Cour de cassation, Chambre commerciale, financière et économique, 3 octobre 2000, 97-18.533

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2000-10-03
Cour d'appel de Rennes (2e chambre)
1997-05-21

Texte intégral

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Sur le pourvoi formé par : 1 / la société Y... Martin, société de fait, dont le siège est ..., 2 / M. X..., agissant personnellement et comme liquidateur amiable de la société de fait Y... X..., domicilié ..., 3 / M. Y..., agissant personnellement et comme liquidateur amiable de la société de fait Y... X..., domicilié ..., en cassation d'un arrêt rendu le 21 mai 1997 par la cour d'appel de Rennes (2e chambre), au profit : 1 / de la société Garage du Grand Launay, société anonyme, dont le siège est ..., 2 / de la compagnie Groupama Bretagne, dont le siège est ..., 3 / de la société Grove France, société anonyme, dont le siège est ..., 4 / de la société Inter Appro, société anonyme, le siège est ..., défenderesses à la cassation ; La société Garage du Grand Launay et le Groupama Bretagne, défendeurs au pourvoi principal, ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt ; Les demandeurs au pourvoi principal, invoquent à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 6 juin 2000, où étaient présents : M. Dumas, président, Mme Vigneron, conseiller rapporteur, M. Tricot, conseiller, M. Feuillard, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Vigneron, conseiller, les observations de la SCP Le Bret-Desaché et Laugier, avocat de la société Y... Martin et de MM. X... et Y... , ès qualités, de la SCP Coutard et Mayer, avocat de la société Grove France, de la SCP Vincent et Ohl, avocat de la société Garage du Grand Launay et de la compagnie Groupama Bretagne, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Inter Appro, les conclusions de M. Feuillard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Donne acte à MM. Y... et X... de leur reprise d'instance, en qualité de liquidateurs amiables de la société Y... Martin ; Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Y... Martin, M. X... et M. Y..., que sur le pourvoi incident et provoqué de la société Garage du Grand de Launay et la compagnie Groupama Bretagne :

Attendu, selon l'arrêt attaqué

(Rennes, 21 mai 1997, n 495), rendu en matière de référé, que le 5 juillet 1993, à la demande de la société Y... Martin, la société Garage du Grand Launay (le garage) a réparé un camion-grue en installant un nouveau pont arrière, fourni par la société Grove France ; que le camion étant tombé en panne le 4 mars 1995, la société Y... Martin a assigné le garage et son assureur, la compagnie Groupama Bretagne, en réparation de son préjudice ; que le juge des référés s'étant déclaré incompétent, la société Y... Martin a fait appel de l'ordonnance ; que, par arrêt du 13 mars 1996, la cour d'appel a notamment condamné le garage et son assureur à faire exécuter les travaux de remise en état du camion dans un certain délai et sous astreinte ; que ces travaux n'ayant pas été exécutés, la société Y... Martin a demandé, à la cour d'appel, la condamnation du garage et de son assureur à lui payer des dommages-intérêts ;

Sur le moyen

unique du pourvoi principal, pris en ses deux branches :

Attendu que la société

Y... Martin, ainsi que MM. X... et Y... , agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité de liquidateurs amiables de cette société, reprochent à l'arrêt d'avoir accueilli partiellement la demande d'indemnisation de la société Y... Martin, alors, selon le pourvoi, d'une part, que, dans ses conclusions du 13 février 1996, délaissées, la société Y... Martin soulignait, s'agissant de la somme de 7 246,52 francs, qu'elle avait fait l'objet d'un "avoir" du garage, qui avait ainsi admis le principe de l'inclusion des pièces dans les réparations à sa charge, sans préfinancement ; qu'en ne répondant pas sur ce point précis de nature à écarter toute plus-value à la charge de la société Y... Martin, créancière de l'obligation de résultat pesant sur le garage, l'arrêt a, faute de satisfaire à l'existence légale de motivation, entaché sa décision d'un défaut de motifs en violation des articles 455 et 458 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, d'autre part, que le principe de la réparation intégrale implique que la victime est en droit d'exiger la remise en état de son véhicule, sans avoir à supporter un coefficient de vétusté pour les pièces remplacées ni à participer au financement des travaux incombant au débiteur de l'obligation de résultat ; qu'à supposer que les arbres de roues remplacés aient été usagés et non pas seulement détériorés par le pont provenant d'une pièce de récupération, indûment facturée par le garage au prix du neuf, cette circonstance ne pouvait générer pour la société Y... Martin, en droit d'obtenir une complète remise en état du camion-grue, une quelconque obligation de participer au financement des pièces utiles à la complète réparation ; qu'ainsi l'ancienneté ou la vétusté du véhicule restait sans lien causal avec la panne provoquée par la défectuosité de la réparation initiale et qu'en mettant à la charge de la société Y... Martin une partie du temps d'immobilisation, exonérant d'autant le garage des conséquences du manquement à son obligation de résultat, l'arrêt attaqué a violé le principe du droit à réparation intégrale et les articles 1147 et 1149 du Code civil ;

Mais attendu

, d'une part, que la cour d'appel n'était pas tenue de répondre aux conclusions de la société Y... Martin faisant état d'un avoir de 7 256,52 francs, qui aurait été émis à son profit par le garage dès lors qu'il résulte des productions que ce document n'est pas un avoir mais une facture du garage adressée à la société Y... X... ; Attendu, d'autre part, qu'après avoir relevé que le garage avait installé un pont défectueux sur le camion, l'arrêt retient qu'il n'est pas établi que ce pont soit à l'origine de la défaillance des arbres de roue, que la société Y... Martin a accepté le remplacement de ces pièces le 8 novembre 1993, mais qu'en raison de la difficulté de trouver des arbres de roue pour le camion d'un modèle ancien, la réparation n'a pu être effectuée que le 24 février suivant ; qu'en l'état de ces constatations et appréciation, la cour d'appel a pu en déduire, que le garage était partiellement responsable du préjudice subi par la société Y... Martin, du fait de l'immobilisation du camion et a ainsi légalement justifié sa décision ; D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le premier moyen

du pourvoi incident et provoqué du garage et de son assureur pris en ses deux branches :

Attendu que le garage et son assureur reprochent à l'arrêt

de les avoir condamnés à payer la somme de 67 839,94 francs à la société Y... Martin, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le juge ne doit pas méconnaître l'objet du litige ; que la société Y... Martin sollicitait la condamnation du Garage au titre du coût des travaux restés à sa charge, soit 7 246,52 francs, et du préjudice résultant des six mois d'immobilisation du camion, soit 106 373 francs ; que la cour d'appel, qui a alloué à la société Y... Martin une indemnité prenant en compte les frais de réparation, pièces et main d'oeuvre, qu'elle n'avait pas supportés et dont elle ne réclamait donc pas le remboursement, à concurrence de 17 117,29 francs, a violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, d'autre part, que la réparation du préjudice doit être intégrale et ne saurait l'excéder ; que la cour d'appel, qui a alloué à la société Y... Martin au titre d'indemnisation des frais de remise, en état de son véhicule des sommes correspondant au coût de pièces et de main-d'oeuvre qu'elle n'avait pas supporté, a violé les articles 1147 et 1149 du Code civil ;

Mais attendu

que dès lors que le garage et son assureur reprochent à l'arrêt d'avoir statué sur des choses non demandées, il leur appartenait de présenter requête à la cour d'appel, dans les conditions et délais prévus aux articles 463 et 464 du nouveau Code de procédure civile ; que le moyen est donc irrecevable ;

Et sur le second moyen

du même pourvoi : Attendu que le garage et son assureur reprochent encore à l'arrêt d'avoir condamné la société Grove et la société Inter Appro à garantir, chacune, le garage d'une partie de la condamnation mise à sa charge au titre de l'immobilisation du véhicule, à l'exclusion de celle relative au montant des travaux de remise en état de ce véhicule, alors, selon le pourvoi, que le vendeur professionnel est tenu de garantir le garagiste condamné à indemniser son client du préjudice, résultant de l'installation d'une pièce dont le garagiste ignorait le défaut ; que la cour d'appel, qui a limité la garantie des fournisseurs d'une pièce défectueuse à l'égard du garagiste, à une partie des frais d'immobilisation consécutifs à la panne du véhicule, en laissant à la charge du garagiste les frais de remise en état, comprenant les pièces et la main-d'oeuvre, et les frais de remorquage, a violé les articles 1147 et 1149 et 1645 du Code civil ;

Mais attendu

que le bien-fondé de ce moyen ne peut être apprécié qu'en fonction des sommes dues au titre des travaux exposés par la société Y... Martin ; que le moyen est, par conséquent, irrecevable, en l'état du litige ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE les pourvois tant principal qu'incident ; Condamne la société Y... Martin, MM. X... et Y..., la société Garage du Grand Launay et la compagnie Groupama Bretagne aux dépens ; Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de la société Garage du Grand Launay, de la compagnie Groupama Bretagne, de la société Grove France et de la société Inter Appro ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois octobre deux mille.