Cour de cassation, Première chambre civile, 3 décembre 2020, 20-19.942

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2020-12-03
Cour d'appel de Poitiers
2020-07-16
Cour d'appel de Poitiers
2020-02-21

Texte intégral

CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 3 décembre 2020 Rejet Mme BATUT, président Arrêt n° 818 F-D Pourvoi n° Q 20-19.942 Aide juridictionnelle totale en demande au profit de M. T.... Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 29 septembre 2020. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 3 DÉCEMBRE 2020 M. M... F... U..., domicilié au cabinet de M. Q... W..., avocat, [...] , a formé le pourvoi n° Q 20-19.942 contre trois arrêts rendus les 8 novembre 2019, 21 février 2020 et 16 juillet 2020 par la cour d'appel de Poitiers (chambre spéciale des mineurs), dans le litige l'opposant au conseil départemental de la Charente-Maritime, direction de l'enfance, de la famille et de l'action sociale (DEFAS), dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Acquaviva, conseiller, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. T..., de la SCP Gaschignard, avocat du conseil départemental de la Charente-Maritime, et l'avis de Mme Marilly, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 1er décembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Acquaviva, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon les arrêts attaqués (Poitiers, 8 novembre 2019, 21 février 2020 et 16 juillet 2020), M... F... U..., se disant mineur pour être né le [...] à Conakry (Guinée), et isolé sur le territoire national, a saisi le juge des enfants en vue de son placement auprès du service de l'aide sociale à l'enfance.

Examen des moyens

Sur les deux premiers moyens, et le troisième moyen, pris en ses première à sixième branches, ci-après annexés

2. En application de l'article 1014

, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, pris en ses quatre premières branches et le troisième moyen, pris en ses deuxième à cinquième branches, rédigées en des termes identiques, qui sont irrecevables, et sur le premier moyen pris en ses cinquième et sixième branches, le deuxième moyen et le troisième moyen pris en ses première et sixième branches, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le troisième moyen

, pris en ses septième et huitième branches

Enoncé du moyen

3. M... F... U... fait grief à l'arrêt de refuser de prendre une mesure d'assistance éducative, alors : « 7°/ que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, l'exposant faisait valoir dans ses écritures, développées oralement à l'audience, le manque de fiabilité de l'expertise pratiquée pour déterminer son âge ; qu'à cet égard il invoquait, documentation scientifique à l'appui, que l'échantillon d'individus ayant servi à constituer le référentiel d'analyse s'agissant des radiographies du poignet gauche effectuées selon la méthode de Greulich et Pyle et du scanner des clavicules effectué selon la méthode Schmeling, n'était pas en adéquation avec une personne ayant ses caractéristiques ethniques et sociales ; qu'en se bornant à relever que pour apprécier l'âge de M. Y... T..., elle disposait, en l'absence de documents probants, « de l'évaluation sociale établie par les services de l'aide sociale à l'enfance qui a exclu sa minorité et de l'examen osseux qui a conclu à un âge nettement supérieur à 18 ans », sans s'expliquer, comme elle y était invitée, sur la fiabilité des méthodes utilisées par l'expert aux fins de déterminer l'âge de l'exposant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 8°/ que pour juger que la minorité de l'exposant n'était pas établie, la cour d'appel a, par motifs adoptés, repris les éléments retenus par l'évacuateur social, selon lesquels « sur le plan physique, son visage ne présente pas de signes pubertaires », « il aurait été scolarisé jusqu'en neuvième année » et « aurait arrêté l'école courant 2017 », alors « âgé de 13 et demi » cependant que « l'âge habituel pour atteindre cette classe en Guinée est quinze ans », ou encore qu'il « n'a pas été en mesure d'expliquer comment son oncle a été en mesure de financer leur voyage jusqu'en Espagne » ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à caractériser une incohérence entre l'âge allégué par l'exposant et son âge réel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 375 et 388 du code civil. »

Réponse de la Cour

4. L'arrêt relève, d'abord, qu'il ressort de l'examen médical ordonné, en l'absence de force probante des documents de l'état civil guinéen dépourvus de légalisation et de caractère vraisemblable de l'âge allégué de 16 ans et 4 mois, que celui-ci n'est pas compatible avec les constatations cliniques et radiologiques osseuses, lesquelles permettent d'affirmer un âge nettement supérieur à 18 ans au jour de l'examen. Il retient, ensuite, que l'évaluation sociale établie par les services de l'aide sociale à l'enfance a également exclu la minorité de l'intéressé, compte tenu de son degré de maturité, de son apparence physique et des incohérences dans son parcours scolaire. 5. En l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel qui n'a pas statué au vu des seules conclusions de l'expertise, mais s'est déterminée après avoir examiné, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, l'ensemble des éléments dont elle disposait, et qui n'était tenue ni de suivre les parties dans le détail de leur argumention ni de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, a pu, en l'absence de doute sur la majorité de M... F... U..., refuser d'ordonner une mesure d'assistance éducative. 6. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS

, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. T... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois décembre deux mille vingt

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt Moyens produits par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour M. T... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué n° 19/116 du 8 novembre 2019 d'avoir, avant-dire droit, ordonné une expertise médicale de M... F... U... ; AUX MOTIFS PROPRES QUE « la procédure d'assistance éducative est applicable à tous les mineurs non émancipés qui se trouvent sur le territoire français, quelle que soit leur nationalité, si leur santé, leur moralité, leur sécurité sont en danger ou leurs conditions d'éducation ou de leur développement physique, intellectuel et social sont gravement compromises ; qu'il appartient à la personne qui demande à bénéficier d'une protection dans le cadre de l'assistance éducative de justifier de sa minorité ; Qu'aux termes de l'article 47 du code civil, tout acte de l'état civil des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes en usage dans ce pays, fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenues, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent le cas échéant après toutes vérifications utiles que cet acte est irrégulier ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ; Que les mentions présentes sur un acte d'état civile en exécution d'une décision de justice ne font foi au sens de l'article 47 du code civil qu'à la condition que la décision de justice soit produite, ce qui permet au surplus de vérifier sa régularité internationale ; qu'en l'absence de cette décision, les mentions présentes sur l'acte ne peuvent faire foi ; Qu'en l'espèce, M... F... U... a produit un jugement supplétif d'acte de naissance qui ne remplit pas les conditions de régularité internationale pour sa reconnaissance en France, à défaut de motivation ; qu'il ne peut donc pas produire d'effet ; que par conséquent, il ne saurait non plus être accordé aucune valeur probante à l'acte de retranscription ; que par ailleurs, on ne peut que s'étonner de l'existence de ce jugement supplétif alors qu'un jugement supplétif d'acte d'état civil ne peut être rendu qu'en cas de perte, de destruction des registres ou lorsque la déclaration n'a pu être effectuée dans les délais prescrits, alors qu'aucune de ces hypothèses n'existe, puisque M... F... U... a produit un acte de naissance ; Que cette situation irrégulière prive de toute valeur probante l'acte de naissance de l'intéressé ; Quant à la carte consulaire, elle n'a pour seul but que de faire connaître ses nationaux à la représentation consulaire en France de l'Etat étranger dont ils relèvent ; que ce document fait simplement foi de la nationalité guinéenne de son détenteur, mais ne constitue pas un acte d'état civil pouvant bénéficier de la présomption de l'article 47 du code civil ; Qu'aucun des documents produits ne peut donc permettre à M... F... U... de justifier de sa minorité, quand bien même certains présentent des signes de régularité formelle Que le renvoi de l'affaire pour légalisation des documents n'apparait donc pas utile ; Que le fait que les documents d'état civil produits ne soient pas réguliers ne permet pas pour autant d'affirmer que M... F... U... n'est pas mineur ; Qu'il convient de se référer aux autres éléments d'appréciation versé aux débats ; Qu'il n'a été procédé qu'à un seul entretien d'évaluation le 3 août 2018, par un unique professionnel ; que l'évaluateur a estimé que l'apparence physique de M... et sa maturité n'apparaissaient pas en adéquation avec l'âge qu'il alléguait mais l'apparence physique et la maturité sont des éléments subjectifs qui ne peuvent servir à justifier ni de la minorité ni de la majorité et ce d'autant que des jeunes contraints à un parcours migratoire ont souvent une maturité plus grande et des traits plus marqués que la plupart des jeunes de leur âge ; que l'évaluateur a également émis diverses réserves quant à la sincérité du récit migratoire mais certaines imprécisions ou erreurs commises par M... F... U... peuvent également s'expliquer par son long parcours migratoire et son histoire de vie traumatisante ; Que pour compléter ces éléments, insuffisants en eux-mêmes pour déterminer si M... F... U... est mineur, il convient d'ordonner avant-dire droit une expertise médicale pour déterminer son âge, selon le dispositif du présent arrêt » ; ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « par requête en date du 14 novembre 2018, Monsieur M... F... U... a saisi le juge des enfants dans le but de bénéficier de l'instauration d'une mesure d'assistance éducative à son profit ; Qu'il déclare être né le [...] à Conakry et avoir quitté ce pays avec un oncle maternel qui ''vendait des bonbons'' ; Qu'il ressort de la procédure qu'il a sollicité son admission à l'Aide sociale à l'enfance en qualité de mineur non accompagné le 31 juillet 2018, l'évaluation du service n'ayant pas conclu à sa minorité ; Qu'à l'audience, Monsieur a produit un acte de naissance et a précisé être pris en charge en famille d'accueil mais devoir régulièrement changer de famille d'accueil ; Que cet acte a fait l'objet d'une analyse technique qui a conclu que le document n'est pas probant car il manque la légalisation du Ministère des affaires étrangères ; Que les services de la Préfecture rappellent que tous les actes d'état civil devant produire un effet de droit à l'extérieur du pays doivent revêtir un ''pavé de légalisation'' apposé par les personnels du MAEGE (Ministère des Affaires étrangères et des Guinéens à l'étranger) ; Qu'ils relèvent également que Monsieur T... n'est pas en mesure de produire un document d'identité avec sa photographie, et notamment un passeport guinéen revêtu d'un visa consulaire, condition normalement exigée des ressortissants guinéens pour se rendre en France ; Qu'en outre, comme le relève le service de l'Aide sociale à l'Enfance, sur le plan physique, son visage ne présente pas de signes pubertaires ; Qu'il a déclaré au représentant de l'Aide sociale à l'Enfance chargé de l'évaluation de sa situation, qu'il aurait été scolarisé jusqu'en 9ème année ; Qu'il est précisé dans la requête qu'il aurait arrêté l'école courant 2017 ; Qu'à l'audience, il a affirmé qu'il était alors âgé de 13 ans et demis ; Qu'or, comme l'observe le service de l'Aide sociale à l'enfance, l'âge habituel pour atteindre cette classe en Guinée est quinze ans ; Qu'il n'a pas été en mesure d'expliquer comment son oncle a été en mesure de financer leur voyage jusqu'en Espagne ; Qu'au regard de ces éléments, Monsieur T... n'apparaît pas être mineur ; Qu'en conséquence, il n'y a pas lieu d'ordonner de mesure d'assistance éducative à son profit » ; 1°/ ALORS QUE le juge ne peut motiver sa décision par voie de simple affirmation ; qu'en l'espèce, pour juger que les documents d'état civil produits par M. Y... T... n'étaient pas réguliers et notamment le jugement supplétif d'acte de naissance n° 3436 du 4 février 2019 (v. production n° 4), la Cour d'appel a cru pouvoir relever que ce jugement « ne remplit pas les conditions de régularité internationale pour sa reconnaissance en France, à défaut de motivation » (v. arrêt p. 4§1) ; qu'en affirmant péremptoirement que le jugement supplétif litigieux n'était pas motivé, cependant que la décision guinéenne s'est fondée, pour dire que l'exposant était né le [...] à Conakry, sur les témoignages concordants du père de l'exposant et de son épouse, et ce, conformément aux dispositions de l'article 193 du code civil guinéen, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2°/ ALORS QUE l'appréciation de la régularité d'un acte de l'état civil étranger par le juge du for doit se faire selon les prescriptions de la loi de l'autorité ayant dressé l'acte ; que pour dénier tout effet au jugement supplétif d'acte de naissance et à l'acte de retranscription en découlant, la Cour d'appel a cru pouvoir relever qu' « on ne peut que s'étonner de l'existence de ce jugement supplétif alors qu'un jugement supplétif d'acte d'état civil ne peut être rendu qu'en cas de perte, de destruction des registres ou lorsque la déclaration n'a pu être effectuée dans les délais prescrits, alors qu'aucune des hypothèses n'existe, puisque M... F... U... a produit un acte de naissance » (v. arrêt p. 4§1) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était tenue, les dispositions du droit guinéen soumettant l'existence de jugement supplétif d'acte de naissance aux conditions par elle énoncées, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 47 du code civil ; 3°/ ALORS QUE subsidiairement, même à considérer qu'au regard du droit guinéen seul applicable, le jugement supplétif d'acte de naissance produit par l'exposant ne pouvait exister, la Cour d'appel ne pouvait se dispenser d'analyser, fût-ce sommairement, l'acte de naissance soumis à son examen ; qu'en se bornant à affirmer que la prétendue irrégularité du jugement supplétif privait « de toute valeur probante l'acte de naissance de l'intéressé » (v. arrêt, p. 4§2), sans procéder, comme elle y était tenue, à la moindre analyse de cet acte, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 47 du code civil ; 4°/ ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, l'exposant faisait valoir dans ses écritures développées oralement à l'audience, que l'acte de naissance produit aux fins d'établir sa minorité devait bénéficier de la présomption de force probante posée par l'article 47 du code civil, nonobstant le défaut de légalisation de cet acte dès lors que « la force probante reconnue par l'article 47 du code civil n'est pas soumise à la légalisation de l'acte de l'état civil », cette formalité administrative n'étant nécessaire que pour faire produire à l'acte les effets substantiels qui lui sont attachés (v. production n° 2, p. 2) ; que pour dénier toute force probante à l'acte de naissance litigieux, la Cour d'appel, par motifs adoptés, a cru pouvoir se contenter de relever le défaut de légalisation du document par le Ministère des affaires étrangères là où « les services de la Préfecture rappellent que tous les actes d'état civil devant produire un effet de droit à l'extérieur du pays doivent revêtir un ''pavé de légalisation'' apposé par les personnels du MAEGE (Ministère des Affaires étrangères et des Guinéens à l'étranger) » (v. production n° 1) ; qu'en statuant ainsi, sans répondre au moyen développé sur ce point par l'exposant, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 5°/ ALORS QUE la preuve de la minorité peut être rapportée, par le demandeur à une mesure de protection de l'enfance, par tous moyens ; que pour dénier toute force probante à la carte consulaire produite par M. Y... T..., indiquant qu'il était né le [...] , et dont l'authenticité n'était pas discutée, la Cour d'appel a cru pouvoir retenir que ce document « n'a pour seul but que de faire connaître ses nationaux à la représentation consulaire en France de l'Etat étranger dont ils relèvent » et qu'il « fait simplement foi de la nationalité guinéenne de son détenteur, mais ne constitue pas un acte d'état civil pouvant bénéficier de la présomption de l'article 47 du code civil » (v. arrêt, p. 4§3) ; qu'en exigeant ainsi que la preuve de la minorité soit rapportée par un acte d'état civil et en excluant en conséquence, tout autre mode de preuve tendant à justifier l'âge du demandeur aux mesures de protection, la Cour d'appel a violé l'article 375 du code civil, ensemble l'article 9 du code de procédure civile ; 6°/ ALORS QUE en toutes hypothèses, les examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l'âge ne peuvent être réalisés que sur décision de l'autorité judiciaire et après recueil de l'accord de l'intéressé, en l'absence de documents d'identité valables et lorsque l'âge allégué n'est pas vraisemblable ; qu'en conséquence, même à considérer que l'ensemble des documents produits par l'exposant n'étaient pas de nature à établir son âge, la Cour d'appel n'en devait pas moins, pour ordonner une expertise tendant à lui faire subir un examen radiologique osseux, justifier sa décision par des considérations de nature à démontrer que l'âge allégué par l'exposant ne pouvait correspondre à la réalité ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a cru suffisant de relever que les documents produits et l'entretien d'évaluation étaient « insuffisants en eux-mêmes pour déterminer si M... F... U... est mineur » ; qu'en statuant ainsi, sans vérifier, comme elle y était tenue, si l'âge allégué par l'exposant était ou non vraisemblable, la Cour d'appel a violé l'article 388 du code civil. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué n° 20/08 du 21 février 2020 d'avoir renvoyé l'affaire à l'audience de la cour du 26 juin 2020 et d'avoir rejeté la demande de placement provisoire de M... F... U... dans l'attente de cette audience ; AUX MOTIFS QUE « M... Y... T... indique être né le [...] à Conakry (Guinée) d'G... T... et D... T... ; Que pour un plus ample exposé de sa situation, il convient de se référer à l'arrêt avant dire droit rendu par la chambre spéciale des mineurs de la Cour d'appel de Poitiers le 8 novembre 2019 ; Que cet arrêt a notamment ordonné une expertise médicale afin de déterminer l'âge de l'intéressé avec renvoi de l'affaire après dépôt du rapport d'expertise à l'audience de la cour du vendredi 14 février 2020 à 11h00 ; Qu'à cette audience, le conseil de M... F... U... a informé la cour de ce qu'en raison d'une panne de scanner, l'examen osseux prévu avait été reporté ; qu'il a sollicité le renvoi de l'affaire et le placement de son client à l'aide sociale à l'enfance dans l'attente de la nouvelle audience à tenir après dépôt du rapport d'expertise, faisant état des problèmes de santé de M... F... U... et de sa situation d'isolement sans représentant légal sur le territoire français ; Que le département de la Charente Maritime, par le canal de son avocat, s'est opposé à la demande de placement ; Qu'il est justifié d'ordonner le renvoi de l'affaire, dans l'attente du dépôt du rapport de l'expertise ordonnée par la cour ; Que la preuve de la minorité de M... Y... n'étant pas en l'état rapportée, il n'y a pas lieu d'ordonner son placement à l'aide sociale à l'enfance dans l'attente de l'audience qui suivra le dépôt du rapport » ; ALORS QUE par application de l'article 625 du Code de procédure civile, la cassation entraine, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation à intervenir de l'arrêt avant dire droit n° 19/116 rendu par la Cour d'appel de Poitiers le 8 novembre 2019, ayant ordonné une expertise médicale aux fins de déterminer l'âge de l'exposant, entrainera, par voie de conséquence, celle de l'arrêt n° 20/08 rendu par la même Cour le 21 février 2020, en ce qu'il a renvoyé l'affaire, dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise ordonnée, à une audience ultérieure et rejeté la demande de placement provisoire de l'exposant dans l'attente de cette audience. TROISIEME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué n° 20/62 du 16 juillet 2020 d'avoir confirmé le jugement du Tribunal pour enfants de Saintes rendu le 15 janvier 2019 ayant dit n'y avoir lieu d'instaurer une mesure d'assistance éducative au profit de l'exposant ; AUX MOTIFS PROPRES QUE « la procédure d'assistance éducative est applicable à tous les mineurs non émancipés qui se trouvent sur le territoire français, quelle que soit leur nationalité, si leur santé, leur moralité, leur sécurité sont en danger ou leurs conditions d'éducation ou de leur développement physique, intellectuel et social sont gravement compromises ; qu'il appartient à la personne qui demande à bénéficier d'une protection dans le cadre de l'assistance éducative de justifier de sa minorité ; Qu'aux termes de l'article 47 du code civil, tout acte de l'état civil des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes en usage dans ce pays, fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenues, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent le cas échéant après toutes vérifications utiles que cet acte est irrégulier ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ; Que les mentions présentes sur un acte d'état civile en exécution d'une décision de justice ne font foi au sens de l'article 47 du code civil qu'à la condition que la décision de justice soit produite, ce qui permet au surplus de vérifier sa régularité internationale ; qu'en l'absence de cette décision, les mentions présentes sur l'acte ne peuvent faire foi ; Qu'en l'espèce, M... F... U... a produit un jugement supplétif d'acte de naissance qui ne remplit pas les conditions de régularité internationale pour sa reconnaissance en France, à défaut de motivation ; qu'il ne peut donc pas produire d'effet ; que par conséquent, il ne saurait non plus être accordé aucune valeur probante à l'acte de retranscription ; que par ailleurs, on ne peut que s'étonner de l'existence de ce jugement supplétif alors qu'un jugement supplétif d'acte d'état civil ne peut être rendu qu'en cas de perte, de destruction des registres ou lorsque la déclaration n'a pu être effectuée dans les délais prescrits, alors qu'aucune de ces hypothèses n'existe, puisque M... F... U... a produit un acte de naissance ; Que cette situation irrégulière prive de toute valeur probante l'acte de naissance de l'intéressé ; Quant à la carte consulaire, elle n'a pour seul but que de faire connaître ses nationaux à la représentation consulaire en France de l'Etat étranger dont ils relèvent ; que ce document fait simplement foi de la nationalité guinéenne de son détenteur, mais ne constitue pas un acte d'état civil pouvant bénéficier de la présomption de l'article 47 du code civil ; Qu'aucun des documents produits ne peut donc permettre à M... F... U... de justifier de sa minorité, quand bien même certains présentent des signes de régularité formelle ; Que la cour dispose donc pour apprécier l'âge de M... F... U... de l'évaluation sociale établie par les services de l'aide sociale à l'enfance qui a exclu sa minorité et de l'examen osseux qui a conclu à un âge nettement supérieur à 18 ans ; Que compte tenu de ces éléments, il convient de considérer que M... F... U... n'est pas mineur et de lui refuser de ce fait la protection prévue par les articles 375 et suivants du code civil » ; ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « par requête en date du 14 novembre 2018, Monsieur M... F... U... a saisi le juge des enfants dans le but de bénéficier de l'instauration d'une mesure d'assistance éducative à son profit ; Qu'il déclare être né le [...] à Conakry et avoir quitté ce pays avec un oncle maternel qui ''vendait des bonbons'' ; Qu'il ressort de la procédure qu'il a sollicité son admission à l'Aide sociale à l'enfance en qualité de mineur non accompagné le 31 juillet 2018, l'évaluation du service n'ayant pas conclu à sa minorité ; Qu'à l'audience, Monsieur a produit un acte de naissance et a précisé être pris en charge en famille d'accueil mais devoir régulièrement changer de famille d'accueil ; Que cet acte a fait l'objet d'une analyse technique qui a conclu que le document n'est pas probant car il manque la légalisation du Ministère des affaires étrangères ; Que les services de la Préfecture rappellent que tous les actes d'état civil devant produire un effet de droit à l'extérieur du pays doivent revêtir un ''pavé de légalisation'' apposé par les personnels du MAEGE (Ministère des Affaires étrangères et des Guinéens à l'étranger) ; Qu'ils relèvent également que Monsieur T... n'est pas en mesure de produire un document d'identité avec sa photographie, et notamment un passeport guinéen revêtu d'un visa consulaire, condition normalement exigée des ressortissants guinéens pour se rendre en France ; Qu'en outre, comme le relève le service de l'Aide sociale à l'Enfance, sur le plan physique, son visage ne présente pas de signes pubertaires ; Qu'il a déclaré au représentant de l'Aide sociale à l'Enfance chargé de l'évaluation de sa situation, qu'il aurait été scolarisé jusqu'en 9ème année ; Qu'il est précisé dans la requête qu'il aurait arrêté l'école courant 2017 ; Qu'à l'audience, il a affirmé qu'il était alors âgé de 13 ans et demis ; Qu'or, comme l'observe le service de l'Aide sociale à l'enfance, l'âge habituel pour atteindre cette classe en Guinée est quinze ans ; Qu'il n'a pas été en mesure d'expliquer comment son oncle a été en mesure de financer leur voyage jusqu'en Espagne ; Qu'au regard de ces éléments, Monsieur T... n'apparaît pas être mineur ; Qu'en conséquence, il n'y a pas lieu d'ordonner de mesure d'assistance éducative à son profit » ; 1°/ ALORS QUE par application de l'article 625 du Code de procédure civile, la cassation entraine, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation à intervenir de l'arrêt avant dire droit n° 19/116 rendu par la Cour d'appel de Poitiers le 8 novembre 2019, ayant ordonné une expertise médicale aux fins de déterminer l'âge de l'exposant, entrainera, par voie de conséquence, celle de l'arrêt n° 20/62 rendu par la même Cour le 16 juillet 2020, en ce que, prenant appui sur les conclusions de l'expertise médicale effectuée, il a jugé que l'exposant n'était pas mineur ; 2°/ ALORS QUE, en toutes hypothèses, le juge ne peut motiver sa décision par simple voie d'affirmation ; qu'en l'espèce, pour juger que les documents d'état civil produits par M. Y... T... n'étaient pas réguliers et notamment le jugement supplétif d'acte de naissance n° 3436 du 4 février 2019 (v. production n° 4), la Cour d'appel a cru pouvoir relever que ce jugement « ne remplit pas les conditions de régularité internationale pour sa reconnaissance en France, à défaut de motivation » (v. arrêt p. 4§7) ; qu'en affirmant péremptoirement que le jugement supplétif litigieux n'était pas motivé, cependant que la décision guinéenne s'est fondée, pour dire que l'exposant était né le [...] à Conakry, sur les témoignages concordants du père de l'exposant et de son épouse, et ce, conformément aux dispositions de l'article 193 du code civil guinéen, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 3°/ ALORS QUE l'appréciation de la régularité d'un acte de l'état civil étranger par le juge du for doit se faire selon les prescriptions de la loi de l'autorité ayant dressé l'acte ; que pour dénier tout effet au jugement supplétif d'acte de naissance et à l'acte de retranscription en découlant, la Cour d'appel a cru pouvoir relever qu' « on ne peut que s'étonner de l'existence de ce jugement supplétif alors qu'un jugement supplétif d'acte d'état civil ne peut être rendu qu'en cas de perte, de destruction des registres ou lorsque la déclaration n'a pu être effectuée dans les délais prescrits, alors qu'aucune des hypothèses n'existe, puisque M... F... U... a produit un acte de naissance » (v. arrêt p. 4§7) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était tenue, les dispositions du droit guinéen soumettant l'existence de jugement supplétif d'acte de naissance aux conditions par elle énoncées, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 47 du code civil ; 4°/ ALORS QUE subsidiairement, même à considérer qu'au regard du droit guinéen seul applicable, le jugement supplétif d'acte de naissance produit par l'exposant ne pouvait exister, la Cour d'appel ne pouvait se dispenser d'analyser, fût-ce sommairement, l'acte de naissance soumis à son examen ; qu'en se bornant à affirmer que la prétendue irrégularité du jugement supplétif privait « de toute valeur probante l'acte de naissance de l'intéressé » (v. arrêt, p. 4§8), sans procéder, comme elle y était tenue, à la moindre analyse de cet acte, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 47 du code civil ; 5°/ ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, l'exposant faisait valoir dans ses écritures développées oralement à l'audience, que l'acte de naissance produit aux fins d'établir sa minorité devait bénéficier de la présomption de force probante posée par l'article 47 du code civil, nonobstant le défaut de légalisation de cet acte dès lors que « la force probante reconnue par l'article 47 du code civil n'est pas soumise à la légalisation de l'acte de l'état civil », cette formalité administrative n'étant nécessaire que pour faire produire à l'acte les effets substantiels qui lui sont attachés (v. production n° 2, p. 2) ; que pour dénier toute force probante à l'acte de naissance litigieux, la Cour d'appel, par motifs adoptés, a cru pouvoir se contenter de relever le défaut de légalisation du document par le Ministère des affaires étrangères là où « les services de la Préfecture rappellent que tous les actes d'état civil devant produire un effet de droit à l'extérieur du pays doivent revêtir un ''pavé de légalisation'' apposé par les personnels du MAEGE (Ministère des Affaires étrangères et des Guinéens à l'étranger) » (v. production n° 1) ; qu'en statuant ainsi, sans répondre au moyen développé sur ce point par l'exposant, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 6°/ ALORS QUE la preuve de la minorité peut être rapportée, par le demandeur à une mesure de protection de l'enfance, par tous moyens ; que pour dénier toute force probante à la carte consulaire produite par M. Y... T..., indiquant qu'il était né le [...] , et dont l'authenticité n'était pas discutée, la Cour d'appel a cru pouvoir retenir que ce document « n'a pour seul but que de faire connaître ses nationaux à la représentation consulaire en France de l'Etat étranger dont ils relèvent » et qu'il « fait simplement foi de la nationalité guinéenne de son détenteur, mais ne constitue pas un acte d'état civil pouvant bénéficier de la présomption de l'article 47 du code civil » (v. arrêt, p. 4§9) ; qu'en exigeant ainsi que la preuve de la minorité soit rapportée par un acte d'état civil et en excluant en conséquence tout autre mode de preuve tendant à justifier l'âge du demandeur aux mesures de protection, la Cour d'appel a violé l'article 375 du code civil, ensemble l'article 9 du code de procédure civile ; 7°/ ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, l'exposant faisait valoir dans ses écritures, développées oralement à l'audience, le manque de fiabilité de l'expertise pratiquée pour déterminer son âge ; qu'à cet égard il invoquait, documentation scientifique à l'appui, que l'échantillon d'individus ayant servi à constituer le référentiel d'analyse s'agissant des radiographies du poignet gauche effectuées selon la méthode de Greulich et Pyle et du scanner des clavicules effectué selon la méthode Schmeling, n'était pas en adéquation avec une personne ayant ses caractéristiques ethniques et sociales (v. production n° 2, p. 5-6) ; qu'en se bornant à relever que pour apprécier l'âge de M. Y... T..., elle disposait, en l'absence de documents probants, « de l'évaluation sociale établie par les services de l'aide sociale à l'enfance qui a exclu sa minorité et de l'examen osseux qui a conclu à un âge nettement supérieur à 18 ans » (v. arrêt p. 4 dernier paragraphe), sans s'expliquer, comme elle y était invitée, sur la fiabilité des méthodes utilisées par l'expert aux fins de déterminer l'âge de l'exposant, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. 8°/ ALORS QUE pour juger que la minorité de l'exposant n'était pas établie, la Cour d'appel a, par motifs adoptés, repris les éléments retenus par l'évaluateur social, selon lesquels « sur le plan physique, son visage ne présente pas de signes pubertaires », « il aurait été scolarisé jusqu'en 9ème année » et « aurait arrêté l'école courant 2017 », alors « âgé de 13 et demi » cependant que « l'âge habituel pour atteindre cette classe en Guinée est quinze ans », ou encore qu'il « n'a pas été en mesure d'expliquer comment son oncle a été en mesure de financer leur voyage jusqu'en Espagne » (v. production n° 1) ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à caractériser une incohérence entre l'âge allégué par l'exposant et son âge réel, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 375 et 388 du code civil.