CJUE, Conclusions de l'avocat général Lenz, 4 octobre 1994, C-324/93
Mots clés
Libre circulation des marchandises · Importation d'un stupéfiant (diamorphine). · convention · quot · question · importation · stupéfiants · membre · états · tiers · interprétation · commerce · uni · communautaire · royaume
Synthèse
Juridiction : CJUE
Numéro affaire : C-324/93
Date de dépôt : 25 juin 1993
Titre : Demande de décision préjudicielle: High Court of Justice, Queen's Bench Division - Royaume-Uni.
Rapporteur : Murray
Avocat général : Lenz
Identifiant européen : ECLI:EU:C:1994:357
Texte
Avis juridique important
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61993C0324
Conclusions de l'avocat général Lenz présentées le 4 octobre 1994. - The Queen contre Secretary of State for Home Department, ex parte Evans Medical Ltd et Macfarlan Smith Ltd. - Demande de décision préjudicielle: High Court of Justice, Queen's Bench Division - Royaume-Uni. - Libre circulation des marchandises - Importation d'un stupéfiant (diamorphine). - Affaire C-324/93.
Recueil de jurisprudence 1995 page I-00563
Conclusions de l'avocat général
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Monsieur le Président,
Messieurs les Juges,
A ° Introduction
1. La présente affaire soulève la question de savoir si les dispositions du traité relatives à la libre circulation des marchandises (articles 30 et suivants du traité CEE) sont applicables au commerce d' héroïne (et autres stupéfiants).
2. La diamorphine (héroïne) est un dérivé de l' opium qui est obtenu par transformation de la morphine. La plupart des pays interdisent son utilisation en raison du risque d' emploi illicite. Au Royaume-Uni, c' est pourtant le traitement le plus employé pour soulager la douleur en cas de maladie grave ou incurable. Selon les indications fournies par la juridiction de renvoi, 238 des 241 kg d' héroïne consommés à des fins médicales dans le monde entier en 1990 l' ont été au Royaume-Uni.
3. La diamorphine relève des stupéfiants au sens de la convention unique de 1961 sur les stupéfiants, signée à New York en 1961 (ci-après la "convention") (1). Cette convention abroge et remplace un certain nombre de conventions existant dans ce domaine (en commençant par la convention internationale sur l' opium de 1912).
4. Il est admis dans le préambule de la convention "que l' usage médical des stupéfiants demeure indispensable pour soulager la douleur et que les mesures voulues doivent être prises pour assurer que des stupéfiants soient disponibles à cette fin" (2). Il y est également constaté que la toxicomanie est un fléau pour l' individu et constitue un danger économique et social pour l' humanité (3). Pour être efficaces, les mesures prises contre l' abus des stupéfiants doivent, selon les parties, être coordonnées et universelles. Une action universelle de cet ordre exige à leur avis une coopération internationale "guidée par les mêmes principes et visant des buts communs" (4).
5. Toutes les mesures de contrôle prévues dans la convention s' appliquent selon son article 2, paragraphe 1, aux stupéfiants énumérés au tableau I. Au nombre de ces mesures figure en premier lieu l' obligation faite aux parties par l' article 19 de la convention d' adresser à l' organe international de contrôle des stupéfiants à Vienne des évaluations annuelles "pour chacun de leurs territoires". Dans ces évaluations, il y a lieu, entre autres, d' indiquer la quantité de stupéfiants qu' il est prévu d' utiliser l' année suivante à des fins médicales ou scientifiques, ou pour la fabrication d' autres stupéfiants ou d' autres produits. Il y a lieu de signaler également les quantités de stupéfiants qui seront en stock au 31 décembre de l' année à laquelle les évaluations se rapportent.
La diamorphine figure aussi bien au tableau I qu' au tableau IV de la convention.
6. L' article 21, paragraphe 1, de la convention dispose que:
"La quantité totale de chaque stupéfiant qui sera fabriquée et importée par un pays ou territoire quelconque au cours d' une année donnée ne devra pas être supérieure à la somme des éléments suivants:
a) la quantité consommée, dans la limite de l' évaluation correspondante, à des fins médicales et scientifiques;
b) la quantité utilisée dans la limite de l' évaluation correspondante, en vue de la fabrication d' autres stupéfiants, de préparations du tableau III et de substances non visées par la présente convention;
c) la quantité exportée;
d) la quantité versée au stock afin de porter celui-ci au niveau spécifié dans l' évaluation correspondante; et
e) la quantité acquise, dans la limite de l' évaluation correspondante, pour les besoins spéciaux."
7. Les articles 29 à 31 de la convention imposent aux parties d' exiger que la fabrication, le commerce et la distribution ainsi que l' importation et l' exportation vers "un État ou territoire quelconque" soient soumis à la délivrance d' une licence.
8. Dans ce contexte, il y a lieu de rappeler la disposition prévue à l' article 43, paragraphe 2. Selon cette disposition, deux ou plusieurs parties peuvent notifier au secrétaire général des Nations unies qu' à la suite de "l' institution d' une union douanière entre elles, ces parties constituent un seul territoire aux fins des articles 19, 20, 21 et 31".
9. L' article 2, paragraphe 5, de la convention prévoit, pour les stupéfiants qui ont été inscrits au tableau IV ° et qui sont particulièrement dangereux °, des mesures supplémentaires qui s' articulent comme suit:
"a) les parties devront adopter toutes les mesures spéciales de contrôle qu' elles jugeront nécessaires en raison des propriétés particulièrement dangereuses des stupéfiants visés; et
b) les parties devront, si, à leur avis, la situation dans leur pays fait que c' est là le moyen le plus approprié de protéger la santé publique, interdire la production, la fabrication, l' exportation et l' importation, le commerce, la détention ou l' utilisation de tels stupéfiants à l' exception des quantités qui pourront être nécessaires exclusivement pour la recherche médicale et scientifique, y compris les essais cliniques avec lesdits stupéfiants, qui devront avoir lieu sous la surveillance et le contrôle direct de ladite partie ou être subordonnés à cette surveillance et à ce contrôle."
10. Au nombre des parties à la convention qui en compte plus de 130, figurent, entre autres, tous les États membres des Communautés. Le Royaume-Uni a ratifié cette convention le 2 septembre 1964 (donc avant son adhésion aux Communautés européennes).
11. Au Royaume-Uni, c' est principalement le Secretary of State for the Home Department (ci-après le "Secretary of State") ° le ministre de l' Intérieur ° qui doit veiller à ce que les obligations résultant de la convention soient respectées. Selon les dispositions prévues par le Misuse of Drugs Act de 1971 (loi sur l' abus de drogues de 1971), l' importation de la diamorphine est interdite, sauf autorisation par le Secretary of State.
12. Jusqu' en août 1992, le Royaume-Uni n' autorisait pas l' importation de stupéfiants qui étaient fabriqués sur son territoire et y étaient facilement disponibles. Pour justifier cette politique qu' il pratiquait depuis longtemps, le Royaume-Uni se référait aux obligations résultant de la convention et ° notamment dans le cas de la diamorphine ° à la nécessité d' éviter tout risque de détournement vers des voies illicites et de garantir la sécurité des approvisionnements. Une politique analogue était suivie dans un certain nombre d' autres États membres et continue de l' être actuellement.
13. Jusqu' en 1992, les besoins en diamorphine au Royaume-Uni étaient exclusivement couverts par la société Evans Medical Ltd (ci-après "Evans"). Evans est aujourd' hui encore le plus grand producteur du produit fini pour le marché britannique et dans le monde entier.
La société Macfarlan Smith Ltd (ci-après "MSL") est actuellement le seul fabricant autorisé au Royaume-Uni de diamorphine brute sous forme de poudre sur la base de laquelle le produit fini est fabriqué. Puisque ce produit n' est utilisé que dans peu d' autres États, elle en est également le fabricant le plus important sur le plan mondial. Evans est le principal client de MSL pour ce produit.
14. Dans deux lettres du 17 août 1992, le Secretary of State a informé les avocats de MSL et d' Evans qu' il était parvenu, après réflexion, à la conclusion qu' il n' avait aucune raison valable de rejeter une demande d' importer un lot de diamorphine des Pays-Bas présentée par Generics (UK) Ltd (ci-après "Generics"). Generics s' est spécialisée dans la fabrication et la commercialisation de produits génériques et possède des filiales dans un certain nombre de pays européens (parmi lesquels les Pays-Bas).
Le Secretary of State a exposé dans ces lettres qu' il avait tenu compte tant de la nécessité de garantir un approvisionnement continu que d' éviter tout risque de détournement vers des voies illicites. Il a fait valoir qu' il avait examiné la demande de Generics à la lumière du droit national, du droit communautaire et du droit international. Le Secretary of State a indiqué dans ses lettres, entre autres,
"Il n' existe, selon nous, aucune incompatibilité entre la convention ... et les articles 30 et 36 du traité de Rome. L' article 2, paragraphe 5, de la convention de 1961 autorise les parties à limiter les importations, mais ne le leur impose pas. En vertu de cet article, elles ont le pouvoir d' interdire l' importation si, à leur avis, la situation dans leur pays fait que c' est là le moyen le plus approprié de protéger la santé publique. L' article 36 (du traité) prévoit que les interdictions ou restrictions d' importation peuvent être justifiées par des motifs de protection de la santé et de la vie des personnes...
En conséquence, la question de la sécurité au cours du transport a fait l' objet d' un examen attentif...
Quant à la question de la sécurité des approvisionnements, les ministres sont évidemment soucieux de garantir que la diamorphine reste à l' avenir aisément disponible à des fins médicales. Toutefois, ils sont convaincus que le meilleur moyen d' assurer l' approvisionnement est le système de l' adjudication ... nos collègues du ministère de la Santé nous ont communiqué que le NHSSA (l' administration responsable des achats) étudiait la possibilité de mettre en place un nouveau système d' adjudication pour la diamorphine à compter du début de 1993" (5).
15. Evans et MSL ont alors introduit un recours devant la Queen' s Bench Division de la High Court of Justice. Elles contestaient par là tant la délivrance d' une licence d' importation à Generics que la décision générale que traduisait ladite décision, à savoir celle de modifier radicalement la politique suivie antérieurement en ce qui concerne les importations de stupéfiants. Les demanderesses ont fait valoir que c' était à tort que le Secretary of State était parti dans sa décision de l' idée que sa politique antérieure était contraire au droit communautaire, notamment que l' interdiction d' importation était illégale conformément à l' article 30 du traité CEE et ne se justifiait pas par l' article 36. Elles ont souligné qu' en vertu de l' article 234 du traité, l' article 30 ne s' applique pas au commerce des stupéfiants au sens de la convention. Même si le Secretary of State s' était à juste titre fondé sur l' idée que les articles 30 et 36 étaient applicables, il n' aurait pas dû, selon les demanderesses, prendre lesdites décisions avant d' avoir vérifié auparavant si le système d' adjudication proposé était faisable et compatible avec la convention ainsi que si et, le cas échéant, comment ce système garantirait la continuité de l' approvisionnement en diamorphine du service national de la santé.
16. La High Court of Justice a suspendu la procédure pendante devant elle et déféré à la Cour de justice les questions préjudicielles suivantes:
"1) Les articles 30, 36 et 234 du traité doivent-ils être interprétés en ce sens qu' un État membre est en droit de refuser d' accorder une licence, requise par sa législation pour importer à partir d' un autre État membre des stupéfiants qui en sont originaires ou qui y sont en libre pratique au motif que
a) les dispositions des articles 30 à 36 ne sont pas applicables aux stupéfiants au sens ou dans le cadre de la convention unique sur les stupéfiants signée à New York le 30 mars 1961; et/ou
b) le respect de la convention nécessiterait en pratique l' attribution arbitraire de quotas entre importateurs et fabricants locaux; et/ou le système de contrôle prévu par la convention serait sans cela moins efficace; et/ou
c) (étant donné que la Communauté n' a pas adopté de directive ni d' autres dispositions régissant le commerce des stupéfiants et permettant de déclarer qu' elle constitue un 'seul territoire' au sens de l' article 43 de la convention unique et que plusieurs États membres qui fabriquent des stupéfiants en interdisent l' importation) l' importation des stupéfiants à partir d' un autre État membre menacerait la viabilité de l' unique fabricant sous licence dans l' État membre concerné, en entraînant des risques pour la sécurité d' approvisionnement de ce pays en drogues de ce type à des fins médicales essentielles?
2) Y a-t-il lieu d' interpréter la directive 77/62/CEE du Conseil du 21 décembre 1976 (JO 1977, L 13, p. 1) en ce sens qu' une autorité publique chargée de l' achat de drogues anti-douleur à des fins médicales est en droit de tenir compte de la nécessité de garantir la sécurité et la continuité de l' approvisionnement lorsqu' elle conclut des contrats de fourniture de ces drogues?"
B ° Appréciation en droit
La recevabilité de la question préjudicielle
17. Selon la Commission, il n' y aurait pas lieu pour la Cour de justice de répondre aux questions posées par la High Court puisqu' il s' agit là de questions "hypothétiques". Elle attire l' attention sur le fait que la juridiction de renvoi souhaiterait, par ses questions 1 a) à 1 c), obtenir une indication sur le point de savoir si un État membre est en droit de refuser une licence d' importation de stupéfiants en provenance d' autres États membres ° de manière générale ou sous certaines conditions. Dans la procédure devant la High Court, il ne s' agit cependant pas d' un refus mais d' une autorisation de délivrer une licence. Il est clair pour la Commission que des restrictions au commerce intracommunautaire des stupéfiants sont admissibles au titre de l' article 36 et que dans certaines conditions, il pourrait également être justifié, le cas échéant, de refuser de délivrer une licence d' importation ou d' exportation. Compte tenu de la grande diversité des circonstances envisageables et de l' importance des intérêts en jeu dans chaque cas, il ne serait toutefois pas souhaitable que la Cour se prononce sur ces problèmes dans la présente affaire. Selon la Commission, la question préjudicielle sous 2) serait encore plus hypothétique, puisqu' elle se réfère à l' achat de diamorphine par l' autorité compétente, alors qu' il s' agit dans la présente affaire d' une décision du Secretary of State d' autoriser l' importation de ce stupéfiant. Cette seconde question ne devrait par conséquent pas non plus recevoir de réponse de la Cour.
Generics soutient également que les questions préjudicielles 1 b), 1 c) et 2) ° mais non la question 1 a) ° sont de nature hypothétique puisqu' elles concernent des faits qui n' ont pas encore été prouvés. Son représentant a toutefois souligné à l' audience devant la Cour qu' il y avait tout de même lieu pour la Cour de répondre à ces questions.
18. La procédure préjudicielle prévue à l' article 177 du traité CEE constitue, selon la jurisprudence constante de la Cour, un instrument de coopération entre la Cour et les juges nationaux. Dans le cadre de cette coopération, il appartient au juge national d' apprécier la nécessité d' une décision préjudicielle pour rendre son jugement. Si la juridiction nationale décide par conséquent de saisir la Cour et si les questions posées portent sur l' interprétation du droit communautaire, la Cour est en principe tenue de statuer. La Cour n' a toutefois pas ° point sur lequel la Commission a attiré l' attention dans ses observations ° pour mission "de formuler des opinions consultatives sur des questions générales ou hypothétiques" (6).
19. Par la question 1 a), la juridiction nationale vise à savoir si les articles 30 à 36 du traité CEE sont applicables au commerce de stupéfiants. Comme MSL l' a exposé dans ses observations et comme cela ressort également de l' ordonnance de renvoi de la High Court, MSL et Evans font valoir dans la procédure au principal qu' en droit anglais elles pourraient exiger que le Secretary of State prenne sa décision sur la demande introduite par Generics en se fondant sur une base exacte en fait et en droit. Lorsqu' il a pris la décision litigieuse, le Secretary of State est parti de l' idée que les articles 30 à 36 du traité CEE étaient applicables dans la présente affaire. Si cette hypothèse se révélait inexacte, cette décision aurait été prise sur une base juridique incorrecte et pourrait le cas échéant être annulée par une juridiction nationale. La réponse à la première question préjudicielle a ainsi une importance directe aux fins du jugement que doit rendre la High Court. Selon nous, on ne saurait donc admettre qu' il s' agit ici d' une question de nature hypothétique.
20. Il est du reste à noter que même la Commission propose à la Cour des réponses aux questions posées par la High Court, bien qu' elle soutienne que ces questions sont de nature hypothétique et qu' elles ne nécessitent par conséquent pas de réponses. Selon la proposition de la Commission, la Cour devrait répondre à ces questions que ni les articles 30 à 36 ni l' article 234 du traité ne font obstacle à ce qu' une autorité nationale autorise, dans le cadre d' un système exigeant des licences, l' importation de stupéfiants à partir d' un autre État membre. Les représentants de MSL ont attiré l' attention au cours de l' audience, à juste titre, sur le fait que cette prise de position ne répond pas à la question posée et n' est pas de nature à permettre à la juridiction de renvoi de répondre à cette question. Le représentant du gouvernement du Royaume-Uni a remarquablement exprimé la même opinion en indiquant que la Commission propose ainsi à la Cour d' aider la juridiction nationale en donnant à une question que personne n' a posée une réponse à laquelle personne ne peut trouver à redire.
21. Certes, la Commission a attiré à juste titre l' attention sur le fait que l' appréciation en droit du commerce intracommunautaire de stupéfiants pose des problèmes très complexes. Le législateur communautaire n' a manifestement pas encore trouvé de solution à ces problèmes. Ces difficultés ne devraient toutefois pas empêcher la Cour de satisfaire à l' obligation qui résulte pour elle de l' article 177 du traité CEE, à savoir d' aider les juridictions nationales à résoudre les litiges sur lesquels elles ont à statuer en interprétant les dispositions du droit communautaire. Ces difficultés ne modifient donc en rien l' obligation faite à la Cour de répondre aux questions posées, autant que cela lui est possible. Elles ne sauraient partant pas non plus affecter la recevabilité des questions préjudicielles concernées.
22. Les questions 1 b) et 1 c) comportent ° comme l' a exposé la High Court dans son ordonnance de renvoi ° des allégations de MSL et Evans, relatives à certains faits dont l' existence n' est pas encore prouvée. Par ces questions, il n' est toutefois pas demandé à la Cour de statuer sur l' existence des faits allégués. Comme l' a exposé le représentant de MSL, la High Court vise plutôt à obtenir une réponse à la question de savoir si les aspects juridiques que comportent ces questions sont en tout état de cause pertinents au regard du droit communautaire. Le représentant du gouvernement du Royaume-Uni s' est exprimé de manière analogue. S' il y avait lieu de répondre par la négative à ces deux questions, la High Court n' aurait par conséquent plus besoin d' examiner les allégations de fait que ces questions comportent. Si la Cour devait par contre juger qu' un État membre peut interdire dans certains cas des importations de stupéfiants en provenance d' autres États membres, la High Court devrait vérifier s' il s' agit d' un tel cas en l' espèce.
23. Selon nous, il n' y a en principe que peu à objecter à la démarche de la High Court. Il est conforme au principe de bonne organisation de la procédure de différer la production de preuves dans une procédure donnée aussi longtemps qu' il n' a pas été clairement établi si lesdites preuves ont une importance aux fins de la procédure en cause. Compte tenu de l' importance du problème de principe soulevé par la question 1 a), celui de l' applicabilité des articles 30 à 36 au commerce licite de stupéfiants sur lesquels la Cour n' avait pas encore eu à se prononcer jusqu' ici, la décision de la High Court de saisir la Cour à un stade précoce de la procédure est elle aussi tout à fait compréhensible. Comme la Cour l' a reconnu, il appartient aux seules juridictions nationales qui sont saisies du litige d' apprécier, au regard des particularités de chaque affaire, tant la nécessité d' une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre un jugement que la pertinence des questions qu' elles posent à la Cour (7). Nous pensons pour ces motifs que la question 1 c) est recevable même si les allégations de faits sur lesquelles elle se fonde (selon lesquelles le fait d' autoriser les importations menacerait l' existence du producteur national et, par conséquent, la sécurité des approvisionnements) n' ont pas encore été prouvées.
Il en va autrement, selon nous, de la question 1 b), qui se compose de deux parties. Cette question vise à savoir, d' une part, si un État membre peut interdire l' importation de stupéfiants en provenance d' un autre État membre dès lors que le respect de la convention nécessiterait l' attribution arbitraire de quotas aux importateurs et fabricants locaux. Elle vise par ailleurs à savoir si l' interdiction des importations est légale lorsque le système de contrôle prévu par la convention serait, sinon, moins efficace. La question 1 b) pose par conséquent la question de la compatibilité ° en pratique ° de l' application des articles 30 à 36 du traité CEE avec les dispositions de la convention. Il y a lieu selon nous de traiter cette question en même temps que la question 1 a) en raison de leur lien de connexité étroit. A la lumière de la solution que nous allons proposer pour la réponse à cette dernière question, il ne nous semble pas nécessaire que la Cour donne une réponse distincte à la question 1 b).
24. La question 2 concerne l' interprétation des dispositions communautaires relatives à l' attribution de contrats de fournitures publiques. Cette question se fonde manifestement sur l' hypothèse émise par le Secretary of State dans ses lettres du 17 août 1992, à savoir que la question de la sécurité de l' approvisionnement du Royaume-Uni en diamorphine pourrait être prise en considération dans le cadre d' une procédure d' adjudication. Il n' est cependant pas litigieux que ce système d' adjudication s' est en définitive révélé impraticable. On peut par conséquent très bien se demander à quoi sert la question 2. La High Court n' a pas fourni d' explication à ce sujet dans son ordonnance de renvoi. Les observations des parties qui ont participé à la procédure devant la Cour ne fournissent pas non plus d' éléments à ce sujet. Dans ces conditions, nous partageons l' avis de la Commission selon lequel la Cour ne devrait pas se prononcer sur cette question. Nous étudierons naturellement à titre subsidiaire les problèmes qu' elle pose.
25. Nous ne faisons que mentionner le fait qu' il est question dans les questions posées à la Cour de manière générale de "stupéfiants" (au sens de la convention) alors que la présente affaire ne vise qu' un seul stupéfiant ° la diamorphine. Les réponses que la Cour donnera aux questions posées par la High Court ne seront cependant pas valables uniquement pour ce produit, mais également de manière générale pour tous les stupéfiants relevant de la convention. Pour ces motifs, nous parlerons nous aussi de stupéfiants en général dans la suite de nos conclusions dans la mesure où il ne s' agira pas pour nous de commenter les dispositions spécifiques de la convention applicables à la diamorphine (et à d' autres stupéfiants particulièrement dangereux).
L' applicabilité des articles 30 à 36
Généralités
26. Il nous semble opportun de rappeler, au début de notre analyse, que la question de l' applicabilité des articles 30 à 36 du traité CEE ne concerne que le commerce licite des stupéfiants, par conséquent le commerce de ceux de ces produits destinés à être utilisés par la médecine et par la science. Il ne fait aucun doute qu' il est nécessaire de combattre le commerce illicite de stupéfiants et les risques dont il est assorti. Cela vaut aussi bien pour les États membres que pour la Communauté (8).
27. La Cour n' a pas eu à statuer jusqu' ici sur la question de savoir si les articles 30 à 36 sont applicables au commerce licite de stupéfiants au sens de la convention. Cependant, elle a été plusieurs fois saisie de la question de savoir si un droit de douane (9) ou une taxe à l' importation (10) pouvait être imposé dans le cas d' une importation illégale ou si le commerce illicite de ces substances pouvait être assujetti à la TVA (11). La Cour a toujours répondu à ces questions par la négative.
28. A cet égard, les arrêts dans lesquels il s' agissait de la légalité de la perception d' une taxe sur des importations illicites de stupéfiants ont un intérêt particulier pour la présente affaire. Dans les arrêts rendus en 1982 dans les affaires Wolf et Einberger, la Cour a souligné que l' importation et la commercialisation des stupéfiants en cause (il s' agissait d' héroïne et de cocaïne dans l' une des affaires et de morphine dans l' autre) sont interdites dans tous les États membres, "exception faite d' un commerce strictement contrôlé et limité en vue d' une utilisation autorisée à des fins pharmaceutiques et médicales" (12). La Cour a jugé que cette situation juridique est conforme à la convention (13). Elle est parvenue par conséquent à la conclusion qu' aucune dette douanière ne prend naissance lors de l' importation de stupéfiants "qui ne font pas partie du circuit économique strictement surveillé par les autorités compétentes en vue d' une utilisation à des fins médicales et scientifiques" (14).
On peut déduire de ces deux arrêts qu' il y a lieu de verser un droit de douane lorsque les stupéfiants sont importés légalement. Puisque la Cour avait, dans les arrêts cités, à interpréter les articles 9 et 12 à 29 du traité CEE, et, partant, les dispositions du titre I sur la libre circulation des marchandises, il ne fait, selon nous (et contrairement à ce qu' a soutenu MSL), aucun doute qu' il en va de même pour l' interprétation des articles 30 à 36 qui relèvent également du titre I. Le commerce licite de stupéfiants au sens de la convention relève par conséquent du champ d' application des dispositions précitées.
L' article 234 et la convention
29. Il reste toutefois à vérifier quelles sont les conséquences résultant pour l' application des articles 30 à 36, de l' article 234, premier alinéa du traité CEE. Selon cette disposition, les "droits et obligations résultant de conventions conclues antérieurement à l' entrée en vigueur du présent traité entre un ou plusieurs États membres d' une part, et un ou plusieurs États tiers d' autre part", ne sont pas affectés par les dispositions du présent traité. Selon l' article 5 des actes d' adhésion du royaume de Danemark, de l' Irlande et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d' Irlande du Nord, l' article 234 du traité CE* est applicable pour ces États membres aux accords ou conventions conclus avant l' adhésion (15). Pour le Royaume-Uni, la convention unique de 1961 sur les stupéfiants qu' il a ratifiée en 1964 constitue par conséquent une convention au sens de l' article 234 (16).
30. Comme la Cour l' a déjà constaté à plusieurs reprises, l' article 234, premier alinéa, a pour objet de préciser, conformément aux principes du droit international (17), que l' application du traité n' affecte pas l' engagement de l' État membre concerné de respecter les droits des États tiers résultant d' une convention antérieure et d' observer ses obligations correspondantes (18). Pour la présente affaire, cela signifie que le Royaume-Uni est en droit de remplir les obligations qui résultent pour lui de la convention vis-à-vis des tiers et de respecter les droits qui résultent pour les tiers de cette convention. Si l' application des articles 30 à 36 devait empêcher le Royaume-Uni de respecter la convention, ces dispositions du traité devraient rester inappliquées.
Il y a lieu toutefois de rappeler que le Royaume-Uni devrait dans ce cas, conformément à l' article 234, deuxième alinéa, recourir "à tous les moyens appropriés" pour éliminer les incompatibilités entre la convention et le traité CEE. Le Royaume-Uni pourrait, le cas échéant, même être tenu de dénoncer cette convention. Cette dernière question est toutefois sans importance pour la solution de la présente affaire, de sorte que nous ne l' étudierons pas plus en détail.
31. Generics fait cependant valoir que l' article 234 ne joue aucun rôle dans la présente affaire, puisque ici seul le commerce entre États membres est concerné. Il s' agit d' une importation au Royaume-Uni de diamorphine en provenance des Pays-Bas; aucun État tiers n' est concerné par cette importation. Le gouvernement irlandais s' est exprimé de manière analogue. La République française indique également dans ses observations que l' article 234, premier alinéa, ne permet pas à un État membre de déroger aux règles du traité CE dans les relations intracommunautaires. L' existence de la convention ne ferait par conséquent pas obstacle à l' application des articles 30 à 36.
32. Tant Generics que la République française se fondent à cet égard sur l' arrêt de la Cour dans l' affaire Conegate (19). En effet, dans cet arrêt, la Cour a jugé "que les conventions conclues antérieurement à l' entrée en vigueur du traité ne peuvent être invoquées dans les rapports entre États membres pour justifier des restrictions dans le commerce intracommunautaire" (20).
MSL attire toutefois l' attention à juste titre sur le fait que ce principe ne s' applique que lorsqu' il n' affecte pas les droits d' États tiers. La jurisprudence de la Cour confirme ce point de vue. Ainsi, dans un arrêt de 1988, la primauté du droit communautaire vis-à-vis d' une convention antérieure à son entrée en vigueur est considérée comme dépendant du fait que, "comme en l' espèce, les droits des États tiers ne sont pas en cause" (21). Dans le premier arrêt que la Cour a rendu à propos de l' article 234, elle a déjà jugé que la manière dont les États membres réglementent les droits douaniers ne peut être critiquée par les États tiers dès lors qu' elle "ne porte pas atteinte aux droits que les États tiers tiennent des conventions en vigueur" (22). Il ne faut par conséquent pas accorder d' importance au fait qu' une telle réserve ne figure pas dans l' arrêt Conegate, précité, ce qui devrait s' expliquer par le fait qu' il ne faisait aucun doute pour la Cour dans cette affaire que les conventions litigieuses n' accordaient aux États tiers aucun droit qui aurait pu être affecté par application du droit communautaire dans les rapports entre États membres (23).
Le gouvernement du Royaume-Uni a en outre attiré, à juste titre, l' attention sur le fait que le point de vue soutenu par Generics était incompatible avec le principe inscrit à l' article 41 de la convention de Vienne sur le droit des traités (24).
33. Il y a lieu par conséquent d' analyser en premier lieu si la convention fonde des obligations des États membres vis-à-vis d' États tiers ou des droits que les États tiers peuvent faire valoir à l' encontre des États membres. Il s' agit, par conséquent, en d' autres termes de la question de savoir si la convention ne crée qu' une série d' obligations bilatérales entre les parties contractantes ou si elle crée des obligations multilatérales entre toutes ses parties (25). Il faut, pour trancher cette question, naturellement procéder à une interprétation de la convention qui, en elle-même ° comme nous l' exposerons de manière plus détaillée par la suite °, est réservée à la juridiction de renvoi. Selon nous, la Cour peut toutefois sans problème répondre elle-même à cette question. D' une part, elle a déjà procédé à une telle analyse dans des affaires antérieures (26). D' autre part, on ne saurait raisonnablement mettre en doute le fait que toutes les parties à la convention doivent respecter les obligations que la convention leur impose, comme le gouvernement portugais et MSL l' ont fait valoir à juste titre.
Le préambule de la convention, qui évoque la nécessité de prendre des mesures coordonnées et universelles contre l' abus des stupéfiants, constitue déjà un indice montrant que cette interprétation est la seule conforme aux objectifs de la convention. Il suffit de considérer que toutes les parties à la convention peuvent être affectées par les risques résultant de sa violation pour aboutir à la conclusion que les obligations du contrôle du commerce des stupéfiants résultant de la convention ne devraient pas seulement protéger les parties à la convention qui sont directement concernées: si, par exemple, une livraison de stupéfiants en provenance d' un État signataire et destinée à un client dans un autre État signataire de la convention est commercialisée illégalement du fait que les deux parties ont renoncé à appliquer les mesures de contrôle prévues par la convention dans leurs échanges commerciaux, cela ne met pas seulement en danger la population de ces deux États, mais également les autres parties à la convention. Il y a lieu enfin d' attirer l' attention sur le fait que l' article 43, paragraphe 2, de la convention prévoit, pour les membres d' une union douanière, la possibilité d' atténuer les inconvénients et les obstacles résultant pour le commerce international de l' application du système de contrôle prévu par la convention en notifiant la déclaration prévue à cet article (27). Cette disposition ne serait pas compréhensible si la question du respect des dispositions de la convention dans les rapports entre deux parties à cette convention n' affectait pas les intérêts des autres signataires.
34. L' article 234, premier alinéa, n' est toutefois pertinent que s' il y a contradiction entre une telle convention conclue avec des États tiers et le droit communautaire. La convention en cause doit par conséquent imposer un acte que le droit communautaire interdit ou elle doit interdire un acte que le droit communautaire impose. Pour vérifier si un tel conflit existe, il faut d' abord voir quel est le contenu, d' une part, de la convention en cause et, d' autre part, du droit communautaire.
35. Le Cour de justice peut assurément interpréter les dispositions pertinentes du droit communautaire et constater leur teneur. On peut par contre se poser la question de savoir si elle a compétence dans le cadre d' une procédure préjudicielle pour interpréter un accord international comme celui qui est en cause dans la présente affaire.
36. Dans l' arrêt qu' elle a rendu dans l' affaire Henn et Darby (28), la Cour semble avoir répondu implicitement à cette question par l' affirmative. Il s' agissait également dans cette affaire d' une procédure préjudicielle en application de l' article 177, portant sur la question de savoir si un État membre pouvait interdire l' importation de marchandises (il s' agissait dans l' affaire citée de films et de publications ayant un contenu pornographique) en provenance d' un autre État membre, pour respecter les obligations que lui imposait une convention internationale. La Cour avait jugé que:
"Il apparaît d' un rapprochement entre les dispositions conventionnelles auxquelles la House of Lords s' est référée et les considérations qui précèdent que l' exécution desdites conventions internationales par le Royaume-Uni n' est pas susceptible de créer un conflit avec les dispositions relatives à la libre circulation des marchandises, compte tenu de l' exception réservée par l' article 36 en ce qui concerne d' éventuelles prohibitions d' importation établies pour des raisons de moralité publique" (29).
37. La version allemande de ce passage ("dass ... keine Widersprueche ... entstehen koennen") donne à penser que la Cour a statué de manière définitive sur la compatibilité des obligations résultant des conventions litigieuses avec le droit communautaire. Si l' on considère cependant sa formulation dans la langue de procédure (anglais) (30), on voit que cela n' est pas aussi sûr qu' il y paraît. Au contraire, il semble que la Cour n' ait examiné les conventions en cause que de manière rapide et constaté que cet examen provisoire n' avait pas fait apparaître d' éléments susceptibles d' indiquer un conflit éventuel entre la convention et les articles 30 à 36 du traité. Il subsiste donc une possibilité que les juridictions nationales, en analysant la convention de manière plus approfondie, puissent parvenir à la conclusion que sur l' un ou l' autre point, le respect des obligations résultant de ces conventions n' est pas compatible avec l' application des articles 30 et suivants.
Cette interprétation me paraît également tout à fait compatible avec les conclusions que la Cour avait, dans l' arrêt en cause, tirées des considérations que nous venons de citer. La Cour avait, en effet, jugé que les dispositions de l' article 234 ne mettent pas obstacle à l' exécution par cet État des engagements résultant des conventions internationales "dans la mesure où un État membre fait usage de la réserve relative à la sauvegarde de la moralité publique" (31). Le représentant de MSL n' a pas eu tort de comparer à l' audience ce passage avec la réponse donnée par un oracle ("a thoroughly Delphic ruling"). Puisque l' article 234, premier alinéa, permet précisément à un État membre de respecter les obligations qui résultent pour lui d' une convention antérieure, la formule employée par la Cour ne semble pas vraiment avoir de sens. Cette contradiction apparente se résout lorsqu' on se fonde sur l' interprétation que nous venons de développer: la phrase de l' arrêt citée signifie alors simplement qu' il n' y a pas de contradiction entre les conventions internationales et le droit communautaire dans la mesure où des obligations résultant de ces conventions peuvent être considérées comme compatibles avec le traité en invoquant la dérogation prévue à l' article 36. Là où une telle interprétation n' est pas possible ° nous nous permettons de le préciser °, c' est, le cas échéant, l' article 234, premier alinéa, qui s' applique.
38. Dans quelques arrêts récents, la Cour s' est prononcée de manière nettement plus claire sur la question de la compétence pour l' interprétation de telles conventions. Tant dans l' affaire Levy (32) que dans l' affaire Minne (33), il s' agissait de la question de savoir si certaines dispositions nationales sur le travail de nuit des femmes étaient contraires au principe de l' égalité de traitement entre hommes et femmes tel qu' il résulte de l' article 5 de la directive 76/207/CEE du Conseil, du 9 février 1976, relative à la mise en oeuvre du principe de l' égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l' accès à l' emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail (JO L 39, p. 40). Dans les deux affaires citées, la question s' était posée de savoir si les dispositions nationales pouvaient se justifier au motif qu' elles avaient été adoptées en vue de respecter les obligations incombant aux États membres en vertu d' une convention au sens de l' article 234, premier alinéa (convention de l' Organisation internationale du travail). La Cour a d' abord réaffirmé que le juge national a l' obligation de laisser inappliquée toute disposition nationale contraire au droit communautaire sauf si l' application d' une telle disposition est nécessaire pour assurer l' exécution, conformément à l' article 234, premier alinéa du traité, d' obligations résultant d' une convention conclue avant l' entrée en vigueur du traité CEE avec des États tiers. Elle a ensuite poursuivi dans son arrêt dans l' affaire Minne:
"Toutefois, ce n' est pas à la Cour saisie dans le cadre d' une procédure préjudicielle mais au juge national qu' il appartient de vérifier, afin de déterminer dans quelle mesure ces obligations font obstacle à l' application de l' article 5 de la directive, d' une part, quelles sont les obligations qui s' imposent ainsi, en vertu d' une convention internationale antérieure, à l' État membre concerné, et, d' autre part, si les dispositions nationales en cause sont destinées à les mettre en oeuvre" (34).
La Cour s' est prononcée dans le même sens dans son arrêt dans l' affaire Levy (35).
39. Il résulte clairement de ces deux arrêts que, selon la Cour, c' est au juge national qu' incombe l' interprétation des conventions internationales en cause dans les procédures préjudicielles au titre de l' article 177. Cette interprétation est également conforme au traité, puisque l' article 177 ne donne à la Cour compétence que pour l' interprétation du droit communautaire. Cette disposition ne lui donne pas compétence pour l' interprétation de conventions internationales qui ont été signées par les États membres avec des États tiers avant l' entrée en vigueur du traité ou avant leur adhésion à la Communauté.
40. MSL a fait valoir dans ses observations que le respect de l' application uniforme du droit communautaire impose à la Cour d' interpréter la convention. Il n' y a pas lieu de suivre ce point de vue. La Cour, en se fondant sur une argumentation analogue, a certes déjà jugé qu' elle était compétente dans le cadre d' une procédure préjudicielle en application de l' article 177, pour interpréter le GATT, convention conclue par les États membres avec des États tiers avant l' entrée en vigueur du traité (36). Indépendamment du fait que cet arrêt a fait l' objet de critiques (37) ° à notre avis justifiées °, il y a lieu d' indiquer que cette jurisprudence ne peut pas s' appliquer à la présente affaire. Comme on le sait en ce qui concerne la mise en place des obligations résultant du GATT, la Communauté a pris la place des États membres. On ne saurait affirmer la même chose en ce qui concerne la convention en cause dans la présente affaire. MSL a certes attiré à juste titre l' attention sur le fait que la Communauté et tous les États membres avaient signé la convention des Nations unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes du 19 décembre 1988 (38). Dans le treizième considérant de cette convention, les parties reconnaissent la nécessité de renforcer les mesures prévues dans la convention de 1961 et de les compléter. MSL et le gouvernement irlandais ont par conséquent certainement raison de faire valoir qu' en adhérant à la convention de 1988, la Communauté a accepté les objectifs et le régime de contrôle de la convention de 1961. La mise en place des obligations résultant de cette convention continue toutefois d' incomber aux États membres.
41. MSL a également laissé entrevoir dans ses observations que ladite convention devrait désormais être éventuellement considérée comme du droit communautaire et, partant, pouvoir faire l' objet d' une interprétation par la Cour. Son représentant a toutefois nuancé cette opinion lors de l' audience devant la Cour. A notre avis, il n' y a pas lieu de nous pencher davantage sur ces considérations. La Communauté a certes adhéré à la convention de 1988 mais non à la convention de 1961, qu' il nous faut examiner dans la présente affaire. Le fait que la Communauté approuve les objectifs prévus par cette convention et les soutient ne suffit pas à en faire une partie intégrante du droit communautaire et ne donne par conséquent pas compétence à la Cour pour l' interpréter dans le cadre d' une procédure au titre de l' article 177.
42. Il va sans dire que l' on ne saurait pas non plus construire une compétence de la Cour pour l' interprétation de la convention dans le cadre d' une procédure en application de l' article 177 en soutenant que la Cour doit en l' espèce interpréter l' article 234 ° et, partant, une norme du droit communautaire. La Cour a assurément compétence pour procéder à une interprétation dans ce cadre; de ce point de vue, l' interprétation de la convention ne constituerait qu' une question préalable que la Cour de justice serait habilitée à interpréter. L' avocat général M. Capotorti avait certes déjà exprimé une opinion analogue (39). Il s' était à l' époque toutefois interrogé sur la question de savoir si un règlement communautaire pouvait avoir violé l' article 234. Si tel était le cas, la Cour devrait en effet interpréter elle-même la convention internationale, puisqu' elle serait la seule à pouvoir constater la nullité de la réglementation communautaire en cause. Il ne s' agit cependant pas d' un tel cas en l' espèce (40).
La référence faite par le représentant du gouvernement du Royaume-Uni à l' arrêt de la Cour dans l' affaire Hurd (41) ne s' oppose pas à une telle conclusion. Dans cette affaire, il s' agissait de l' interprétation d' une disposition du droit communautaire qui renvoyait à des dispositions spécifiques du droit international.
43. On pourrait toutefois, selon nous, penser que la Cour de justice pourrait porter une appréciation sur cette convention si son contenu n' était pas litigieux. Si toutes les parties et la juridiction de renvoi s' accordent sur le contenu des obligations qui résultent de la convention, la Cour peut naturellement vérifier si l' application du droit communautaire ne fait pas obstacle au respect desdites obligations. Il faut peut-être trouver dans cette considération aussi l' explication du fait que la Cour a elle-même examiné les traités internationaux en cause dans l' affaire Henn et Darby, précitée.
Dans la présente affaire, il ne fait, selon nous, aucun doute que le respect par les États membres des obligations résultant pour eux de la convention ne peut pas conduire à un conflit avec le droit communautaire. Nous reviendrons sur ce point dans nos conclusions subsidiaires. Il nous faut toutefois attirer l' attention sur le fait que les parties à la présente procédure ne sont pas toutes d' accord sur l' interprétation de la convention. MSL fait valoir qu' il résulte de son article 21, paragraphe 1, qu' un État membre ne devrait pas autoriser d' importations lorsque les besoins peuvent être couverts par des producteurs nationaux. Le gouvernement portugais soutient une interprétation analogue. Generics ainsi que les gouvernements d' Irlande et du Royaume-Uni ne partagent pas cette conception. Dans son ordonnance de renvoi, la High Court n' a pas exprimé clairement sa propre interprétation de la convention, de sorte qu' il n' est pas exclu qu' elle puisse se rallier à l' opinion soutenue par le Portugal et MSL. Compte tenu de ces considérations, nous maintenons que l' interprétation de la convention dans le cadre d' une procédure en application de l' article 177 incombe aux juridictions nationales.
44. Il y a lieu de souligner qu' il ne devrait pas en résulter de risque important pour le respect d' une interprétation uniforme du droit communautaire. Les craintes exprimées par MSL, à savoir que l' autorisation d' importation par le Royaume-Uni pourrait entraîner pour elle de graves conséquences si d' autres États membres devaient continuer à limiter ou à interdire les importations en provenance d' autres pays membres, sont tout à fait compréhensibles. Il faut toutefois indiquer que la Cour, dans le cadre d' une procédure en application de l' article 177, ne peut certes se prononcer sur l' interprétation de conventions que les États membres ont conclues avec des tiers mais qu' elle a bien évidemment pour mission d' interpréter le droit communautaire. Les juridictions nationales peuvent par conséquent saisir la Cour en application de l' article 177 pour qu' elle statue sur le point de savoir si le respect des obligations dont elles ont constaté qu' elles résultaient pour un État membre de la convention en cause ne fait pas obstacle à l' application du droit communautaire.
Par ailleurs, dans les cas dans lesquels un État membre laisse inappliqué le droit communautaire, sans y être habilité par l' article 234, premier alinéa, du traité, il peut faire l' objet d' une procédure en manquement en application de l' article 169 ou de l' article 170. Dans le cadre d' une telle procédure, la Cour devrait vérifier si le comportement de l' État membre se justifie sur le fondement de l' article 234 et se demander, le cas échéant, si l' interprétation de la convention en cause par l' État membre concerné est exacte. Il ne semble pas que ce soit par hasard si la Cour a jugé dans les arrêts Levy et Minne que nous avons déjà mentionnés qu' il n' incombe pas à la Cour d' interpréter les traités internationaux "dans le cadre d' une procédure préjudicielle".
45. Nous vous proposons par conséquent de répondre comme suit à la question 1 a) posée par la High Court: les articles 30 à 36 du traité CEE trouvent application au commerce licite de stupéfiants au sens de la convention unique sur les stupéfiants de 1961. Cependant, dans la mesure où cette application fait obstacle au respect par l' État membre en cause des obligations résultant pour lui de la convention unique, même en tenant compte des possibilités ouvertes par l' article 36 du traité CEE, l' article 234, premier alinéa, du traité CEE permet à cet État membre, dès lors qu' il a adhéré à cette convention avant l' entrée en vigueur du traité CEE ou avant son adhésion à la Communauté, de remplir les obligations résultant pour lui de ladite convention.
46. Cette réponse constitue en même temps une réponse suffisante à la question 1 b). En ce qui concerne la question de l' effet pratique du système de contrôle prévu par la convention, il y a lieu d' attirer l' attention sur le fait qu' il ne peut pas s' agir, selon nous, d' une efficacité plus ou moins grande desdites mesures: l' État membre concerné est tenu de mettre en oeuvre les mesures de contrôle prévues par la convention. Si cela lui est impossible du fait de l' application des articles 30 à 36 du traité CEE, il doit laisser ces articles inappliqués sur ce point. Si tel n' est pas le cas, les dispositions communautaires sont par contre applicables.
Il en va de même, selon nous, pour l' autre hypothèse qui est également envisagée dans cette question, selon laquelle le respect de la convention aurait en pratique pour effet d' instaurer des quotas arbitraires pour les importateurs et les fabricants nationaux. La High Court devra vérifier si une telle obligation ne résulte pas de la convention et si le respect de cette obligation a été rendu impossible par l' application des articles 30 à 36. Ce n' est que si tel est le cas que les dispositions communautaires doivent rester inappliquées.
Conclusions subsidiaires sur la question 1
47. Si la Cour devait toutefois en venir à la conclusion qu' il lui est possible dans la présente affaire de prendre elle-même position sur la question de savoir si le respect des obligations résultant de la convention est compatible avec l' application des articles 30 à 36 du traité CEE, il conviendrait, selon nous, de tenir compte des considérations suivantes que nous développons sous forme de conclusions subsidiaires.
48. La convention soumet le commerce légal de stupéfiants à des contrôles stricts. Les parties à la convention doivent présenter des évaluations statistiques annuelles sur la consommation de stupéfiants (article 19 de la convention). La quantité fabriquée et importée ne doit pas, pour un État membre ou sur un territoire donné, dépasser la quantité qui y est consommée ou exportée (article 21). La fabrication, l' exportation et l' importation de stupéfiants sont dans chaque cas soumises à la délivrance d' une licence par l' État (articles 29 à 31). Selon l' article 2, paragraphe 5, des mesures supplémentaires peuvent être prises pour des substances particulièrement dangereuses, lesquelles incluent également une interdiction générale. MSL n' a pas tout à fait tort lorsqu' elle expose que la convention a établi "une économie planifiée à l' échelle mondiale" ("a planned economy on a world scale"). Il apparaît clairement que ce système est contraire à l' article 30 du traité CEE ° qui vise à éliminer toutes restrictions quantitatives à l' importation et mesures d' effet équivalent dans le commerce intracommunautaire.
49. Ce serait toutefois une erreur de ne tenir compte que de l' article 30 dans l' examen auquel nous devons nous livrer ici. Cette disposition n' est pas dissociable de l' article 36 qui autorise certaines exceptions à l' interdiction de l' article 30. La Cour de justice a indiqué clairement dans l' arrêt Henn et Darby (42) qu' il faut considérer ici les problèmes dans leur ensemble: comme nous l' avons déjà mentionné, la Cour a dit pour droit dans cet arrêt qu' il n' y avait aucune contradiction entre les dispositions litigieuses de la convention internationale et les dispositions sur la libre circulation des marchandises "compte tenu de l' exception réservée par l' article 36 en ce qui concerne d' éventuelles prohibitions d' importation établies pour des raisons de moralité publique" (43). Si, dans la présente affaire, les restrictions à l' importation ou les interdictions qui résultent de la convention pouvaient également se justifier sur le fondement de l' article 36, il n' y aurait pas de contradiction entre cette convention et les articles 30 à 36.
50. Les objections sur le plan méthodique ou plutôt doctrinal que MSL fait valoir à l' encontre de ce point de vue ne parviennent pas à convaincre. Il est certes exact qu' il faut justifier les dérogations prévues à l' article 36. Cela signifie que, pour pouvoir relever cet article, les mesures prises pour atteindre les objectifs mentionnés à cet article doivent être adaptées et proportionnées au but poursuivi (44). Il est également exact que l' article 36, qui est une disposition dérogatoire, est d' interprétation stricte (45). L' argument de MSL, selon lequel on ne saurait faire dépendre les droits d' États tiers d' une justification telle que prévue par l' article 36, passe cependant à côté de la substance du problème. Ce qui est décisif, c' est que l' État membre soit en mesure de respecter les obligations qui résultent pour lui de la convention. La question de savoir si cela lui est possible en vertu des pouvoirs dont il dispose ou par le biais de l' article 36 ne joue aucun rôle vis-à-vis des tiers concernés.
51. Selon l' article 36 du traité CEE, les interdictions ou restrictions d' importation peuvent, entre autres, être justifiées par la protection de la santé. A l' exception de MSL, les parties à la procédure devant la Cour sont d' avis que les mesures imposées par la convention peuvent également être fondées sur l' article 36 du traité CEE. Nous partageons cette opinion. Les mesures de contrôle du commerce légal de stupéfiants prévues aux articles 19, 21 ainsi que 29 à 31 nous apparaissent susceptibles d' éviter les risques (ou de les réduire autant que faire se peut) qui résulteraient pour la santé de l' abus de ces substances. Compte tenu de la dangerosité de ces produits, on ne voit aucune autre possibilité permettant d' atteindre le même but de manière moins restrictive.
52. A cet égard, il y a lieu de rappeler que la Communauté a fait siens les objectifs de la convention qu' il nous faut examiner ici, et ce au plus tard lorsqu' elle a adhéré à la convention de 1988 (46). Tant le traité ECE que la convention accordent une extrême importance à la protection de la santé. Il serait par conséquent étonnant que des mesures imposées par la convention pour atteindre cet objectif soient contraires au traité CEE.
53. Il ne pourrait de toute façon y avoir contradiction que lorsque les limites imposées par l' article 36 sont dépassées. On sait que, selon l' article 36, deuxième phrase, les restrictions ne sont pas justifiées lorsqu' elles constituent un "moyen de discrimination arbitraire" ou une "restriction déguisée" dans le commerce entre les États membres. Cela ne saurait toutefois, selon nous, pas être le cas ici.
54. Comme le gouvernement du Royaume-Uni l' a par exemple exposé à juste titre, la convention n' impose pas aux parties d' interdire l' importation de stupéfiants. Le commentaire à la convention publié par les Nations unies (ci-après le "Commentaire") (47) indique certes qu' il y a lieu de considérer les importations de stupéfiants (et le commerce international en tant que tel) comme des opérations particulièrement dangereuses qui présentent un risque de détournement vers des voies illicites (48). La convention comporte toutefois un grand nombre de références au commerce international, dont il résulte qu' elle se fonde en tout état de cause sur l' idée que ces importations sont légales dans leur principe. Il suffit ici de rappeler le libellé de l' article 21, paragraphe 1, selon lequel la quantité totale de chaque stupéfiant "qui sera fabriquée et importée" pendant une année ne doit pas dépasser une certaine quantité.
55. MSL et le gouvernement portugais soutiennent qu' il résulte de l' article précité de la convention qu' un État doit interdire les importations lorsque la production nationale suffit à couvrir les besoins. Une telle obligation ne peut plus, selon nous, être fondée sur l' article 36 du traité, de sorte qu' il y aurait conflit sur ce point entre la convention et les dispositions du droit communautaire. Cette question n' a toutefois qu' un caractère théorique, puisque la convention n' impose pas, selon nous, une telle obligation. L' article 21, paragraphe 1, mentionne aussi bien la production nationale que les importations sans pour autant imposer une préférence pour la première. Une obligation d' interdire les importations ne résulte pas non plus d' un impératif pratique (49), puisque aussi bien la fabrication nationale que les importations doivent faire l' objet d' une autorisation. La seule indication en ce sens figure, pour autant que nous le sachions, dans une décision prise en 1934 par la commission consultative de la Société des nations (50), qui recommande aux pays fabricants de ne pas délivrer de nouvelles licences de fabrication dans le cas où leurs fabriques ont une capacité suffisante pour les besoins de leur marché intérieur. Il n' y a cependant dans la convention qu' il nous faut analyser ici aucune disposition de cette teneur ni aucune disposition qui obligerait dans ce cas à interdire les importations.
56. L' autorisation d' importation a pour conséquence, selon MSL, que certains quotas devraient être attribués aux producteurs nationaux et aux importateurs. Une telle réglementation par quotas n' est toutefois pas compatible avec les articles 30 à 36, notamment si elle devait avoir pour conséquence une attribution arbitraire des différents quotas.
En fait, il devrait être très difficile, voire même impossible, pour un État, de respecter les limites fixées à l' article 21 et de ne pas dépasser les évaluations faites à l' article 19 sans attribuer aux opérateurs économiques concernés certains quotas de la quantité totale nécessaire. Dans le commentaire que nous avons déjà cité, il est pour cette raison recommandé aux parties de répartir des quotas entre les divers "fabricants ou importateurs ou entre les uns et les autres" (51). Cependant, une telle méthode pourrait aussi, selon nous, être justifiée sur la base de l' article 36 du traité. Le gouvernement irlandais a attiré l' attention à juste titre sur le fait que dans la présente affaire, l' interdiction des importations aurait pour conséquence d' imposer le monopole d' une entreprise sur le marché anglais. Une telle situation serait encore moins compatible avec la libre circulation des marchandises que l' attribution de quotas à des fabricants nationaux et à des importateurs.
Une telle attribution de quotas ne doit pas non plus ° contrairement à ce que soutient MSL ° avoir lieu de manière arbitraire (et par conséquent contraire à l' article 36). Rien n' empêche d' utiliser des critères objectifs qui tiennent compte, par exemple, du prix ou de la garantie d' un approvisionnement constant pour la firme en question lors de la répartition des quotas.
57. L' autorisation des importations ne met pas non plus en cause l' efficacité du système de contrôle de la convention. Il est certes indiqué dans le commentaire qu' il pourrait être souhaitable, ou même essentiel, aux fins d' un contrôle effectif, de réduire au strict minimum le nombre de fabricants comme de commerçants faisant le commerce international de stupéfiants (importateurs et exportateurs) (52) titulaires d' une licence. Il y a toutefois lieu de remarquer à cet égard que le commentaire constitue un moyen d' interprétation de la convention mais ne justifie aucune obligation qui ne soit pas déjà contenue dans la convention. La convention n' impose cependant pas aux parties signataires d' interdire les importations. Le passage du commentaire que nous venons de citer confirme implicitement ce point de vue. Puisque, dans certains cas, la délivrance de licences d' importation individuelles ne viole pas la convention, la réflexion [que nous avons ébauchée à propos de la question 1 b)], à savoir qu' il est particulièrement opportun pour la sécurité des approvisionnements d' en charger exclusivement un seul producteur national, ne saurait s' opposer à l' application des articles 30 à 36 du traité.
Il n' y a pas lieu pour nous de nous attarder davantage sur la question de savoir si l' autorisation de procéder à des importations rend plus difficile pour une des parties à la convention la fourniture d' évaluations correctes prévues par l' article 19. Il suffit d' indiquer que la convention n' interdit pas les importations. Si ces importations rendent effectivement plus difficile la fourniture d' évaluations, c' est que ces difficultés résidaient déjà dans la convention elle-même.
58. Même le respect des obligations résultant de l' article 2, paragraphe 5, de la convention est compatible avec l' application des règles sur la libre circulation des marchandises. Selon cet article, chaque partie prend, en ce qui concerne les stupéfiants inscrits au tableau IV de la convention, toutes les mesures de contrôle qu' elle estime "nécessaires" [sous a)] et peut interdire totalement un stupéfiant lorsqu' elle considère qu' il s' agit là "du moyen le plus approprié" de protéger la santé publique [sous b)]. Les parties ont donc une possibilité d' agir. Une obligation d' agir n' existe que lorsqu' une partie considère que ces mesures s' imposent. Il y a lieu à cet égard de considérer que les parties doivent interpréter ces dispositions "de bonne foi" (53). La convention n' impose certes pas aux parties de prendre des mesures lorsqu' elles ne les jugent pas nécessaires. Si une partie aboutit toutefois à la conclusion que certaines mesures de contrôle sont "nécessaires" ou qu' une interdiction des stupéfiants constitue "le moyen le plus approprié" pour combattre les dangers liés à ces stupéfiants, elle doit les prendre. Cette interprétation correspond à la fois au libellé ainsi qu' à l' objet et au but de la convention.
59. Puisque dans ce cas c' est l' appréciation faite par les différentes parties à la convention qui est déterminante, il peut naturellement y avoir des différences entre les États membres lors de l' application de cette disposition. La présente affaire illustre concrètement ce problème, puisque, selon les indications dont nous disposons, l' utilisation de diamorphine n' est autorisée qu' au Royaume-Uni et est interdite dans tous les autres États membres.
De telles différences n' ont de toute façon rien d' étonnant dans un domaine aussi sensible que celui du commerce légal des stupéfiants. Comme plusieurs des parties l' ont fait remarquer à juste titre, le commerce des stupéfiants n' entraîne pas seulement des dangers pour la santé, mais il peut également affecter d' autres biens. Des restrictions au commerce intracommunautaire de stupéfiants peuvent par conséquent également être justifiées pour la protection de l' ordre et de la sécurité publics ° également visés à l' article 36.
60. Comme le gouvernement français l' a fait observer à juste titre, de telles différences sont compatibles avec le droit communautaire tant qu' il n' y a pas encore d' harmonisation des dispositions de protection au niveau communautaire dans ce domaine. Il y a toutefois lieu d' attirer l' attention sur le fait que le droit communautaire pose des limites à l' adoption de mesures nationales. Ces limites sont décrites à l' article 36, deuxième phrase. Les observations des gouvernements portugais et français n' en tiennent, selon nous, pas suffisamment compte.
Il y aurait, par exemple, discrimination cachée ° qui ne serait par conséquent plus couverte par l' article 36 ° si un État membre autorisait la fabrication ou le commerce de stupéfiants mentionnés au tableau IV de la convention par les opérateurs économiques nationaux, mais interdisait de manière générale les importations en provenance d' autres États membres. Une telle attitude n' est pas non plus imposée par l' article 2, paragraphe 5, de la convention. Cette disposition n' impose pas aux parties de favoriser les fabricants nationaux par rapport aux importateurs. Elle contraint encore moins les parties à maintenir des monopoles nationaux. Le gouvernement irlandais a exprimé cette idée de manière très convaincante en disant que l' article 2, paragraphe 5, permet d' interdire complètement la production, la fabrication, l' exportation et l' importation, le commerce, la détention ou l' utilisation de ces stupéfiants. L' imposition d' une telle interdiction est compatible avec l' article 36 du traité. Toutefois, si une partie n' impose pas d' interdiction générale mais uniquement certaines restrictions, la convention n' oblige pas à pénaliser les importateurs par rapport aux producteurs nationaux.
Il n' y a donc pas non plus de contradiction à cet égard entre les dispositions de la convention et celles sur la libre circulation des marchandises.
61. MSL a fait valoir que l' autorisation d' importation est contraire aux obligations générales des parties prévues à l' article 4 de la convention, à savoir exécuter les dispositions de la convention et, sous réserve des dispositions de la convention, limiter la fabrication, l' exportation et l' importation, le commerce, la détention, l' utilisation de stupéfiants aux fins médicales et scientifiques. MSL n' a cependant pas exposé en quoi consisterait concrètement cette infraction.
62. L' argument selon lequel les règles du traité sur la libre circulation des marchandises ne pourrait ° au moins pour le Royaume-Uni ° trouver application aussi longtemps que les États membres n' ont pas notifié la déclaration prévue à l' article 43, paragraphe 2, de la convention nous semble avoir nettement plus de poids.
Il est manifeste que cette disposition vise à donner aux membres d' une union douanière (comme la Communauté en est une) un moyen leur permettant de réduire les inconvénients et obstacles résultant pour le commerce international de l' application du système de contrôle (54). Puisqu' une telle déclaration n' a jusqu' ici pas été notifiée en ce qui concerne les États membres de la Communauté, ces derniers ne sauraient être considérés comme un seul "territoire" au sens des articles 19, 20, 21 et 31 et bénéficier, par conséquent, des assouplissements qui en résultent (55). Cela signifie par exemple que l' importation de stupéfiants d' un État membre dans un autre continue de nécessiter une licence, tel que prévu par l' article 31.
63. Dans la présente affaire, il s' agit pourtant d' une autre question, celle de la compatibilité des dispositions de la convention avec l' application des règles du traité sur la libre circulation des marchandises. Il y a lieu, à la lumière des considérations développées ci-dessus, de répondre à cette question par l' affirmative. Le fait que la notification de la déclaration prévue à l' article 43, paragraphe 2, aurait pour conséquence encore d' autres assouplissements est par conséquent dépourvu de pertinence. Si la convention et le traité sont compatibles l' un avec l' autre, sans que les États membres soient tenus de notifier leur déclaration, le fait qu' ils ne l' aient pas fait ne saurait les libérer des obligations qui leur incombent en vertu des articles 30 à 36 du traité.
64. Si la Cour suivait les considérations développées dans les présentes conclusions subsidiaires, il y aurait lieu, selon nous, de répondre comme suit aux questions 1 a) et 1 b): les articles 30 à 36 du traité trouvent application au commerce licite de stupéfiants au sens de la convention unique sur les stupéfiants de 1961.
Sur la question 1 c)
65. Par sa question 1 c), la High Court cherche à savoir si un État membre peut refuser une licence pour l' importation de stupéfiants provenant d' un autre État membre, lorsque cette importation met en danger la viabilité du seul fabricant de ces stupéfiants autorisé dans l' État membre en cause et la sécurité de l' approvisionnement en stupéfiants de ce pays à des fins médicales essentielles. La High Court vise par cette question manifestement à obtenir une interprétation de l' article 36, et part donc de l' applicabilité des articles 30 à 36. C' est sur cette base qu' il y a également lieu de répondre à cette question.
66. Cette question est fondée sur l' allégation des demanderesses au principal, selon laquelle l' autorisation d' importation mettrait en cause la viabilité du fabricant britannique et, par conséquent, la sécurité des approvisionnements au Royaume-Uni. Cette allégation n' a certes pas encore été prouvée. Il faut cependant, pour répondre à la question posée, supposer qu' elle est exacte.
67. Les autres éléments énumérés dans la question posée à la Cour sont sans importance. Le fait que d' autres États membres qui produisent des stupéfiants interdisent leur importation est dépourvu de pertinence pour l' interprétation du droit communautaire. La circonstance que les États membres n' ont pas jusqu' ici notifié la déclaration prévue à l' article 33, paragraphe 2, de la convention est, elle aussi, dépourvue de pertinence pour l' interprétation de l' article 36 du traité (56).
68. Il est, selon nous, incontestable que la continuité de l' approvisionnement en stupéfiants nécessaire à des fins médicales est d' une grande importance. Un État membre est par conséquent en droit de tenir compte de cette considération lorsqu' il prend la décision de délivrer une licence d' importation de stupéfiants. Il n' est pas à exclure que cette considération permette à un État membre, dans le cadre de l' article 36, de privilégier jusqu' à un certain point la production nationale par rapport aux importations en provenance des autres États membres. Une telle éventualité résulte, selon nous, de l' arrêt de la Cour dans l' affaire Campus Oil (57). La Cour avait jugé à l' époque qu' un État membre qui dépend de l' importation de produits pétroliers peut imposer aux importateurs de couvrir un certain pourcentage de leurs besoins auprès d' une raffinerie située sur son territoire, si la production de la raffinerie en cause ne peut sans cela être écoulée à des prix compétitifs sur le marché concerné (58). L' application de l' article 36 n' est pas exclue dans de tels cas, du seul fait que la mesure en cause permet d' atteindre en même temps des objectifs de nature économique (59). L' objection formulée à cet égard par Generics passe par conséquent à côté du problème.
69. On ne saurait exclure qu' un État membre puisse même, en vertu des considérations susmentionnées, être en droit de prohiber dans certains cas l' importation de stupéfiants. Le gouvernement du Royaume-Uni attire toutefois à juste titre l' attention sur le fait qu' il s' agit de cas extrêmes. L' article 36 n' autorise en effet des restrictions au commerce que dans le cas où il n' existe pas d' autres solutions moins restrictives pour atteindre l' objectif visé. Il est par conséquent nécessaire, pour la réponse aux questions posées, d' attirer l' attention sur ces limites. Il va de soi, à cet égard, que l' article 36 permet des restrictions à la libre circulation des marchandises mais n' impose cependant pas à un État membre de procéder à ces restrictions.
70. Nous proposons par conséquent de répondre à la question 1 c) comme suit: l' article 36 du traité permet exceptionnellement à un État membre de privilégier la fabrication nationale par rapport aux importations en provenance d' autres États membres, si tel est le seul moyen qui permette de garantir dans ledit État membre un approvisionnement fiable en stupéfiants à des fins médicales essentielles.
Sur la question 2
71. Par cette dernière question, la High Court cherche à savoir si l' autorité compétente pour l' achat de substances analgésiques essentielles à des fins médicales peut tenir compte, lorsqu' elle conclut des contrats dans le cadre d' une procédure de passation de marchés publics de fourniture, des notions de fiabilité et de continuité des approvisionnements. L' ordonnance de renvoi mentionne à cet égard la directive 77/62/CEE du Conseil, du 21 décembre 1976, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de fourniture (60), "dans sa version modifiée". Cette directive (modifiée à plusieurs reprises) a été abrogée par l' article 33 de la directive 93/36/CEE du Conseil, du 14 juin 1993, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de fourniture (61); les dispositions de la directive 93/36 ont remplacé les dispositions de la directive abrogée. La directive précitée a été adoptée postérieurement à l' ordonnance de renvoi de la High Court. S' il fallait répondre à la question posée par la High Court, il y aurait lieu par conséquent de tenir compte de l' état actuel de la législation. Comme nous l' avons déjà exposé, la Cour n' a cependant pas besoin de répondre à cette question (62). Nous ne l' analysons dans les pages suivantes qu' à titre subsidiaire.
72. A l' exception de MSL et du gouvernement français, toutes les parties à la présente procédure sont d' avis que le critère de la fiabilité ainsi que de la continuité des approvisionnements peut être pris en considération dans le cadre de la directive 77/62. Selon MSL, par contre, ce critère ne relève pas des critères d' attribution au sens de l' article 25 de la directive. Cette disposition s' applique à toutes les procédures "ouvertes" et "restreintes" au sens de l' article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive. Il faut par conséquent d' abord vérifier si ces procédures pourraient trouver application à la présente affaire.
73. Le gouvernement portugais a des doutes à cet égard et invoque l' article 6, paragraphe 1, sous b), de la directive 77/62 (63). Selon cet article, il n' est pas nécessaire d' utiliser les procédures mentionnées à l' article 4, paragraphes 1 et 2, "pour les fournitures dont la fabrication ou la livraison, en raison de leur spécificité technique, artistique ou pour des raisons tenant à la protection des droits d' exclusivité, ne peut être confiée qu' à un producteur déterminé".
Contrairement à l' opinion soutenue par le gouvernement portugais, il nous semble cependant qu' il ne fait aucun doute que l' approvisionnement en stupéfiants ne relève pas de la disposition précitée. Les faits de la présente affaire montrent que la fabrication de diamorphine ne fait pas l' objet d' un droit d' exclusivité.
74. Le gouvernement français fait valoir que, compte tenu de l' article 6, paragraphe 1, sous g), de la directive 77/62, il ne s' impose pas que la fourniture de stupéfiants fasse l' objet d' une adjudication. Selon l' article cité, il n' est pas nécessaire d' utiliser les procédures mentionnées à l' article 4, paragraphes 1 et 2, "lorsque les fournitures sont déclarées secrètes ou lorsque leur exécution doit s' accompagner de mesures particulières de sécurité, conformément aux dispositions législatives, réglementaires ou administratives en vigueur dans l' État membre considéré, ou lorsque la protection des intérêts essentiels de la sécurité de cet État l' exige". Après une modification ultérieure (64) de la directive 77/62, ce paragraphe a été remplacé par l' article 2, paragraphe 2, sous c), selon lequel la directive ne s' applique pas dans de tels cas (65).
Il ne nous paraît pas exclu que la fourniture de stupéfiants relève de la disposition précitée. Il y certes lieu de "limiter ... expressément" (66) (67) les cas dans lesquels il n' y a pas lieu d' appliquer la procédure d' adjudication prévue par les directives 77/62 ou 93/36. Puisque la fourniture de stupéfiants doit cependant être assortie de mesures de sécurité spécifiques, on pourrait soutenir qu' elle relève de la disposition dérogatoire. Dans ce cas, le problème abordé dans la question 2 ne se poserait évidemment pas.
75. Si on part au contraire de l' idée que la directive est applicable, la question se pose de savoir si les critères de la fiabilité et de la continuité des approvisionnements peuvent être retenus selon l' article 25 de la directive 77/62. Comme l' expose à juste titre MSL, la directive prévoit une différence entre les critères de sélection qualitative des entrepreneurs pouvant être pris en considération (articles 21 à 24) et les critères d' attribution (article 25). Une telle distinction apparaît déjà à l' article 17, paragraphe 1, de la directive 77/62.
76. Selon l' article 25, paragraphe 1, de la directive 77/62 (68), les critères sur lesquels le pouvoir adjudicateur se fonde pour attribuer les marchés sont soit uniquement le prix le plus bas [sous a)], "soit ° lorsque l' attribution se fait à l' offre économiquement la plus avantageuse, divers critères variables suivant le marché en question: par exemple, le prix, le délai de livraison, le coût d' utilisation, la rentabilité, la qualité, le caractère esthétique et fonctionnel, la valeur technique, le service après-vente et l' assistance technique" [sous b)].
Comme la Cour l' a déjà constaté, en ce qui concerne une disposition comparable de la directive 71/305/CEE du Conseil, du 26 juillet 1971, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux (JO L 185, p. 5), cela signifie que les critères admissibles doivent se borner à déterminer "l' offre économiquement la plus avantageuse" (69). MSL en déduit que le critère de la fiabilité et de la continuité des approvisionnements, qui est une considération de nature générale, ne peut être appliqué dans le cadre de l' article 25, paragraphe 1, sous b), de la directive 77/62.
77. Il n' y a pas lieu de suivre ce point de vue. Il nous semble certes douteux que l' on puisse soutenir que ce dernier critère est déjà inclus dans l' un des critères expressément mentionnés à l' article 25, comme l' ont fait valoir tant le gouvernement du Royaume-Uni (selon lequel ce critère fait partie de la "valeur technique") que le gouvernement irlandais (selon lequel ce critère pourrait être envisagé comme se référant au "délai de livraison" ou à la "qualité"). En tout cas, ce critère contribue également à déterminer "l' offre économiquement la plus avantageuse", puisqu' une offre qui semble être séduisante sur le plan économique ne l' est en définitive pas lorsque l' approvisionnement n' est pas assuré pour l' avenir. Il s' agit certes là d' un point de vue qui tient compte également des suites pour l' avenir de l' attribution du marché à un soumissionnaire donné. Cependant, la mention des critères "coût d' utilisation" et "service après-vente" à l' article précité montre, selon nous, qu' une telle analyse n' est pas étrangère à la directive. La Commission s' est également exprimée en ce sens.
Generics et les gouvernements d' Irlande et du Royaume-Uni ont également attiré à juste titre l' attention sur le fait que l' énumération figurant à l' article 25, paragraphe 1, sous b), n' est pas limitative ° comme le montre d' ailleurs le libellé de cet article. Il va de soi qu' il est nécessaire qu' un tel critère soit mentionné dans l' avis d' adjudication.
78. Il y a lieu enfin d' attirer l' attention sur le fait que le critère de la sécurité des approvisionnements constitue une considération légitime qui peut être prise en considération dans le cadre de l' article 36. Le gouvernement du Royaume-Uni a indiqué à cet égard à juste titre qu' il faut éviter d' interpréter une directive en ce sens qu' elle interdit des mesures que l' article 36 permet. Le gouvernement français renvoie sur ce point au cinquième considérant de la directive 77/62, selon lequel la directive ne fait pas obstacle à l' application de l' article 36.
C ° Conclusion
79. Nous vous proposons par conséquent de répondre aux questions posées par la High Court de la façon suivante:
"1) Les articles 30 à 36 du traité CEE trouvent application au commerce licite de stupéfiants au sens de la convention unique sur les stupéfiants de 1961. Cependant, dans la mesure où cette application fait obstacle au respect par l' État membre en cause des obligations résultant pour lui de la convention unique, même en tenant compte des possibilités ouvertes par l' article 36 du traité CEE, l' article 234, paragraphe 1, du traité CEE permet à cet État membre, dès lors qu' il a adhéré à cette convention avant l' entrée en vigueur du traité CEE ou avant son adhésion à la Communauté, de remplir les obligations résultant pour lui de ladite convention.
2) L' article 36 du traité CEE permet exceptionnellement à un État membre de privilégier la fabrication nationale par rapport aux importations en provenance d' autres États membres, si tel est le seul moyen qui permette de garantir dans ledit État membre un approvisionnement fiable en stupéfiants à des fins médicales essentielles."
(*) Langue originale: l' allemand.
(1) ° Recueil des traités des Nations unies, 520, p. 204.
(2) ° Deuxième considérant du préambule de la convention.
(3) ° Troisième et quatrième considérants.
(4) ° Cinquième et sixième considérants.
(5) ° Ces citations sont extraites de la lettre adressée par le Secretary of State aux avocats d' Evans. La teneur de la lettre aux avocats de MSL fait apparaître quelques petites modifications par rapport à la lettre citée (qui n' ont toutefois pas d' importance pour le contenu).
(6) ° Arrêt du 16 juillet 1992, Meilicke (C-83/91, Rec. p. I-4871, points 22 à 25).
(7) ° Voir, notamment, l' arrêt du 27 octobre 1993, Enderby (C-127/92, Rec. p. I-5535, point 10).
(8) ° Voir, par exemple, l' article K.1, point 9, du traité sur l' Union européenne, qui déclare que la coopération policière en vue de la prévention et de l' aide contre le trafic illicite de drogue est une question d' intérêt commun .
(9) ° Arrêts du 5 février 1981, Horvath (50/80, Rec. p. 385), et du 26 octobre 1982, Wolf (221/81, Rec. p. 3681), et Einberger (240/81, Rec. p. 3699).
(10) ° Arrêt du 28 février 1984, Einberger (294/82, Rec. p. 1177).
(11) ° Arrêts du 5 juillet 1988, Mol (269/86, Rec. p. 3627), et Happy Family (289/86, Rec. p. 3655).
(12) ° Loc. cit. note 9, point 8 des deux arrêts.
(13) ° Loc. cit. note 9, point 9 des deux arrêts.
(14) ° Loc. cit. note 9, point 16 des deux arrêts.
(15) ° Une disposition analogue figure à l' article 5 de l' acte relatif à l' adhésion de la République hellénique et à l' article 5 des actes relatifs à l' adhésion du royaume d' Espagne et de la République portugaise.
(16) ° Il en va de même pour le royaume de Danemark, la République hellénique, la République portugaise et le royaume d' Espagne, qui ont aussi ratifié la convention avant leur adhésion aux Communautés.
(17) ° Voir l' article 30 de la convention de Vienne sur le droit des traités.
(18) ° Arrêts du 27 février 1962, Commission/Italie (10/61, Rec. p. 1, 22 et suiv.); du 14 octobre 1980, Burgoa (812/79, Rec. p. 2787, point 8).
(19) ° Arrêt du 11 mars 1986 (121/85, Rec. p. 1007).
(20) ° Loc. cit. note 19, point 25.
(21) ° Arrêt du 22 septembre 1988, Deserbais (286/86, Rec. p. 4907, point 18).
(22) ° Arrêt Commission/Italie, précité (note 18), p. 23.
(23) ° Il s' agissait dans cette affaire de la convention de Genève de 1923 sur la répression de la circulation et du trafic des publications obscènes et de la convention postale universelle que la Cour a déjà analysée dans son arrêt du 14 décembre 1979, Henn et Darby (34/79, Rec. p. 3795). La Cour avait jugé à cette époque que l' application des articles 30 et suivants était compatible avec la convention (point 26).
(24) ° Selon cet article, deux ou plusieurs parties d' une convention multilatérale peuvent conclure un accord leur permettant de modifier cette convention dans leurs rapports mutuels. Un tel accord suppose cependant que les autres parties ne soient pas affectées dans l' exercice des droits qu' elles tirent dudit traité .
(25) ° Voir à propos de cette différenciation les conclusions de l' avocat général M. Warner dans l' affaire Henn et Darby, précitée (note 23), p. 3818, 3833.
(26) ° Voir, notamment, l' arrêt dans l' affaire Deserbais, loc. cit, note 21, et texte y relatif.
(27) ° L' organe international de contrôle des stupéfiants à Vienne a formulé cela dans une lettre adressée au gouvernement du Royaume-Uni le 11 août 1981 et produite par MSL de la manière suivante: si, pour des raisons économiques, les États souhaitent atténuer les inconvénients et les obstacles que cause pour le commerce international un système de contrôle conforme aux traités universels en cause dans le commerce international, ils pourront chercher à unifier leurs systèmes. Les traités universels eux-mêmes vont dans cette direction étant donné que l' article 43 de la convention unique signée en 1961 envisage le cas d' une union douanière...
(28) ° Voir note 23 ci-dessus.
(29) ° Loc. cit. note 23, point 26.
(30) ° It appears ... that the observance ... of those international conventions is not likely to result in a conflict... Voir également la version française, selon laquelle la disposition litigieuse de la convention internationale n' est pas susceptible de créer un conflit... (c' est nous qui soulignons).
(31) ° Loc. cit. note 23, point 27.
(32) ° Arrêt du 2 août 1993 (C-158/91, Rec. p. I-4287).
(33) ° Arrêt du 3 février 1994 (C-13/93, Rec. p. I-371).
(34) ° Loc. cit. note 33, point 18.
(35) ° Loc. cit. note 32, point 21: Toutefois, ce n' est pas à la Cour, dans le cadre d' une procédure préjudicielle qu' il appartient de vérifier quelles sont les obligations qui s' imposent, en vertu d' une convention internationale antérieure, à l' État membre concerné et d' en tracer les limites de manière à déterminer dans quelle mesure ces obligations font obstacle à l' application de l' article 5 de la directive.
(36) ° Arrêt du 16 mars 1983, SPI et SAMI (267/81, 268/81 et 269/81, Rec. p. 801, points 14 à 19).
(37) ° Voir, par exemple, Hartley, T.C.: The Foundations of European Community Law, deuxième édition, 1988, p. 252 et suiv.
(38) ° Voir la décision 90/611/CEE du Conseil, du 22 octobre 1990, concernant la conclusion de cette convention (JO L 326, p. 56).
(39) ° Conclusions dans l' affaire Burgoa, précitée (note 18), p. 2809, 2817.
(40) ° Les faits à la base de l' arrêt du 8 décembre 1981, Arbelaiz-Emazabel (181/80, Rec. p. 2961, point 11), fournissent au contraire un exemple de faits analogues à l' exemple cité.
(41) ° Arrêt du 15 janvier 1986 (44/84, Rec. p. 29).
(42) ° Loc. cit. note 23.
(43) ° Voir ci-dessus, point 36.
(44) ° Voir, par exemple, l' arrêt du 16 mai 1989, Buet et Educational Business Services (382/87, Rec. p. 1235, points 10 et 11).
(45) ° Arrêt du 5 juin 1986, Commission/Italie (103/84, Rec. p. 1759, point 22).
(46) ° Voir point 40 ci-dessus.
(47) ° Nations unies (Éd.), Commentaires sur la convention unique sur les stupéfiants de 1961, New York, 1975.
(48) ° Loc. cit. note 47, commentaires à l' article 1er, paragraphe 1, alinéa y, point 2.
(49) ° Au sens suivant: si l' on considère la production nationale comme un fait, la quantité des importations qui pourrait être autorisée pourrait tout au plus se monter à la différence entre consommation (y compris l' exportation) et production nationale. S' il n' y avait pas de différence entre production et consommation (en raison du chiffre élevé de la production nationale), aucune importation ne serait licite.
(50) ° Cité dans le commentaire, loc. cit. note 47, commentaires à l' article 29, paragraphe 1, point 10.
(51) ° Loc. cit. note 47, observations générales sur l' article 21, point 3.
(52) ° Loc. cit. note 47, observations générales sur l' article 21, point 4; commentaires à l' article 31, paragraphe 3, point 4.
(53) ° Commentaire, loc. cit. note 47, observations sur l' article 2, paragraphe 5, point 4. Il s' agit ici d' un principe général d' interprétation de conventions internationales (voir l' article 31 de la convention de Vienne sur le droit des traités), dont la Cour a reconnu qu' il était contraignant [voir l' arrêt du 1er juillet 1993, Metalsa (C-312/91, Rec. p. I-3751, point 12)].
(54) ° Voir ci-dessus, point 33, et la lettre citée dans la note 27.
(55) ° Il résulte du Commentaire qu' indépendamment du libellé de l' article 43, paragraphe 2 ( peuvent ), il est nécessaire de notifier la déclaration prévue à cet article pour bénéficier de ses conséquences (loc. cit note 47, commentaires à l' article 1er, paragraphe 1, alinéa y, point 13).
(56) ° Voir ci-dessus points 62 à 63.
(57) ° Arrêt du 10 juillet 1984, Campus Oil (72/83, Rec. p. 2727).
(58) ° Loc. cit. note 57, point 51 des motifs.
(59) ° Voir, par exemple, l' arrêt du 6 octobre 1987, Nertsvoederfabriek Nederland (118/86, Rec. p. 3883, point 15).
(60) ° JO 1977, L 13, p. 1.
(61) ° JO L 199, p. 1.
(62) ° Voir ci-dessus point 24.
(63) ° Cette disposition correspond à l' article 6, paragraphe 3, sous c), de la directive 93/36.
(64) ° Voir la directive 88/295/CEE du Conseil, du 22 mars 1988 (JO L 127, p. 1).
(65) ° Selon la disposition comparable de l' article 2, paragraphe 1, sous b), de la directive 93/36, la directive ne s' applique pas dans de tels cas.
(66) ° Neuvième considérant de la directive 77/62.
(67) ° Onzième considérant de la directive 93/36.
(68) ° Il en va de même pour l' article 26, paragraphe 1, de la directive 93/36.
(69) ° Arrêt du 20 septembre 1988, Beentjes (31/87, Rec. p. 4635, point 19).