INPI, 9 mai 2005, 04-1799

Synthèse

  • Juridiction : INPI
  • Numéro de pourvoi :
    04-1799
  • Domaine de propriété intellectuelle : OPPOSITION
  • Marques : LECLERC ; LECLERC MODE LM LA MODE DE TOUS LES JOURS
  • Classification pour les marques : 18
  • Numéros d'enregistrement : 1307790 ; 3277160
  • Parties : ASSOCIATION DES CENTRES DISTRIBUTEURS E. LECLERC / S.A. DES MAGASINS LECLERC

Texte intégral

OPP 04-1799/CBN 09/05/05 DECISION STATUANT SUR UNE OPPOSITION **** LE DIRECTEUR GENERAL DE L'INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE ;

Vu le

Code de la propriété intellectuelle et notamment ses articles L. 411-4, L. 411-5, L. 712-3 à L. 712-5, L. 712-7, L. 713-2, L. 713-3, R. 411-17, R. 712-13 à R. 712-18, R. 712-21, R. 712-26, R. 717-3, R. 717-5 et R. 718-2 à R. 718-4 ; Vu l'arrêté du 31 janvier 1992 relatif aux marques de fabrique, de commerce ou de service; Vu l'arrêté du 12 décembre 2002 relatif aux redevances de procédure perçues par l'Institut national de la propriété industrielle.

I.- FAITS ET PROCEDURE

Monsieur Serge L a déposé le 24 février 2004, la demande d'enregistrement n° 04 3 277 160 portant sur le signe complexe LECLERC MODE. Ce signe est présenté comme destiné à distinguer les produits suivants : "Vêtements, chaussures, chapellerie Chemises, vêtements en cuir ou en imitation cuir, ceintures, foulards Cravates et autres produits textiles non compris dans d'autres classes. Tissus ; couvertures de lit et de table. Tissus à usage textile ; velours ; linge de maison ; produits de ces matières non compris dans d'autres classes. Cuir et imitations du cuir ; peaux d'animaux ; malles et valises ; parapluies, sacs à main, à dos ; colliers ; sacs pour l'emballage (cuir)" (classes 18, 24 et 25). Cette demande a été publiée au Bulletin officiel de la propriété industrielle n°04/15 NL du 9 avril 2004. Suite à une objection de forme, la société déposante a procédé à la régularisation de son dépôt, dont une copie a été transmise à la société opposante, en application du principe du contradictoire. Le 9 juin 2004, l'ASSOCIATION DES CENTRES DISTRIBUTEURS E. LECLERC (A.C.D. Lec) (association loi 1901), représentée par Monsieur Jean-Philippe BRESSON, conseil en propriété industrielle mention "marques, dessins et modèles" du cabinet INLEX CONSEIL, a formé opposition à l'enregistrement de cette marque. L'acte d'opposition était accompagné de la justification du paiement de la redevance correspondante. La marque antérieure invoquée dans cet acte est la marque verbale LECLERC, renouvelée par déclaration en date du 5 avril 1995 sous le n° 1 307 790. L'association opposante indique qu'elle est devenue propriétaire de cette marque suite à une transmission de propriété, selon acte inscrit au Registre national des marques le 22 janvier 2004 sous le n° 385 409. Cet enregistrement porte notamment sur les produits suivants : "joaillerie ; bijouterie ; cuir et imitations du cuir ; peaux d'animaux ; malles et valises ; parapluies ; sacs ; tissus et produits textiles ; couvertures de lit et de table ; vêtements, chaussures, chapellerie" (classes 14, 18, 24 et 25). L'opposition, formée à l'encontre de l'intégralité des produits désignés dans la demande d'enregistrement contestée, a été notifiée au déposant le 23 juin 2004, sous le n° 04-1799. Cette notification l'invitait à présent er des observations en réponse dans les deux mois. Le 19 juillet 2004, le déposant, représenté par Monsieur Michel HERMAN, avocat justifiant d'un pouvoir, a présenté des observations en réponse à l'opposition, transmises à la société opposante par l'Institut, en application du principe du contradictoire. Le 1er septembre 2004, Monsieur Serge L et l'ASSOCIATION DES CENTRES DISTRIBUTEURS E.LECLERC ont présenté conjointement, conformément à l'article L 712-4 du Code de la propriété intellectuelle, une demande de suspension de la procédure d'opposition pour une période d'un mois, ce qui leur a été accordé. Aucun accord n'étant intervenu entre les parties, la procédure d'opposition a repris le 2 novembre 2004, au stade où elle se trouvait le 1er septembre 2004, date de la suspension. Le 6 décembre 2004, Monsieur Serge L et l'ASSOCIATION DES CENTRES DISTRIBUTEURS E.LECLERC ont présenté conjointement une nouvelle demande de suspension de la procédure d'opposition pour une période de trois mois, ce qui leur a été accordé. Aucun accord n'étant intervenu entre les parties, la procédure d'opposition a repris le 7 mars 2005, au stade où elle se trouvait le 6 décembre 2004, date de la seconde suspension. L'Institut a notifié aux parties, le 15 mars 2005, par télécopie confirmée par courrier, un projet de décision établi au vu de l'opposition et des observations en réponse ; cette notification, les invitaient, si elles souhaitaient en contester le bien-fondé, à présenter des observations au plus tard le 18 avril 2005, fin de la procédure écrite. Le 14 avril 2005, le déposant a, par télécopie confirmée par courrier, présenté des observations contestant le bien-fondé du projet de décision. Ces observations ont été transmises par l'Institut le 18 avril suivant, par télécopie confirmée par courrier à l'association opposante. Il lui était précisé qu'afin de respecter le principe du contradictoire, la date de fin de procédure écrite était repoussée au 21 avril 2005, ce dont le déposant a également été informé. II.- ARGUMENTS DES PARTIES A.- L'OPPOSANT L'ASSOCIATION DES CENTRES DISTRIBUTEURS E.LECLERC fait valoir, à l'appui de son opposition, les arguments exposés ci-après : Sur la comparaison des produits Les produits de la demande d'enregistrement sont pour certains identiques et pour d'autres similaires à certains de ceux de la marque antérieure. Sont identiques, les "vêtements, chaussures, chapellerie ; couvertures de lit et de table ; cuir et imitations du cuir ; peaux d'animaux ; malles et valises ; parapluies" qui se retrouvent dans les mêmes termes ou en termes proches dans les deux libellés en présence. Sont respectivement similaires, les produits suivants de la demande d'enregistrement et de la marque antérieure, les premiers relevant de la catégorie générale des seconds : - les "chemises, vêtements en cuir ou en imitation du cuir, ceintures, foulards ; cravates et autres produits textiles non compris dans d'autres classes" et les "vêtements" ; - les "tissus ; tissus à usage textile ; velours" et les "tissus et produits textiles" ; - les "couvertures de lit et de table" et le "linge de maison" ; - les "sacs à main, à dos ; sacs pour l'emballage (cuir)" et les "sacs" ; - les "sacs pour l'emballage (cuir)" et les "cuir et imitations du cuir" ; - les "colliers" et la "joaillerie ; bijouterie ; cuir et imitations du cuir". Sont similaires, par complémentarité, les "ceintures, foulards, cravates" de la demande d'enregistrement et les "vêtements (habillement)" de la marque antérieure. L'association opposante soulève le fait que les "produits en ces matières non compris dans d'autres classes" de la demande d'enregistrement ne permettent pas aux tiers de connaître de façon constante et précise la portée du dépôt. Sur la comparaison des signes La demande d'enregistrement contestée constitue l'imitation de la marque antérieure invoquée, en raison des ressemblances visuelles, phonétiques et intellectuelles résultant de la reprise du terme L au sein du signe contesté. L'association opposante invoque à l'appui de son argumentation la notoriété de la marque antérieure. B.- LE TITULAIRE DE LA DEMANDE D'ENREGISTREMENT Dans ses observations en réponse à l'opposition, le déposant invoque l'irrecevabilité de l'opposition et conteste la comparaison des produits ainsi que celle des signes. Suite au projet de décision, le déposant invoque l'antériorité de deux marques dont il serait titulaire, la présente marque n'étant que le renouvellement de l'une d'entre elles et le fait que le signe contesté correspond à son patronyme.

III.- DECISION

A- SUR LA RECEVABILITE CONSIDERANT qu'aux termes de l'article L.712-4 du code de la propriété intellectuelle, "pendant le délai mentionné à l'article L.712-3 [deux mois suivant la publication de la demande d'enregistrement], opposition à la demande d'enregistrement peut être faite auprès du directeur de l'Institut national de la propriété industrielle par le propriétaire d'une marque enregistrée ou déposée antérieurement…" ; Qu'en l'espèce, la demande d'enregistrement contestée, déposée effectivement le 24 février 2004, a été publiée au Bulletin officiel de la propriété industrielle n°04/15 du 9 avril 2004 ; que l'opposition a été formée le 9 juin 2004, soit dans le délai pour former opposition ; Qu'ainsi, contrairement aux allégations du déposant, l'opposition a bien été introduite dans le délai imparti. CONSIDERANT en conséquence, que l'opposition est recevable. B- SUR LE FOND Sur la comparaison des produits CONSIDERANT que suite à la régularisation matérielle de la demande d'enregistrement effectuée par son titulaire, le libellé à prendre en considération aux fins de la procédure d'opposition est le suivant : "Vêtements, chaussures, chapellerie, chemises, vêtements en cuir ou en imitation cuir, ceintures, foulards, cravates, bonneterie, chaussettes, gants et sous vêtements. Tissus ; couvertures de lit et de table. Tissus à usage textile ; velours ; linge de maison ; linge de lit, linge de table (en matières textiles), linge de bain. Cuir et imitations du cuir ; peaux d'animaux ; malles et valises ; parapluies, sacs à main, à dos ; colliers ; sacs pour l'emballage (cuir)" ; Que la marque antérieure a été enregistrée notamment pour les produits suivants : "joaillerie ; bijouterie ; cuir et imitations du cuir ; peaux d'animaux ; malles et valises ; parapluies ; sacs ; tissus et produits textiles ; couvertures de lit et de table ; vêtements, chaussures, chapellerie". CONSIDERANT que les produits précités de la demande d'enregistrement apparaissent pour certains, identiques et pour d'autres, similaires à ceux invoqués de la marque antérieure ; Qu'à cet égard, est inopérant l'argument du déposant tenant à la portée de la marque antérieure et aux principes de liberté du commerce ; qu'en effet, une marque fait l'objet d'une appropriation non seulement pour les produits et services désignés, quelle que soit l'étendue de son libellé, mais est également protégée pour des produits ou services qui leur sont similaires ; Que de même, est inopérant son argument tenant à l'absence de démonstration d'une volonté parasitaire de sa part, la contrefaçon devant s'apprécier indépendamment de la bonne ou mauvaise foi du titulaire de la demande d'enregistrement. Sur la comparaison des signes CONSIDERANT que la demande d'enregistrement contestée porte sur le signe complexe LECLERC MODE, ci-dessous reproduit : Que ce signe a été déposé en couleurs ; Que la marque antérieure porte sur la dénomination LECLERC, présentée en lettres majuscules d'imprimerie droites, grasses et noires. CONSIDERANT que l'association opposante invoque l'imitation de sa marque par le signe contesté. CONSIDERANT que l'imitation nécessite la démonstration d'un risque de confusion entre les signes, lequel doit donc être apprécié globalement à partir de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce ; que cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l'impression d'ensemble produite par les marques, en tenant compte notamment de leurs éléments distinctifs et dominants. CONSIDERANT que le signe contesté est constitué de huit éléments verbaux, de deux initiales et d'éléments graphiques et de couleurs, alors que la marque antérieure est composée d'une seule dénomination à l'exclusion de tout autre élément ; Qu'ils ont en commun le terme L, parfaitement distinctif au regard des produits en cause ; Que le terme L, seul élément constitutif de la marque antérieure, présente un caractère dominant au sein du signe contesté ; Qu'en effet, la dénomination LECLERC figure sur la première ligne, en caractères de grande taille par rapport aux autres éléments verbaux ; Qu'à cet égard, les initiales LM, inscrites dans un carré, et le terme MODE, inscrit en oblique n'ont pas pour effet d'altérer le caractère essentiel et immédiatement perceptible du terme L, dès lors que ce dernier occupe une place prépondérante et apparaît dans une couleur tranchée ; Que de même, la présence des termes LA MODE DE TOUS LES JOURS n'a pas pour effet de fondre la dénomination LECLERC dans un ensemble unitaire, dès lors que cette expression s'apparente à un slogan. CONSIDERANT ainsi, que le signe contesté LECLERC MODE constitue l'imitation de la marque verbale LECLERC. CONSIDERANT en conséquence, qu'en raison de l'identité et de la similarité des produits en cause et de l'imitation de la marque antérieure par le signe contesté, il existe pour le consommateur un risque de confusion sur l'origine de ces marques. CONSIDERANT qu'est inopérant l'argument du déposant selon lequel la liste des marques appartenant à l'opposant ne fait pas apparaître de marque LECLERC MODE ni même de marque LECLERC vêtements ; qu'en effet, il convient de rappeler que la contrefaçon s'entend non seulement de la reproduction à l'identique d'une marque pour des produits et services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement mais aussi de son imitation. CONSIDERANT en outre, qu'à moins d'une action en nullité susceptible de suspendre la procédure d'opposition, est inopérant l'argument du titulaire de la demande d'enregistrement relatif aux antériorités constituées par l'inscription au Registre du commerce et des sociétés de Monsieur René L, par les marques MONDO TEXTILE ET LES MAGASINS LECLERC et LECLERC MODE dont le présent dépôt ne constitue pas, contrairement à ce que soutient le déposant le renouvellement, ainsi que par l'usage du signe contesté ; qu'en effet le bien-fondé d'une opposition doit uniquement s'apprécier eu égard aux droits conférés par l'enregistrement de la seule marque antérieure invoquée et à l'atteinte susceptible d'être portée à ces droits par l'enregistrement de la demande contestée, indépendamment des droits antérieurs dont pourrait être titulaire la société déposante, ces circonstances relevant au demeurant de la compétence exclusive des tribunaux judiciaires. CONSIDERANT que ne saurait être retenu l'argument du déposant selon lequel en l'absence de fraude ou de volonté parasitaire de sa part, rien ne peut s'opposer à l'usage de son patronyme ; Qu'en effet, si l'article L.713-6 du code de la propriété intellectuelle autorise le titulaire d'un nom patronymique à en faire usage, nonobstant l'enregistrement d'une marque antérieure, un tel usage n'inclut pas son dépôt à titre de marque. CONSIDERANT en conséquence, que le signe complexe contesté LECLERC MODE ne peut pas être adopté comme marque pour désigner des produits identiques et similaires sans porter atteinte aux droits antérieurs de la société opposante sur la marque verbale LECLERC.

PAR CES MOTIFS

DECIDE Article 1 : L'opposition numéro 04-1799 est reconnue justifiée. Article 2 : La demande d'enregistrement numéro 04 3 277 160 est rejetée. Christine BONIN, Juriste Pour le Directeur généralde l'Institut national de la propriété industrielle