Cour de cassation, Chambre commerciale, financière et économique, 24 juin 2020, 19-13.121

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2020-06-24
Cour d'appel de Paris
2019-02-13
Cour d'appel de Paris
2019-02-13

Texte intégral

COMM. JT COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 24 juin 2020 Cassation partielle Mme MOUILLARD, président Arrêt n° 266 F-D Pourvoi n° E 19-13.121 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 24 JUIN 2020 1°/ la société Les Editions F..., société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , 2°/ la société [...] , société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , prise en la personne de M. E... N..., agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Les Editions F..., ont formé le pourvoi n° E 19-13.121 contre l'arrêt rendu le 13 février 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 4), dans le litige les opposant à la société Parlan Publishing, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] (Fédération de Russie), défenderesse à la cassation. Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Sudre, conseiller, les observations de la SCP L. Poulet-Odent, avocat des sociétés Les Editions F... et [...] , ès qualités, de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Parlan Publishing, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 février 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Sudre, conseiller rapporteur, M. Guérin, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris,13 février 2019), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 8 novembre 2016, pourvoi n° 15-12.445), la société Les Editions F... (la société F...), éditrice du magazine "l'Officiel de la couture et de la mode de Paris", a concédé à la société New Sovereign Ltd une licence exclusive en vue de la publication de ce magazine, en langue russe, et sa diffusion en Russie et dans certains pays voisins jusqu'au 31 décembre 2011. 2. Le contrat prévoyait qu'à son expiration, la société New Sovereign Ltd bénéficierait d'un droit de préemption pour conclure, par préférence à tout tiers, un nouveau contrat de licence avec la société F.... 3. Le 1er octobre 2006, les droits et obligations de la société New Sovereign Ltd ont été transférés à la société CJSC Parlan Publishing (la société Parlan). 4. Le 1er janvier 2007, un contrat de licence standard a été conclu pour une durée de cinq ans entre la société F... et la société Parlan, conférant à cette dernière l'exclusivité d'exploitation du magazine et reprenant les dispositions du contrat du 28 décembre 2001 telles que modifiées par un avenant du 1er octobre 2006. 5. Les parties s'étant opposées sur les conditions de reconduction du contrat amendé de 2001, la société F... a notifié à la société Parlan, le 4 août 2010, la résiliation unilatérale de ce contrat, avec effet au 30 août 2010 puis l'a assignée pour faire constater le caractère légitime de cette résiliation et demander des dommages-intérêts pour inexécution contractuelle. 6. Reconventionnellement, la société Parlan a demandé la réparation de ses préjudices, résultant, selon elle, de la violation de son droit de préemption, en raison de la conclusion par la société F... de deux contrats de licence avec un tiers, et de la rupture brutale et abusive de la relation commerciale établie entre les parties. 7. Devant la cour d'appel, la société F... a présenté des demandes en réparation de préjudices résultant d'actes commis postérieurement à la résiliation. 8. Le 4 février 2015, la société F... a été mise en redressement judiciaire et un plan de redressement a été homologué le 17 mars 2016.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

9. La société F... fait grief à l'arrêt de fixer au passif de la procédure collective dont elle fait l'objet, la somme de 1 760 000 euros correspondant à la créance de la société Parlan (au titre de son droit de préemption) et de rejeter ses autres demandes alors : « 1°/ que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'en l'espèce, le contrat de licence litigieux a prévu, en son article 10.4, que la société Parlan aurait "à l'expiration du présent contrat, ( ) le droit de préemption auprès des tiers pour conclure un nouveau contrat pour un nouveau délai" ; qu'en revanche, en vertu de l'article 11.8, les parties sont convenues qu'en cas de résiliation du contrat "le licencié perdra ses droits qui lui avaient été accordés par le concédant conformément au présent contrat" ; qu'il résulte de ces stipulations logiques, d'une part, que l'exercice du droit de préemption, qui avait pour finalité la poursuite du contrat, supposait que celui-ci fût porté à son terme et, d'autre part, qu'une éventuelle résiliation, quel qu'en fût l'auteur, devait entraîner la perte de ce droit ; que, le contrat ayant été résilié le 30 août 2010, avant terme, le droit de préemption de la société Parlan se trouvait éteint par le fait même, à la fois parce que les parties en avaient décidé ainsi, et parce que l'exercice du droit de préemption, ordonné à la poursuite du contrat, n'avait plus de cause en raison de l'extinction de celui-ci ; qu'en jugeant pourtant que le droit de préemption demeurait acquis à la société Parlan en vertu du contrat nonobstant la survenance de la résiliation du contrat, la cour a violé les articles 1134 et 1135, devenus respectivement 1103 et 1193 du code civil ; 2°/ que les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que l'article 10.4 du contrat litigieux a reconnu à la société Parlan, à l'expiration de cette convention, un « droit de préemption auprès des tiers pour conclure un nouveau contrat pour un nouveau délai » ; que, cependant, ainsi que l'avait soutenu la société F..., l'article 11.8 a prévu que « suite à la résiliation du contrat, le licencié perdra ses droits qui lui avaient été accordés par le concédant conformément au présent contrat », ce qui incluait nécessairement le droit de préemption lui-même ; que cette dernière stipulation était logique puisque, le droit de préemption ayant pour objet la poursuivre du contrat à l'expiration de son terme, il n'a plus de raison d'être s'il y est mis fin par une résiliation ; que, pour juger néanmoins que le droit de préemption subsistait, la cour s'est bornée à retenir que la société F... ne pouvait se prévaloir du fait qu'elle avait unilatéralement résilié le contrat ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si en vertu de l'article 11.8, qui constituait la loi des parties, la société Parlan n'avait pas perdu son droit de préemption en raison de la résiliation survenue, et si ce texte ne constituait pas un obstacle conventionnel à ce qu'elle pût encore s'en prévaloir, la cour a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1135, devenus respectivement 1103 et 1193 du code civil ; 3°/ que tout jugement, à peine de censure, doit être motivé ; que ne répond pas à cette exigence le motif inopérant ; qu'en l'espèce, compte tenu du moyen soutenu par la société F..., il s'agissait de savoir s'il pouvait être jugé qu'un droit de préemption pouvait subsister au profit de la société Parlan malgré la survenance d'une résiliation, quand la loi des parties, en son article 11.8, avait explicitement exclu cette possibilité, en faisant de cette circonstance une cause de perte de tous droits pour cette dernière société ; qu'en retenant dès lors que la société Parlan n'avait pas pu être privée de ce droit parce que la résiliation dont avait pris l'initiative la société F... était fautive, ce pourquoi elle avait été condamnée à verser une indemnisation à hauteur de 2 217 000 euros, la cour, qui s'est déterminée par des motifs inopérants, a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 4°/ qu' une partie ne peut être sanctionnée en vertu d'une clause pénale que pour les seuls manquements contractuels qui en sont l'objet ; qu'en l'espèce, ainsi que la société F... l'avait rappelé, la clause pénale stipulée à l'article 10.6 avait exclusivement pour objet de punir un manquement éventuel constitué soit par son refus de négocier, soit par sa décision de conclure avec un tiers, après que la société Parlan l'avait pourtant informée de son intention de poursuivre le contrat après son échéance ; que la société F... avait cependant fait valoir qu'elle n'avait commis aucun de ces deux manquements, de sorte que la clause pénale ne pouvait lui être appliquée ; qu'en décidant néanmoins de la lui appliquer et de fixer au passif de la procédure collective de la société F... la somme de 1 760 000 euros de ce chef, sans avoir recherché, comme elle y était invitée, si ladite société avait commis les manquements contractuels que la clause pénale avait exclusivement pour objet de sanctionner la cour a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1135, devenus respectivement 1103 et 1193 du code civil ; 5°/ que le principe de la réparation intégrale implique en particulier qu'un même préjudice ne puisse être réparé deux fois ; qu'en l'espèce, pour appliquer à la société F... la clause pénale inscrite dans le contrat litigieux, la cour, qui n'a pas constaté que ladite société ait commis aucune des fautes que cette clause avait pour objet de sanctionner, s'est bornée à retenir qu'elle avait résilié unilatéralement et fautivement le contrat litigieux ; qu'ainsi, sa décision d'appliquer la clause pénale à la société F... ne repose en définitive que sur le seul constat de cette résiliation fautive ; qu'en se déterminant dès lors ainsi, par des motifs qui reviennent à indemniser deux fois le même préjudice, la cour a violé l'article 1147, devenu 1231-1 du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale. »

Réponse de la Cour

10. L'arrêt relève qu'en application des stipulations des articles 10.4, 10.5 et 10.6 du contrat, la société Parlan bénéficiait d'un droit de préemption à l'expiration du contrat, laquelle était fixée au 31 décembre 2011, sous réserve de notifier par écrit ses intentions à la société F... au plus tard un an avant cette date, ce qu'elle a régulièrement fait le 15 décembre 2010. 11. Il rappelle ensuite que la société F... a commis une faute en résiliant unilatéralement le contrat le 30 août 2010 et qu'elle a, par une décision devenue irrévocable, été condamnée à payer à la société Parlan la somme de 2 217 000 euros en réparation du préjudice correspondant. 12. En l'état de ces constatations, c'est à bon droit que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à la recherche invoquée par la deuxième branche, que ses constatations rendaient inopérante, a retenu que la résiliation unilatérale fautive du contrat par la société F..., qui a donné lieu par ailleurs à réparation, ne pouvait avoir pour effet de priver la société Parlan du droit de préemption dont elle bénéficiait en vertu du contrat et dont la violation par la société F..., sanctionné par la clause pénale stipulée à l'article 10.5 du contrat, lui a causé un préjudice distinct de celui de la résiliation du contrat proprement dite. 13. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le second moyen

, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

14. La société F... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes de dommages-intérêts alors « que la résiliation d'une convention, même fautive, en entraîne l'extinction ; que la poursuite à son avantage, par l'une des parties, des droits procurés par le contrat n'a dès lors plus de cause, hors le cas des clauses spécifiques dont il peut être justifié qu'elles demeurent applicables, de sorte qu'elle est nécessairement fautive ; qu'en l'espèce, la société F..., demandant réparation de fautes commises par la société Parlan, avait notamment fait valoir qu'elle avait poursuivi, postérieurement à la résiliation du contrat de licence, la publication de sept numéros du magazine, continuant ainsi de jouir de la marque, sans verser pourtant aucune redevance de ce chef ; que, pour écarter ses demandes, la cour a retenu que la résiliation unilatérale opérée par la société F... avait été jugée fautive, qu'elle avait donné lieu à indemnisation et que la convention aurait dû se poursuivre jusqu'au 31 décembre 2011 ; qu'en se déterminant ainsi, quand le seul constat de la résiliation du contrat, fautive ou non, aurait dû la conduire à juger que l'exercice ultérieur d'un droit de licence par la société Parlan était fautive, la cour a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil . » Réponse de la Cour

Vu

l'article 1382, devenu 1240, du code civil ; 15. Aux termes de ce texte, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. 16. Pour rejeter les demandes de dommages-intérêts de la société F..., l'arrêt, après avoir énoncé que, s'il n'avait pas été résilié par elle le 30 août 2010, le contrat conclu avec la société Parlan aurait dû se poursuivre jusqu'à son terme, le 31 décembre 2011, retient qu'il ne peut être reproché à celle-ci d'avoir publié, après la résiliation fautive, sept numéros du magazine afin de respecter ses propres engagements contractuels auprès de ses annonceurs.

17. En statuant ainsi

, alors que la résiliation anticipée faisait obstacle à la poursuite de l'exécution du contrat par la société Parlan, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS

, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour : CASSE et ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de dommages-intérêts de la société Les Éditions F... au titre de la publication de sept numéros de magazine postérieurement à la résiliation du contrat, l'arrêt rendu le 13 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille vingt

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt Moyens produits par la SCP L. Poulet-Odent, avocat aux Conseils, pour les sociétés Les Editions F... et [...] , ès qualités, PREMIER MOYEN DE CASSATION Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, infirmant le jugement déféré en ce qu'il avait prononcé les condamnations à l'encontre de la société Les Éditions F... pour les sommes de 2 millions USD et 153 000 euros, fixé les créances de la société Parlan Publishing au passif de la société Les Éditions F... comme suit : millions USD au taux de conversion du 4 février 2015, et débouté la société Les Éditions F... de toutes ses demandes, AUX MOTIFS QUE sur la demande d'un montant de 2 000 000 USD, la société F... conteste cette demande formée au titre de la pénalité contractuelle en faisant valoir que le droit de préférence était éteint depuis le 30 août 2010, date à laquelle elle a résilié le contrat, et par là même la clause pénale sanctionnant son inexécution ; qu'elle invoque l'article 11.8 du contrat qui précise que suite à la résiliation du contrat, le licencié perd les droits qui lui avaient été accordés par le concédant et prétend que l'article 10.6 du contrat n'a vocation à s'appliquer qu'à l'arrivée du terme contractuel ; que, subsidiairement, la société F... allègue que font défaut les deux hypothèses ou conditions prévues à l'article 10.5 du contrat, à savoir : son refus de négocier après demande de renouvellement de la société Parlan ou son refus de conclure un nouveau contrat et la signature d'un contrat avec une tierce personne à des conditions que la société Parlan était prête à accepter ; qu'elle souligne : - que la demande de renouvellement du contrat n'a été formalisée par la société Parlan que le 15 décembre 2010, alors que le contrat était déjà résilié, - qu'il ne peut lui être reproché de n'avoir pas négocié avec la société Parlan en décembre 2010 puisque le droit de préférence n'était plus en vigueur à cette date, - que la résiliation anticipée du contrat a déjà été lourdement sanctionnée ; qu'à titre infiniment subsidiaire, la société F... soutient que l'indemnité, qui s'analyse en une clause pénale, est manifestement excessive et doit être réduite à néant ou à un euro symbolique ; que, cependant, la société Parlan se fonde à juste raison sur les stipulations contractuelles qui prévoient : - à l'article 10.4 : « À l'expiration du présent contrat, le concessionnaire, toutes autres conditions étant égales, a le droit de préemption auprès des tiers pour conclure un nouveau contrat pour un nouveau délai. Le concessionnaire est tenu d 'aviser l'Officiel par écrit en faisant part de ses intentions en matière de signature d'un contrat pour un nouveau délai, et ce, au plus tard un an avant l'expiration du présent contrat. Passé ce délai, le concessionnaire perd son droit de conclure le contrat pour un nouveau délai », - à l'article 10.5 : « Si l'Officiel ayant reçu l'avis du concessionnaire lui annonçant son intention de conclure le contrat pour un nouveau délai n'entame pas de négociations avec le concessionnaire en vue de la signature d'un contrat pour un nouveau délai et conclut avec une tierce personne ou si l'Officiel refuse de conclure le contrat pour un nouveau délai avec le concessionnaire, en le signant avec une tierce personne aux conditions auxquelles le concessionnaire était prêt à conclure le contrat pour un nouveau délai (ou à des conditions moins avantageuses pour l'Officiel), le concessionnaire a le droit d'exiger, soit le transfert en sa faveur des droits et obligations issus du contrat pour un nouveau délai conclu avec des tiers et de verser une pénalité égale à un million (1 000 000) de dollars US, soit de lui verser une pénalité égale à deux millions (2 000 000) de dollars USD », - à l'article 10.6 : « ( ) Si dans les deux (2) ans après la date de cessation du présent contrat, l'Officiel s 'apprête à signer un contrat pour un nouveau délai, il sera tenu d'aviser le concessionnaire de cette nouvelle intention de conclure le contrat pour un nouveau délai ( ) Si dans les deux (2) ans après la date de cessation du présent contrat, l'Officiel signe le contrat pour un nouveau délai avec une tierce personne sans avoir exposé au concessionnaire son intention de conclure le contrat pour un nouveau délai ( ) ou si l'Officiel signe le contrat pour un nouveau délai avec une tierce personne aux conditions auxquelles le concessionnaire était prêt à conclure le contrat pour un nouveau délai (ou à des conditions moins avantageuses pour l'Officiel), le concessionnaire aura le droit, soit d'exiger le transfert en sa faveur des droits et obligations qui découlent du contrat conclu et de lui verser une pénalité égale à un million (1 000 000) USD, soit de lui verser une pénalité égale à deux millions (2 000 000) USD » ; qu'il résulte de ces stipulations que la société Parlan bénéficiait d'un droit de préemption à l'expiration du contrat, laquelle était fixée au 31 décembre 2011, sous réserve de notifier par écrit ses intentions à la société F... au plus tard un an avant cette date, ce qu'elle a régulièrement fait le 15 décembre 2010 ; que la société F... est mal fondée à se prévaloir du fait qu'elle a résilié le contrat le 30 août 2010, cette résiliation unilatérale, qui a été jugée fautive et a donné lieu à une indemnisation à hauteur de 2 217 000 euros, ne pouvant avoir pour effet de priver la société Parlan des droits dont elle bénéficiait en vertu du contrat, dont le droit de préemption et l'indemnité s'y attachant en cas de non respect de ce droit ; que la société F... ne démontrant pas le caractère manifestement excessif de la clause pénale, son montant de 2.000.000 USD, soit 1.760.000 euros, sera fixé au passif de sa procédure collective. 1° ALORS QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'en l'espèce, le contrat de licence litigieux a prévu, en son article 10.4, que la société Parlan aurait « à l'expiration du présent contrat, ( ) le droit de préemption auprès des tiers pour conclure un nouveau contrat pour un nouveau délai » ; qu'en revanche, en vertu de l'article 11.8, les parties sont convenues qu'en cas de résiliation du contrat « le licencié perdra ses droits qui lui avaient été accordés par le concédant conformément au présent contrat » ; qu'il résulte de ces stipulations logiques, d'une part, que l'exercice du droit de préemption, qui avait pour finalité la poursuite du contrat, supposait que celui-ci fût porté à son terme et, d'autre part, qu'une éventuelle résiliation, quel qu'en fût l'auteur, devait entraîner la perte de ce droit ; que, le contrat ayant été résilié le 30 août 2010, avant terme, le droit de préemption de la société Parlan se trouvait éteint par le fait même, à la fois parce que les parties en avaient décidé ainsi, et parce que l'exercice du droit de préemption, ordonné à la poursuite du contrat, n'avait plus de cause en raison de l'extinction de celui-ci ; qu'en jugeant pourtant que le droit de préemption demeurait acquis à la société Parlan en vertu du contrat nonobstant la survenance de la résiliation du contrat, la cour a violé les articles 1134 et 1135, devenus respectivement 1103 et 1193 du code civil ; 2° ALORS QUE les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que l'article 10.4 du contrat litigieux a reconnu à la société Parlan, à l'expiration de cette convention, un « droit de préemption auprès des tiers pour conclure un nouveau contrat pour un nouveau délai » ; que, cependant, ainsi que l'avait soutenu la société Les éditions F..., l'article 11.8 a prévu que « suite à la résiliation du contrat, le licencié perdra ses droits qui lui avaient été accordés par le concédant conformément au présent contrat », ce qui incluait nécessairement le droit de préemption lui-même ; que cette dernière stipulation était logique puisque, le droit de préemption ayant pour objet la poursuivre du contrat à l'expiration de son terme, il n'a plus de raison d'être s'il y est mis fin par une résiliation ; que, pour juger néanmoins que le droit de préemption subsistait, la cour s'est bornée à retenir que la société Les éditions F... ne pouvait se prévaloir du fait qu'elle avait unilatéralement résilié le contrat ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si en vertu de l'article 11.8, qui constituait la loi des parties, la société Parlan n'avait pas perdu son droit de préemption en raison de la résiliation survenue, et si ce texte ne constituait pas un obstacle conventionnel à ce qu'elle pût encore s'en prévaloir, la cour a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1135, devenus respectivement 1103 et 1193 du code civil ; 3° ALORS QUE tout jugement, à peine de censure, doit être motivé ; que ne répond pas à cette exigence le motif inopérant ; qu'en l'espèce, compte tenu du moyen soutenu par la société Les éditions F..., il s'agissait de savoir s'il pouvait être jugé qu'un droit de préemption pouvait subsister au profit de la société Parlan malgré la survenance d'une résiliation, quand la loi des parties, en son article 11.8, avait explicitement exclu cette possibilité, en faisant de cette circonstance une cause de perte de tous droits pour cette dernière société ; qu'en retenant dès lors que la société Parlan n'avait pas pu être privée de ce droit parce que la résiliation dont avait pris l'initiative la société Les éditions F... était fautive, ce pourquoi elle avait été condamnée à verser une indemnisation à hauteur de 2 217 000 euros, la cour, qui s'est déterminée par des motifs inopérants, a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 4° ALORS QU'une partie ne peut être sanctionnée en vertu d'une clause pénale que pour les seuls manquements contractuels qui en sont l'objet ; qu'en l'espèce, ainsi que la société Les éditions F... l'avait rappelé, la clause pénale stipulée à l'article 10.6 avait exclusivement pour objet de punir un manquement éventuel constitué soit par son refus de négocier, soit par sa décision de conclure avec un tiers, après que la société Parlan l'avait pourtant informée de son intention de poursuivre le contrat après son échéance ; que la société Les éditions F... avait cependant fait valoir qu'elle n'avait commis aucun de ces deux manquements, de sorte que la clause pénale ne pouvait lui être appliquée ; qu'en décidant néanmoins de la lui appliquer et de fixer au passif de la procédure collective de la société Les éditions F... la somme de 1 760 000 euros de ce chef, sans avoir recherché, comme elle y était invitée, si ladite société avait commis les manquements contractuels que la clause pénale avait exclusivement pour objet de sanctionner, la cour a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1135, devenus respectivement 1103 et 1193 du code civil ; 5° ALORS QUE le principe de la réparation intégrale implique en particulier qu'un même préjudice ne puisse être réparé deux fois ; qu'en l'espèce, pour appliquer à la société Les Éditions F... la clause pénale inscrite dans le contrat litigieux, la cour, qui n'a pas constaté que ladite société ait commis aucune des fautes que cette clause avait pour objet de sanctionner, s'est bornée à retenir qu'elle avait résilié unilatéralement et fautivement le contrat litigieux ; qu'ainsi, sa décision d'appliquer la clause pénale à la société Les Éditions F... ne repose en définitive que sur le seul constat de cette résiliation fautive ; qu'en se déterminant dès lors ainsi, par des motifs qui reviennent à indemniser deux fois le même préjudice, la cour a violé l'article 1147, devenu 1231-1 du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale. SECOND MOYEN DE CASSATION Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté la société Les Éditions F... de toutes ses demandes, AUX MOTIFS QUE la société F... reproche notamment à la société Parlan la publication de plusieurs numéros de la revue en Russie après la rupture du contrat, le dénigrement de la marque par des communiqués de presse, le blocage de l'enregistrement du nouveau contrat de licence auprès des autorités administratives russes par des procédures abusives introduites devant les juridictions russes, en dépit de la clause attributive de juridiction figurant au contrat, constituant un abus de droit manifeste, le fait qu'elle ait été contrainte de solliciter l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire pour protéger ses marques et son activité ; qu'elle demande la condamnation de la société Parlan à lui payer la somme totale de 11 804 535 euros, en réparation de ses préjudices, et la compensation avec toutes les sommes qu'elle pourrait devoir à la société Parlan ; que la société F... demande la somme de 10 000 000 euros pour « perte de redevances avantageuses du contrat conclu avec la société AST », évaluée à 6 000 000 euros, et frais qu'elle a dû engager pour redorer son image ; qu'elle fait valoir à ce titre : que la notoriété de la marque en Russie lui avait permis de négocier un contrat de licence avec la société AST pour la période 2010 à 2016 à des conditions très avantageuses, à savoir des rémunérations largement supérieures à celles du contrat conclu avec la société Parlan, mais que compte tenu de la poursuite de la publication par la société Parlan après la résiliation de son contrat et de ses actions de blocage devant les autorités russes, la société AST a résilié les contrats de licence dès le 11 juillet 2012 et engagé une procédure devant un tribunal arbitral, que la reprise de la publication de l'Officiel n'a pu avoir lieu qu'en octobre 2013 avec la société Les Éditions F... Russie à des conditions bien moins avantageuses, qu'elle a perdu une partie de son chiffre d'affaires avec ses annonceurs et, pour compenser sa perte d'image, elle a dû mettre en oeuvre un plan marketing coûteux ; que, cependant, il convient de rappeler que la résiliation unilatérale par la société F... du contrat passé avec la société Parlan, intervenue le 4 août 2010, avec effet au 30 août 2010, a été jugée fautive, donnant droit à indemnisation au profit de la société Parlan ; que ce contrat aurait dû se poursuivre jusqu'à son terme, soit le 31 décembre 2011 ; que dès lors, la société F... est mal fondée à reprocher à la société Parlan d'avoir, après cette résiliation fautive, publié 7 numéros du magazine afin de respecter ses propres engagements contractuels auprès de ses annonceurs ; qu'en introduisant des procédures en Russie fin 2010 à l'encontre de la société AST, pour empêcher l'enregistrement de son contrat de licence auprès des autorités administratives russes, la société Parlan n'a donc pas commis un abus de droit ; que la société F... ne démontre en aucune façon l'existence d'un préjudice qui serait résulté des communiqués de presse publiés par la société Parlan les 2 et 16 septembre 2010, en réponse à son propre communiqué du 1er septembre 2010 annonçant le contrat qu'elle venait de conclure avec la société AST ; qu'en conséquence la demande de la société F... sera rejetée ; 1° ALORS QUE la résiliation d'une convention, même fautive, en entraîne l'extinction ; que la poursuite à son avantage, par l'une des parties, des droits procurés par le contrat n'a dès lors plus de cause, hors le cas des clauses spécifiques dont il peut être justifié qu'elles demeurent applicables, de sorte qu'elle est nécessairement fautive ; qu'en l'espèce, la société Les Éditions F..., demandant réparation de fautes commises par la société Parlan, avait notamment fait valoir qu'elle avait poursuivi, postérieurement à la résiliation du contrat de licence, la publication de sept numéros du magazine, continuant ainsi de jouir de la marque, sans verser pourtant aucune redevance de ce chef ; que, pour écarter ses demandes, la cour a retenu que la résiliation unilatérale opérée par la société Les Éditions F... avait été jugée fautive, qu'elle avait donné lieu à indemnisation et que la convention aurait dû se poursuivre jusqu'au 31 décembre 2011 ; qu'en se déterminant ainsi, quand le seul constat de la résiliation du contrat, fautive ou non, aurait dû la conduire à juger que l'exercice ultérieur d'un droit de licence par la société Parlan était fautive, la cour a violé l'article 1382, devenu 1240 du code civil ; 2° ALORS QUE tout jugement, à peine de censure, doit être motivé ; qu'un motif inopérant ne répond pas à cette exigence ; que la résiliation d'un contrat, même fautive, en entraîne l'extinction ; que la poursuite à son avantage, par l'une des parties, des droits procurés par ce contrat n'ayant plus de cause, est nécessairement fautive ; que, pour écarter la demande de la société Les Éditions F..., qui demandait réparation de la faute commise par la société Parlan en publiant 7 numéros de la revue après la résiliation du contrat, la cour a retenu que cette résiliation avait été jugée fautive et avait donné lieu à condamnation de la société Les Éditions F... ; qu'en se déterminant par de tels motifs, inopérants, la cour a violé l'article 455 du code de procédure civile.