LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a obtenu, à effet du 1er novembre 2001, une pension de réversion servie par la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (la CNAVTS), à effet du 1er février 2005, une pension personnelle servie par la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, à effet du 1er novembre 2006, un avantage de retraite complémentaire servi par la caisse de retraite complémentaire Aprionis, et à effet, du 1er novembre 2006, une pension de vieillesse du régime général servie par la CNAVTS ; que celle-ci a notifié à Mme X..., les 17 et 22 octobre 2008, la réduction de sa pension de réversion, en raison de l'application des règles de cumul des droits propres et des droits de réversion, et réclamé le remboursement d'un trop-perçu, couvrant la période du 1er novembre 2006 au 30 septembre 2008 ; que Mme X... a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Sur le moyen unique, pris en ses première et troisième branches, reproduit en annexe :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen unique qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le même moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles
R. 353-1,
R. 815-18 et
R. 815-38 du code de la sécurité sociale ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes que si la date de la dernière révision de la pension de réversion ne peut être postérieure, notamment, à un délai de trois mois après la date à laquelle le conjoint survivant est entré en jouissance de l'ensemble des avantages personnels de retraite de base et complémentaires lorsqu'il peut prétendre à de tels avantages, c'est à la condition que l'intéressé ait informé de cette date l'organisme auquel incombe le paiement de la pension de réversion ;
Attendu que pour accueillir le recours de Mme X..., l'arrêt retient que celle-ci bénéficiait d'une retraite complémentaire depuis 2006 dont elle a informé la CNAVTS en août 2011, suite à un contrôle effectué par celle-ci ; que la CNAVTS disposait de tous les éléments de ressources pour fixer le montant de la pension de réversion qu'elle lui a notifié le 1er décembre 2006 ; que la date de la dernière révision ne pouvait être postérieure au délai de trois mois après la date à laquelle Mme X... est entrée en jouissance de l'ensemble de ses avantages personnels de retraite de base et complémentaire, soit postérieurement au 1er février 2007 ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, alors qu'elle constatait que Mme X... n'avait produit l'information lui incombant qu'en août 2011, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS
:
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article
700 du code de procédure civile, condamne Mme X... à payer à la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE
au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la CNAVTS
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la révision par la CNAV était hors délai en application de l'article
R.353-1-1 du code de la sécurité sociale et partant, l'indu qui en est résulté et, en conséquence, d'AVOIR débouté la CNAV de sa demande en paiement ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il résulte de l'article
L.353-1 du code de la sécurité sociale, que la pension de réversion allouée au conjoint survivant obéit à des conditions de ressources et qu'elle est réduite à due concurrence du dépassement, lorsque son montant majoré des ressources prises en compte excède les plafonds prévus ; que l'article
R.353-1-1 du même code stipule que la pension de réversion est révisable en cas de variation dans le montant des ressources, calculé en application des dispositions de l'article
R.353-1, dans les conditions et selon les modalités fixées aux articles R.815-20 et suivants du code de la sécurité sociale ; que la date de la dernière révision ne peut être postérieure a) un délai de trois mois après la date à laquelle le conjoint survivant est entrée en jouissance de l'ensemble des avantages personnels de retraite de base et complémentaire lorsqu'il peut prétendre à de tels avantages ; b) à la date de son soixantième anniversaire lorsqu'il ne peut pas prétendre à de tels avantages ; qu'en l'espèce, Mme X..., bénéficiaire d'une pension de réversion depuis 2001 et titulaire d'une pension de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales depuis le 1er février 2005, s'est vue attribuer à effet du 1er novembre 2006 sur la base d'un questionnaire mentionnant sa pension de la CNRACL ; qu'à compter de cette date également, elle s'est vue attribuer le bénéfice de son avantage complémentaire ; qu'ainsi, comme le reconnaît la caisse, Mme X..., au 1er novembre 2006, était titulaire de l'ensemble de ses avantages vieillesse ; que l'organisme de retraite disposait à cette date de tous les éléments de ressources de l'intéressé pour fixer le montant de sa pension de réversion qu'il lui a notifié le 1er décembre 2006 ; qu'en conséquence la date de la dernière révision ne pouvait être postérieure au délai de trois mois après la date à laquelle Mme X... est entrée en jouissance de l'ensemble de ses avantages personnels de retraite de base et complémentaire soit postérieure au 1er février 2007, date de cristallisation de la pension de réversion ; que la caisse, dès lors, ne pouvait valablement modifier la pension de réversion de Mme X..., 20 mois plus tard, le 17 octobre 2008, alors qu'elle ne se fondait sur aucun élément nouveau depuis l'attribution de la pension comme elle le reconnaissait dans un courrier explicatif adressé à Mme X... le 26 août 2009 en ces termes : « à compter du 1er novembre 2006, nous vous avons attribué une retraite personnelle. Nous aurions dû dès cette date prendre en compte votre pension auprès de de la CNRACL dont nous avions connaissance et de ce fait réviser votre pension de réversion ; or cette révision n'a pas été effectuée et nous avons continué à vous servir la pension entière ; à la détection de l'erreur par notre service informatique, nous avons révisé votre dossier à compter du 1er août 2006 » ; que c'est en vain que la caisse justifie son retard par la connaissance, à la date d'août 2011, d'une retraite complémentaire de 19 euros par mois perçue par Mme X... depuis 2006 que celle-ci n'aurait déclarée que dans le questionnaire rempli, à la demande de la caisse, à l'âge de 65 ans, alors que cet élément argué pour la première fois en cause d'appel, n'est pas compris dans le périmètre du litige puisqu'il est postérieur à la notification contestée du 17 octobre 2008, seul objet du débat ; que compte tenu de tous ses éléments, le jugement, pris pour de justes motifs adoptés, doit être confirmé en ce qu'il a déclaré infondée la créance de la caisse, forclose en son recours et fait droit au recours de Mme X... ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'aux termes de l'article
R.353-1-1 du code de la sécurité sociale la révision de la pension de réversion ne peut être postérieure à un délai de trois mois après la date à laquelle le conjoint survivant est entré en jouissance de l'ensemble des avantages de retraite de base et complémentaire ; qu'en l'espèce, Mme X... a obtenu sa retraite le 1er novembre 2006 et le délai suscité expirait le 1er février 2007 ; que la révision effectuée par la CNAV en octobre 2008 était donc hors délai ; que la contestation de Mme X... sera accueillie et la CNAV sera déboutée de sa demande en paiement ; que par ailleurs, il convient de condamner la CNAV à rembourser à Mme X... la somme de 383,78 € correspondant aux retenues déjà effectuées ; que la demande de dommages et intérêts qui correspondait à une compensation à valoir sur l'indu réclamé devient sans objet ;
1. ALORS QUE la fraude corrompt tout et fait exception à toutes les règles ; que si, en principe, la date de la dernière révision de la pension de réversion ne peut être postérieure de trois mois à la date à laquelle l'assuré est entré en jouissance de l'ensemble de ses avantages personnels de retraite de base et complémentaire, il n'en va pas de même s'il a dissimulé à la caisse une partie de ces avantages ; que dans cette hypothèse, la caisse débitrice de la pension de réversion peut procéder à une révision du montant de cette pension au-delà du délai de trois mois ; qu'il est constant que Mme X... a dissimulé à la CNAV, jusqu'en août 2011, la retraite complémentaire versée par APRIONIS depuis le 1er novembre 2006, avantage de retraite distinct de la pension versée par la CNRACL ; qu'en jugeant, en dépit de cette fraude, que dans la mesure où l'assurée avait obtenu l'ensemble de ses avantages de retraite de base et complémentaire au 1er novembre 2006, la CNAV ne pouvait procéder à une révision de sa pension de réversion au-delà du 1er février 2007, la Cour d'appel a violé le principe selon lequel « la fraude corrompt tout » ;
2. ALORS QUE la pension de réversion est une prestation soumise à conditions de ressources ; qu'elle ne peut être définitivement fixée qu'une fois toutes les ressources de l'assuré connues par la CNAV ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a relevé que la caisse n'avait eu connaissance qu'en août 2011 d'une retraite complémentaire de 19 € par mois perçue par l'assurée depuis 2006 (arrêt p. 4 § 2), à savoir la retraite complémentaire versée par APRIONIS, distincte de la pension CNRACL ; qu'en affirmant pourtant qu'au 1er novembre 2006, « l'organisme de retraite disposait de tous les éléments de ressources de l'intéressée pour fixer le montant de sa pension de réversion qu'il lui a notifié le 1er décembre 2006 », la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard des articles
L.353-1 et
R.353-1-1 du code de la sécurité sociale ;
3. ALORS QUE pour justifier en appel les prétentions qu'elles ont soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux ; qu'en affirmant, pour faire droit au recours de Mme X..., que le moyen pris de la dissimulation par l'assurée de sa retraite complémentaire était « argué pour la 1ère fois en cause d'appel », la Cour d'appel a violé les articles
563 et
565 du code de procédure civile ;