LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- Mme Françoise X... épouse Y...,
- M. Antonio Y..., parties civiles,
- contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 5e section, en date du 14 décembre 2010, qui, dans l'information suivie, sur leur plainte, contre personne non dénommée des chefs de violation du secret professionnel et recel, a confirmé l'ordonnance de refus de mesure d'instruction complémentaire rendue par le juge d'instruction ;
- contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 5e section, en date du 26 mars 2012, qui, dans l'information suivie, sur leur plainte, contre personne non dénommée des chefs de violation du secret professionnel et recel, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 24 septembre 2013 où étaient présents dans la formation prévue à l'article
567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel, président, M. Buisson conseiller rapporteur, Mme Guirimand conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller BUISSON, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, avocat en la Cour, et les conclusions de l'avocat général LIBERGE ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit ;
I-Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 14 décembre 2010 :
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme,
81,
82-1,
591 et
593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande d'actes présentée par M. et Mme Y...;
" aux motifs qu'il s'évince des pièces de la procédure que tant les personnes morales, les sociétés Beverly Hills, Michel Ange, la SCI Achristola après mise en liquidation judiciaire des deux premières, sociétés dans lesquelles les époux Y..., d'une part, et les époux B..., d'autre part, étaient associés, que les personnes physiques de ce deux couples ont fait l'objet de procédures de vérification fiscale de la part des services compétents des Pyrénées atlantiques ; que si auparavant une plainte avec constitution de partie civile a fait l'objet de l'ouverture d'une information judiciaire principalement du chef d'abus de biens sociaux, il apparaissait juridiquement nécessaire, pour tenter d'établir cette éventuelle infraction, de « croiser » des documents comptables, commerciaux ou émanant des services fiscaux relatifs à ces personnes physiques et morales afin de recueillir éventuellement tout élément de preuve, que les parties civiles se devaient de verser, elles-mêmes ou via leur conseil, à la procédure à l'initiative de laquelle elles étaient ; qu'il est exact que si ces personnes physiques et morales ont été l'objet de procédures de vérifications fiscales, ce que ne contestent pas les parties civiles, elles bénéficiaient en corollaire d'un droit de communication des pièces que leur opposait l'administration, et que dès lors ces pièces étaient régulièrement mises à leur disposition ; que le raisonnement du juge d'instruction dans son ordonnance du 15 mars 2010 apparaît tout à fait pertinent pour expliquer suffisamment la source des pièces dont le versement à la procédure pénale initiale est contesté par les époux Y..., alors qu'il ne peut être légalement tenu compte des motivations contraires d'une ordonnance intervenue dans une procédure distincte ; que s'il est exact que si ces personnes physiques et morales ont été l'objet de procédures de vérifications fiscales, ce que ne contestent pas les parties civiles, elles bénéficiaient, en corollaire, d'un droit de communication des pièces que l'administration leur opposait, et que dès lors ces pièces étaient régulièrement mises à leur disposition ; qu'en conséquence les actes complémentaires sollicités ne sont absolument pas nécessaires à la manifestation de la vérité ;
" 1°) alors que les pièces dont les époux B...pouvaient le cas échéant obtenir communication dans le cadre de leur contrôle fiscal ne pouvaient concerner que leur situation personnelle ou celle des sociétés dont ils étaient associés, à l'exclusion de celle des époux Y...; qu'en rejetant la demande d'actes supplémentaires sans rechercher si, parmi les pièces mises à la disposition des époux B..., certaines ne concernaient pas la situation personnelle des époux Y..., la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision ;
" 2° alors que les époux Y...faisaient valoir dans leur mémoire que les pièces litigieuses étaient des documents internes à l'administration fiscale, qui ne pouvaient faire l'objet d'une quelconque communication ; qu'en se bornant à énoncer, pour dire que ces pièces avaient été régulièrement mises à la disposition des époux B..., que ceux-ci bénéficiaient d'un droit de communication des pièces que l'administration leur opposait, sans répondre à ce moyen, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés " ;
Attendu que pour dire que la demande d'actes des parties civiles n'est pas nécessaire à la manifestation de la vérité, l'arrêt attaqué prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la chambre de l'instruction a, sans insuffisance ni contradiction, souverainement apprécié la nécessité de l'exécution des actes sollicités ;
II-Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 26 mars 2012 :
Sur le premier moyen
de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme,
226-13 du code pénal,
591,
593 et
609 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a dit qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis le délit de violation du secret professionnel ;
" aux motifs qu''il ne résulte pas de l'information judiciaire des charges suffisantes à l'encontre de quiconque et, en particulier, des époux B...d'avoir commis le délit de violation du secret professionnel, infraction prévue et réprimée par l'article
226-13 du code pénal ; qu'en effet, les époux B..., eu égard à leur qualité d'associés des époux Y..., au sein notamment des sociétés Beverly Hills et Michel Ange, étaient fondés à se trouver en possession des documents fiscaux relatifs auxdites sociétés et, en particulier, de ceux communiqués par l'administration fiscale dans le cadre des vérifications fiscales relatives aux sociétés considérées ; qu'ils étaient, dès lors, en droit de verser, via leur conseil, ces documents à la procédure pénale qu'ils avaient engagée, du chef d'abus de biens sociaux à l'encontre des époux Y...; que l'infraction « principale » de violation du secret professionnel n'étant pas constituée, celle « secondaire » de recel de ladite infraction, incriminée à l'article
321-1 de ce même code, ne saurait davantage l'être ; que l'information judiciaire a été complète et que les faits ne sont susceptibles de recevoir aucune autre qualification pénale ;
" 1°) alors que la cassation de l'arrêt du 14 décembre 2010 entraînera par voie de conséquence l'annulation de l'arrêt du 26 mars 2012 ;
" 2°) alors que les époux Y...faisaient valoir que parmi les documents produits par les époux B...au soutien de leur plainte du chef d'abus de biens sociaux, se trouvaient des documents concernant la situation personnelle des époux Y...; qu'en se bornant à affirmer que les époux B...en leur qualité d'associés des époux Y...au sein des sociétés Beverly Hills et Michel Ange étaient fondés à se trouver en possession des documents fiscaux relatifs auxdites sociétés, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par la partie civile appelante, a exposé, par des motifs exempts d'insuffisance comme de contradiction, que l'information était complète et qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis le délit reproché, ni toute autre infraction ;
Que, dès lors, le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen
de cassation, pris de la violation des articles
177-2,
591 et
593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné M et Mme Y...à une amende civile de 1 000 euros ;
" aux motifs qu'ainsi que le juge d'instruction l'a justement estimé dans l'ordonnance entreprise, la plainte avec constitution de partie civile des époux Y..., ayant été déposée, alors qu'une information judiciaire avait été précédemment ouverte, suite à la plainte avec constitution de partie civile des époux B...du chef d'abus de biens sociaux, revêt manifestement un caractère dilatoire ; qu'eu égard aux dispositions de l'article
177-2 du code de procédure pénale et aux circonstances de l'espèce, il échet de confirmer la condamnation intervenue des époux Y...au paiement d'une amende civile de 1 000 euros ;
" alors que les époux Y...faisaient valoir dans leur mémoire en réplique qu'aucune procédure n'avait été suspendue par l'effet de la plainte ; qu'en retenant que celle-ci présentait un caractère manifestement dilatoire, sans s'expliquer sur ce moyen, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés " ;
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance portant condamnation à une amende civile, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, exemptes d'insuffisance comme de contradiction, la chambre de l'instruction a justifié sa décision au regard des dispositions de l'article
177-2 du code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que les arrêts sont réguliers en la forme ;
REJETTE
les pourvois ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq novembre deux mille treize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;