Vu les procédures suivantes :
I- Par une requête enregistrée sous le n°2002060 le 6 mai 2020 et des mémoires enregistrés le 13 octobre 2020 et le 27 janvier 2022, Mme C A, représentée par Me Dalbin, demande au tribunal :
1°) d'annuler la décision implicite par laquelle le directeur de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Saint-Jacques, d'une part, a suspendu son traitement à compter du 1er janvier 2020 et, d'autre part, l'aurait radié des cadres ;
2°) à titre subsidiaire de prononcer un non-lieu à statuer ;
3°) d'enjoindre à l'EPHAD Saint-Jacques de procéder au versement des traitements qui ne lui ont pas été versés depuis le 1er janvier 2020 jusqu'au jour du jugement, de la réintégrer et de procéder à sa reconstitution de carrière sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'EHPAD Saint-Jacques la somme de 2 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article
37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'EHPAD Saint-Jacques ne peut pas demander au juge de prononcer une amende pour recours abusif dès lors que cette demande n'est ni recevable ni justifiée ;
- la décision implicite de suspension du versement de son traitement est illégale dès lors qu'aucune absence injustifiée ne peut lui être reprochée ;
- la décision implicite de suspension du versement de son traitement méconnaît les dispositions des articles
27 du décret n°86-442 du 14 mars 1986 et 17 du décret n°88-386 du 19 avril 1988 dès lors qu'elle n'a pas été invitée à présenter sa demander de reclassement à la suite du comité médical du 7 novembre 2019 ;
- l'illégalité de la décision attaquée implique nécessairement qu'il soit enjoint à l'EHPAD Saint-Jacques de procéder au versement des traitements dus depuis le 1er janvier 2020 sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir et qu'elle soit réintégrée avec reconstitution de sa carrière.
Par des mémoires en défense enregistrés le 25 septembre 2020, le 25 janvier 2022 et le 14 février 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Saint-Jacques, représenté par Me Lagorce-Billiaud, conclut au rejet de la requête, à la condamnation de Mme A au versement d'une amende pour recours abusif et également à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de Mme A au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés et que Mme A doit être condamnée au versement d'une amende pour recours abusif dès lors qu'elle multiplie les contentieux.
Par une ordonnance du 26 janvier 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 février suivant.
En application des dispositions de l'article
R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées, par lettre du 19 janvier 2023, que le jugement était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions en annulation dirigées contre la décision implicite de radiation des cadres dès lors que cette décision est inexistante.
Mme C A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 septembre 2020.
II- Par une requête enregistrée sous le n°2004319 le 27 août 2020 et des mémoires enregistrés le13 octobre 2020 et le 27 janvier 2022, Mme C A, représentée par Me Dalbin demande au tribunal :
1°) de condamner l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Saint-Jacques à lui verser la somme globale de 9 094,89 euros en réparation de préjudices qu'elle impute à une faute de cet établissement, augmentée des intérêts à taux légaux à compter du 10 mars 2020, capitalisés ;
2°) de mettre à la charge de l'EHPAD Saint-Jacques la somme de 2 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article
37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'EHPAD Saint-Jacques ne peut pas demander au juge de prononcer une amende pour recours abusif dès lors que cette demande n'est ni recevable ni justifiée ;
- la responsabilité de l'EPHAD Saint-Jacques doit être engagée dès lors qu'il a illégalement suspendu le versement de ses traitements depuis le 1er janvier 2020 ;
- l'EHPAD Saint-Jacques doit être condamné à lui verser ses traitements depuis le 1er janvier 2020 soit la somme de 6 094,89 euros bruts ;
- les troubles dans les conditions d'existence subis doivent être réparés à hauteur de 1 000 et le préjudice moral subi à hauteur de 2 000 euros.
Par des mémoires en défense enregistrés le 25 septembre 2020, le 25 janvier 2022 et le 14 février 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Saint-Jacques, représenté par Me Lagorce-Billiaud, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de Mme A au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés et que Mme A doit être condamnée au versement d'une amende pour recours abusif.
Par une ordonnance du 26 janvier 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 février suivant.
Mme C A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 août 2020.
Vu les pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n°86-442 du 14 mars 1986 ;
- le décret n°88-386 du 19 avril 1988 ;
- le décret n°88-976 du 13 octobre 1988 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B,
- les conclusions de Mme Chalbos, rapporteure publique,
- et les observations de Me Billiaud représentant l'EHPAD Saint-Jacques.
Considérant ce qui suit
:
1. Mme A, aide-soignante titulaire au sein de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Saint-Jacques, à Villemur-sur-Tarn (Haute-Garonne), depuis 2008, a été placée en congé de maladie ordinaire à compter du 22 février 2018. Par décision du 11 décembre 2018, le directeur de l'EHPAD a prolongé son congé de maladie ordinaire jusqu'au 21 décembre 2018. Elle a été ensuite placée en congés annuels jusqu'au 13 janvier 2019, puis en congé de maladie ordinaire jusqu'au 31 janvier 2019. À la suite de l'avis rendu par le comité médical départemental, le 7 novembre 2019, l'EHPAD Saint-Jacques lui a demandé, par lettres du 19 novembre 2019 et du 28 janvier 2020, de justifier de son absence depuis le 1er février 2019 et indiqué que, faute de justificatifs, elle serait placée en absence injustifiée. N'ayant plus perçu de demi-traitement à compter du mois de janvier 2020, Mme A demande au tribunal, par la requête n° 2002060, d'annuler la décision implicite, révélée par ses bulletins de paie, par laquelle l'EHPAD Saint-Jacques a suspendu le versement de son demi-traitement et, selon elle, l'aurait radiée des cadres. Elle demande également d'enjoindre à l'établissement de procéder au versement des demi-traitements qui ne lui ont pas été versés depuis le 1er janvier 2020 jusqu'au jour du jugement, de la réintégrer et de procéder à sa reconstitution de carrière sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir. Par la requête n°2004319, Mme A demande au tribunal d'engager la responsabilité de l'EHPAD Saint-Jacques pour illégalité fautive en raison de ces décisions implicites de suspension de versement des demi-traitements et, selon elle, de radiation des cadres et de condamner ce dernier à lui verser les sommes de 6 094,89 euros bruts au titre des rémunérations non versées, de 1 000 euros au titre des troubles subis dans ses conditions d'existence et de 2 000 euros au titre du préjudice moral subi assortis des intérêts au taux légal à compter du 10 mars 2020 et de leur capitalisation.
2. Les requêtes n°2002060 et 2004319 ont été introduites par une même requérante, ont trait à une même situation et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a donc lieu de les joindre pour statuer par un jugement commun.
Sur les conclusions tendant à l'annulation d'une prétendue décision implicite de radiation des cadres :
3. Contrairement à ce que soutient Mme A, aucune décision implicite de radiation des cadres n'a été prononcée à son encontre, une telle décision ne pouvant être formalisée que de manière expresse. Par suite, les conclusions tendant à l'annulation d'une décision inexistante doivent être rejetées comme irrecevables.
Sur les conclusions afférentes à la suspension du versement des demi-traitements de Mme A à compter du 1er janvier 2020 :
4. Il résulte de l'instruction, et il n'est d'ailleurs pas contesté par Mme A, que l'EHPAD Saint-Jacques, d'une part, a versé de manière rétroactive l'ensemble des demi-traitements qui lui étaient dus pour la période du 1er janvier au 31 août 2020 et, d'autre part, a repris le versement de son demi-traitement à compter du mois de septembre 2020. Ce faisant, l'EHPAD Saint-Jacques a entièrement donné satisfaction aux conclusions tendant au versement de la rémunération en cause, présentées par Mme A tantôt sur le terrain de la responsabilité pour faute, tantôt sur le terrain de l'excès de pouvoir assorti d'une demande d'injonction de paiement. Par suite, ces conclusions, de même que les conclusions aux fins d'annulation de la décision implicite de suspension du demi-traitement de Mme A qui a implicitement mais nécessairement été retirée, ont perdu leur objet. Il n'y a dès lors plus lieu d'y statuer.
Sur les conclusions tendant à la réparation de troubles dans les conditions d'existence et d'un préjudice moral :
5. Mme A demande au tribunal de condamner l'EHPAD Saint-Jacques à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de troubles dans les conditions d'existence et la somme de 2 000 euros à titre de préjudice moral. Toutefois, la requérante, qui demande le versement de ces sommes sans autre précision, ne démontre pas la réalité des préjudices allégués, pas plus qu'elle n'en justifie le montant. Par suite, les conclusions précitées doivent être rejetées.
Sur les conclusions présentées par l'EHPAD au titre de l'article
R.741-12 du code de justice administrative :
6. Les conclusions de l'EHPAD Saint-Jacques tendant à ce qu'il soit fait application de l'article
R. 741-12 du code de justice administrative, qui relève d'un pouvoir propre du juge, doivent être rejetées comme irrecevables.
Sur les frais liés au litige
7. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter toutes les conclusions des parties tendant au bénéfice d'une somme au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite suspendant, à compter du 1er janvier 2020, le versement d'un demi-traitement à Mme A et sur celles tendant à ce que l'EHPAD Saint-Jacques verse à Mme A un demi-traitement à compter de cette même date.
Article 2 : Le surplus des conclusions présentées par Mme A dans ses requêtes n°2002060 et 2004319 est rejeté.
Article 3 : Les conclusions de l'EHPAD Saint-Jacques tendant à l'application des dispositions de l'article
R. 741-2 du code de justice administrative et celles tendant à l'application de l'article
L. 761-1 du même code sont rejetées.
Article 4 : Le présent jugement sera notifié à Mme C A, à Me Dalbin et à l'EHPAD Saint-Jacques.
Délibéré après l'audience du 26 janvier 2023, à laquelle siégeaient :
M. Katz, président,
M. Luc, premier conseiller.
Mme Jorda, conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2023.
La rapporteure,
V. BLe président,
D. KATZLa greffière,
F. DEGLOS
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière en chef, 2004319