REPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
4ème Chambre - Section A
ARRET DU 1 er AVRIL 2009
Numéro d'inscription au répertoire général : 07/20715
Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Décembre 2007 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 06/05786
APPELANTE
ASSOCIATION FRANÇAISE DE NORMALISATION agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux [...] 93571 LA PLAINE SAINT-DENIS représentée par la SCP Anne-Marie OUDINOT et Pascale FLAURAUD, avoués à la Cour assistée de Me Pierre G, avocat au barreau de Paris,
INTIME
SARL ECLATS ANTIVOLS SOCIETE D'EXPLOITATION prise en la personne de son gérant Centre de Gros -19, Rue Gaston Evrard 31094 TOULOUSE CEDEX représenté par la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER, avoués à la Cour assistée de Me Laurent S, avocat au barreau de Paris, toque D1392
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles
786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Janvier 2009, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Brigitte CHOKRON, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Alain GIRARDET, président Madame Dominique ROSENTHAL, conseiller, Madame Brigitte CHOKRON, conseiller qui en ont délibéré
GREFFIER : lors des débats : Mme Jacqueline VIGNALARRET : CONTRADICTOIRE - rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article
450 du nouveau Code de procédure civile. - rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article
450 du nouveau Code de procédure civile. - signé par Nous, Dominique ROSENTHAL, Conseiller le plus ancien ayant délibéré, en l'empêchement de Monsieur Alain GIRARDET, président et par Nous Jacqueline VIGNAL, greffier à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
Vu l'appel interjeté le 7 décembre 2007 par l'ASSOCIATION FRANÇAISE DE NORMALISATION (AFNOR), d'un jugement rendu sous le bénéfice de l'exécution provisoire le 4 décembre 2007 par le tribunal de grande instance de Paris qui :
- l'a déboutée de ses demandes en contrefaçon de la marque semi-figurative n° 1588821 "NF" formées à rencontre de la société ECLATS ANTIVOLS qui s'est contentée de faire référence aux Normes Françaises en vigueur,
- l'a déboutée de ses demandes formées à l'encontre de cette même société en parasitisme, publicité mensongère et tromperie,
- l'a condamnée à régler à la société défenderesse les sommes de 10 000 euros pour procédure abusive, 5000 euros au titre des frais irrépétibles et à supporter les dépens ;
Vu les uniques écritures, signifiées le 19 mars 2008, par lesquelles l'ASSOCIATION FRANÇAISE DE NORMALISATION poursuivant l'infirmation du jugement déféré, demande à la Cour, statuant à nouveau, de :
- constater qu'elle est titulaire de la marque semi-figurative "NF" n° 1588821 pour l'avoir déposée le 23 juillet 1942 dans les classes 1 à 42 et l'avoir régulièrement renouvelée depuis,
- constater que cette marque est notoirement connue au sens de l'article
L 713-5 du Code de la propriété intellectuelle,
- dire et juger que la société ECLATS ANTIVOLS s'est livrée au préjudice de l'AFNOR à :
* des agissements de contrefaçon de marque au regard de l'article
L 713-2 et à tout le moins de l'article
L 713-3 du Code de la propriété intellectuelle,
* une atteinte à la marque notoire "NF" au visa de l'article
L 713-5 du Code précité,
* des actes de publicité mensongère au sens des articles
L 121-1 du Code de la consommation et
1382 du Code civil,
* des actes de tromperie en vertu des articles L L 15-30 du Code de la consommation et
1382 du Code civil,
En conséquence,- lui interdire, sous astreinte de 1000 euros par infraction constatée, l'utilisation sous quelque forme que ce soit de la marque de certification "NF" à compter de la signification de l'arrêt,
- la condamner à lui verser :
* la somme de 25 000 euros à titre de dommages-intérêts pour les atteintes à ses droits de marque au regard des articles
L 713-2,
L713-3,
L 713-5 du Code de la propriété intellectuelle,
* la somme de 25 000 euros à titre de dommages-intérêts pour publicité mensongère et tromperie,
* la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles,
- ordonner à titre de suppléments de dommages-intérêts, la publication à ses frais de l'arrêt dans des revues ou journaux à concurrence d'un coût de 3500 HT par insertion,
- la condamner aux dépens dans les conditions de l'article
699 du Code de procédure civile ;
Vu les uniques conclusions, signifiées le 19 septembre 2008, aux termes desquelles la société ECLATS ANTIVOLS poursuit la confirmation du jugement entrepris et prie la Cour, en conséquence, de débouter la société appelante de toutes ses demandes outre de la condamner au paiement d'une indemnité de 5000 euros au titre de l'article 700 du Code de l'article
700 du Code de procédure civile et des dépens avec le bénéfice des dispositions de l'article
699 du Code précité ;
Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 24 novembre 2008 ;
SUR CE, LA COUR,
Considérant que
, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ; qu'il suffit de rappeler que :
-1'ASSOCIATION FRANÇAISE DE NORMALISATION, ci-après dénommée AFNOR, association fondée en 1926 reconnue d'utilité publique, a pour objet l'élaboration, l'homologation et la promotion des normes en France,
- elle est titulaire d'une marque collective "NF" n° 1588821, déposée le 23 juillet 1942 et régulièrement renouvelée depuis, pour distinguer les produits et services des classes 1 à 42, représentée par le logo suivant :- la société ECLATS ANTIVOLS (sari) a commercialisé en 2006, sous la dénomination PROTECTOR JB 2005, un dispositif de sécurité visant à prévenir au moyen d'une alarme les risques de noyade dans les piscines privatives,
- elle expose que la réglementation exige désormais des propriétaires de piscines la mise en place d'un dispositif de sécurité normalisé, que le produit qu'elle offre à la vente répond aux normes françaises NF P 90-307 et NF P 90-307/A1, qu'elle n'a fait usage du sigle NF pour désigner et promouvoir son produit que dans le souci légitime de certifier à la clientèle sa conformité à la norme applicable ,
- c'est dans ces circonstances que l'AFNOR a fait établir le 6 avril 2006 un procès-verbal de constat par un agent assermenté de l'Agence de Protection des Programmes(APP) puis, a assigné le 10 avril 2006 la société ECLATS ANTIVOLS devant le tribunal de grande instance de Paris pour répondre de faits de contrefaçon de marque, d'atteinte à une marque notoire, publicité mensongère et tromperie ;
Sur la contrefaçon de la marque semi-figurative "NF",
Considérant que le procès-verbal de constat de l'APP produit au soutien de l'action en justice, énonce avoir constaté après saisie dans la barre URL du navigateur de l'adresse http://www.eclats- antivols.fr les impressions suivantes :
-LE PRODUIT PHARE- ALARME PISCINE PROTECTOR JB 2005 NF P 90-307/A1 (page 3),
- ALARME PISCINE PROTECTOR JB 2005 NF P 90-307/A1 2005 CONFORME AGREE CE INTERTEK CONFORMITE NF (page4),
- Alarme électronique de piscine agréée NF P 90-307 / Al 2005 (page 11),- Système électronique NF de haute technologie à fixation mécanique très simple (5- lOminutes) ; ne nécessite ni branchement électrique, ni réglage de la sensibilité. Le détecteur de chute PROTECTOR JB 2005 est agréé et conforme à la norme NF P 90- 307/A1 2005 (page 11),
- PROTECTOR JB 2005 NF a été reconnue comme l'alarme électronique de piscine NF la plus sûre et la plus fiable (page 11),
- Les tests réalisés par les laboratoires internationaux d'INTERTEK SEMKO (ITL) et leurs homologations CE et NF P 90-307/A1 2005, vous certifient un usage rassurant sans aucun désagrément (page 11);
Or considérant qu'il résulte de ces éléments que les premiers juges ont exactement retenu par des motifs pertinents que la Cour adopte que les initiales NF désignent de manière usuelle la NORME FRANÇAISE de sorte qu'il apparaît d'évidence que la dénomination (PROTECTOR JB 2005) suivie des initiales NF pour désigner et pour promouvoir un dispositif de sécurité pour les piscines signifie d'emblée pour le consommateur moyen raisonnablement attentif et avisé et normalement informé que ce produit est conforme à la norme applicable en France, la notoriété de la marque semi-figurative "NF" et 1 ' observation selon laquelle au sein de cette marque le couple de consonnes NF serait distinctif et dominant n'étant pas de nature à générer un risque de confusion entre les signes en présence au sens des dispositions de l'article
L 713-3 du Code de la propriété intellectuelle ;
Considérant que dans le cas de l'espèce, le prétendu risque de confusion avec la marque semi- figurative "NF" est d'autant moins caractérisé au regard des dispositions précitées que les initiales NF sont suivies des références de la norme applicable au produit en question : NF P 90-307/A1 2005 et que ce produit, constitué d'un dispositif de prévention contre le risque de noyade, est destiné à une clientèle de propriétaires de piscines privatives auxquels la réglementation impose de se- pourvoir d'un tel dispositif dans des conditions de conformité avec la norme qu'elle aura édictée ;
Qu'il s'ensuit que le jugement déféré mérite confirmation en ce qu'il a écarté au regard de l'ensemble des facteurs pertinents du cas de l'espèce tout risque de confusion et débouté P AFNOR de sa demande en contrefaçon de marque ;
Sur l'atteinte à la marque notoire,
Considérant que le jugement doit encore être confirmé en ce qu'il a débouté l'AFNOR de sa prétention émise de ce chef force étant de constater que l'emploi du sigle NF est légitime et justifié pour faire connaître au public que le produit offert à la vente répond à la norme qui lui est applicable ;
Sur la publicité mensongère et la tromperie,
Considérant, toujours par confirmation du jugement entrepris, qu'il résulte des développements qui précèdent qu'il ne saurait être fait grief à la société ECLATS ANTIVOLS de faire connaître que ses produits obéissent à la norme en vigueur force étant d'observer que le moyen avancé par l'AFNOR selon lequel il résulterait de cette circonstance une publicité mensongère ou une tromperie pour la clientèle qui serait fondée à attribuer à ces produits les garanties spécifiques attachées à la marque AFNOR est dénué depertinence en l'absence de tout risque de confusion entre la référence expresse à la nonne française applicable et la marque française ;
Sur les autres demandes,
Considérant que la société intimée n'apporte pas la preuve qui lui incombe de la mauvaise foi, de l'esprit de malveillance ou de la légèreté blâmable qui auraient présidé à l'introduction de l'action en justice de sorte que, l'abus de droit susceptible d'ouvrir droit à réparation n'est pas établi à la charge de l'AFNOR à laquelle il convient d'accorder qu'elle a pu légitimement se méprendre sur l'étendue de ses droits ;
Que le jugement déféré sera, par voie de conséquence, infirmé en ce qu'il a, estimé à tort, la procédure abusive et alloué des dommages-intérêts de ce chef ;
Considérant qu'il résulte du sens de l'arrêt que l'AFNOR ne saurait bénéficier des dispositions de l'article
700 du Code de procédure civile; que l'équité commande, par contre, de la condamner, sur ce même fondement, à verser à la société intimée une indemnité complémentaire de 5000 euros et à supporter les dépens selon les modalités énoncées au dispositif ci-après ;
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a retenu le caractère abusif de la procédure et condamné l'AFNOR à verser des dommages-intérêts de ce chef,
Statuant à nouveau du chef infirmé,
Déboute la société ECLATS ANTIVOLS de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,
Y ajoutant,
Condamne l'AFNOR à régler à la société ECLATS ANTIVOLS une indemnité complémentaire de 5000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens de la procédure d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article
699 du Code précité.