Vu la procédure suivante
:
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 novembre 2020 et le 16 août 2021, M. C B, représenté par Me Huaumé, demande au tribunal :
1°) d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2020 par laquelle le maire de la commune de La Chapelle Saint-Aubert a refusé de le titulariser en fin de stage ;
2°) de mettre à la charge de la commune de la Chapelle Saint-Aubert la somme de 4 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision de ne pas le titulariser ne pouvait être fondée sur l'existence d'une condamnation pénale.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 8 juillet et le 4 novembre 2021, la commune de la Chapelle Saint-Aubert, représentée par la SELARL Coudray, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de M. B au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la requête est irrecevable, dès lors que la requête ne comporte l'exposé d'aucun moyen ;
- les moyens invoqués sont infondés.
M. B a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 16 décembre 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 92-1194 du 4 novembre 1992 ;
- le décret n° 2006-1691 du 22 décembre 2006 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Dayon,
- les conclusions de M. Met, rapporteur public,
- les observations de Me Dugue et de M. A élève avocat, représentant la commune de la Chapelle Saint-Aubert.
Considérant ce qui suit
:
1. M. B a été nommé en qualité d'adjoint technique territorial stagiaire par le maire de la commune de la Chapelle Saint-Aubert par un arrêté du 13 septembre 2019 pour une durée d'un an à compter du 18 septembre 2019. Par un arrêté du 30 septembre 2020, dont M. B demande l'annulation, le maire de la commune de la Chapelle Saint-Aubert a refusé de titulariser M. B à l'issue de son stage.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 5 du décret du 4 novembre 1992 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires stagiaires de la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Le fonctionnaire territorial stagiaire peut être licencié pour insuffisance professionnelle lorsqu'il est en stage depuis un temps au moins égal à la moitié de la durée normale du stage. ". Aux termes de l'article 8 du décret du 22 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux : " Les candidats recrutés en qualité d'adjoint technique territorial sur un emploi d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public d'une collectivité territoriale, ainsi que les candidats inscrits sur une liste d'aptitude au grade d'adjoint technique territorial principal de 2e classe et recrutés sur un emploi d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public d'une collectivité territoriale, sont nommés stagiaires par l'autorité territoriale investie du pouvoir de nomination pour une durée d'un an. ". Aux termes de l'article 10 du décret précité : " A l'issue du stage, les stagiaires dont les services ont donné satisfaction sont titularisés par décision de l'autorité territoriale investie du pouvoir de nomination au vu notamment d'une attestation de suivi de la formation d'intégration établie par le Centre national de la fonction publique territoriale. / Les autres stagiaires peuvent, sur décision de l'autorité territoriale, être autorisés à effectuer un stage complémentaire d'une durée maximale d'un an. Si le stage complémentaire a été jugé satisfaisant, les intéressés sont titularisés. / Les adjoints techniques territoriaux stagiaires et les adjoints techniques territoriaux principaux de 2e classe stagiaires qui n'ont pas été autorisés à effectuer un stage complémentaire, ou dont le stage complémentaire n'a pas été jugé satisfaisant, sont soit licenciés s'ils n'avaient pas auparavant la qualité de fonctionnaire, soit réintégrés dans leur grade d'origine. ".
3. Il ressort des pièces du dossier que la décision de ne pas titulariser M. B a été prise au motif que ce dernier avait été en retard sans justifications, qu'il avait accusé un élu de la commune d'alcoolisme, qu'il avait utilisé des outils personnels durant le service, qu'il méconnaissait les règles de récupération d'heures et enfin d'une désobéissance hiérarchique. A ce titre, il ressort des pièces du dossier, notamment produites par la commune et non sérieusement contestées par le requérant, que M. B a fait l'objet d'un suivi de stage et de plusieurs entretiens, en particulier les 7 février et 11 juin 2020 au cours desquels les manquements de M. B aux horaires de travail, ses absences injustifiées, l'utilisation des outils personnels sur le temps de travail et sa désobéissance hiérarchique ont été constatés. En outre, il ressort des pièces du dossier que le rapport de saisine de la commission administrative paritaire (CAP) apporte une description circonstanciée des manquements précités et que la CAP s'est, par un avis du 29 septembre 2020 déclaré favorable au refus de titularisation de M. B. Dans ces conditions, dès lors que M. B n'apporte aucun élément de nature à sérieusement remettre en cause les manquements qui lui ont été reprochés, et qui caractérisent une insuffisance professionnelle, c'est sans erreur manifeste d'appréciation que le maire de la Chapelle Saint-Aubert a refusé de le titulariser en fin de stage.
4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le rapport de saisine de la CAP indique que M. B a été condamné à trois années d'emprisonnement pour agression sexuelle sur mineure et qu'en conséquence, " compte tenu du motif de la condamnation et de l'impossibilité de surveillance, la collectivité ne peut pas prendre le risque d'une nouvelle agression ". Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que le maire de la Chapelle Saint-Aubert a refusé de titulariser M. B en raison notamment de la condamnation pénale dont il avait fait l'objet. Or, il ressort des pièces du dossier que cette condamnation est fondée sur des faits commis en dehors du service et sans rapport avec les fonctions de M. B au sein de la commune. Dès lors, en prenant la décision de ne pas titulariser M. B sur ce motif, le maire de la commune de la Chapelle Saint-Aubert n'a pas procédé à la constatation d'une insuffisance professionnelle. Par suite, la décision est entachée d'une erreur de droit.
5. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit au point 3 que le maire de la commune de la Chapelle Saint-Aubert pouvait refuser de titulariser M. B en raison des manquements commis lors de son stage et de nature à révéler une insuffisance professionnelle sans entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation. Il ne résulte pas de l'instruction que le maire de la commune de la Chapelle Saint-Aubert n'aurait pas pris la même décision en se fondant sur ce seul motif.
6. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de la Chapelle Saint-Aubert, les conclusions de M. B tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 septembre 2020 par laquelle le maire de la commune de La Chapelle Saint-Aubert a refusé de le titulariser en fin de stage doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
7. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la commune de la Chapelle Saint-Aubert au titre des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
8. Les dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la commune de la Chapelle Saint-Aubert, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de la Chapelle Saint-Aubert au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. C B et à la commune de la Chapelle Saint-Aubert.
Délibéré après l'audience du 11 mai 2023, à laquelle siégeaient :
M. Tronel, président,
Mme Allex, première conseillère,
M. Dayon, conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 mai 2023.
Le rapporteur,
signé
C. Dayon
Le président,
signé
N. Tronel
La greffière,
signé
C. Salladain
La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.