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Tribunal administratif de Lyon, 8ème Chambre, 17 juillet 2023, 2107950

Mots clés
requis • requête • soutenir • statut • sanction • production • contrat • emploi • grâce • rapport • rejet • ressort

Chronologie de l'affaire

Cour administrative d'appel de Lyon
22 mai 2024
Tribunal administratif de Lyon
17 juillet 2023

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Lyon
  • Numéro d'affaire :
    2107950
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Dispositif : Rejet
  • Nature : Décision
  • Avocat(s) : SELARL JEAN-PIERRE & WALGENWITZ AVOCATS ASSOCIES
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Résumé

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Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête enregistrée le 7 octobre 2021, Mme C B, représentée par Me Bénagès, demande au tribunal : - d'annuler la décision du 20 septembre 2021 par laquelle le directeur général du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne a prononcé sa suspension de fonctions à compter du même jour ; - d'enjoindre au centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne de lui verser la rémunération qui lui est due depuis sa suspension ; - de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - il n'est pas justifié de l'habilitation du signataire de la décision en litige pour avoir accès à ses données de santé ; - elle n'a pas bénéficié d'un entretien après sa suspension en vue de la régularisation de sa situation et a été privée de la garantie que constitue un tel entretien ; - la suspension critiquée constitue une sanction déguisée et n'est pas limitée dans le temps, en méconnaissance de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 ; - la décision en litige se fonde sur le décret du 7 août 2021 qui est lui-même illégal dès lors qu'il limite de façon discriminatoire les contre-indications à la vaccination et qu'il impose une vaccination dont l'efficacité n'est pas démontrée ; - son défaut de vaccination ne pouvait légalement lui être opposé compte tenu de la nature et du lieu d'exercice de ses fonctions. Par des mémoires en défense enregistrés les 25 janvier et 24 mai 2022, le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne, représenté par la Selarl Jean-Pierre et Walgenwitz Avocats associés, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Vu la décision attaquée et les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ; - la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations ; - la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire ; - le décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 prescrivant les mesures générales nécessaires à la gestion de la sortie de crise sanitaire ; - le décret n° 2021-1059 du 7 août 2021 modifiant le décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 prescrivant les mesures générales nécessaires à la gestion de la sortie de crise sanitaire ; - le code de justice administrative. Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu, au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Gille, - les conclusions de Mme A, - et les observations de Me Bénagès pour la requérante, ainsi que celles de Me Allala pour le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne.

Considérant ce qui suit

: 1. Ouvrière principale de 2e classe employée par le centre hospitalier universitaire (CHU) de Saint-Etienne, Mme B conteste la décision du 20 septembre 2021 par laquelle le directeur général de cet établissement a prononcé sa suspension de fonctions à compter du même jour au motif qu'elle ne justifiait pas de sa vaccination contre la covid-19 ou d'une contre-indication à cette vaccination. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article 12 de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire : " I. -Doivent être vaccinés, sauf contre-indication médicale reconnue, contre la covid-19 : / 1° Les personnes exerçant leur activité dans : / a) Les établissements de santé mentionnés à l'article L. 6111-1 du code de la santé publique () / (). / II. - Un décret, pris après avis de la Haute Autorité de santé, détermine les conditions de vaccination contre la covid-19 des personnes mentionnées au I du présent article. Il précise les différents schémas vaccinaux et, pour chacun d'entre eux, le nombre de doses requises. / Ce décret fixe les éléments permettant d'établir un certificat de statut vaccinal pour les personnes mentionnées au même I et les modalités de présentation de ce certificat sous une forme ne permettant d'identifier que la nature de celui-ci et la satisfaction aux critères requis. Il détermine également les éléments permettant d'établir le résultat d'un examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19 et le certificat de rétablissement à la suite d'une contamination par la covid-19. / III. - Le I ne s'applique pas aux personnes chargées de l'exécution d'une tâche ponctuelle au sein des locaux dans lesquels les personnes mentionnées aux 1°, 2°, 3° et 4° du même I exercent ou travaillent. / IV. - Un décret, pris après avis de la Haute Autorité de santé, peut, compte tenu de l'évolution de la situation épidémiologique et des connaissances médicales et scientifiques, suspendre, pour tout ou partie des catégories de personnes mentionnées au I, l'obligation prévue au même I ". Aux termes de l'article 13 de la même loi : " I. - Les personnes mentionnées au I de l'article 12 établissent : / 1° Satisfaire à l'obligation de vaccination en présentant le certificat de statut vaccinal prévu au second alinéa du II du même article 12. / Par dérogation au premier alinéa du présent 1°, peut être présenté, pour sa durée de validité, le certificat de rétablissement prévu au second alinéa du II de l'article 12. Avant la fin de validité de ce certificat, les personnes concernées présentent le justificatif prévu au premier alinéa du présent 1°. / () ; / 2° Ne pas être soumises à cette obligation en présentant un certificat médical de contre-indication (). / II. - Les personnes mentionnées au I de l'article 12 justifient avoir satisfait à l'obligation prévue au même I ou ne pas y être soumises auprès de leur employeur lorsqu'elles sont salariées ou agents publics (). / V.- Les employeurs sont chargés de contrôler le respect de l'obligation prévue au I de l'article 12 par les personnes placées sous leur responsabilité () ". Aux termes de l'article 14 de cette loi : " I. - () B. - A compter du 15 septembre 2021, les personnes mentionnées au I de l'article 12 ne peuvent plus exercer leur activité si elles n'ont pas présenté les documents mentionnés au I de l'article 13 ou, à défaut, le justificatif de l'administration des doses de vaccins requises par le décret mentionné au II de l'article 12 (). / III. - Lorsque l'employeur constate qu'un agent public ne peut plus exercer son activité en application du I, il l'informe sans délai des conséquences qu'emporte cette interdiction d'exercer sur son emploi ainsi que des moyens de régulariser sa situation. L'agent public qui fait l'objet d'une interdiction d'exercer peut utiliser, avec l'accord de son employeur, des jours de congés payés. A défaut, il est suspendu de ses fonctions ou de son contrat de travail. La suspension mentionnée au premier alinéa du présent III, qui s'accompagne de l'interruption du versement de la rémunération, prend fin dès que l'agent public remplit les conditions nécessaires à l'exercice de son activité prévues au I. Elle ne peut être assimilée à une période de travail effectif pour la détermination de la durée des congés payés ainsi que pour les droits acquis par l'agent public au titre de son ancienneté. Pendant cette suspension, l'agent public conserve le bénéfice des garanties de protection sociale complémentaire auxquelles il a souscrit () ". En ce qui concerne la légalité externe : 3. Les dispositions précitées de la loi du 5 août 2021 et celles du décret n° 2021-1059 du 7 août 2021 pris pour son application prévoient que les personnes concernées justifient avoir satisfait à leur obligation vaccinale ou ne pas y être soumises auprès de leur employeur, qui est chargé de contrôler le respect de cette obligation par les personnes placées sous sa responsabilité, et ont fixé à cette fin le principe de la production du certificat de statut vaccinal qu'elles prévoient et les modalités d'établissement et de présentation de ce certificat sous une forme ne permettant d'identifier que la nature de celui-ci et la satisfaction aux critères requis. Dans ces conditions et alors que la décision en litige se fonde au demeurant sur l'absence de fourniture du justificatif requis, la circonstance qu'il ne serait pas justifié de l'habilitation du signataire de la décision en litige pour accéder aux données de santé de la requérante est sans incidence sur la légalité de cette décision. 4. Alors que la requérante a été destinataire d'un courrier d'information du 7 septembre 2021 et a été reçue le 20 septembre suivant pour un entretien relatif à sa situation au regard de son obligation vaccinale et aux conséquences susceptibles d'en être tirées, il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire que la légalité de la mesure de suspension prévue par l'article 14 de la loi du 5 août 2021 serait subordonnée à la tenue après cette suspension d'un entretien en vue d'examiner les possibilités de régularisation de la situation de l'intéressé. Par suite, le moyen tiré par la requérante de ce qu'elle n'a pas bénéficié d'un entretien après le prononcé de la mesure en litige ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté. En ce qui concerne la légalité interne : S'agissant de l'exception d'illégalité du décret du 7 août 2021 : 5. A l'appui de sa contestation, Mme B soutient par la voie de l'exception que le décret du 7 août 2021 présente un caractère discriminatoire en ce qu'il fixe en son annexe 2 les cas de contre-indication médicale à la vaccination contre la covid-19, faisant ainsi obstacle à ce qu'un médecin, portant son appréciation sur la situation de l'intéressé, puisse délivrer utilement un certificat de contre-indication dans un cas qui ne figurerait pas sur cette liste. Toutefois et alors que la liste fixée à l'annexe 2 du décret critiqué l'a été sur la base d'une proposition de l'Agence nationale de santé et du médicament et au vu de l'avis de la Haute autorité de santé du 4 août 2021, il ne ressort pas des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas sérieusement soutenu par la requérante, qui ne se prévaut d'ailleurs d'aucune contre-indication qui la concernerait et se borne sur ce point à invoquer l'anxiété que la perspective d'une vaccination peut selon elle susciter chez certains, qu'en l'état des connaissances scientifiques disponibles à la date de ce décret et de la décision en litige, la liste des contre-indications retenues aurait été illégalement lacunaire ou n'aurait pas dû être limitative. Par suite, le moyen doit être écarté. 6. Pour soutenir que le décret du 7 août 2021 est illégal comme étant entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, Mme B met en doute la pertinence de l'obligation vaccinale en faisant notamment valoir la possibilité d'y substituer plus efficacement selon elle une politique de dépistage régulier. Toutefois, le principe de l'obligation vaccinale que conteste la requérante ne résulte pas du décret en litige mais de la loi du 5 août 2021 elle-même, qui n'est pas autrement contestée. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté. S'agissant de la possibilité d'opposer l'obligation vaccinale à la requérante : 7. En adoptant, pour l'ensemble des personnes exerçant leur activité dans les établissements de santé mentionnés à l'article L. 6111-1 du code de la santé publique et à l'exception de celles n'y effectuant qu'une tâche ponctuelle, le principe d'une obligation vaccinale à compter du 15 septembre 2021, le législateur a entendu garantir le bon fonctionnement des services hospitaliers publics grâce à la protection offerte par les vaccins disponibles et protéger la santé des personnes qui y étaient hospitalisées. Il en résulte que l'obligation vaccinale prévue par les dispositions du I de l'article 12 de la loi du 5 août 2021 citées au point 2 s'impose à toute personne travaillant régulièrement au sein de locaux relevant d'un établissement de santé mentionné à l'article L. 6111-1 du code de la santé publique, quel que soit l'emplacement des locaux en question et que cette personne ait ou non des activités de soins et soit ou non en contact avec des patients ou des professionnels de santé. Par suite, Mme B n'est pas fondée à se prévaloir de la nature des fonctions qu'elle exerce en sa qualité d'ouvrière principale au sein de la cuisine centrale du CHU ni de l'exercice de ses fonctions en un lieu distinct de ceux où sont accueillis les patients ou le personnel soignant du CHU pour soutenir que l'obligation vaccinale en débat ne pouvait légalement lui être opposée. S'agissant du caractère disciplinaire de la décision attaquée : 8. La décision en litige prononce la suspension de fonctions de la requérante jusqu'à ce qu'elle produise un justificatif de vaccination ou de contre-indication à celle-ci répondant aux exigences du décret du 7 août 2021. Ce faisant, cette décision se borne à tirer les conséquences du défaut de production par l'intéressée du justificatif requis en faisant application des dispositions spécifiques de l'article 14 de la loi du 5 août 2021 sur lesquelles elle se fonde. Dans ces conditions, Mme B, d'une part, n'est pas fondée à soutenir que la décision qu'elle conteste est constitutive d'une sanction déguisée et, d'autre part, ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions alors en vigueur de la loi du 13 juillet 1983 visée ci-dessus dont l'application n'est pas en cause, en particulier de la durée maximale de la suspension de fonctions prononcée sur le fondement de son article 30 lorsque l'engagement d'une procédure disciplinaire est envisagé. 9. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de la décision du 20 septembre 2021 doivent être rejetées. Sur les conclusions à fin d'injonction : 10. Le présent jugement, qui rejette les conclusions dirigées contre la décision du 20 septembre 2021, n'appelle aucune mesure d'exécution. Sur les frais liés au litige : 11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la requérante présentées sur leur fondement et dirigées contre le CHU de Saint-Etienne, qui n'est pas partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions que le CHU de Saint-Etienne présente au titre des frais d'instance.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B est rejetée. Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Mme C B et au centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne. Délibéré après l'audience du 31 mai 2023, à laquelle siégeaient : M. Gille, président, M. Richard-Rendolet, premier conseiller, Mme de Mecquenem, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juillet 2023. Le président, rapporteur A. Gille L'assesseur le plus ancien F.-X. Richard-Rendolet La greffière, L. Khaled La République mande et ordonne au préfet de la Loire en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Un greffier,

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