Cour d'appel de Paris, 12 janvier 2016, 2014/02823

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    2014/02823
  • Domaine de propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
  • Parties : COQUET (Sté des Ets) ; GLADEL SELARL / NESS SARL ; SELAFA MANDATAIRES JUDICIAIRES ASSOCIES (MJA)
  • Décision précédente :Tribunal de grande instance de Paris, 9 novembre 2012
  • Président : Monsieur Benjamin RAJBAUT
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Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Paris
2016-01-12
Tribunal de grande instance de Paris
2012-11-09

Texte intégral

COUR D'APPEL DE PARIS

ARRÊT

DU 12 janvier 2016 Pôle 5 - Chambre 1 (n° 003/2016, 9 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 14/02823 Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 novembre 2012 -Tribunal de Grande Instance de Paris -RG n° 10/07728 - 3ème chambre - 2ème section - APPELANTES SA ETABLISSEMENTS COQUET Immatriculée au Registre du Commerce et des sociétés de Limoges sous le numéro 562 056 630 Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège Avenue de Limoges 87400 St-Léonard-de-Noblat SELARL GLADEL Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de sous le numéro799 018 510 Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège [...] 87000 CLERMONT FERRAND Représentées par Me Claire BOUCHENARD de la S O CLARKE, avocat au barreau de PARIS, toque : C1965 Assistées de Me Julia DARCEL de l O CLARKE, avocat au barreau de PARIS, toque : C1965 INTIMÉE SARL NESS Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Paris sous le numéro 448 517 656 Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège [...] 75001 PARIS Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034 PARTIE INTERVENANTE : SELAFA MANDATAIRES JUDICIAIRES ASSOCIES 'MJA' agissant poursuites et diligences de son représentant légal és-qualités de liquidateur judiciaire de la société NESS [...] 75010 PARIS non comparante, non représentée, n'ayant pas constitué avocat COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 10 novembre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Benjamin RAJBAUT, Président de chambre Mme Nathalie AUROY, Conseillère Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère qui en ont délibéré. Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile. Greffier, lors des débats : Madame Karine ABELKALON ARRÊT : •Contradictoire • par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. • signé par Monsieur Benjamin RAJBAUT, président et par Madame Karine ABELKALON, greffier présent lors du prononcé. Vu le jugement rendu contradictoirement le 09 novembre 2012 par le tribunal de grande instance de Paris. Vu l'appel interjeté le 07 février 2014 par la SA Établissements Coquet et la SELARL GLADEL, ès-qualités d'administrateur judiciaire de la SA Établissements Coquet. Vu les dernières conclusions de la SA Établissements Coquet et de la SELARL GLADEL, ès-qualités, transmises le 12 mai 2014. Vu la lettre du conseil de la SARL NESS en date du 17 novembre 2014 indiquant que cette dernière a fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire en date du 24 juillet 2014, nommant la SELAFA Mandataires Judiciaires Associés (MJA), représentée par Me Lucile JOUVE, ès-qualités de liquidateur judiciaire. Vu l'ordonnance rendue le 18 novembre 2014 par le conseiller de la mise en état constatant l'interruption de l'instance par l'effet de l'ouverture d'une procédure collective à l'encontre de la SARL NESS. Vu l'assignation en intervention forcée de la SELAFA MJA, notifiée le 06 février 2015 à la requête de la SA Établissements Coquet et de la SELARL GLADEL, ès-qualités, par remise à personne habilitée. Vu l'ordonnance de clôture en date du 23 juin 2015.

MOTIFS

DE L'ARRÊT Considérant que la SELAFA MJA, assignée à personne habilitée en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL NESS, représentée par Me Lucile JOUVE, ne comparaît pas, que le présent arrêt sera réputé contradictoire en vertu des dispositions de l'article 474, 1er alinéa du code de procédure civile ; Considérant que, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ; Considérant qu'il suffit de rappeler que la SA Établissements Coquet, fondée en 1963, a pour activité la manufacture d'articles de table en porcelaine de qualité, sous les noms commerciaux 'Jean Louis Coquet' et 'J.L. Coquet' ; Qu'elle indique commercialiser une gamme d'articles de table dénommée 'Hémisphère' composée d'assiettes, bols, soucoupes à café, déclinés en plusieurs coloris et décors, la couleur emblématique de la société étant le blanc satin uni, caractérisé notamment par les stries que ses articles comportent sur leurs pourtours externes ; Qu'apprenant que la SARL NESS commercialisait une gamme d'articles de table en porcelaine blanche dénommée 'Nilo', reprenant selon elle, les caractéristiques originales de la gamme Hémisphère, et après avoir fait procéder à une saisie contrefaçon au siège social de cette société à Paris ainsi que dans son show room à Ivry-sur-Seine le 29 avril 2010, en vertu de deux ordonnances présidentielles du 09 avril 2010, révélant que la SARL NESS se fournissait auprès de la société espagnole Viejo Valle, la SA Établissements Coquet a fait assigner le 26 mai 2010, la SARL NESS devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de droits d'auteur et concurrence déloyale et parasitaire ; Considérant que le jugement entrepris a, en substance : •dit que l'assiette plate, le bol à salade, la tasse et la soucoupe à café, l'assiette creuse à aile, l'assiette mise en bouche et l'assiette à pâtes, formant la gamme de la collection Hémisphère commercialisée par la SA Établissements Coquet ne peuvent bénéficier de la protection au titre du livre I du code de la propriété intellectuelle, • débouté en conséquence la SA Établissements Coquet de ses demandes au titre de la contrefaçon de droits d'auteur, • rejeté les demandes en concurrence déloyale et parasitaire, • condamné la SA Établissements Coquet à payer à la SARL NESS la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens • rejeté le surplus des demandes, •dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ; I : SUR LA PROTÉGEABITITÉ AU TITRE DU DROIT D'AUTEUR : Considérant que la SA Établissements Coquet et la SELARL GLADEL, ès-qualités rappellent que les établissements Coquet exploitent ostensiblement la gamme Hémisphère sous le nom de la société, laquelle est bien titulaire des droits d'auteur attachés aux articles de table de cette gamme ; Que les appelantes revendiquent l'originalité de cette gamme dont les articles ont été créés dans les ateliers de la société, sous la direction artistique de Mme Sylvie C dont la personnalité et l'esprit de la société se retrouvent incontestablement dans le choix de la combinaison des caractéristiques des articles de cette gamme ; Qu'elles décrivent les éléments de décor des articles de cette gamme comme consistant en : •une aile mate (en biscuit) et gravée avec de fines stries concentriques, avec un espacement minimal entre elles et avec un relief marqué, •un bassin lisse et brillant (ou émaillé), •un effet de contraste ainsi créé entre un pourtour mat et strié et une partie 'contenante' brillante et lisse ; Qu'elles décrivent les éléments de forme jouant sur la proportion inhabituelle entre un bassin de taille réduite et des ailes larges, les assiettes creuses (en ce compris les assiettes de mise en bouche) présentant un élément de forme supplémentaire, à savoir la forme de leur bassin reproduisant exactement et sans nécessité fonctionnelle la forme du bol intérieur, créant ainsi un effet de cassure au niveau de l'aile placée à l'horizontale ; Qu'elles font valoir que c'est la combinaison de ses éléments de décor et de forme qui confère à cette gamme un aspect particulier, très reconnaissable, traduisant un parti pris esthétique et un effort créatif personnel caractérisant son originalité ; qu'il a ainsi été cherché à sublimer la porcelaine par des reliefs délicats ton sur ton et un jeu de proportions inhabituelles, tout en s'inspirant de la symbolique de l'univers ; Qu'elles ajoutent que le critère de nouveauté est indifférent en matière de droit d'auteur et qu'en tout état de cause aucune des antériorités produites en première instance ne présente la même combinaison originale ; Considérant en premier lieu que l'exploitation non équivoque d'une oeuvre par une personne morale sous son nom et en l'absence de revendication du ou des auteurs, seraient-ils connus, fait présumer à l'égard du tiers recherché pour contrefaçon, que cette personne est titulaire sur l'oeuvre du droit de propriété intellectuelle ; Qu'en l'espèce il n'est pas contesté que la SA Établissements Coquet exploite de façon non équivoque depuis 1999 les articles de table de la gamme Hémisphère sous son nom, ainsi que l'ont d'ailleurs relevé les premiers juges ; Qu'en conséquence, en l'absence de revendication de la part de Mme Sylvie C, la SA Établissements Coquet est à l'égard de la SARL NESS présumée titulaire des droits patrimoniaux d'auteur sur les articles de table de la gamme Hémisphère ; Considérant qu'il ressort des pièces versées aux débats que le fondateur de la SA Établissements Coquet, M. Jean-Louis C, est un porcelainier connu, à la fois ouvrier et créateur, sa fille Sylvie C lui ayant succédé comme directrice artistique ; Que les articles créés par la SA Établissements Coquet sont reconnus et appréciés chez les professionnels et les consommateurs, un article de la revue 'Table & Cadeaux' du mois d'octobre 1999 relevant que les assiettes de la ligne de table Hémisphère 'associent satinage et brillance, petit bassin lisse et large aile striée ; Que cette collection se caractérise en effet par l'alliance de la blancheur de la porcelaine, qualifiée de 'légendaire' à des formes novatrices (ailes très larges des assiettes permettant notamment d'y couper la viande) et des effets de matière (ailes mates et striées sur leur pourtour d'une part et bassin lisse et brillant d'autre part) ; Que les professionnels de la restauration et des arts de la table s'accordent pour reconnaître à cette combinaison le style propre aux productions des établissements Coquet et de sa directrice artistique, ainsi le site Internet qui parle des 'modèles avant-gardistes tels que l'Hémisphère' de Mme Sylvie C ou la revue suisse 'Le Cafetier' (journal des cafetiers, restaurateurs et hôteliers romands) du 24 février 2012, qui dans un article consacré à Mme Sylvie C relève son 'univers créatif, entièrement dédié à sa relation au mystère de la matière' ou encore de nombreuses entreprises étrangères de vente d'articles de table de luxe relevant notamment la 'combinaison unique' (attestation de M. S HOAGLAND) des stries concentriques gravées avec plusieurs sortes d'émaillage produisant un effet mat et brillant ; Considérant qu'il s'ensuit que si les éléments qui composent la gamme Hémisphère sont connus et si, pris séparément, ils appartiennent au fonds commun de l'art de la table, leur combinaison telle que décrite ci-dessus - qui n'a jamais été effectuée auparavant - présente cependant un aspect d'ensemble propre traduisant un parti pris esthétique qui porte l'empreinte de la personnalité de son auteur et le rend éligible à la protection conférée aux créations originales en vertu de l'article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle ; Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a débouté la SA Établissements Coquet de ses demandes au titre de la contrefaçon et que, statuant à nouveau, il sera jugé que les produits de la gamme Hémisphère peuvent bénéficier de la protection au titre des droits d'auteur ; II : SUR LA CONTREFAÇON : Considérant qu'il ressort du procès-verbal de saisie-contrefaçon effectuée le 29 avril 2010 dans le showroom de la SARL NESS à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) et de la comparaison effectuée par la cour, que cette société importe en France et commercialise une collection dénommée Nilo comportant des assiettes, des saladiers, des tasses et des soucoupes reprenant dans une même combinaison, l'association des caractéristiques originales de la gamme Hémisphère, à savoir une large aile mate gravée avec des stries concentriques, un bassin lisse et brillant créant un effet de contraste entre d'une part le bassin de taille réduite et l'aile large et d'autre part le pourtour mat et brillant et le contenant brillant et lisse ; Qu'en effet les assiettes plates référencées, selon leur diamètre, 2439, 2440, 2471, 2472 et 2473 et les assiettes dégustation référencées, selon leur diamètre, 2388, 2389, 2390, 2391 et 2392, dont les photographies figurent en annexe du procès-verbal présentent selon le procès-verbal 'des ailes larges et striées et un bassin petit et lisse. Ces modèles sont des assiettes plates, en porcelaine blanche satinée, que les assiettes pasta référencées 2467, 2468 et 2526 (photographies en annexe du procès-verbal) présentent 'des ailes larges et striées de couleur rouge et un bassin creux, blanc et lisse' et que les assiettes à risotto référencées 2645 (photographies en annexe du procès-verbal) ont 'des ailes larges striées et recourbées avec bassin creux, blanc et lisse' ; Qu'il en est de même des saladiers/bols référencés 2441 et 2442 selon leur diamètre et des paires de tasses référencées 2368 et 2387 selon leur taille ; Considérant en conséquence qu'il sera jugé que la SARL NESS a commis des actes de contrefaçon des produits de la gamme Hémisphère de la SA Établissements Coquet sans qu'il y ait lieu d'examiner la demande subsidiaire en parasitisme ; III: SUR LES AGISSEMENTS DÉLOYAUX : Considérant que la SA Établissements Coquet et la SELARL GLADEL, ès-qualités, présentent également des demandes au titre des agissements déloyaux en faisant valoir que le fait de commercialiser une gamme de produits se rapprochant par sa composition d'une gamme de produits connus et reconnus, constitue une faute caractérisant un acte de concurrence déloyale, que la contrefaçon des articles de cette gamme ait été admise ou non ; Qu'elles soutiennent que la SARL NESS a ainsi proposé à sa clientèle un service de base complet dans des formats identiques, en nombre et en dimension, à ceux proposés par elle pour sa gamme Hémisphère, à savoir une assiette plate en 5 formats identiques, une assiette de dégustation en 5 formats identiques, une assiette à pâtes en 3 formats identiques, une assiette à risotto, un saladier/bol en deux formats identiques et un service à café en deux formats identiques ; Considérant qu'indépendamment des actes de contrefaçon des modèles de la SA Établissements Coquet, il apparaît en effet que la SARL NESS a commercialisé à des prix nettement plus bas, chacun des modèles contrefaits en les déclinant en plusieurs formats correspondant exactement à ceux des modèles produits et commercialisés par la SA Établissements Coquet, créant ainsi un effet de gamme susceptible de créer et d'accentuer un risque de confusion dans l'esprit du consommateur d'attention moyenne qui peut leur attribuer une origine commune, de sorte que se trouve caractérisé un comportement contraire à une pratique loyale du commerce ; Considérant dès lors que le jugement entrepris sera également infirmé en ce qu'il a rejeté les demandes en concurrence déloyale et que, statuant à nouveau, il sera jugé que la SARL NESS a commis des actes de concurrence déloyale engageant sa responsabilité civile au sens de l'article 1382 du code civil ; IV : SUR LES MESURES RÉPARATRICES : Considérant qu'au titre de la contrefaçon, la SA Établissements Coquet et la SELARL GLADEL, ès-qualités, réclament la somme globale de 1.000.000 € de dommages et intérêts se décomposant en 150.000 € au titre de la perte subie par la société, 500.000 € au titre des bénéfices réalisés par la SARL NESS et 300.000 € au titre du préjudice moral, le solde de 50.000 € n'étant pas explicité ; Qu'au titre de la concurrence déloyale, la SA Établissements Coquet et la SELARL GLADEL, ès-qualités, réclament la somme de 250.000 € à titre de dommages et intérêts en faisant notamment valoir que l'ensemble de ces actes ont contribué à aggraver la situation financière de la société puisqu'elle a dû licencier pour motif économique 14 salariés en 2012 après avoir perdu plus de 800.000 € en 2010 et qu'elle a été placée en redressement judiciaire le 29 mai 2013 ; Qu'elles demandent encore la production sous astreinte des noms et adresses des producteurs, fabricants, distributeurs, fournisseurs et autres détenteurs antérieurs des marchandises contrefaisantes, ainsi que des grossistes destinataires et des détaillants, ainsi que les quantités de marchandises contrefaisantes commercialisées, livrées, reçues ou commandées et le prix obtenu pour ces marchandises ; Qu'elles présentent également une demande d'interdiction de poursuite des actes contrefaisants, la confiscation et la destruction des articles contrefaisants encore en la possession de la SARL NESS et la publication judiciaire de l'arrêt à intervenir ; Considérant que dans la mesure où la SARL NESS est en liquidation judiciaire, aucune condamnation pécuniaire ne peut être prononcée à son encontre, seule la créance de la SA Établissements Coquet pouvant être fixée au passif de cette liquidation judiciaire ; Considérant que, conformément aux dispositions de l'article L 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle, le préjudice subi par la SA Établissements Coquet du fait des actes de contrefaçon doit être évalué en prenant distinctement en considération les conséquences négatives de l'atteinte aux droits, le préjudice moral causé à la partie lésée et les bénéfices réalisés par l'auteur de l'atteinte aux droits ; Considérant que pour l'évaluation de la masse contrefaisante, la SARL NESS avait annoncé à l'huissier de justice, le jour des opérations de saisie-contrefaçon, que les factures de vente des articles de la gamme Nilo étaient chez son expert-comptable et qu'elle les lui transmettrait, ce qu'elle n'a jamais fait; Que la SA Établissements Coquet et la SELARL GLADEL, ès-qualités, évaluent les quantités d'articles de table Nilo vendues par la SARL NESS à au moins 10.000 exemplaires par an sur une période d'au moins cinq années puisque ces articles ont fait l'objet de dépôts de modèles communautaires par la société Viejo Valle en août 2005 (dépôts annulés par la suite par l'OHMI) ; Que sur cette base et en tenant compte d'une marge brute de la SA Établissements Coquet de 70 % sur ses articles (vendus entre 16,50 € HT et 33,25 € ainsi que cela résulte du catalogue des tarifs 2010 départ usine), la SA Établissements Coquet et la SELARL GLADEL, ès-qualités, évaluent la perte financière de la société à la somme de 150.000 € HT sans être contredites ; Que sur cette même base et en tenant compte des prix de vente hors taxes pratiqués par la SARL NESS (14,10 € pour l'assiette à pâtes, 12,84 € pour l'assiette à risotto, 12,84 € pour l'assiette plate et 5,50 € pour l'assiette à dessert) et du fait que les bénéfices réalisés par cette société correspondent à la différence entre le prix d'achat et le prix de vente en l'absence d'autres charges, la SA Établissements Coquet et la SELARL GLADEL, ès-qualités, évaluent le bénéfice réalisé par la SARL NESS à la somme de 500.000 € HT sans être contredites ; Que le préjudice moral subi par la SA Établissements Coquet par la commercialisation au tout venant des produits contrefaisants de bas de gamme à bas prix, résulte de la dépréciation entachant sa réputation et son image de luxe auprès des professionnels de l'hôtellerie et de la restauration de luxe et des consommateurs au regard de ses points de vente sélectionnés ; que la cour évalue ce préjudice, au vu des éléments de la cause, à la somme de 150.000 € ; Considérant en conséquence que la créance de la SA Établissements Coquet au titre de la contrefaçon sera fixée au passif de la liquidation judiciaire de la SARL NESS à la somme globale de 800.000 € (150.000 + 500.000 + 150.000) ; Considérant que dans la mesure où le préjudice subi par la SA Établissements Coquet est évalué de façon définitive et non pas à titre de provision il n'apparaît pas nécessaire de faire droit à la demande de production de documents fondée sur l'article L 331-1-2 du code de la propriété intellectuelle ; Considérant que pour prévenir le renouvellement des actes contrefaisants, il sera fait interdiction à la SARL NESS d'importer et/ou d'exporter, de commercialiser, de proposer à la vente et de promouvoir de quelque manière que ce soit et sous quelque dénomination que ce soit les articles contrefaisants de la gamme Nilo ; Considérant qu'en application des dispositions de l'article L 331-1-4 il sera ordonné, aux frais de la SARL NESS, la confiscation et la destruction des articles de la gamme Nilo en la possession de la SARL NESS ; Considérant que le préjudice subi au titre de la concurrence déloyale résulte dans le trouble commercial certain en raison de l'effet de gamme créé par la SARL NESS qui offrait ainsi à bas coût une gamme de substitution à la gamme Hémisphère de la SA Établissements Coquet, étant observé que depuis les faits cette société a connu des difficultés économique conduisant à sa mise en redressement judiciaire ; Qu'au vu des éléments de la cause, la cour évalue ce préjudice à la somme de 200.000 € dont la créance sera également fixée au passif de la liquidation judiciaire de la SARL NESS ; Considérant qu'il n'y a pas lieu à faire droit à la demande de publication judiciaire du présent arrêt à titre de mesure réparatrice supplémentaire, compte tenu notamment de l'ancienneté des faits et de la liquidation judiciaire de la SARL NESS ; Considérant qu'il est équitable d'allouer à la SA Établissements Coquet et à la SELARL GLADEL, ès-qualités, la somme globale de 10.000 € au titre des frais par elles exposés en première instance et en cause d'appel et non compris dans les dépens, le jugement entrepris étant infirmé en ce qu'il a statué sur les frais irrépétibles de première instance ; Considérant que la SARL NESS, partie perdante, sera condamnée en la personne de son liquidateur judiciaire, la SELAFA MJA représentée par Me Lucile JOUVE, au paiement des dépens de première instance et d'appel, le jugement entrepris étant infirmé en ce qu'il a statué sur la charge des dépens de la procédure de première instance ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire ; Infirme le jugement entrepris et, statuant à nouveau : Dit que les articles d'arts de la table produits et commercialisés par la SA Établissements Coquet sous la dénomination Hémisphère bénéficient de la protection au titre du droit d'auteur ; Dit qu'en important, commercialisant, distribuant et promouvant entre 2005 et 2010 des assiettes, des saladiers/bols, des tasses et des soucoupes sous la dénomination Nilo référencés 2439, 2440, 2471, 2472, 2473, 2388, 2389, 2390, 2391, 2392, 2467, 2468, 2526, 2645, 2441, 2442, 2368 et 2387, la SARL NESS a commis des actes de contrefaçon des produits de la collection Hémisphère dont la SA Établissements Coquet est titulaire des droits d'auteur ; Dit que la SARL NESS, par la création d'un effet de gamme entraînant un risque de confusion, a commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la SA Établissements Coquet ; Fixe la créance de la SA Établissements Coquet au passif de la liquidation judiciaire de la SARL NESS aux sommes suivantes : - HUIT CENT MILLE euros (800.000 €) en réparation des actes de contrefaçon, - DEUX CENT MILLE euros (200.000 €) en réparation des actes de concurrence déloyale ; Fait interdiction à la SARL NESS d'importer et/ou d'exporter, de commercialiser, de proposer à la vente et de promouvoir de quelque manière que ce soit et sous quelque dénomination que ce soit les articles contrefaisants de la gamme Nilo ; Ordonne, aux frais de la SARL NESS, la confiscation et la destruction des articles de la gamme Nilo en sa possession ; Déboute la SA Établissements Coquet et la SELARL GLADEL, ès- qualités d'administrateur judiciaire de la SA Établissements Coquet, de leur demande de communication de documents sous astreinte et de leur demande de publication judiciaire du présent arrêt ; Condamne la SARL NESS en la personne de son liquidateur judiciaire, la SELAFA MJA représentée par Me Lucile JOUVE, à payer à la SA Établissements Coquet et à la SELARL GLADEL, ès-qualités d'administrateur judiciaire de la SA Établissements Coquet, la somme globale de DIX MILLE euros (10.000 €) au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; Condamne la SARL NESS en la personne de son liquidateur judiciaire, la SELAFA MJA représentée par Me Lucile JOUVE, aux dépens de la procédure de première instance et d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.