Vu la procédure suivante
:
Par une requête, enregistrée le 22 avril 2022, l'association Grésilles Football Club, M. J B, M. E O, M. I L, M. D C, M. H N, M. Q R, M. S et M. A K, représentés par la société civile professionnelle Gavignet et Associés, demandent au tribunal :
1°) d'annuler la décision du 22 mars 2022, par laquelle la commission régionale d'appel de la ligue Bourgogne-Franche-Comté de football a notamment prononcé des sanctions de suspension et des amendes à l'égard de MM. R, N, Laib, L, C, O, K, B, a prononcé, à compter du 28 février 2022, la mise hors compétition de l'équipe sénior A du club Association Grésilles Football Club Dijon pour la saison 2021/2022, lui a infligé une amende de 500 euros, a prononcé à compter de la même date l'interdiction d'utilisation du terrain Epirey 2 pour toutes les équipes du club évoluant dans des compétitions de football à onze, et a suspendu à compter de la même date l'utilisation du terrain Epirey 1 pour toutes les équipes séniors du club évoluant dans des compétitions de football à onze ;
2°) de mettre à la charge de la ligue Bourgogne Franche-Comté de football une somme de 2 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à chacun des requérants.
Ils soutiennent que :
- la convocation à l'audition mentionne seulement des personnes physiques et non le club, en méconnaissance de l'article 3.3.4.2.1 du règlement disciplinaire et barème disciplinaire de la fédération française de football ;
- cette convocation ne mentionne aucun grief, de sorte qu'aucune des personnes poursuivies ne peut connaître les griefs qui lui sont reprochés ;
- M. F a été désigné instructeur du district, après la démission de M. M, en cours de mandat du comité de direction, en méconnaissance de l'article 3.3.2.2. du règlement disciplinaire et barème disciplinaire de la fédération française de football ;
- alors que le club avait sollicité l'audition de huit personnes, dans le délai de 48 heures qui lui est imparti à cette fin par les dispositions de l'article 3.3.4.2.1 du règlement disciplinaire annexé aux règlements généraux de la fédération française de football, et qu'aucun refus n'a été opposé à cette demande, aucune de ces personnes n'a été auditionnée ;
- les mesures conservatoires, prises à l'encontre de MM. N, L et R, du club et des terrains " en U18 " sont irrégulières, dès lors qu'elles ont été prises, non dans l'attente d'une décision définitive, mais suite à une décision définitive du mois de janvier 2021 ; en outre, le procès-verbal de la commission disciplinaire prononçant ces mesures conservatoires ne fait état d'aucune motivation ;
- l'irrégularité de la convocation et la privation injustifiée du droit de faire entendre des témoins vicient l'ensemble de la procédure, tant en première instance qu'en appel, sans que l'évocation de l'affaire soit de nature à purger les nullités ; à défaut de constater la nullité de l'ensemble de la procédure, le tribunal reconnaîtra une atteinte irréversible au caractère équitable d'une procédure ultérieurement engagée, faisant obstacle à toute condamnation ;
- l'absence d'objet sur la convocation et la privation du droit de faire citer des témoins ont porté atteinte au droit à un procès équitable ;
- la sanction prononcée à l'égard de M. N est entachée d'une erreur de fait, dès lors qu'il n'a porté aucun coup, qu'il a tenté de raisonner les joueurs et les spectateurs et que plusieurs témoignages attestent de son innocence ;
- la sanction prononcée à l'égard de M. R est entachée d'une erreur de fait, dès lors qu'il conteste les faits qui lui sont reprochés ;
- la sanction prononcée à l'égard de M. B est entachée d'une erreur de fait, dès lors que l'arbitre n'est pas en mesure d'indiquer les manquements qu'il aurait personnellement commis, et que cet arbitre a été escorté par M. K et non par M. B ;
- M. O a été privé de la possibilité de son droit de se défendre, dès lors que la convocation qu'il a reçue ne mentionnait pas les griefs qui lui étaient reprochés et qu'il n'a pas été entendu ;
- la phrase reprochée à M. O est agressive, mais ne constitue pas une menace physique ni une intimidation ; lui reprocher cette phrase méconnaît sa liberté d'expression ; aucun membre de la délégation de Châtillon-sur-Seine n'est en mesure de confirmer la réalité des propos qui lui sont reprochés ;
- quand bien même M. L aurait violemment saisi un carton rouge des mains de l'arbitre pour le jeter à terre en proférant des insultes, ce comportement n'a porté atteinte à l'intégrité ni de M. G ni de l'arbitre, de sorte qu'il ne pouvait être sanctionné sur le fondement de l'article 13 du règlement ; il n'a commis aucune brutalité ;
- M. C ne pouvait être sanctionné sur le fondement de l'article 8 du règlement, dès lors que le fait d'être contestataire ne répond ni à la définition de l'intimidation ni à celle de la menace au sens de l'article 8 du règlement ;
- les sanctions prononcées à l'égard du club sont illégales, dès lors que les sanctions prononcées à l'encontre des joueurs et du délégué de l'équipe sont elles-mêmes illégales ;
- le comportement de l'arbitre, qui a, délibérément et contre les avis des organisateurs, emprunté un chemin dangereux, se dirigeant vers la butte où se situaient les spectateurs, plutôt que d'emprunter le chemin sécurisé qu'il avait pris en rentrant sur le terrain, est source d'exonération totale ou partielle de responsabilité pour le club ; c'est l'arbitre qui a, le premier, frappé un spectateur ;
- les " U15 " et " U18 ", qui ne sont pas concernés par les faits, les seniors, qui n'étaient pas présents le jour des faits litigieux, et l'équipe B, qui n'était pas concernée, n'auraient pas dû être sanctionnés ;
- à titre subsidiaire, la sanction d'exclusion prononcée à l'encontre des équipes est disproportionnée au regard de l'article
L. 100-1 du code du sport.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juillet 2022, la ligue Bourgogne-Franche-Comté de football conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que la requête de l'association Grésilles Football Club, de M. J B, de M. E O, de M. I L, de M. D C, de M. H N, de M. Q R, de M. S et de M. A K est irrecevable, dès lors qu'en vertu des articles
R. 141-7 et
R. 141-23 du code du sport, l'opposition à la proposition de conciliation et sa notification constituent une formalité obligatoire, dont l'absence rend irrecevable le recours introduit à l'encontre d'une décision régionale.
Les parties ont été informées par une lettre du 10 octobre 2022 que cette affaire était susceptible, à compter du 7 novembre 2022, de faire l'objet d'une clôture d'instruction à effet immédiat en application des dispositions de l'article
R. 611-11-1 du code de justice administrative.
La clôture de l'instruction a été fixée au 9 novembre 2022 par une ordonnance du même jour.
Le Comité national olympique et sportif français a produit, à la demande du tribunal, des pièces, enregistrées le 30 novembre 2023, qui ont été communiquées dans les conditions prévues par les dispositions de l'article
R. 613-1-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du sport ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Irénée Hugez,
- les conclusions de M. Thierry Bataillard, rapporteur public,
- et les observations de Me Larue, représentant les requérants.
Considérant ce qui suit
:
1. Le 24 octobre 2021, le match de championnat séniors départemental 2 (" D2 ") opposant l'équipe 1 du club Grésilles Football Club Dijon et l'équipe 1 de l'Union châtillonnaise Colombine Football a été arrêté à la soixante-neuvième minute par l'arbitre, considérant que la sécurité des joueurs et des officiels sur le terrain n'était plus assurée, et compte tenu des agissements des joueurs et supporters du club recevant, à la suite de jets de projectiles de la part des supporters du club dijonnais à l'encontre de l'arbitre assistant bénévole du club visiteur, dans un contexte d'invectives, d'insultes et de comportements agressifs des joueurs dijonnais. Nonobstant l'arrêt du match, l'arbitre officiel de la rencontre a été pris à partie par des joueurs et des spectateurs ayant envahi le terrain, et a, en outre, été victime de violences physiques, alors qu'il regagnait les vestiaires, et à l'intérieur de ceux-ci, et de violences routières alors qu'il quittait les lieux.
2. Par une décision du 19 janvier 2022, notifiée par lettre du 24 janvier 2022, la commission de discipline du district de la Côte-d'Or de football a infligé des sanctions de suspension allant de dix matchs à quinze ans, et des amendes allant de cinquante à cent cinquante euros, à MM. E O, dirigeant et I L, Belkacem Laib, D C, H N, Q R, joueurs, une sanction de six mois de suspension ferme et une amende de cent euros à M. J B, délégué et président du club dijonnais, a fixé le résultat du match et accordé la victoire à l'équipe adverse, a infligé une amende de cent cinquante euros à l'association Grésilles Football Club, a exclu les équipes séniors 1 et 2, évoluant en départemental 2 et départemental 3 pour la saison en cours, a interdit le club de tout engagement dans les compétitions officielles séniors, à onze joueurs, pour les trois saisons suivantes, et enfin a suspendu l'utilisation des terrains Epirey 1 et Epirey 2, pour les équipes à onze joueurs pour la saison en cours et les trois saisons à venir, avec obligation de réalisation de travaux de sécurisation. Tant le club requérant que la ligue Bourgogne-Franche-Comté de football ont fait appel de cette décision devant la commission régionale d'appel de cette ligue. Par une décision du 23 février 2022, notifiée par lettre du 22 mars 2022, la commission régionale d'appel a accordé la victoire au club Union châtillonnaise Colombine Football, par pénalité au club Grésilles Football Club Dijon, a infligé des sanctions de suspension ferme allant de quatre matchs à huit ans et des amendes allant de cinquante à cent cinquante euros à MM. R, N, Laib, L, C, une sanction de suspension ferme de quatre matchs et une amende de cinquante euros à M. O, spectateur le jour du match et dirigeant du club, une sanction de suspension de toutes fonctions officielles de six mois avec sursis et une amende de cinquante euros à M. A K, arbitre assistant bénévole le jour du match et dirigeant du club, une sanction de suspension de toutes fonctions officielles de six mois, dont quatre avec sursis et une amende de cinquante euros à M. B, délégué bénévole le jour du match et président du club, a prononcé la mise hors compétition de l'équipe séniors A du club pour la saison en cours, a infligé une amende de cinq cents euros à cette association, a prononcé l'interdiction d'utilisation du terrain Epirey 2 pour toutes les équipes du club évoluant dans des compétitions de football à onze jusqu'à ce que ce terrain soit à nouveau classé par la commission compétente, a suspendu l'utilisation du terrain Epirey 1 pour toutes les équipes séniors du club évoluant dans des compétitions de football à onze jusqu'à la réalisation des travaux de sécurisation qu'il a définis, et enfin a imposé au club, du 28 février 2022 au 30 juin 2023, la mise en place d'un service de sécurité.
3. Le 6 avril 2022, P des requérants a saisi, en leur nom, P national olympique et sportif français à fin de conciliation, dans les conditions fixées par les articles
L. 141-4 et
R. 141-5 du code du sport. Le 15 juin 2022, postérieurement l'introduction de la requête, le conciliateur a proposé " de s'en tenir à la décision du 23 février 2022 de la commission régionale d'appel de la ligue Bourgogne-Franche-Comté de football ". Par leur requête, l'association Grésilles Football Club, et MM. B, O, L, C, N, R, Belkacem et K demandent au tribunal d'annuler la décision du 22 mars 2022 de la commission régionale d'appel de la ligue Bourgogne-Franche-Comté de football.
Sur le non-lieu à statuer :
4. Aux termes de de l'article
L. 141-4 du code du sport : " Le Comité national olympique et sportif français est chargé d'une mission de conciliation dans les conflits opposant les licenciés, les agents sportifs, les associations et sociétés sportives et les fédérations sportives agréées, à l'exception des conflits mettant en cause des faits de dopage. () ". Aux termes de l'article
R. 141-5 du même code : " La saisine du comité à fin de conciliation constitue un préalable obligatoire à tout recours contentieux, lorsque le conflit résulte d'une décision, susceptible ou non de recours interne, prise par une fédération dans l'exercice de prérogatives de puissance publique ou en application de ses statuts. ". Aux termes de l'article
R. 141-23 de ce code : " Les mesures proposées par les conciliateurs sont réputées acceptées par les parties et doivent être appliquées dès leur notification. Les parties peuvent toutefois s'y opposer dans le délai de quinze jours à compter de cette notification. / Cette opposition ne peut être prise en compte que si elle est notifiée aux conciliateurs ainsi qu'aux autres parties. / Ces notifications doivent intervenir par lettre recommandée, par télécopie ou par courrier électronique, avec demande d'avis de réception. ".
5. Il résulte des dispositions précitées que la saisine du Comité national olympique et sportif français constitue un recours préalable obligatoire à tout recours contentieux lorsque le litige entre dans le champ d'application des articles
L. 141-4 et
R. 141-5 du code du sport. Il incombe à la partie qui s'oppose aux mesures proposées par les conciliateurs de justifier que son opposition a bien été notifiée aux conciliateurs et aux autres parties, notamment par la production d'accusés de réception. En l'absence de notification d'une telle opposition dans un délai de quinze jours à compter de la notification des mesures proposées par les conciliateurs, ces dernières sont présumées acceptées par les parties. En cas de contestation sur l'existence d'une telle opposition et notamment sur l'authenticité d'un avis de réception, il appartient au juge de former sa conviction au vu des éléments versés au dossier et de l'argumentation des parties.
6. Comme il a été dit au point 3 du présent jugement, le 15 juin 2022, postérieurement l'introduction de la requête, le conciliateur a proposé " de s'en tenir à la décision du 23 février 2022 de la commission régionale d'appel de la ligue Bourgogne-Franche-Comté de football ". Il ressort des pièces du dossier que cette proposition a été transmise par courriel le jour même au club, à son conseil, qui en a accusé réception, à MM. C, B et O et à la ligue Bourgogne Franche-Comté de football, et qu'elle a été régulièrement notifiée par courrier à MM. K, R le 17 juin 2022, et à MM. L, Laib et N à une date indéterminée. Si les éléments produits à l'instance ne permettent pas de déterminer, pour tous les destinataires, la date exacte à laquelle cette proposition a été portée à leur connaissance, il ressort, en tout état de cause, des pièces du dossier que celle-ci leur a été communiquée par le tribunal le 3 juillet 2022 et qu'ils en ont pris connaissance le lendemain. Le Comité national olympique et sportif français a confirmé au tribunal, le 30 novembre 2023, par une lettre qui a été communiquée aux parties, qu'aucune d'elles n'a formé opposition, à cette date, à cette proposition de conciliation. Aucun des requérants ne soutient davantage, dans la présente instance, qu'il aurait formé opposition à cette proposition de conciliation. Dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'un des requérants aurait fait opposition, dans le délai de quinze jours mentionné à l'article
R. 141-23 du code du sport, à la proposition de conciliation établie par le Comité national olympique et sportif français, l'association Grésilles Football Club et MM. B, O, L, C, N, R, Belkacem et K doivent être regardés comme ayant accepté la mesure de conciliation, laquelle a acquis force obligatoire à l'égard des parties, en cours d'instance. Dès lors, les conclusions à fin d'annulation de l'association Grésilles Football Club et des licenciés précités ont perdu leur objet en cours d'instance. Il n'y a, dès lors, plus lieu de statuer sur ces conclusions.
Sur les conclusions relatives aux frais de l'instance :
7. Il n'y a, en tout état de cause, pas lieu, de faire application des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la Ligue Bourgogne-Franche-Comté de football la somme demandée par les requérants au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation présentées par l'association Grésilles Football Club et par MM. B, O, L, C, N, R, Belkacem et K.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de l'association Grésilles Football Club et de MM. B, O, L, C, N, R, Belkacem et K est rejeté.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à l'association Grésilles Football Club, à M. J B, à M. E O, à M. I L, à M. D C, à M. H N, à M. Q R, à M. S à M. A K, et à la ligue Bourgogne-Franche-Comté de football.
Copie en sera adressée pour information à la ministre des sports et des jeux olympiques et paralympiques, à la fédération française de football et au Comité national olympique et sportif français.
Délibéré après l'audience du 22 décembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Nicolet, président,
M. Hugez, premier conseiller,
M. Cherief, conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 janvier 2024.
Le rapporteur,
I. Hugez
Le président,
Ph. Nicolet
La greffière,
L. Curot
La République mande et ordonne à la ministre des sports et des jeux olympiques et paralympiques, en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
lc