Cour d'appel de Bordeaux, 5 mars 2012, 2011/00820

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
  • Numéro de pourvoi :
    2011/00820
  • Domaine de propriété intellectuelle : MARQUE
  • Marques : COGNAC FLEURY ; FLEURY WINES
  • Classification pour les marques : CL33
  • Numéros d'enregistrement : 3731329 ; 3603741
  • Parties : F (Olivier) ; UNION VINICOLE DE GASCOGNE C. F (Jean) ; DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L' INPI
  • Décision précédente :INPI, 10 janvier 2011
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Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Bordeaux
2012-03-05
INPI
2011-01-10

Texte intégral

COUR D'APPEL DE BORDEAUXARRÊT DU : 05 MARS 2012 PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION AN° de rôle : 11/00820 Décision déférée à la cour : décision rendue le 10 janvier 2011 par le Directeur Général de l'Institut National de la Propriété Industrielle de PARIS (N° OPP 10-3100) suivant déclaration de recours en date du 08 février 2011 DEMANDEURS :Olivier Jacques M Fde nationalité française profession : négociant en vins SOCIETE UNION VINICOLE DE GASCOGNE, agissant en la personne de son gérant, Olivier F,domicilié en cette qualité au siège sis[...] -33640 BEAUTIRANreprésentés par la SCP TAILLARD Annie JANOUEIX Valérie, et assistés de Maître Vincent POLLARD substituant Maître Hubert B, avocats au barreau de BORDEAUX DÉFENDEURS :Jean Fassisté de la SELARL MAGRET- JANOUEIX, avocats au barreau de LIBOURNE DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L'INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE - INPI, pris en la personne de son représentant légaldomicilié en cette qualité au siège social sis[...]75800 PARISreprésenté par Mathilde JUNAGADE, chargée de mission munie d'un pouvoir régulier COMPOSITION DE LA COUR :L'affaire a été débattue le 16 janvier 2012 en audience publique, devant la cour composée de :Marie-Paule LAFON, président,Jean-Claude SABRON, conseiller,Thierry LIPPMANN, conseiller,qui en ont délibéré. Greffier lors des débats : Annick B Ministère Public :L'affaire a été communiquée au Ministère Public qui a fait connaître son avis.

ARRÊT

: - contradictoire- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile. FAITS ET PROCEDURE ANTERIEURE : La société Union Vinicole de Gascogne a déposé le 19 avril 2010 la demande d'enregistrement n°10 3 731 329 portant sur le sign e verbal Cognac FLEURY. Le 30 juillet 2010, M Jean F a formé opposition à l'enregistrement de cette marque sur la base de la marque complexe FLEURY Wines déposée le 9 octobre 2008 et enregistrée sous le numéro 3 603 741. Dans l'acte d'opposition, la société opposante faisait valoir qu'aucune observation en réponse n'étant parvenue à l'Institut de la propriété industrielle dans le délai imparti, il y a lieu de statuer sur l'opposition. Dans sa décision en date du 10 janvier 2011, le Directeur de l'INPI a décidé que :- l'opposition n° 10 3100 était justifiée- la demande d'enregistrement devait être rejetée. PROCEDURE DEVANT LA COUR D'APPEL : Par déclaration en date du 8 févier 2011, la société Union Vinicole de Gascogne et M Olivier F ont interjeté appel de ladite décision. Aux termes de leur mémoire en date du 28 décembre 2011, la société Union Vinicole de Gascogne et M Olivier F font valoir devant la cour d'appel que :- faire droit à la demande de l'opposant de rejeter l'ensemble des pièces communiquées dans le cadre de la présente procédure en annulation serait contraire aux principes élémentaires du contradictoire et du respect des droits de la défense - au titre de la comparaison des produits qui s'impose, il doit être relevé que le vin et le cognac ne sont pas des produits similaires susceptible de favoriser dans l'esprit du public une origine ou une consommation communes dés lors au surplus qu'ils sont issus de procédés de fabrication différents, relèvent d'un régime fiscal et douanier différent de telle sorte que tout risque d'association de la marque Cognac FLEURY avec la marque FLEURY Wines est exclue pour lesdits produits - en ce qui concerne la comparaison des signes il convient de considérer que la seule présence d'un élément verbal commun aux deux marques opposées est insuffisante pour démontrer le risque de confusion dans l'esprit du public et ce notamment lorsque l'élément verbal considéré constitue un patronyme reconnu par un public avisé mais aussi dés lors que le terme commun qui n'est ni positionné, ni utilisé de la même façon ne saurait engendrer à lui seul un risque de confusion chez le consommateur de référence, les marques n'ayant pas par ailleurs la même consonance et ne présentant pas d'identité de signes au plan visuel, phonétique et conceptuel - il sera donc prononcé l'annulation de la décision du Directeur de l'INPI du 10 janvier 2011 portant sur l'opposition et M F sera condamné à lui payer la somme de 5000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile. Dans son mémoire en date du 1ier septembre 2011, M Jean F réplique que :- que le recours déposé par M Jean F est irrecevable dés lors que la marque Cognac FLEURY a seulement été déposée par la société Union Vinicole de Gascogne et non conjointement avec M Olivier F et que seul cette dernière pouvait former opposition - par ailleurs la société Union Vinicole de Gascogne n'ayant pas formulé d'observations en réponse à l'opposition émanant de M Jean F et n'ayant pas non plus communiqué de pièces dans le cadre de cette procédure, elle ne peut communiquer des pièces au stade de l'appel - également il doit être souligné que les produits en cause ont la même nature, les mêmes ingrédients, la même fonction, les mêmes circuits de distribution et qu'ils sont en outre complémentaires - enfin dans les deux marques, le terme F est distinctif et constitue l'élément dominant de chaque marque de telle sorte qu'il en ressort une impression d'ensemble commune entre ces deux ces deux signes que ce soit sur le plan visuel, sonore ou intellectuel - la décision du Directeur général de l'INPI sera donc confirmée - il lui sera alloué la somme de 3000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile. L'INPI indique que :- dans le cadre du recours en annulation il doit être relevé que l'exposé des moyens de la requérante en date du 8 mars 2011 ne faisait état d'aucun moyen relatif au défaut de motivation de la décision qui constitue donc un moyen nouveau qui doit être déclaré irrecevable comme tardif - en tout état de cause sa décision apparaît suffisamment motivée quant à la comparaison des produits dés lors qu'ont été adoptés les arguments de l'opposante qui démontrait la similarité évidente des produits - par ailleurs dans le cadre du recours l'INPI ne peut être considérée comme une partie, son rôle consiste uniquement à présenter des observations pour expliciter sa décision et donner son avis sur les moyens et arguments développés par les parties - s'il a relevé l'existence d'un lien d'identité entre les produits c'est uniquement en réponse à l'argumentation de la requérante elle même qui a invoqué le fait que les produits désignés n'étaient 'ni identiques, ni similaires'. Le Parquet Général auquel le dossier a été communiqué a apposé une mention de visa sur le dossier le 27 juin 2011.

MOTIFS

: - Sur la régularité de la procédure : Il apparaît que M Jean F a adressé un mémoire à la cour d'appel le 13 janvier 2012 dans des délais qui n'ont pas permis au greffe d'en opérer la notification compte tenu de la fixation du dossier à l'audience du 16 janvier 2012. Toutefois les parties à la procédure et l'INPI ont expressément accepté ainsi que cela a été acté au plumitif que ce dernier puisse être admis. Il leur en a été donné acte. - Sur la recevabilité du recours déposé par M Olivier F : Il est constant que la marque Cognac FLEURY a été déposée exclusivement par l'Union Vinicole de Gascogne qui a d'ailleurs seule été partie à la procédure d'opposition devant M l de l'INPI. En conséquence, c'est à bon droit que M Jean F, dans le cadre de ses observations se prévaut du défaut d'intérêt à agir de M Olivier F qui ne démontre jouir d'aucun droit sur la marque précitée. M Olivier F sera donc déclaré irrecevable à agir. - Sur l 'examen du recours de la société Union Vinicole de Gascogne : En application de l'article R 411 - 21 du code de la propriété intellectuelle applicable à la présente procédure, l'ensemble des moyens invoqués au soutien d'un recours doit être déposé dans le mois qui suit la déclaration de recours. En l'espèce il apparaît que dans l'exposé des moyens qu'elle a déposé devant la cour le 8 mars 2011, la requérante se contentait d'argumenter au titre de la similarité retenue par l'INPI entre les produits et ce n'est que dans son mémoire déposé le 28 décembre 2011 qu'elle a pour la première fois invoqué le moyen tiré du défaut de motivation de la décision de l'INPI. Il apparaît donc que c'est à bon droit qu'il est invoqué l'irrecevabilité de ce moyen comme soulevé hors délais. En tout état de cause le grief d'absence de motivation de la décision rendue le 10 janvier 2011 par le Directeur de l'INPI n'est pas fondé, cette décision ayant été prise sous le visa des textes et articles du code de la propriété intellectuelle applicables, après un examen des faits de l'espèce au regard de ceux ci et par une comparaison des deux signes en présence ainsi que des produits et services concernés en retenant leur nature similaire et en l'absence d'observation de la société Union Vinicole de Gascogne devant lui alors qu'elle avait été expressément invitée à les fournir. Sur le fond, il sera relevé que les marques font l'objet en application de la législation en vigueur d'une protection non seulement pour les produits identiques à ceux désignés dans le cadre du dépôt mais également aux produits similaires envisagés comme ceux qui, par leur nature leur fonction, leur destination les circuits de distributions qu'ils empruntent ou leur communauté de clientèle peuvent être attribués par un consommateur moyennement avisé à une même origine économique. Il ne peut être contesté que 'l'eau de vie bénéficiant de l'appellation d'origine contrôlée Cognac' mentionnée dans la demande d'enregistrement de la marque, comme les divers vins mentionnés dans la marque antérieure constituent des boissons alcoolisées issues du raisin commercialisées dans les mêmes réseaux de détaillants de vins et spiritueux indépendants ou rayons de grandes surfaces et que de ce fait il y a lieu de retenir leur grande similarité. Le cognac se définit même comme une eau de vie obtenue par distillation de vin blanc. Par ailleurs l'examen comparatif des signes des marques en présence révèle qu'ils sont composés de la même dénomination distinctive 'FLEURY' qui présente toutes les chances d'être perçue par le consommateur comme un patronyme et ce d'autant plus qu'elle est associée dans les deux marques à un terme non distinctif désignant les produits offerts dans lesdites marques soit 'Cognac' pour le signe contesté et 'Wines' pour la marque antérieure dont la consonance anglaise est cependant immédiatement transposable en français. Les structures très voisines de ces marques au plan visuel et phonétique du fait d'une longueur proche et d'un signe distinctif identique jointes à une grande similitude conceptuelle sont de nature à entraîner pour le consommateur la perception de celles ci comme la déclinaison de marques d'un même négociant de vins et spiritueux dénommé F. Cette forte impression de similitude de nature à induire en erreur le consommateur moyennement avisé ne peut être considérée comme gommée par la seule différence tenant à l'inversion du positionnement du terme 'F' qui est insuffisante au regard de la prééminence de ce terme dans les marques. De plus la notoriété du nom F invoquée par la requérante qui n'a pas été établie dés le stade de l'opposition ne pourrait en tout état de cause qu'accroître le risque de confusion. Enfin, le Directeur de l'INPI, même s'il n'est pas partie à la procédure du présent recours a cependant vocation en vertu des textes applicables à être' entendu ' et dispose de la faculté de 'présenter des observations écrites et orales' dans le cadre du dit recours exercé contre sa décision qui revêt un caractère administratif. En conséquence il y a lieu de rejeter comme dépourvu de fondement le présent recours. L'équité commande d'allouer à M Jean F la somme de 1500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

: LA COUR Déclare irrecevable le recours formé par M Olivier F Rejette comme infondé le recours formé par la société Union Vinicole de Gascogne Condamne la société Union Vinicole de Gascogne à payer à M Jean F la somme de 1500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile Dit que la présente décision sera notifiée par les soins du greffe et par lettres recommandées avec avis de réception aux parties ainsi qu'au Directeur Général de l'Institut National de la propriété industrielle.