Vu la procédure suivante
:
Par une requête enregistrée le 9 décembre 2020, Mme C B, représentée par Me Frenehard, de la SELARL Actavoca, demande au tribunal :
1°) d'annuler la décision du 15 octobre 2020 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Dinan a prononcé à son encontre la sanction de révocation ;
2°) de mettre à la charge du groupement hospitalier de territoire (GHT) Rance Emeraude la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la décision attaquée est entachée d'une erreur d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 février 2021, le GHT Rance Emeraude, représenté par la SELARL Juriadis conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme B la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que le moyen n'est pas fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi du n° 83-634du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A,
- les conclusions de M. Met, rapporteur public,
- et les observations de Me Courset, de la SELARL Juriadis, représentant le GHT Rance Emeraude.
Considérant ce qui suit
:
1. Aux termes de l'article 81 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, alors en vigueur : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Premier groupe : / L'avertissement, le blâme, l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours ; / Deuxième groupe : / La radiation du tableau d'avancement, l'abaissement d'échelon à l'échelon immédiatement inférieur à celui détenu par l'agent, l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre à quinze jours ; / Troisième groupe : / La rétrogradation au grade immédiatement inférieur et à l'échelon correspondant à un indice égal ou, à défaut, immédiatement inférieur à celui afférent à l'échelon détenu par l'agent, l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans ; / Quatrième groupe : / La mise à la retraite d'office, la révocation. () ".
2. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
3. Il ressort des pièces du dossier qu'il est reproché à Mme B, agent titulaire exerçant les fonctions d'aide-soignante à temps partiel à hauteur de 80% au centre hospitalier de Dinan, d'avoir effectué, sans autorisation, en juin 2019 et de septembre 2019 à janvier 2020, alors qu'elle était en congé de maladie, des missions en qualité d'agent contractuel, comme auxiliaire de soins à temps incomplet, auprès de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) de Pleslin Trigavou, selon six contrats à durée déterminée, et ce, en méconnaissance de l'article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires alors en vigueur aux termes duquel : " I.- Le fonctionnaire consacre l'intégralité de son activité professionnelle aux tâches qui lui sont confiées. () ; / (.) IV.- Le fonctionnaire peut être autorisé par l'autorité hiérarchique dont il relève à exercer à titre accessoire une activité, lucrative ou non, auprès d'une personne ou d'un organisme public ou privé dès lors que cette activité est compatible avec les fonctions qui lui sont confiées et n'affecte pas leur exercice. () ", dispositions applicables même lorsque le fonctionnaire est placé en position de congé de maladie. Ces faits, non contestés par Mme B sont constitutifs de fautes disciplinaires.
4. Si Mme B soutient s'être trouvée dans l'obligation de travailler pour subvenir aux besoins de sa famille dès lors que, placée en congé de maladie à la suite d'un accident de service survenu le 21 juin 2019, elle n'aurait pas perçu son plein salaire, son employeur ayant tardé à reconnaître l'imputabilité au service de ses congés, ces allégations ne sont pas étayées par les pièces du dossier, le GHT Rance Emeraude produisant au contraire les arrêtés des 10 juillet, 10 septembre et 16 décembre 2019 reconnaissant les congés de maladie de l'intéressée comme imputables au service pour la période du 21 juin au 12 juillet 2019, du 12 juillet au 18 octobre 2019 puis du 19 octobre 2019 au 31 janvier 2020, ainsi que les bulletins de salaire établissant qu'elle a perçu l'intégralité de son salaire tout au long de cette période. Certains des contrats de travail conclus avec l'EHPAD de Pleslin Trigavou l'ont d'ailleurs été en dehors de la période de congés de maladie de Mme B.
5. Cependant, et même si Mme B a déjà fait l'objet en 2016 d'un rapport hiérarchique suite à des difficultés de communication avec les résidents de l'EHPAD et avec l'équipe soignante et si elle a également été sanctionnée, le 3 juillet 2018, d'une exclusion temporaire de fonctions de trois mois dont deux mois avec sursis pour avoir falsifié des ordonnances médicales, la sanction de révocation, qui est la plus lourde dans l'échelle des sanctions, ne peut être regardée, compte tenu de la faible importance, de la durée relativement courte et de la rémunération modique de l'activité exercée illégalement, comme proportionnée aux faits décrits au point 3. Par suite, Mme B est fondée à en demander pour ce motif l'annulation.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du GHT Rance Emeraude, qui est partie perdante, le versement à Mme B de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font obstacle, pour le même motif, à ce que soit mise à la charge de Mme B la somme que le GHT Rance Emeraude demande sur ce fondement.
D E C I D E :
Article 1er : La décision du 15 octobre 2020 du directeur du centre hospitalier de Dinan est annulée.
Article 2 : Le GHT Rance Emeraude versera à Mme B la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par le GHT Rance Emeraude sur le fondement des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent jugement sera notifié à Mme C B et au groupement hospitalier de territoire Rance Emeraude.
Délibéré après l'audience du 16 décembre 2022, où siégeaient :
M. Kolbert, président,
Mme Allex, première conseillère,
M. Dayon, conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 janvier 2023.
La rapporteure,
signé
A. ALe président,
signé
E. KolbertLa greffière,
signé
C. Salladain
La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°2005522