Cour de cassation, Chambre commerciale, financière et économique, 7 mai 2019, 17-26.233

Synthèse

  • Juridiction : Cour de cassation
  • Numéro de pourvoi :
    17-26.233
  • Dispositif : Rejet
  • Publication : Inédit au bulletin
  • Décision précédente :Cour d'appel de Paris, 29 mars 2017
  • Identifiant européen :
    ECLI:FR:CCASS:2019:CO10196
  • Lien Judilibre :https://www.courdecassation.fr/decision/5fca7037e89b335bd82c5edd
  • Président : Mme MOUILLARD
  • Avocat général : Mme Beaudonnet
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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2019-05-07
Cour d'appel de Paris
2017-03-29

Texte intégral

COMM. MF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 7 mai 2019 Rejet non spécialement motivé Mme MOUILLARD, président Décision n° 10196 F Pourvoi n° R 17-26.233 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante : Vu le pourvoi formé par la société Goliath BV, société de droit étranger, dont le siège est [...] (Pays-Bas), contre l'arrêt rendu le 29 mars 2017 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 4), dans le litige l'opposant à la société Juguetes Cayro Sl, société de droit étranger, dont le siège est [...] (Espagne), défenderesse à la cassation ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 12 mars 2019, où étaient présentes : Mme Mouillard, président, Mme Le Bras, conseiller référendaire rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Labat, greffier de chambre ; Vu les observations écrites de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Goliath BV, de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société Juguetes Cayro Sl ; Sur le rapport de Mme Le Bras, conseiller référendaire, l'avis de Mme Beaudonnet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que le moyen de cassation annexé

, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée

;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Goliath BV aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Juguetes Cayro Sl la somme de 3 000 euros ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept mai deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE

à la présente décision Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Goliath BV. Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR rejeté toutes les demandes de la société Goliath, et, y ajoutant, d'AVOIR condamné la société Goliath au paiement des dépens et au paiement d'une somme de 6000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. AUX MOTIFS PROPRES QUE : « Le parasitisme est constitué lorsqu'une personne physique ou morale à titre lucratif, de façon injustifiée, copie une valeur économique d'autrui, individualisée, lui procurant un avantage concurrentiel, fruit d'un savoir-faire, d'un travail intellectuel et d'investissements. Il consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'une entreprise en profitant indûment de la notoriété acquise ou des investissements consentis, attentant ainsi à l'exercice paisible et loyal du commerce. Toutefois, eu égard au principe de la liberté du commerce, la seule imitation d'un produit non protégé ne suffit pas à constituer une faute. En l'occurrence, le jeu Triominos de la société Goliath est un jeu de dominos triangulaires, soit un jeu sur lequel plusieurs brevets sont intervenus, dont le plus ancien est un brevet n°331652 déposé le 1er décembre 1885, étant précisé que ces brevets sont désormais tombés dans le domaine public. La société Goliath indique pour sa part que la genèse de son jeu se trouve dans le brevet M... référencé 1.599.894 déposé le 5 décembre 1968, qui est donc aussi entré dans le domaine public. Ce brevet porte sur un jeu de domino dont la forme triangulaire permet de former des dessins géométriques et d'attribuer des points de bonification en cas de réalisation de dessins particuliers prédéterminés. il se distingue du jeu de domino "classique" en ce qu'il est nécessaire de faire correspondre plusieurs signes distinctifs au lieu d'un seul. Il vise des pions triangulaires, sur une face desquels "les signes sont apportés dans les coins" ; les valeurs dans les coins vont de 0 à 5, ce qui permet cinquante-six combinaisons de ces nombres, la même valeur pouvant apparaître deux, voire trois fois sur un même pion. Après que le 1" joueur ait posé son pion, le suivant doit "ensuite placer un pion portant des signes qui correspondent à deux des signes du pion placé précédemment, à défaut de le faire il passe et perd un point. Le jeu continue ensuite de cette manière jusqu'au moment où les pions de l'un des joueurs sont épuisés ou jusqu'au moment où le jeu est entièrement bloqué". Ce brevet prévoit également que lorsqu'un joueur ne peut faire correspondre un de ses pions à ceux déjà joués, il prend un des pions non distribués, ou perd des points s'il ne reste plus de pions disponibles. Parmi les investissements revendiqués qui distingueraient son jeu du brevet M..., la société Goliath relève la taille des triangles de 40 millimètres, la présence d'un rivet en laiton au milieu du pion, l'orientation des chiffres y figurant, et l'usage du chevalet, qui auraient selon elle été repris de manière servile ou quasi-servile par la société Cayro. Pour autant, il est justifié par la société Cayro (ses pièces 7 et 31) que la présence sur les dominos d'un rivet en laiton est une pratique ancienne, répandue dans la fabrication traditionnelle des dominos, afin de les mélanger plus facilement. Il sera par ailleurs relevé que la présence d'un rivet se trouve sur l'édition de luxe du jeu de la société Goliath, et non sur sa version classique. De même, les pions de la société Cayro, de taille légèrement inférieure à ceux de la société Goliath, sont pleins, et ceux de la société Goliath sont soit pleins soit évidés. L'orientation des chiffres figurant dans les coins de chacun des pions s'explique par le but de faciliter la lecture des chiffres et l'usage des pions, et la reprise de cette orientation sur d'autres jeux de dominos triangulaires confirme cette explication fonctionnelle. Il n'est pas justifié d'un investissement de la société Goliath ayant permis d'arrêter la taille ou le poids des pions, les distinguant des dominos classiques connus depuis plusieurs siècles. Enfin, l'utilisation d'un chevalet afin de permettre à chaque joueur de disposer de ses pions tout en les dissimulant au regard des adversaires constitue un moyen souvent utilisé dans les jeux de sociétés (ainsi, le jeu Scrabble), le fait que ce chevalet ait deux rangées s'expliquant par le nombre de pièces dont chaque joueur peut lors d'une partie disposer dans son jeu, et se retrouve dans d'autres jeux (ainsi, le tridomino, pièce 19). S'agissant des règles du jeu, celles de la société Goliath commencent par la distribution de pions d'un nombre différent selon le nombre de joueurs (ainsi, 9 pions pour une partie à 2 joueurs, 7 pions pour une partie à 3 ou 4 joueurs), alors que dans le jeu de la société Cayro chaque joueur commence la partie avec 7 pions, quelque soit le nombre de joueurs. Dans le jeu Goliath c'est le joueur qui tire le pion avec la valeur la plus élevée qui commence, alors que dans le jeu de la société Cayro c'est celui qui possède le brelan le plus élevé, ou à défaut celui qui possède le pion ayant la valeur la plus élevée. Le joueur qui commence le jeu Goliath marque un score correspondant au total des chiffres figurant sur son pion, alors que dans le jeu Cayro il bénéficie en plus d'un bonus de dix points, voire d'un bonus supplémentaire de trente points s'il utilise le pion triple zéro. Dans les deux jeux, le joueur qui ne peut jouer par défaut de pion pouvant s'associer avec ceux posés pioche un pion supplémentaire, dans la limite de trois, en perdant à chaque fois cinq points, et encore dix points si au bout de trois pioches, il ne peut pas jouer. Les deux jeux prévoient des bonifications pour la réalisation de figures géométriques, il s'agit dans les deux jeux des mêmes figures avec le même nombre de points correspondant ; une telle bonification de points lors de la réalisation de figures prédéterminées était prévue par le brevet M..., qui n'en indiquait cependant pas le quantum. Dans le jeu Goliath, le premier joueur qui pose son dernier pion bénéficie d'un bonus de 25 points plus le total des Triominos que les autres joueurs auront en leur possession ; le tour sera terminé et le gagnant est celui qui aura cumulé le plus de points. Dans le jeu Cayro le gagnant est le joueur qui placera tous ses pions, il bénéficiera d'un bonus de cinq points, outre le total des points des pions de ces adversaires. Dans les deux jeux, si aucun joueur ne peut jouer et que le jeu est bloqué, le gagnant est celui qui dispose du nombre de points le plus faible sur les pièces qu'il lui reste à jouer. Enfin, la société Goliath conseille à ses joueurs de fixer une limite maximum de points (par exemple, 400...), soit le même nombre que celui fixé par la société Cayro pour la fin de la partie. Pour autant, ce nombre se retrouve également dans les autres jeux de dominos triangulaires présents sur le marché (pièce intimée 34), et est indiqué à titre de conseil par la société Goliath. La plupart des règles des deux jeux dérivent du brevet M..., qui prévoyait également que le joueur bloqué devait prendre un des pions non distribués, perdait des points si tous les pions avaient été distribués. La proximité des deux jeux s'explique en partie par le fait qu'il s'agit de deux jeux de dominos triangulaires, et la société Goliath ne conteste pas que certaines règles du jeu de la société Cayro lui sont propres, comme le recours au brelan pour déterminer le joueur, et certains principes de bonus. Aussi, la reprise dénoncée de certaines règles du jeu, qui figurent également dans d'autres jeux présents sur le marché, ne peut, de par l'absence de démonstration d'investissement pour les définir, révéler une faute constitutive de parasitisme, indépendamment du fait que les règles du jeu n'apparaissent pas au moment de l'achat et ne peuvent donc déterminer un consommateur, dont l'intérêt pour le jeu est celui pour un jeu de dominos triangulaires. Le fait que le premier pion mis en jeu soit appelé "trio" par la société Cayro peut s'expliquer et sera compris du consommateur par le fait qu'il s'agit d'une pièce à trois côtés présentant trois chiffres sur la même surface, à chacun de ces trois angles. Le caractère commun de cette appellation ne permet pas de déduire de son usage qu'il révèle la volonté de la société Cayro de créer un lien avec le jeu "Triominos" de la société Goliath. De même la présentation par certains revendeurs du jeu de la société Cayro ou par certains sites marchands comme contenant des "Triominos" ne lui peut être reproché, qi land bien même ces présentations sont de nature à établir un lien avec le produit de la société Goliath, ces présentations n'étant pas de son fait ni effectuées sous sa responsabilité. La société Goliath justifie du budget consacré à la promotion de son jeu, par le biais de partenariats, d'opérations de communication ou de marketing, mais ne verse cependant pas de pièces liées à l'investissement portant sur la conception même du jeu, et celles versées ne permettent pas de déterminer la part consacrée au seul jeu Triominos de la part consacrée à la marque. La société Cayro souligne également le fait que les articles de presse locale et de bulletins municipaux produits pour témoigner de la notoriété acquise par le jeu de la société Goliath, et donc des investissements de celle-ci, sont récents et postérieurs à la naissance du litige entre les sociétés. Il convient de rappeler qu'en l'absence de droits protégés, la seule imitation ne suffit pas à constituer une faute et qu'en l'occurrence, la présentation des produits est différente, la boîte de jeu du produit de la société Cayro se distinguant de celle du jeu de la société Goliath, étant relevé qu'il est commun à tous les jeux de sociétés de présenter sur leur boîte une situation de jeu ou une vision du produit. Les éléments communs aux pions des deux jeux sont courants dans les jeux de dominos et de dominos triangulaires, leurs règles sont des adaptations des dominos "classiques" et plus particulières des dominos triangulaires telles que posées notamment par le brevet M... désormais dans le domaine public, et relèvent essentiellement d'éléments usuels communs aux jeux de dominos triangulaires non protégés par des droits de propriété intellectuelle, de sorte que le fait de les reproduire partiellement ne saurait en l'espèce caractériser un acte de parasitisme, même en procédant à une appréhension globale. Aussi, la société Goliath sera déboutée de sa demande au titre du parasitisme. Il ne sera pas fait droit à ses autres demandes. » ; ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « GOLIATH prétend que CAYRO, en commercialisant le jeu intitulé « Dominos triangulaires », a commis et commet des actes de concurrence parasitaire à rencontre de la société GOLIATH BV ; que GOLIATH fonde ses demandes sur l'article 1382 du code civil qui dispose que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; Qu'il y a lieu de rappeler que la concurrence déloyale et le parasitisme sont certes fondés sur l'article 1382 du code civil mais sont caractérisés par application de critères distincts, la concurrence déloyale l'étant au regard du principe tiré du risque de confusion, étranger à la concurrence parasitaire qui requiert la circonstance selon laquelle, à titre lucratif et de façon injustifiée, une personne morale ou physique s'inspire ou copie une valeur économique d'autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d'un savoir-faire, d'un travail intellectuel et d'investissements ; Qu'il en résulte un acte de concurrence parasitaire fautive, contraire aux usages normaux du commerce, notamment en ce qu'il rompt l'égalité entre les divers intervenants, sans risque de confusion, fausse le jeu normal du marché et provoque ainsi un trouble commercial ; La concurrence déloyale consiste notamment à utiliser la réputation d'un concurrent en créant une confusion avec ce dernier afin d'en capter la clientèle. La déloyauté repose notamment sur une imitation qui vise à entretenir la confusion, la seule imitation n'étant pas en elle-même condamnable. Caractérise un comportement parasitaire, indépendamment de tout risque de confusion, le fait de se placer dans le sillage d'un concurrent en cherchant à évoquer dans l'esprit du public les éléments qui servent à l'identifier ; Attendu en premier lieu que GOLIATH ne revendique aucun droit privatif sur son jeu ; que, selon l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ; que pour démontrer la notoriété de son jeu, GOLIATH produit en pièce 26 des articles de presse locale, voir municipale très récents qui ne sont pas de nature à établir une notoriété de 25 ans, comme prétendu par le demandeur ; Attendu de plus que CAYRO est un opérateur habituel des jeux de société, qui n'a pas besoin pour exister sur le marché d'un jeu similaire au Triominos ; qu'il n'est pas établi que CAYRO aurait commis une faute, du fait de l'absence de droit privatif sur le jeu de dominos triangulaires ; qu'à l'appui de ses affirmations sur les investissements réalisés, le demandeur produit des documents sous sa pièce 20 qui ne comportent aucune identification certaine de leur source, et qui ne sont pas certifiés par le commissaire aux comptes ; que GOLIATH n'apporte aux débats aucun élément comptable relatif â ses investissements et à l'évolution de son chiffre d'affaires ; qu'en l'absence de démonstration de l'existence d'une renommée certaine et antérieure au jeu du défendeur, d'une faute de celui-ci et d'investissements réalisés pour la mise sur le marché du Triominos, il en résulte que GOLIATH sera déboutée de sa demande au titre du parasitisme ; 3-Sur la demande d'expertise qu'il appartient à GOLIATH de rapporter la preuve des actes de concurrence déloyale et de parasitisme qu'elle invoque à l'encontre de CAYRO ; qu'il n'appartient pas au juge du fond de palier la carence d'une partie dans l'administration de la preuve qui lui incombe, en ordonnant une mesure d'instruction ; qu'il en résulte que succombant à sa demande principale GOLIATH sera déboutée de sa demande ; 4-Sur les demandes d'interdiction et de publication que GOLIATH succombe en sa demande principale, les présentes demandes sont devenues sans objet et il conviendra d'en débouter la demanderesse. 5- Sur les demandes reconventionnelles 5.1 Sur la demande pour procédure abusive que la société CAYRO prétend qu'elle serait victime d'une procédure abusive de la part de la demanderesse; mais que chercher à faire valoir ses droits en justice est un droit fondamental, qu'il ne peut être fait grief à GOLIATH de s'être méprise sur leur étendue à l'égard de la société CAYRO; Que cette dernière ne justifie d'aucun préjudice distinct en relation avec sa mise en cause dans la présente instance ; 5.2 Sur la demande de remboursement de frais Attendu que CAYRO prétend qu'elle a dû engager la somme de 15.000 euros à titre de remboursement des frais qu'elle a été contrainte d'engager pour modifier certains éléments du jeu de domino triangulaire ; toutefois qu'elle a procédé à ces modifications de son propre chef sans pour autant reconnaître sa responsabilité ; qu'elle ne justifie pas des frais exposés qui ne sauraient ainsi être mis à la charge de GOLIATH ; 5.3 Sur la demande de publication qu'il n'apparaît pas nécessaire, compte tenu de la solution donnée au litige, de recourir à une publication judiciaire qui pourrait constituer une sanction disproportionnée au regard des faits jugés, quand bien même la mise en cause de CAYRO s'est révélée infondée ; En conséquence, le tribunal déboutera la société CAYRO de ses demandes reconventionnelles formées de ce chef ; 6- Sur les demandes relatives à l'article 700 du code de procédure civile Attendu que CAYRO a dû, pour assurer sa défense, engager des frais qu'il serait inéquitable de lui faire supporter ; qu'il convient donc de condamner GOLIATH à lui payer la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile; Qu'il y a lieu, corrélativement de débouter GOLIATH de sa propre demande à ce titre Sur l'exécution provisoire Attendu que la solution donnée au litige ne justifie pas l'exécution provisoire ; qu'il n'y e donc pas lieu de l'ordonner » ; 1°) ALORS QU'en l'espèce, la société Goliath faisait valoir (v ; ses conclusions, p.12s.) que le jeu de dominos triangulaires édité par la société Cayro avait non seulement repris les éléments esthétiques des pions du jeu Triominos qu'elle commercialisait en propre (pions d'environ 40 mm de côté, couleur ivoire, affublés d'un rivet en laiton, chiffres placés sur chaque côté), mais également le nombre de pièces, le principe d'un chevalet à double étage, et avait, sous réserve de quelques modifications anecdotiques, repris l'intégralité des règles du jeu Triominos commercialisé par la société Goliath ; qu'elle rappelait également que c'était la société Pressman, dont elle était la licenciée, qui avait commercialisé pour la première fois un jeu de société reprenant ces éléments et popularisé le jeu de dominos triangulaires ; que pour écarter le grief de parasitisme, la Cour d'appel a retenu que la société Goliath ne faisait pas la preuve des investissements intellectuels qui seraient à l'origine du jeu Triominos et que la société Cayro se serait indûment appropriée sans bourse délier dès lors que certains des choix opérés par la société Goliath s'expliqueraient par des considérations ludiques et que certains éléments de son jeu étaient repris par d'autres produits commercialisés sur le marché ; qu'en statuant de la sorte, par des motifs impropres à écarter l'existence d'efforts intellectuels et d'un savoir-faire à l'origine de la création du jeu Triominos, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ; 2°) ALORS en outre QU'en l'espèce, la société Goliath rappelait (v ; ses conclusions, p.12s.) que le jeu Triominos proposait de nombreux ajouts et améliorations par rapport aux règles de base contenues dans le brevet M..., lesquels ajouts et améliorations relevaient de choix arbitraires de l'éditeur du jeu Triominos (règle selon laquelle le joueur qui débute est celui qui dispose dans son jeu de la tuile représentant le plus grand nombre de points ; fixation d'une limite de points à 400 points ; modification de la sanction de l'impossibilité d'accomplir une séquence de jeu ; définition des points accordés en cas de réalisation de figures spéciales ; définition desdites figures ; modification des règles de fin de jeu ) ; qu'elle ajoutait qu'à l'exception de quelques modifications anecdotiques, la société Cayro s'était contentée de reprendre ces règles, ce qui constituait en soi un comportement parasitaire ; qu'en énonçant, pour juger que la société Goliath ne faisait pas la preuve des investissements intellectuels dans l'établissement des règles du jeu Triominos que la plupart de ces règles dérivaient du brevet M..., cependant que ledit brevet ne divulguait aucune des règles sus-énoncées, la Cour d'appel a dénaturé le brevet d'invention n° 176.784 délivré le 20 juillet 1970 à Monsieur Y... M... et violé l'article 1103 du code civil (anciennement l'article 1134 du code civil) ; 3°) ALORS en tout état de cause QU'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée (v. conclusions, p.28s.), si la réunion de l'ensemble des éléments relevés par la Cour en un seul jeu et la création du produit fini Triominos n'avaient pas nécessité en toute hypothèse des efforts intellectuels et financiers, notamment en matière de recherche et développement, que la société Cayro avait pu s'approprier sans bourse délier, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ; 4°) ALORS QUE constitue un acte de parasitisme, le fait, pour un opérateur économique, de reproduire quasi servilement un produit existant et notoire sur le marché afin de bénéficier, sans bourse délier de la notoriété de celui-ci et des investissements engagés par son éditeur en termes de communication ; qu'en l'espèce, il résulte des constations mêmes de l'arrêt attaqué que la société Caryo avait non seulement repris les éléments esthétiques des pions du jeu Triominos commercialisé par la société Goliath (pions d'environ 40 mm de côté, couleur ivoire, affublés d'un rivet en laiton, chiffres placés sur chaque côté), mais également le nombre de pièces, le principe d'un chevalet à double étage, et avait, sous réserve de quelques modifications anecdotiques, repris l'intégralité des règles du jeu Triominos commercialisé par la société Goliath (arrêt, p.6 et 7) ; que la Cour d'appel a encore constaté que la société Goliath justifiait du budget consacré à la promotion de son jeu, par le biais de partenariats, d'opérations de communication ou de marketing (arrêt, p.7) ; qu'en écartant le grief de parasitisme sans constater que la société Cayro avait procédé à des investissements intellectuels et/ou financiers propres et suffisants sans se borner à agir comme un parasite, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ; 5°) ALORS en toute hypothèse QU' en écartant le grief de parasitisme au motif que les pièces versées aux débats ne permettaient pas « de déterminer la part consacrée au seul jeu Triominos de la part consacrée à la marque » parmi les dépenses de communication exposées par la société Goliath, la Cour d'appel s'est déterminée par un motif inopérant dès lors que les investissements effectués par cette dernière pour communiquer sur le jeu Triominos, sur ses déclinaisons, ou sur la marque Triominos correspondaient nécessairement à des investissements effectués en vue de développer la notoriété du jeu Triominos et à des investissements que la société Cayro avait pu chercher à parasiter ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ; 6°) ALORS en outre QU' 'en écartant le grief de parasitisme, au motif que « la société Cayro souligne également le fait que les articles de presse locale et de bulletins municipaux produits pour témoigner de la notoriété acquise par le jeu de la société Goliath, et donc des investissements de celle-ci, sont récents et postérieurs à la naissance du litige entre les sociétés », sans s'expliquer sur les pièces par lesquelles la société Goliath démontrait que le jeu Triominos était devenu l'un des jeux de société familiaux les plus vendus, notamment en France où les ventes étaient les plus importantes au niveau européen (conclusions, p.4), que le jeu était affiché sur des sites majeurs de commerce en ligne comme faisant partie de leurs « meilleurs ventes », ou encore que le jeu Triominos était régulièrement cité par des études « comme le jeu préféré des enfants ou des séniors » (conclusions, p.19), ce dont il résultait que le jeu Triominos avait acquis une notoriété certaine, que de nouveaux intervenants sur le marché pouvaient parasiter en commercialisant, sans bourse délier, un jeu identique ou quasiment identique, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.