Cour de cassation, Deuxième chambre civile, 4 mars 2021, 19-24.089

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2021-03-04
Tribunal de grande instance de Paris
2019-07-11

Texte intégral

CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 mars 2021 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 182 F-D Pourvoi n° B 19-24.089 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 4 MARS 2021 La société BNP Paribas, société anonyme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° B 19-24.089 contre le jugement rendu le 11 juillet 2019 par le tribunal de grande instance de Paris (service du juge de l'exécution saisies immobilières), dans le litige l'opposant à M. E... C..., domicilié [...] , défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Marc Lévis, avocat de la société BNP Paribas, de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de M. C..., et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 20 janvier 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal de grande instance de Paris, 11 juillet 2019), rendu en dernier ressort, et les productions, la société Banque nationale de Paris intercontinentale, aux droits de laquelle se trouve la société Banque nationale de Paris Paribas (la banque), a fait délivrer, le 30 juin 2000, un commandement de payer valant saisie immobilière, publié le 26 septembre 2000, à M. C.... 2. Un jugement du 22 février 2001 a sursis à statuer jusqu'à ce qu'une décision soit intervenue dans l'instance opposant les parties. 3. Un jugement du 10 mars 2011 a déclaré irrecevable la demande de M. C... en son incident relatif à la nullité des actes notariés, l'a débouté de toutes ses autres demandes et a autorisé la reprise des poursuites de saisie immobilière. 4. Statuant sur l'appel formé contre ce jugement par M. C..., un arrêt du 11 avril 2013 a déclaré irrecevable l'appel en ce qu'il tendait à la constatation de la déchéance de la banque fondée sur l'article 688 de l'ancien code de procédure civile, l'a déclaré recevable en ce qu'il tendait à la nullité des actes authentiques en vertu desquels la procédure de saisie immobilière avait été engagée et à la constatation du caractère non exécutoire de ces actes, a constaté que les originaux des actes authentiques, ainsi que les offres de prêt, avaient été versés aux débats par la banque, a confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, y ajoutant, a débouté M. C... de sa demande tendant à la constatation du caractère non exécutoire des actes authentiques et a rejeté toute autre demande. 5. Un jugement du 26 mars 2015 a autorisé la reprise de la procédure de saisie immobilière. 6. A l'issue de ces procédures, la banque a fait sommation à M. C..., le 20 mai 2019, d'assister à l'audience d'adjudication du 11 juillet 2019 et, par jugement de ce jour, le tribunal a prononcé la déchéance de l'ensemble de la procédure de saisie immobilière en application des articles 690, alinéa 9, et 715 de l'ancien code de procédure civile.

Examen du moyen



Enoncé du moyen

7. La banque fait grief au jugement de prononcer la déchéance de l'ensemble de la procédure de saisie immobilière, alors : « 1°/ que si l'autorité de la chose jugée s'attache seulement au dispositif et non aux motifs, elle s'étend à ce qui a été implicitement jugé comme étant la conséquence nécessaire du dispositif ; qu'en prononçant la déchéance de l'ensemble de la procédure de saisie immobilière, quand les jugements des 10 mars 2011 et 26 mars 2015 avaient déclaré irrecevable la demande de M. C... en son incident relatif à la nullité des actes notariés, avaient débouté M. C... de toutes ses autres demandes et avaient autorisé la reprise des poursuites de saisie immobilière introduites par la banque, suivant commandement en date du 30 juin 2000 ayant fait l'objet de jugements de prorogation de ses effets des 24 juillet 2003, 6 juillet 2006, 25 juin 2009 et 21 juin 2012, le tribunal de grande instance a méconnu la chose précédemment jugée et a violé les articles 480 du code de procédure civile et 1351 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; 2°/ qu'en retenant que le prononcé de la déchéance n'avait fait auparavant l'objet d'aucune demande, quand il résulte au contraire de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 11 avril 2013 que M. C... avait déjà présenté une demande de prononcé de la déchéance de la procédure de saisie, le tribunal de grande instance a violé l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause. »

Réponse de la Cour

8. Selon l'article 1351 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause, que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité. 9. Dès lors qu'il ressort des productions que ni le jugement du 10 mars 2011 ni celui du 26 mars 2015 n'ont statué sur une demande de déchéance et que l'arrêt du 11 avril 2013 a déclaré l'appel irrecevable en ce qu'il tendait à la constatation de la déchéance fondée sur l'article 688 de l'ancien code de procédure civile, c'est sans encourir les griefs du moyen que le tribunal a retenu que la demande de déchéance dont il était saisi ne se heurtait pas à l'autorité de la chose jugée des décisions antérieures et a prononcé, en conséquence, la déchéance de l'ensemble de la procédure de saisie immobilière. 10. Le moyen, inopérant en sa seconde branche, n'est, dès lors, pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS

, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société BNP Paribas aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du quatre mars deux mille vingt et un et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

MOYEN ANNEXE

au présent arrêt Moyen produit par la SCP Marc Lévis, avocat aux Conseils, pour la société BNP Paribas Il est reproché au jugement attaqué d'avoir prononcé la déchéance de l'ensemble de la procédure de saisie immobilière. AUX MOTIFS QUE « L'article 690 de ce code prévoit que dans le cas où des dires sont déposés et si l'adjudication ne peut être maintenue à la date fixée dans la sommation, la date nouvelle est fixée dans le jugement à 30 jours au moins et à une audience au plus éloignée de 60 jours. L'article 715 prévoit que ce délai est prescrit à peine de déchéance. En l'espèce, le jugement du 22 février 2001, en ordonnant le sursis à statuer jusqu'au prononcé d'une décision rendue dans une autre instance, n'a fixé aucune date de vente, remettant celle-ci à une date indéterminée ( ) S'il incombe au demandeur de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci, il n'est néanmoins pas tenu de présenter dans la même instance toutes les demandes fondées sur les mêmes faits. La demande de prononcé de la déchéance, pouvait donc être présentée en tout état de cause de la procédure et jusqu'à l'audience d'adjudication, étant observé qu'aucune des décisions rendues entre les parties n'a tranché ce point qui n'a fait l'objet d'aucune demande. Elle ne se heurte par conséquent pas à l'autorité de la chose jugée des décisions antérieures » ; 1°) ALORS QUE si l'autorité de la chose jugée s'attache seulement au dispositif et non aux motifs, elle s'étend à ce qui a été implicitement jugé comme étant la conséquence nécessaire du dispositif ; qu'en prononçant la déchéance de l'ensemble de la procédure de saisie immobilière, quand les jugements des 10 mars 2011 et 26 mars 2015 avaient déclaré irrecevable la demande de M. C... en son incident relatif à la nullité des actes notariés, avaient débouté M. C... de toutes ses autres demandes et avaient autorisé la reprise des poursuites de saisie immobilière introduites par la BNP Paribas, suivant commandement en date du 30 juin 2000 ayant fait l'objet de jugements de prorogation de ses effets des 24 juillet 2003, 6 juillet 2006, 25 juin 2009 et 21 juin 2012, le tribunal de grande instance a méconnu la chose précédemment jugée et a violé les articles 480 du code de procédure civile et 1351 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; 2°) ALORS QU'en retenant que le prononcé de la déchéance n'avait fait auparavant l'objet d'aucune demande, quand il résulte au contraire de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 11 avril 2013 que M. C... avait déjà présenté une demande de prononcé de la déchéance de la procédure de saisie, le tribunal de grande instance a violé l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause.