Cour de cassation, Chambre sociale, 16 décembre 1998, 96-43.668

Synthèse

Voir plus

Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
1998-12-16
Cour d'appel de Paris (18e chambre, section C)
1996-05-23

Texte intégral

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Sur le pourvoi formé par : 1 / la société Mizeret, Rinqueberck et Rouvière, société anonyme, dont le siège est ..., 2 / M. Y..., pris en sa qualité d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société Mizeret, Rinqueberk et Rouvière, domicilié ..., EN PRESENCE de M. B..., pris en sa qualité de représentant des créanciers de la société Mizeret, Rinqueberk et Rouvière, domicilié ..., en cassation d'un arrêt rendu le 23 mai 1996 par la cour d'appel de Paris (18e chambre, section C), au profit : 1 / de M. Patrick C... D..., demeurant ... les Seurre, 2 / de M. Julien Z..., demeurant ..., 3 / de M. E... Perisse, demeurant, ..., 4 / de M. Bernard A..., demeurant ..., 5 / de M. Henri G..., demeurant ..., 6 / de M. Bernard H..., demeurant ... V, 84130 Le Pontet, 7 / de M. Patrick X..., demeurant 9, Parc de Bretonne, 76130 Mont Saint-Aignan, 8 / de M. Jean-Paul I..., demeurant ..., défendeurs à la cassation ; LA COUR, en l'audience publique du 28 octobre 1998, où étaient présents : M. Merlin, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Richard de la Tour, conseiller référendaire rapporteur, M. Texier, Mme Lemoine-Jeanjean, conseillers, Mme Bourgeot, conseiller référendaire, M. Martin, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. Richard de la Tour, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rouvière et Boutet, avocat de la société Mizeret, Rinqueberck et Rouvière et de M. Y..., ès qualités, les conclusions de M. Martin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen

unique : Attendu que M. Furt F... et sept autres salariés sont au service de la société Mizeret, Rinqueberck et Rouvière, en qualité de VRP ; que leur contrat de travail prévoit le versement d'une avance sur commission de 15 000 francs bruts par mois ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale, statuant en référé, pour obtenir le paiement de sommes qu'ils estimaient leur devoir être dues à titre de rémunération ;

Attendu que la société Mizeret, Rinqueberck et Rouvière et M. Y... font grief à

l'arrêt attaqué (Paris, 23 mai 1996), d'avoir condamné la société à payer à M. Furt F..., et à chacun des sept autres salariés une somme de 15 000 francs pour le mois de novembre, et une somme de 15 000 francs pour le mois de décembre alors, selon le moyen, de première part, que l'existence d'un trouble manifestement illicite ne se présume pas et doit être prouvée ; qu'en se bornant, pour faire droit à la demande des salariés, à relever que ces derniers étaient obligés de faire l'avance des frais sans certitude d'être payés, sans relever, comme elle y était pourtant invitée, que le contrat de travail prévoyait que les frais restaient à la charge des VRP, la cour d'appel n'a pas caractérisé les circonstances de nature à établir un trouble manifestement illicite, et partant n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article R. 516-31 du Code du travail ; alors, de deuxième part, que la formation des référés ne peut ordonner que des mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ; qu'en faisant droit à la demande des salariés, qui impliquait pourtant une nécessaire appréciation sur l'existence même d'un droit contesté, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article R. 516-30 du Code du travail ; alors, de troisième part, que les juges ne peuvent dénaturer l'écrit qui leur est soumis et dont les termes sont clairs et précis ; qu'en l'espèce, il résultait des termes clairs et précis des contrats de travail des salariés, que la commission invoquée par ces derniers à l'appui de leur demande constituait une avance sur frais et non une rémunération, les frais demeurant à leur charge ;

qu'en décidant

que, dès lors que les VRP poursuivaient leur activité, ils avaient droit à l'intégralité de cette avance, ce d'autant qu'ils devaient faire l'avance de leurs frais sans certitude d'en être payés, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des contrats de travail et par là même violé les dispositions de l'article 1134 du Code civil ; et alors, de quatrième part, que la cour d'appel ne pouvait statuer comme elle l'a fait, sans répondre aux conclusions de la SA Mizeret faisant valoir en particulier que M. Furt D... avait demandé à la SA Mizeret, Rinqueberck et Rouvière de lui fournir une attestation, qui indiquait que ce dernier, et ses autres collègues, étaient entièrement rémunérés à la commission, sans fixe ou minimum garanti ; qu'ainsi l'arrêt est entaché d'une violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu, d'abord, qu'en application de l'article R. 516-31, alinéa 1, du Code du travail, la formation de référé du conseil de prud'hommes peut, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; Et attendu, ensuite, que la cour d'appel, répondant aux conclusions prétendument délaissées, ayant constaté que le contrat de travail prévoyait le versement d'une somme mensuelle de 15 000 francs à titre d'avance sur commission, a pu décider, hors toute dénaturation, que l'interruption de ce versement constituait un trouble manifestement illicite ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Mizeret, Rinqueberck et Rouvière et M. Y..., ès qualités, aux dépens ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.