18 JUIN 2024
Arrêt
n°
CV/NB/NS
Dossier N° RG 21/02592 - N° Portalis DBVU-V-B7F-FXFY
S.A.S. [6]
/
URSSAF D'AUVERGNE
jugement au fond, origine pole social du tj de clermont-ferrand, décision attaquée en date du 18 novembre 2021, enregistrée sous le n° 20/00532
Arrêt rendu ce DIX-HUIT JUIN DEUX MILLE VINGT-QUATRE par la CINQUIEME CHAMBRE CIVILE CHARGEE DU DROIT DE LA SECURITE SOCIALE ET DE L'AIDE SOCIALE de la cour d'appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :
Monsieur Christophe VIVET, président
Mme Karine VALLEE, conseillère
Mme Sophie NOIR, conseillère
En présence de Mme Nadia BELAROUI, greffier lors des débats et du prononcé
ENTRE :
S.A.S. [6]
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Philippe CRETIER de la SELARL CLERLEX, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
APPELANTE
ET :
UNION DE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES D'AUVERGNE
[Adresse 10]
[Localité 2]
Représenté par Me Francois FUZET de la SCP HUGUET-BARGE-CAISERMAN-FUZET, avocat au barreau de CUSSET/VICHY
INTIME
Après avoir entendu M.VIVET, président, en son rapport, et les représentants des parties à l'audience publique du 08 avril 2024, la cour a mis l'affaire en délibéré, le président ayant indiqué aux parties que l'arrêt serait prononcé ce jour, par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l'article
450 du code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
La SAS [6] (la société), dont le siège est sis à [Localité 5] (Puy-de-Dôme), exploite une activité de plâtrerie-peinture, M.[T] [O] exerçant les fonctions de président de la société et M.[V] [O] celles de directeur général.
Du 07 juin 2019 au 12 juillet 2019, la société a fait l'objet d'un contrôle de l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales d'Auvergne (l'URSSAF) pour les années 2016 à 2018, à l'issue duquel celle-ci lui a adressé une lettre d'observations du 12 juillet 2019 envisageant un redressement de 128.525 euros.
Par courrier non daté, la société a contesté plusieurs points du redressement.
Par courrier du 14 octobre 2019, l'URSSAF a pris en compte partiellement les observations de la société, pour ramener le montant du redressement à 76.788 euros au titre de quatre chefs, n°7 à 10.
Par mise en demeure du 18 novembre 2019, l'URSSAF a notifié à la société le redressement correspondant, outre majorations de retard d'un montant de 6.767 euros, soit la somme totale de 83.555 euros.
Le 09 janvier 2020, la société a saisi la commission de recours amiable de l'URSSAF (la CRA) de contestations concernant les quatre chefs de redressement maintenus.
Par décision du 26 juin 2020 notifiée le 30 octobre 2020, la CRA a ramené le montant du chef de redressement n°8 de 6.239 euros à 4.484 euros, et a rejeté la contestation concernant les chefs n°7, 9 et 10.
Par courrier du 24 novembre 2020 la société a saisi d'une contestation le pôle social du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand.
Par jugement contradictoire du 18 novembre 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand a déclaré irrecevable pour défaut de saisine de préalable de la CRA la demande d'annulation des chefs de redressement n°1 à 5 présentée par la société, a annulé le redressement du chef n°8 d'un montant de 189 euros, a maintenu tous les autres chefs de redressement, et en conséquence a condamné la société à payer à l'URSSAF les sommes de 74.844 euros au titre de la mise en demeure du 18 novembre 2019 et de 1.000 euros au titre de l'article
700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Le jugement a été notifié le 24 novembre 2021 à la SAS [6] qui en a relevé appel par déclaration de son conseil le 14 décembre 2021, l'appel étant limité aux éléments du dispositif du jugement par lesquels le tribunal a rejeté la demande d'annulation de chefs de redressement, et l'a condamnée à payer des sommes à l'URSSAF, outre les dépens.
Les parties ont été convoquées à l'audience de la cour du 08 avril 2024 à laquelle elles ont comparu représentées par leurs conseils.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par conclusions notifiées le 08 avril 2024, soutenues oralement à l'audience, la SAS [6] demande à la cour de réformer le jugement et statuant à nouveau d'annuler l'ensemble des redressements notifiés, de débouter l'URSSAF de ses demandes concernant les chefs de redressement n°1 et n°5, et de la condamner à lui payer la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile.
Par conclusions notifiées le 08 avril 2024, soutenues oralement à l'audience, l'URSSAF d'Auvergne demande à la cour de débouter la SAS [6] de ses demandes, d'infirmer le jugement en ce qu'il a annulé le chef de redressement n°8 d'un montant de 189 euros, de dire que ce redressement est fondé, de confirmer le jugement pour le surplus, et de condamner la société à lui payer la somme de 75.033 euros au titre de la mise en demeure du 18 novembre 2019 outre majorations de retard jusqu'à complet paiement, et la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens distraits au profit de son conseil.
Conformément aux dispositions de l'article
455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions susvisées des parties, soutenues oralement à l'audience, pour l'exposé de leurs
MOTIFS
Ecation de l'article
L.242-1 du code de la sécurité sociale, tout avantage en argent ou en nature alloué en contrepartie du travail doit être soumis à cotisations à l'exclusion des sommes représentatives de frais professionnels, dans les conditions et limites fixées par arrêté interministériel.
Les conditions d'exonération des remboursements de frais professionnels sont fixées par l'arrêté interministériel du 20 décembre 2002 relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale.
Selon l'article premier de cet arrêté, 'les frais professionnels s'entendent des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l'emploi du travailleur salarié ou assimilé que celui-ci supporte au titre de l'accomplissement de ses missions. Les sommes à déduire de l'assiette des cotisations de sécurité sociale au titre des frais professionnels, tels que prévus à l'article
L.242-1 du code de la sécurité sociale, sont celles qui sont versées aux travailleurs salariés ou assimilés, à l'exception des allocations forfaitaires prévues au 2° de l'article 2 ci-dessous perçues par les personnes visées aux 11°, 12° et 23° de l'article L.311-3 dudit code pour l'exercice de leur fonction de dirigeant.'
L'article 2 précise que l'indemnisation des frais professionnels s'effectue comme suit:
- soit sous la forme du remboursement des dépenses réellement engagées par le travailleur salarié ou assimilé : l'employeur est alors tenu de produire les justificatifs y afférents,
- soit sur la base d'allocations forfaitaires, l'employeur étant alors autorisé à déduire leurs montants dans les limites fixées par le même arrêté, sous réserve de l'utilisation effective de ces allocations forfaitaires conformément à leur objet. Cette condition est réputée remplie lorsque les allocations sont inférieures ou égales aux montants fixés aux articles 3 à 9.
Sur le chef de redressement n°7 relatif à des primes de panier correspondant à des frais de restauration exposés hors des locaux de l'entreprise
L'article 3 de l'arrêté interministériel du 20 décembre 2002, dans sa version en vigueur du 27 décembre 2022 au 02 novembre 2022, porte les dispositions suivantes :
« Les indemnités liées à des circonstances de fait qui entraînent des dépenses supplémentaires de nourriture sont réputées utilisées conformément à leur objet pour la fraction qui n'excède pas les montants suivants :
1° Indemnité de repas :
Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement professionnel et empêché de regagner sa résidence ou lieu habituel de travail, l'indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n'excède pas 15 euros par repas ;
2° Indemnité de restauration sur le lieu de travail :
Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est contraint de prendre une restauration sur son lieu effectif de travail, en raison de conditions particulières d'organisation ou d'horaires de travail, telles que travail en équipe, travail posté, travail continu, travail en horaire décalé ou travail de nuit, l'indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de restauration est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n'excède pas 5 euros ;
3° Indemnité de repas ou de restauration hors des locaux de l'entreprise :
Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement hors des locaux de l'entreprise ou sur un chantier, et lorsque les conditions de travail lui interdisent de regagner sa résidence ou son lieu habituel de travail pour le repas et qu'il n'est pas démontré que les circonstances ou les usages de la profession l'obligent à prendre ce repas au restaurant, l'indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n'excède pas 7,5 euros.
Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est placé simultanément au cours d'une même période de travail dans des conditions particulières de travail énoncées aux 1°, 2° et 3°, une seule indemnité peut ouvrir droit à déduction. »
En l'espèce, l'URSSAF a procédé à la réintégration dans l'assiette des cotisations sociales des indemnités versées au cours des trois années concernées à un salarié, M.[S], générant un redressement de 3.136 euros, considérant que ce salarié percevait la prime en question tous les mois, pour un nombre de jours supérieur au nombre de jours travaillés (incluant une pause méridienne), que l'employeur ne démontrait pas que les conditions de travail du salarié lui interdisaient systématiquement de regagner sa résidence ou son lieu de travail, et que devaient ainsi être soumises à cotisation d'une part les sommes versées quand la zone de travail était à moins de cinq kilomètres du siège de l'entreprise, ce qui était le cas le plus fréquemment, et d'autre part les sommes correspondant au nombre de jours dépassant le nombre de jours travaillés dans le mois (incluant une pause méridienne).
Pour rejeter la contestation soulevée par la société sur ce chef, le tribunal a considéré en substance que le redressement était justifié par le fait que les salariés disposaient du lundi au jeudi d'une pause déjeuner de 90 minutes, qu'ils ne travaillaient pas le vendredi après-midi, que lorsqu'ils travaillaient sur un chantier situé à moins de cinq kilomètres du siége de la société il leur donc était donc possible de s'y rendre pour s'y restaurer, et qu'il n'était pas démontré que M.[S] effectuait des heures supplémentaires le vendredi après-midi, ce qui était invoqué pour justifier qu'il perçoive une indemnité tous les jours.
A l'appui de sa demande d'infirmation du jugement sur ce point, la société [6] soutient que M.[S] effectue parfois des heures supplémentaires le vendredi après-midi, produisant ses feuilles de paie, et reprochant au tribunal d'avoir validé le redressement sans prendre en compte ces éléments, et alors que l'URSSAF ne précisait pas au cours de quels mois le nombre d'indemnités versées avait dépassé le nombre de jours travaillés, lui interdisant de contester précisément la réintégration prime par prime.
L'URSSAF, à l'appui de sa demande de confirmation du jugement sur ce point, expose de première part que la société ne justifie pas que M.[S] a parfois travaillé le vendredi après-midi et a donc été fondé à percevoir une indemnité au titre de ces jours, en ce que que les bulletins de salaire indiquent uniquement des heures supplémentaires mensualisées effectuées pendant l'horaire collectif et non des heures supplémentaires effectuées au-delà de l'horaire collectif, et donc le vendredi après-midi. L'URSSAF expose de seconde part qu'il n'est pas justifié que M.[S] était dans l'impossibilité de regagner le siège
SUR CE
C soutient la société, il ne ressort ni de la lettre d'observation du 12 juillet 2019 ni du courrier de réponse aux observations du 14 octobre 2019 de la mise en demeure du 18 novembre 2019 ni des écritures de l'URSSAF un décompte précis des indemnités concernées par le redressement. Il s'en déduit que la société assujettie, comme elle le soutient, n'a à aucun moment été mise en situation de s'expliquer point par point sur les primes réintégrées. La cour, au regard de cette imprécision, n'étant donc pas plus en mesure de vérifier si les redressements sont ou non justifiés au regard des éléments de preuve produits par la société, il s'en déduit que l'URSSAF ne démontre pas être créancière des sommes en question. Le jugement sera donc infirmé sur ce point, et il sera fait droit à la demande d'annulation du chef de redressement n°7, d'un montant de 3.136 euros.
Sur le chef de redressement n°8 relatif à des rémunérations servies par des tiers
L'article
L.242-1-4 du code de la sécurité sociale porte en particulier les dispositions suivantes :
«Toute somme ou avantage alloué à un salarié par une personne n'ayant pas la qualité d'employeur en contrepartie d'une activité accomplie dans l'intérêt de ladite personne est une rémunération assujettie aux cotisations de sécurité sociale et aux contributions mentionnées aux articles L.136-1 du présent code,
L.14-10-4 du code de l'action sociale et des familles et 14 de l'ordonnance n°96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale.
Dans les cas où le salarié concerné exerce une activité commerciale ou en lien direct avec la clientèle pour laquelle il est d'usage qu'une personne tierce à l'employeur alloue des sommes ou avantages au salarié au titre de cette activité, cette personne tierce verse à l'organisme de recouvrement dont elle dépend une contribution libératoire dont le montant est égal à 20 % de la part de ces rémunérations qui excède pour l'année considérée un montant égal à 15 % de la valeur du salaire minimum interprofessionnel de croissance calculée pour un mois sur la base de la durée légale du travail. Les cotisations et les contributions d'origine légale ou conventionnelle rendues obligatoires par la loi ne sont pas dues sur ces rémunérations. Cette contribution libératoire ne s'applique que sur la part des rémunérations versées pour un an qui n'excède pas 1,5 fois la valeur du salaire minimum interprofessionnel de croissance calculée pour un mois; la part supérieure à ce plafond est assujettie aux cotisations et contributions mentionnées au premier alinéa.»
En l'espèce, l'URSSAF, suite à la décision de la CRA du 26 juin 2020, a procédé à la réintégration dans l'assiette des cotisations sociales de sommes déduites au titre de plusieurs factures, générant un redressement total de 4.484 euros. Il ressort de la lettre du 14 octobre 2019 qu'ont ainsi été réintégrées dans l'assiette les sommes de 7.653,36 euros TTC correspondant à des factures de la SELARL [11] en 2017, et 2.880 euros TTC correspondant à une facture de la SARL [9] en 2018. L'URSSAF a retenu ces sommes au titre du redressement en ce que que la société ne démontrait pas comme elle le soutenait qu'il s'agissait d'achat de champagne destiné à être offert à des clients.
Le tribunal a annulé le redressement d'un montant de 189 euros concernant la facture [9], considérant qu'il était établi que la facture correspondait à un achat de champagne offert à un client M.[E]. Le tribunal a confirmé le solde du redressement concernant les factures [11], soit 4.295 euros, considérant que la société ne démontrait pas que les bouteilles achetées avaient été offertes à des clients, au motif qu'elle ne produisait pas de liste autre qu'un journal des ventes établi le 05 janvier 2021.
A l'appui de sa demande d'infirmation du jugement sur ce point, la société [6] soutient que les factures [11] correspondent à un achat de champagne effectué en vue de cadeaux de fin d'année pour les clients, expose que le document rejeté par le premier juge au motif qu'il était tardif n'a pas été établi le 05 janvier 2021, mais a été imprimé à cette date pour production en procédure, et produit des attestations des personnes à qui les cadeaux ont été remis.
L'URSSAF, à l'appui de sa demande de confirmation du jugement en ce qui concerne les factures [11], et d'infirmation en ce qui concerne la facture [9], soutient que les éléments produits ne démontrent pas que les achats ont été utilisés comme cadeaux remis à des c
SUR CE
Lété justifiant suffisamment en cause d'appel, par la concordance entre le journal des ventes visé par le tribunal, dont la date du 05 janvier 2021 n'est d'évidence pas la date à laquelle il a été établi comme l'a compris le tribunal, mais la date d'édition, et les attestations produites, que les achats de champagne correspondant aux factures [11] ont été utilisés conformément à l'intérêt de l'entreprise, à titre de cadeaux pour les clients, le jugement sera infirmé sur ce point.
Le tribunal ayant retenu par une motivation que la cour adopte qu'il en était de même pour l'achat correspondant à la facture [9], le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur le chef de redressement n°9 relatif à des frais professionnels non justifiés des dirigeants de la société
L'article 4 de l'arrêté interministériel du 20 décembre 2002 relatif aux frais professionnels dispose que, lorsque le travailleur salarié ou assimilé est contraint d'utiliser son véhicule personnel à des fins professionnelles, l'indemnité forfaitaire kilométrique est réputée utilisée conformément à son objet dans les limites fixées par les barèmes kilométriques annuellement publiés par l'administration fiscale.
Il est donc constant que, en application de ce texte et de l'article 2 du même arrêté, il incombe à l'employeur, pour que les sommes versées aux salariés à titre d'indemnisation des frais professionnels de déplacement soient considérées comme telles et donc exonérées de cotisation, soit de produire les justificatifs afférents en cas de remboursement des dépenses réellement engagées par l'intéressé, soit de démontrer que le personnel concerné a été contraint d'utiliser son véhicule personnel à des fins professionnelles dans l'intérêt de l'entreprise en cas d'indemnisation forfaitaire.
En l'espèce, l'URSSAF a procédé à la réintégration dans l'assiette des cotisations sociales de sommes versées aux dirigeants de la société à titre de remboursement de frais de déplacement, générant un redressement total de 62.355 euros, au motif que la société ne produisait aucun justificatif de ces dépenses et n'établissait pas leur lien avec l'activité de l'entreprise.
Le tribunal, pour rejeter la contestation de la société sur ce point, a retenu que les éléments produits ne démontraient pas que les dirigeants avaient été contraints d'utiliser leurs véhicules personnels à des fins professionnelles, relevant que les carnets de rendez-vous produits avaient été établis les 04 et 13 janvier 2021 alors qu'ils avaient été demandés par l'URSSAF dès le début du contrôle en 2019, qu'ils avaient été remplis manuellement et non par un logiciel à l'époque concernée, qu'ils n'étaient corroborés par aucun autre élément tel que des attestations des clients, et qu'il existait une doute quant à la réalité des informations. Le tribunal a considéré en outre qu'un des trois véhicules n'était assuré que pour un usage privé, trajets et besoins de la profession sédentaire, et ne pouvait donc être utilisé dans le cadre de l'activité de l'entreprise, que l'assurance du deuxième véhicule n'était pas produite, et que le troisième pouvait être utilisé pour un usage vie privée, promenade, trajet salarié, et donc dans le cadre de l'activité de l'entreprise.
A l'appui de sa demande d'infirmation du jugement sur ce point, la société [6] produit des tableaux retraçant selon elle tous les déplacements effectués par les deux dirigeants au cours des trois années concernées par le contrôle, relevant que les dates des 04 et 13 janvier 2021 sont les dates d'édition des tableaux et non les dates leur de création. La société indique également produire la copie des agendas des dirigeants et le détail des frais remboursés, les factures émises par les fournisseurs suite aux déplacements de M.[T] [O], en charge de cette partie de l'activité, et les devis correspondant aux déplacements effectués sur les chantiers par M.[V] [O], chargé de cette tâche. La société, procédant par voie de sondage au regard du volume de pièces, fait état des éléments de preuve corroborant quelques-uns des frais contestés.
L'URSSAF, à l'appui de sa demande de confirmation du jugement sur ce point, rappelle qu'elle a demandé les justificatifs des frais de déplacement au début du contrôle et que le 25 juin 2019 la société lui a répondu qu'il s'agissait de dépenses non soumises à charges sociales, sans communiquer de justificatifs. Elle relève que la société fait état d'une part de carnets de déplacement et d'autre part d'un décompte forfaitaire, alors que seul le décompte au réel peut être pris en compte, qui doit être démontré par la société. Elle constate que la société ne produit ni les carnets de rendez-vous mentionnant les dates, lieux, motifs du déplacement et nombre de kilomètres effectués, ni les factures d'entretien des véhicules, ni la preuve de l'assurance pour un usage profess
SUR CE
Eèce, il est constant que la société, à titre de remboursement de frais de déplacement, a versé à M.[V] [O], directeur général, les sommes suivantes :
- au titre de l'année 2016 : 10.213,40 euros
- au titre de l'année 2017 : 29.213,40 euros
- au titre de l'année 2018 : 26.213,40 euros,
et à M.[T] [O], président, les sommes suivantes :
- au titre de l'année 2016 : 14.111,50 euros
- au titre de l'année 2017 : 10.570,40 euros
- au titre de l'année 2018 : 6.570,40 euros.
Selon les explications de la société, en particulier dans sa lettre non datée de réponse à la lettre d'observation du 12 juillet 2019, les sommes correspondent pour partie à un forfait hebdomadaire de 150 kilomètres pour chacun des dirigeants, et pour partie à des indemnités correspondant à un kilométrage réel.
Comme le soutient à juste titre l'URSSAF, l'allocation d'indemnités kilométriques déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale sur la base du barème, qu'elle soit forfaitaire ou réel, demeure subordonnée à la démonstration par l'employeur de l'utilisation du véhicule personnel du salarié indemnisé à des fins de nécessité professionnelle.
A l'appui de sa position, la société produit à titre de preuve les certificats d'immatriculation des trois véhicules utilisés pour les déplacements en question, qui établissent qu'ils appartiennent à M.[V] [O] pour une Jeep [Immatriculation 4] et une Jeep [Immatriculation 8], et à M.[T] [O] pour une Mini [Immatriculation 7]. Elle produit les conditions particulières des contrats d'assurance uniquement pour les deux Jeep, correspondant à un usage pour la vie privée et les trajets du salarié ou les besoins de la profession sédentaire, le périmètre exact de la couverture correspondant à ces intitulés étant inconnu en l'absence des conditions générales. Le contrat d'assurance de la Mini n'est pas produit, mais son existence est établie par un avis d'échéance de cotisation, qui ne permet pas de déterminer le périmètre de la garantie.
La société produit concernant la Jeep [Immatriculation 4] un contrat de location du premier mars 2016, approuvé par assemblée générale extraordinaire du 26 novembre 2019, par lequel M.[V] [O] lui a loué ce véhicule à compter de cette date pour une durée indéterminée, pour un loyer mensuel de 375 euros, la société locataire s'engageant à prendre en charge les charges afférentes à la mise à la disposition du véhicule, dont l'assurance responsabilité, étant relevé que le contrat prévoit d'autre part que le loueur prend à sa charge l'assurance du véhicule. Les parties ne tirent aucune conséquence de ces documents au titre du litige sur le point n°9, mais les évoquent au titre du litige sur le point n°10 évoqué plus loin.
La société produit des tableaux numérisés retraçant les déplacements des dirigeants au cours des années 2016 à 2018, le tribunal ayant d'évidence mal interprété la date du 04 janvier 2021 figurant sous les tableaux, s'agissant manifestement de la date d'édition des tableaux et non de la date à laquelle ils ont été établis.
La société produit par ailleurs des tableaux numérisés retraçant le détail des indemnités kilométriques versées pour l'intégralité des trois années, qui laissent apparaître les éléments suivants :
- concernant M.[T] [O] (tableau en pièce 28), la société note lui avoir versé les sommes suivantes :
* au cours de l'année 2016, la somme de 4.323,80 euros au titre des frais réels et 7.800 euros au titre d'un forfait hebdomadaire de 150 kilomètres, soit un total de 12.123,80 euros,
* au cours de l'année 2017, la somme de 11.854,20 euros au titre des frais réels et 7.800 euros au titre d'un forfait hebdomadaire de 150 kilomètres, soit un total indiqué comme égal à 8.533,20 euros, de manière non compréhensible,
* au cours de l'année 2018, la somme de 4.436,40 euros au titre des frais réels et 7.800 euros au titre d'un forfait hebdomadaire de 150 kilomètres, soit un total de 12.236,40 euros ;
- concernant M.[V] [O] (tableau en pièce 29), la société note lui avoir versé les sommes suivantes :
* au cours de l'année 2016, la somme de 17.975,20 euros au titre des frais réels,
* au cours de l'année 2017, la somme de 44.899 euros au titre des frais réels,
* au cours de l'année 2018, la somme de 35.754,20 euros au titre des frais réels.
Par ailleurs, il ressort des documents élaborés par l'URSSAF et de la lettre non datée (pièce 2) par laquelle la société a présenté des observations en réponse à la lettre du 12 juillet 2019, que celle-ci indiquait concernant les deux dirigeants, que chacun d'eux se déplaçait en moyenne 150 kilomètres par semaine pour rencontrer ses prestataires de service, et qu'elle avait tenu compte de cette variable pour la réalisation de son tableau.
Or, la cour constate que, si le tableau concernant M.[T] [O] mentionne un versement d'une telle indemnité forfaitaire, aucune mention en ce sens n'apparaît sur le tableau concernant M.[V] [O], ce qui est contradictoire avec les termes de la lettre de la société évoquée ci-dessus et visant précisément le tableau en question.
La cour constate que la société ne démontre donc pas que ces tableaux doivent être considérés comme retraçant exactement la réalité, en ce qu'il n'est donc pas permis de déterminer le montant des indemnités forfaitaires que la société a indiqué verser à M.[V] [O] sans néanmoins les faire apparaître dans le tableau, alors que le tableau concernant M.[T] [O] fait état de telles indemnités.
Par ailleurs, l'ensemble de ces éléments, comme l'a retenu à juste titre le tribunal, ne démontre aucunement, ce qui n'est d'ailleurs pas soutenu explicitement, que les dirigeants ont été contraints d'utiliser leurs véhicules personnels à des fins professionnelles, ce qui exclut que les sommes versées à titre forfaitaire puissent être considérées comme des remboursements non soumis à cotisations.
Ensuite, les sommes ainsi versées à titre forfaitaire excluent par hypothèse que les sommes versées à titre de remboursement s'analysent comme telles, en ce que le caractère forfaitaire des sommes versées à ce titre implique que les salariés sont, du fait de cette perception, considérés comme intégralement indemnisés des frais exposés, et que les remboursements accordés en plus ne peuvent donc s'analyser que comme un supplément de revenu, soumis à cotisations.
En conséquence, les sommes versées ne pouvant être exonérées ni en qualité d'indemnités forfaitaires ni en qualité de frais réels, quelles que soient les pièces produites, c'est à juste titre que le tribunal a rejeté la contestation soulevée par la société de ce chef.
Sur le chef de redressement n°10 relatif à des rémunérations non soumises à cotisations
L'URSSAF a procédé à la réintégration dans l'assiette des cotisations sociales de sommes versées aux dirigeants de la société, à hauteur en brut de 1.203 euros en 2016 correspondant à une facture personnelle de 962 euros, et 7.500 euros en 2017, correspondant à la location du véhicule Jeep [Immatriculation 4] consentie par M.[V] [O] à la société, entraînant un redressement total de 4.462 euros, confirmé par la CRA.
Le tribunal, pour rejeter la contestation de la société sur ce point, a retenu qu'elle ne démontrait pas que la location du véhicule présentait pour elle un intérêt professionnel, en ce qu'elle produisait par ailleurs le contrat d'assurance du véhicule démontrant qu'il était assuré pour les trajets privés de M.[V] [O] et qu'elle ne justifiait d'aucune dépense d'entretien.
A l'appui de sa demande d'infirmation du jugement sur ce point, la société [6] soutient que l'opération de location dont il s'agit est courante, qu'elle n'a pas pris en charge les frais d'assurance, supportés par M.[V] [O], et qu'elle supportait les frais d'entretien et d'essence, remboursés à ce dernier.
L'URSSAF, à l'appui de sa demande de confirmation du jugement sur ce point, soutient que les éléments invoqués par la société ne démontrent pas la justification professionnelle de la lo
SUR CE
I constant que la société a versé à M.[V] [O] la somme de 6.000 euros au titre de loyers en exécution d'un contrat de location du véhicule appartenant à ce dernier. Il ressort par ailleurs des explications de la société quant au point de redressement n°9 que ce véhicule est resté de fait utilisé par M.[V] [O], et qu'il était assuré pour les déplacements privés de ce dernier, qui obtenait des remboursements de la société pour l'utilisation d'un véhicule personnel. Il s'en déduit comme l'a retenu le tribunal et comme le soutient l'URSSAF que la société ne démontre, ni même n'explique, en quoi les frais ainsi exposés l'auraient été dans son intérêt.
En conséquence, les sommes versées ne pouvant être exonérées en qualité de frais d'exploitation, et s'analysant comme un revenu versé à un dirigeant, c'est à juste titre que le tribunal a rejeté la contestation soulevée par la société.
D'autre part le redressement à hauteur de 1.203 euros n'est pas contesté.
Sur le tout
Il y a donc lieu de déduire du montant de la condamnation en paiement s'élevant en principal à 74.844 euros le montant des redressements annulés, soit 3.136 euros et 4.295 euros, et de ramener le montant de la condamnation en principal à 67.413 euros.
Sur les dépens
En application de l'article
696 du code de procédure civile, le tribunal a condamné la société [6] aux dépens de l'instance. Le jugement étant pour la plus grande part confirmé, cette disposition sera également confirmée sauf en ce qui concerne l'application de l'article
699 du code de procédure civile, s'agissant d'une procédure sans ministère d'avocat obligatoire. Les demandes de la société étant pour la plus grande part rejetées, les dépens d'appel seront mis à sa charge.
Sur les demandes présentées en application de l'article
700 du code de procédure civile
L'article
700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer:
1° à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens;
2° et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991.
Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.
La société supportant les dépens, le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a condamnée à payer à l'URSSAF la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile, et elle sera déboutée de sa demande présentée sur ce fondement au titre des frais exposés en appel, ainsi que l'URSSAF pour des motifs d'équité.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,
- Déclare recevable l'appel relevé par la SAS [6] à l'encontre du jugement n°20-532 prononcé le 18 novembre 2021 par le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand,
- Infirme le jugement en ce qu'il a rejeté intégralement la demande d'annulation du chef de redressement n°7 d'un montant de 3.136 euros, rejeté partiellement la demande d'annulation du chef de redressement n°8 à hauteur de 4.295 euros au titre des factures [11], condamné la SAS [6] à payer à l'URSSAF la somme totale de 74.844 euros outre majorations de retard, et fait application de l'article
699 du code de procédure civile, et statuant à nouveau :
- Annule le chef de redressement n°7, d'un montant de 3.136 euros,
- Annule le chef de redressement n°8 à hauteur de 4.295 euros au titre des factures [11],
- Condamne la SAS [6] à payer à l'URSSAF d'Auvergne la somme de 67.413 euros au titre de la mise en demeure du 18 novembre 2019 outre les majorations de retard dues jusqu'à complet paiement,
- Confirme le jugement pour le surplus,
- Y ajoutant:
- Condamne la SAS [6] aux dépens de première instance et d'appel,
- Déboute les parties de leurs demandes présentées sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en appel.
Ainsi jugé et prononcé à Riom le 18 juin 2024.
Le greffier, Le président,
N. BELAROUI C.VIVET