AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Sur le pourvoi formé par la Société nationale des chemins de fer français (SNCF), dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 24 mai 1994 par la cour d'appel de Riom (chambre sociale), au profit de M. André X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
M. X... a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 16 juillet 1996, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, Mme Trassoudaine-Verger, conseiller référendaire rapporteur, MM. Waquet, Ferrieu, Monboisse, Mme Ridé, MM. Merlin, Desjardins, Finance, conseillers, MM. Frouin, Boinot, Mme Bourgeot, MM. Richard de la Tour, Soury, conseillers référendaires, M. Chauvy, avocat général, Mme Marcadeux, greffier de chambre;
Sur le rapport de Mme Trassoudaine-Verger, conseiller référendaire, les observations de Me Odent, avocat de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF), les conclusions de M. Chauvy, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Sur la recevabilité des mémoires en défense soulevée d'office :
Attendu que le mémoire ampliatif de la SNCF ayant été notifié au salarié le 25 octobre 1994, les mémoires en défense notifiés postérieurement au délai de trois mois prévu à l'article
989 du nouveau Code de procédure civile sont irrecevables;
Sur la demande de sursis à statuer :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande ;
Sur le moyen
unique du pourvoi principal :
Vu
les lois du 21 juillet 1909 et 11 juillet 1953, les décrets des 1er juin 1950, 9 août 1953, 9 janvier 1954 et la loi du 30 juillet 1987;
Attendu que la loi du 30 juillet 1987 n'est pas applicable aux agents SNCF dont la rupture du contrat pour mise à la retraite est régie par le statut des relations collectives entre la SNCF et son personnel, élaboré conformément au décret du 1er juin 1950 et prononcé dans les conditions prévues par le décret du 9 janvier 1954 pris pour l'application du décret du 9 août 1953 relatif au régime des personnels de l'Etat et des services publics, lequel est intervenu pour l'application des lois du 11 juillet 1953 portant redressement économique et financier et du 21 juillet 1909 relative aux conditions de retraite des personnels des grands réseaux de chemins de fer d'intérêt général;
Attendu, selon l'arrêt attaqué
, que M. X..., engagé le 14 avril 1959, a été mis à la retraite à compter du 31 décembre 1992, à l'âge de 56 ans, alors qu'il totalisait 33 ans et 9 mois d'ancienneté; que revendiquant l'application de l'article
L. 122-14-13 du Code du travail, il a saisi le conseil de prud'hommes de demandes en paiement d'une indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;
Attendu que, pour accueillir la demande du salarié, la cour d'appel a énoncé que l'article
L. 122-14-13 du Code du travail n'établit aucune distinction suivant qu'il s'agit d'un salarié du secteur privé ou bénéficiant d'un statut particulier au sein d'une entreprise publique; que ce texte vise au contraire et de façon expresse "tout salarié"; qu'il n'appartient pas au juge de distinguer là où la loi ne distingue pas; qu'il est de principe que les dispositions du Code du travail sont applicables aux salariés des entreprises publiques quant elles sont plus favorables que les règles statutaires, quand bien même ces dernières auraient été agréées par l'autorité administrative; qu'en l'espèce, si les règles statutaires ont bien été respectées, il n'en est pas de même de celles de l'article
L. 122-14-13 du Code du travail;
Qu'en statuant ainsi
, la cour d'appel a violé les textes susvisés;
PAR CES MOTIFS
, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 mai 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Riom; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon;
Condamne M. X..., envers la Société nationale des chemins de fer français (SNCF), aux dépens;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux octobre mil neuf cent quatre-vingt-seize.