Vu
- la décision contestée du 18 avril 2023,
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code pénitentiaire ;
- le code de justice administrative.
La présidente du tribunal administratif de Melun a désigné M. Aymard, vice-président, pour statuer en tant que juge des référés en application de l'article
L. 511-2 du code de justice administrative.
Par une requête enregistrée le 10 mai 2023 sous le numéro 2304653, M. A a demandé l'annulation de la décision contestée.
Après avoir, au cours de l'audience du 23 mai 2023, présenté son rapport en présence de Mme Aubret, greffière d'audience, et entendu les observations de Me
Lorget, représentant M. A, requérant, absent, qui rappelle que la condition d'urgence est liée à l'aménagement de peine dont il bénéficie, que celui-ci peut encore être remis en cause et qu'il a fait l'objet d'un nouveau compte-rendu d'incident lui reprochant de ne pas avoir été à son travail alors qu'il était en cellule, qu'il ne lui est pas possible d'indemniser ses victimes, que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis.
Le garde des sceaux, ministre de la justice, dûment convoqué, n'était ni présent ni représenté.
Considérant ce qui suit
:
1. M. B A, lorsqu'il était écroué au centre pénitentiaire Sud-Francilien au Réau (Seine-et-Marne) a été convoqué devant une commission disciplinaire le 18 avril 2023 pour avoir introduit ou fait introduire au sein de l'établissement des produits stupéfiants. Il a été sanctionné d'un placement en cellule disciplinaire pour une durée de vingt jours, dont dix jours avec sursis, actif pendant six mois. Il a formé un recours administratif le même jour. Par un jugement en date du 11 mai 2023 du vice-président chargé de l'application des peines au tribunal de Melun, il a été admis au régime de la semi-liberté à compter du 16 mai 2023 et transféré au centre pour peines aménagées de Villejuif (Val-de-Marne), sous le régime de la semi-liberté, et à la liberté conditionnelle à compter du 16 novembre 2023. M. A a demandé, le 10 mai 2023 l'annulation de cette décision et sollicite du juge des référés, par une requête enregistrée le même jour, la suspension de son exécution.
2. Aux termes de l'article
L. 521-1 du code de justice administrative : "Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision".
3. Il résulte des dispositions précitées que la condition d'urgence à laquelle est subordonné le prononcé d'une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés, saisi d'une demande tendant à la suspension d'une telle décision, d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de celle-ci sur la situation de ce dernier ou le cas échéant, des personnes concernées, sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue.
4. Aux termes d'une part de l'article
R. 232-4 du code pénitentiaire : " Constitue une faute disciplinaire du premier degré le fait, pour une personne détenue : () 11° D'introduire ou tenter d'introduire au sein de l'établissement des produits stupéfiants, ou sans autorisation médicale, des produits de substitution aux stupéfiants ou des substances psychotropes, de les fabriquer, de les détenir ou d'en faire l'échange contre tout bien, produit ou service ; () ". Aux termes de l'article
R. 233-1 du même code : " Peuvent être prononcées à l'encontre des personnes détenues majeures les sanctions disciplinaires suivantes () 8° La mise en cellule disciplinaire ". Aux termes de l'article
R. 233-2 du même code : " Les sanctions disciplinaires suivantes peuvent également être prononcées à l'encontre des personnes détenues majeures : () 2° Le déclassement du travail, la fin de l'affectation sur un poste de travail ou l'exclusion d'une formation ; () ".
5. Aux termes d'autre part de l'article R. 234-36 du même code : " Lorsqu'il octroie le bénéfice du sursis, le président de la commission de discipline fixe un délai de suspension de la sanction sans que celui-ci puisse excéder six mois. Il appelle l'attention de la personne détenue sur les conséquences du sursis telles qu'elles sont réglées par les dispositions des articles R. 234-37 et R. 234-38 ". Aux termes de l'article R. 234-37 du même code : " Si, au cours du délai de suspension de la sanction, une personne détenue commet une nouvelle faute donnant lieu à une sanction, quels que soient la nature ou le degré de cette faute, le sursis est, sauf décision contraire du président de la commission, révoqué de plein droit. La première sanction est alors exécutée cumulativement avec celle afférente à la seconde faute. () ". Et aux termes de l'article R. 232-8 du même code : " Si, au cours du délai de suspension de la sanction, la personne détenue n'a commis aucune faute disciplinaire donnant lieu à une sanction, la sanction assortie du sursis est réputée non avenue. Il en est fait mention sur le registre prévu par les dispositions du premier alinéa de l'article R. 234-30 ".
6. La modification temporaire du régime de détention qui résulte pour l'intéressé de son placement en cellule disciplinaire, défini aux articles
R. 232-2 et suivants du code pénitentiaire, ne peut, en l'absence de circonstances particulières, être regardée par elle-même comme constitutive d'une situation d'urgence au sens et pour l'application des dispositions citées ci-dessus de l'article
L. 521-1 du code de justice administrative.
7. D'une part, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la requête, la peine de placement en cellule disciplinaire pour une durée de dix jours prononcée le 18 avril 2023 par la commission disciplinaire du centre pénitentiaire Sud Francilien à l'encontre de M. A avait été pleinement exécutée. Par suite, la demande de suspension présentée le 10 mai 2023 pour cette partie de la décision contestée est devenue sans objet.
8. D'autre part, pour caractériser la condition d'urgence qui s'attacherait à suspendre l'exécution de cette même décision du 18 avril 2023 en ce qu'elle aurait assorti la sanction de dix jours supplémentaires de placement en cellule disciplinaire avec sursis ainsi que d'un déclassement du travail, le requérant soutient que ce sursis serait de nature à l'empêcher d'obtenir un aménagement de peine et de ne plus pouvoir être en mesure d'indemniser ses victimes.
9. Il est toutefois constant que M. A a été admis en régime de semi-liberté le 11 mai 2023 et a quitté le centre pénitentiaire Sud Francilien le 16 mai 2023 pour intégrer le centre de semi-liberté de Villejuif. Il n'apparait donc plus susceptible de faire l'objet de sanctions disciplinaires motivées par son comportement au centre pénitentiaire et peut trouver une activité professionnelle lui permettant de répondre à ses obligations en matière d'indemnisation de ses victimes.
10. Dans ces circonstances la condition d'urgence, qui doit s'analyser objectivement et globalement, ne peut être considérée comme satisfaite, et la requête de M. A ne pourra qu'être rejetée, dans l'ensemble de ses composantes.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B A et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Le juge des référés,
Signé : M. Aymard
La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
N°230465