamment les règlements no 350/77 (JO no L 48 du 19 février 1977, p. 28) et no 1412/77 (JO no L 160 du 30 juin 1977, p. 5), ainsi qu'à une série d'autres réglementations invoquées par la Commission et contenant des dispositions analogues. Pour l'analyse détaillée de l'ensemble de ces réglementations nous renvoyons, Messieurs, aux développements de la Commission; nous soulignerons seulement que les mesures de conservation qu'ils prévoient se rapportent à l'ensemble de la zone des 200 milles et qu'il résulte clairement de leur économie que le législateur communautaire admet, l'idée d'une compétence réglementaire dans le domaine de la pêche englobant dans ce cadre l'ensemble des eaux maritimes nationales, ce qui ne peut que confirmer, notamment si l'on considère les dispositions combinées des articles 1 et 4 du règlement 1412/77, l'idée qu'à défaut de modification explicite, le règlement no 101/76 se rapporte aux eaux maritimes élargies relevant de la souveraineté des États membres. Comment est-il néanmoins possible dans ces conditions de défendre la thèse selon laquelle la réglementation communautaire prévue par le règlement précité ne s'étend pas à la zone visée par les mesures irlandaises? Nous ne le comprenons guère. |
2. |
En second lieu, il convient d'examiner si à l'époque en question il était possible au demeurant de prendre des mesures nationales en vue de la conservation des ressources de pêche ou si seules les institutions de la Communauté avaient compétence dans ce domaine. Il s'agit ici d'un argument qu'ont fait valoir les défendeurs dans la procédure dont est issue l'affaire préjucielle 88/77. Il se rapporte toutefois aux seules eaux maritimes comprises dans la limite des 12 milles et il convient donc dans ce cadre — tout comme d'ailleurs dans la présente espèce — de laisser hors de propos les eaux côtières telles qu'elles sont définies aux articles 100 et 101 des actes d'adhésion, étant donné que des dérogations à la politique commune et notammment des limitations particulières des prises ont été déclarées licites pour ces eaux. Les défenseurs de la thèse de l'illégalité des mesures nationales s'appuient principalement sur l'article 102 déjà cité des actes d'adhésion ainsi que sur l'article 4, alinéa 1, du règlement no 101/76 que nous avons également déjà cité précédemment. En outre, ils rejettent toute référence à l'arrêt Kramer (affaires 3, 4, 6/76) en prenant motif de ce que la situation était différente à l'époque. Ils estiment, en ce qui concerne l'argument tiré des résolutions de La Haye où il est question, c'est un fait, de mesures unilatérales, que celles-ci ne visaient pas à modifier le règlement 101/76 et n'auraient d'ailleurs pu le faire. Enfin, et cet argument n'est pas des moindres, ils font valoir que le Conseil a arrêté en fait au début de l'année 1977 des mesures transitoires en vue de la conservation des ressources de pêche et qu'il a, ce faisant, fait usage des ses pouvoirs. En ce qui concerne ces allégations, il est indéniable qu'il existe une compétence communautaire dans le domaine des mesures de conservation des ressources de la pêche et que, dans ce cadre, l'article 4 du règlement no 101/76 occupe le premier plan. Il ne faut pas oublier toutefois qu'une disposition analogue figurait déjà à l'article 5 du règlement no 2141/70 (JO no L 236 du 27 octobre 1970, p. 1) et que, malgré cela, aucun grief n'a été avancé dans l'affaire Kramer à l'encontre de mesures de conservation nationales. Cela tient essentiellement au fait que les institutions de la Communauté n'avaient pas fait usage jusqu'alors de la possibilité d'arrêter une réglementation au niveau communautaire. Il a été souligné explicitement qu'à l'époque, les États membres avaient compétence pour agir parce que la Communauté n'avait pas encore assumé pleinement ses responsabilités en la matière. Une situation analogue existait manifestement aussi début avril 1977, car il ne faut pas perdre de vue que les mesures effectivement adoptées au niveau communautaire jusqu'à ce moment-là n'avaient pas un caractère global, mais visaient seulement des domaines partiels. Nous nous permettons de renvoyer à cet égard aux règlements qui les prévoient. Certes, il est incontestable qu'en fait, les circonstances de l'affaire Kramer ne sont pas entièrement les mêmes que celles de l'espèce. En particulier, les mesures nationales applicables à l'époque avaient été arrêtées en exécution des engagements que les Pays-Bas avaient souscrits dans le cadre de la Convention du 24 janvier 1959 sur la pêche dans l'Atlantique nord. Il s'agissait donc d'une réglementation qui avait force obligatoire pour tous les États intéressés (sont parties à la Convention tous les États membres à l'exception de l'Italie et du Luxembourg ainsi que sept pays tiers). Nous ne sommes toutefois pas certains que cela revête une importance décisive et, d'autre part, il faut admettre qu'il n'est pas du tout nécessaire de recourir exclusivement à l'arrêt Kramer pour justifier la thèse de la licéité de mesures de conservation nationales. Qu'il suffise de rappeler ici l'annexe VI aux résolutions de La Haye où la licéité de mesures nationales est clairement admise, sous certaines conditions. C'est vainement d'ailleurs que l'on objecterait à cela que ces résolutions ne visaient pas à modifier le règlement no 101/76 et n'auraient d'ailleurs pu le faire. En réalité, tel n'est pas du tout le but en vue duquel elles ont été arrêtées; elles visent simplement, en effet, à préciser — précision que la Cour a également donnée dans l'arrêt Kramer — qu'aussi longtemps que la Communauté n'a pas fait usage de ses compétences, des mesures peuvent être prises, en cas de besoin, sur le plan national. Enfin, référence peut également être faite dans ce contexte à la motivation du règlement no 350/77 du 18 février 1977 définissant certaines mesures intérimaires de conservation et de gestion des ressources de pêche. Il est dit, en effet, en termes explicites dans les considérants de ce règlement, ce qui suit: «(…), dans l'attente de l'établissement d'un régime communautaire de conservation et de gestion des stocks de pêche et sans préjudice des dispositions du présent règlement, les États membres peuvent adopter, conformément à la procédure et aux conditions définies à l'annexe VI de la résolution du Conseil du 3 novembre 1976, d'une manière non discriminatoire, des mesures appropriées supplémentaires pour assurer la protection des ressources des zones de pêche situées au large de leurs côtes». Toutefois, comme il n'existait en avril 1977 que des réglementations partielles — ainsi que nous l'avons déjà dit — et comme une politique globale était, certes, en discussion, mais n'avait pas encore été réalisée, il est incontestable, en fait, qu'il était encore permis en principe à l'époque de prendre des mesures de conservation sur le plan national. |
3. |
La condition capitale pour l'adoption de mesures de conservation est naturellement — nous l'avons déjà dit — que ces mesures soient nécessaires, c'est-à-dire que les ressources de pêche se soient déjà considérablement réduites dans une certaine zone ou qu'il existe un danger immédiat de pêche excessive ou encore que la régénération et, partant, les ressources futures soient menacées à défaut de restrictions et de mesures de protection. Sur ce point, certaines déclarations de la Commission ainsi que d'autres circonstances dont l'existence est apparue dans le cours de la procédure, peuvent nous porter à croire que les mesures irlandaises ne remplissaient pas cette condition. Nous songeons à ce qu'a dit la Commission au sujet de la baisse considérable des prises des pays tiers à la suite des mesures adoptées par la Communauté après le 1er janvier 1977. Si, en 1976, les bateaux battant pavillon de pays tiers ont encore pris plus de 400000 tonnes dans la zone considérée, le total des prises réalisées par ces mêmes navires en 1977 ne devrait plus atteindre que 130000 tonnes environ. En effet, une comparaison des quotas pour certaines variétés de poissons que les bateaux soviétiques pouvaient pêcher dans la zone VII (dont il s'agit en l'espèce) en 1975, d'une part, et 1977, d'autre part, ne manque pas d'impressionner; il en est de même si l'on compare ces chiffres à l'ensemble des prises de la Communauté dans la zone précitée en 1975. Il ne faut pas oublier, à ce propos, que la réduction des quotas va de pair avec une diminution des prises accessoires. Nous songeons en outre aux mesures adoptées sur le plan communautaire en vue de limiter les prises de harengs ou d'interdire celles-ci, mesures qui ont également apporté un soulagement considérable dans le secteur. Rappelons en outre qu'après l'ordonnance de la Cour de justice, l'application des mesures irlandaises a été suspendue à partir du 18 juillet 1977 et qu'aucune autre mesure n'a été prise, telle que la fixation de plans de pêche, etc … Si l'on y regarde de plus près, il apparaît cependant que ces motifs ne permettent pas de nier purement et simplement qu'il était nécessaire d'adopter des mesures de conservation sur le plan national en avril 1977. Naturellement, puisqu'il s'agit de l'époque à laquelle ont été appliquées les mesures irlandaises et, à la rigueur, des actions prévisibles dans ce cadre, il nous faut laisser hors de propos les mesures adoptées par le Conseil à une date ultérieure, comme par exemple les règlements no 1672/77 (JO no L 186 du 26 juillet 1977, p. 27), no 1709/77 (JO no L 189 du 29 juillet 1977, p. 8) et no 1779/77 (JO no L 196 du 3 août 1977, p. 8) arrêtés fin juillet début août 1977. En ce qui concerne les restrictions apportées à certaines prises des pays tiers — qui sont d'ailleurs limitées dans le temps —, il importe en outre de noter qu'il existait des mesures communautaires de ce genre dès le début de l'année 1977, comme par exemple le règlement no 194/77 du 28 janvier 1977 et le règlement no 373/77 du 24 février 1977. Cela n'a pas empêché la Commission de présenter, en mars 1977, des propositions en matière de mesures de conservation. Dans ces propositions, la Commission reconnaissait que certains stocks situés dans les eaux irlandaises avaient fait l'objet d'une pêche excessive et que l'adoption de mesures pour certaines variétés importantes de poissons des zones VI et VII apparaissait particulièrement urgente. C'est la raison pour laquelle les mesures de conservation proposées par la Commission prévoyaient, pour 1977, une réduction des prises de 41 %. C'est d'ailleurs aussi pourquoi la Commission n'a pas contesté en soi la nécessité de mesures de conservation — et cela encore au cours de la procédure orale — mais, a simplement souligné le fait qu'en raison de la réduction des prises des pays tiers, la situation était moins dramatique que ne le prétendait le gouvernement irlandais. Enfin, on ne saurait déduire du comportement de l'Irlande après l'ordonnance de la Cour du 13 juillet 1977 que les mesures adoptées par ce pays n'étaient pas nécessaires «ab origine». Il se peut que des mesures communautaires arrêtées entre-temps, ou qui seront bientôt arrêtées, ainsi que le fait que les mesures irlandaises avaient produit leurs effets pendant une période considérable aient joué un rôle à cet égard et que, de ce fait, l'adoption de mesures unilatérales plus radicales ait paru présenter moins d'urgence. En outre, il n'a pas été précisé dans la procédure pourquoi les plans de pêche sur lesquels l'Irlande avait insisté à l'origine, n'ont pas vu le jour. Faute d'en connaître la raison, on ne peut s'empêcher de supposer que des raisons de fait faisaient obstacle à leur réalisation, comme, par exemple, l'insuffisance des informations et l'impossibilité de réaliser un système de contrôle nécessaire qui ne saurait fonctionner qu'en collaboration avec les autres États membres. Pour toutes ces raisons, nous estimons que les mesures irlandaises ne sauraient être critiquées en prenant motif du fait qu'en principe, elles n'étaient pas nécessaires. Évidemment, c'est un autre problème de savoir — et nous y reviendrons plus amplement par la suite — si les mesures en question étaient nécessaire sous la forme globale dans laquelle le gouvernement irlandais a choisi de les adopter — et cela tant en ce qui concerne la zone à laquelle elles étaient applicables qu'aux variétés de poissons qu'elles visaient — ou s'il faut considérer qu'elles ont outrepassé la mesure du nécessaire. |
4. |
Nous poursuivrons donc l'analyse du cas d'espèce en examinant la forme et les effets des mesures irlandaises. Divers points de vue — qui, une fois de plus, remontent pour partie à l'affaire 88/77 — entrent ici en ligne de compte. Ainsi la question a-t-elle été soulevée de savoir si la limitation des prises ne doit pas être considérée comme constituant une mesure d'effet équivalent à une restriction quantitative au sens de l'article 30 du traité de la CEE et, partant, comme une mesure illégale. Le caractère conservatoire des mesures irlandaises critiquées a été mis en doute. En outre, on a soutenu que les mesures en question contreviennent à divers égards au principe de non-discrimination. Et, de surcroît, il a été dit que dans leurs effets sur l'organisation commune de marché, elles ne sont pas limitées à ce qui est absolument nécessaire et sont susceptibles de mettre en péril les négociations avec les pays tiers qu'il incombe à la Commission de mener aux termes des résolutions de La Haye.
|
5. |
Cela étant, nous disons en résumé que le recours de la Commission est fondé et qu'il faut constater en conséquence qu'en arrêtant les deux décrets du 16 février 1977 et en les appliquant à partir du 10 avril 1977, l'Irlande a manqué à ses obligations au titre du droit communautaire. De ce fait, l'Irlande doit être condamnée aux dépens du procès, conformément aux conclusions de la Commission. |