Tribunal de grande instance de Paris, 1 février 2018, 2016/09836

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    2016/09836
  • Domaine de propriété intellectuelle : MARQUE
  • Marques : GT DESIGN
  • Classification pour les marques : CL12 ; CL16
  • Numéros d'enregistrement : 4157220
  • Parties : A (Annabella, épouse A) ; A (Philippe, intervenant volontaire) / S (Thibaut)

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS JUGEMENT rendu le 01 février 2018 3ème chambre 1ère N° RG : 16/09836 Assignation du 13 juin 2016 DEMANDEURS Madame Annabella A épouse A Monsieur Philippe A, Intervenant Volontaire, Tous deux représentés par Me Pierre-Philippe FRANC, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0189 DÉFENDEUR Monsieur Thibaut S représenté par Me Sébastien CAVALLO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0100 COMPOSITION DU TRIBUNAL Marie-Christine C, Vice-Présidente Julien R. Juge Aurélie JIMENEZ, Juge assisté de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier DÉBATS À l'audience du 12 décembre 2017 tenue en audience publique JUGEMENT Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe Contradictoire En premier ressort EXPOSE DU LITIGE Madame Annabella A épouse A est une auto entrepreneure ayant pour activité déclarée la fabrication et la vente en ligne de produits adhésifs décoratifs notamment pour les motos, les voitures et la maison. Elle a réservé le nom de domaine gt-design.fr le 30 mai 2013 et est titulaire, avec Monsieur Philippe A, des droits de propriété intellectuelle sur la marque française verbale « GT DESIGN » déposée le 16 février 2015 sous le numéro 4157220 pour désigner après limitation du 12 août 2015 les produits suivants des classes 12 et 16 : - en classe 12 : « cadres, béquilles, freins, guidons, jantes, pédales de cycles, pneumatiques, roues ou selles de cycles » ; - en classe 16 : « articles pour reliures ; articles de papeterie, à savoir autocollants ; adhésifs (matières collantes) pour la papeterie ou le ménage ; machines à écrire et articles de bureau (à l'exception des meubles) ; matériel d'instruction ou d'enseignement (à l'exception des appareils) ; caractères d'imprimerie ; papier ; carton ; boîtes en carton ou en papier ; affiches ; albums ; cartes ; journaux ; prospectus ; brochures ; calendriers ; patrons pour la couture ; mouchoirs de poche en papier ; serviettes de toilette en papier ; linge de table en papier ; papier hygiénique ; sacs et sachets (enveloppes, pochettes) en papier ou en matières plastiques pour l'emballage ; sacs à ordures en papier ou en matières plastiques. » Monsieur Thibaut S exerce également en qualité d'auto entrepreneur une activité de fabrication et de vente de produits adhésifs décoratifs pour les véhicules et motos et pour la décoration intérieure sous le nom commercial « GT DESIGN ADHESIVE RACING PROJECT ». Il a réservé le nom de domaine gtdesign.fr le 7 avril 2013. Soutenant que l'exploitation par Monsieur Thibaut S du signe « GT DESIGN » comme nom de domaine et nom commercial portait atteinte à ses droits, Madame Annabella A épouse A l'a mis en demeure, par courrier de son conseil du 17 mai 2016, de cesser cette dernière. Monsieur Thibaut S contestait par courrier de son conseil du 30 mai 2016 tous les griefs qui lui étaient imputés en opposant l'antériorité de ses droits. C'est dans ces circonstances que Madame Annabella A épouse A a, par acte d'huissier du 13 juin 2016, assigné Monsieur Thibaut S devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de marque et en concurrence déloyale. Monsieur Philippe A, co-titulaire des droits sur la marque opposée et objet d'une demande reconventionnelle en nullité n'étant pas dans la cause, le tribunal a, à l'audience du 3 juillet 2017, révoqué l'ordonnance de clôture initialement prononcée le 6 juin 2017, et renvoyé l'affaire à la mise en état pour régularisation. Par conclusions notifiées par la voie électronique le 9 août 2017, ce dernier intervenait volontairement à l'instance. Dans leurs dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 9 août 2017 auxquelles il sera renvoyé pour un exposé de leurs moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile, Madame Annabella A épouse A et Monsieur Philippe A demandent au tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire et au visa des dispositions des articles L 713-3 b du code de la propriété intellectuelle et 1382 du code civil : - d'ordonner à Monsieur Thibaut S de cesser d'exploiter le nom GT DESIGN sous quelque forme que ce soit ; - de lui ordonner de supprimer le nom de domaine gt-design.fr ; - de dire et juger que ces diligences devront être effectuées dans un délai de 8 jours à compter de la signification du jugement à intervenir, et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard ; - de condamner Monsieur S à payer à Madame Annabelle A la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts ; - de condamner Monsieur S à payer à Monsieur Philippe A la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts ; - de condamner Monsieur S à payer à Madame Annabelle A et Monsieur Philippe A la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. En réplique, dans ses dernières écritures notifiées par la voie électronique le 11 octobre 2017 auxquelles il sera renvoyé pour un exposé de ses moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile, Monsieur Thibaut S demande au tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire et au visa des dispositions des articles L711-4etL714-3 du code de la propriété intellectuelle et 13 82 du code civil : - de débouter la demanderesse de l'ensemble de ses fins, moyens et conclusions, - de prononcer la nullité de la marque « GT DESIGN » enregistrée par la demanderesse auprès de l'INPI le 16/02/2015 sous le numéro 4157220 dans les classes 12 et 16, - d'ordonner la notification du jugement à intervenir à M. l Général de l'INPI, - de condamner la demanderesse à procéder à la radiation de son nom de domaine « gt-design.fr », et ce sous astreinte de 500 euros par jours de retard à compter de la signification du jugement à intervenir, - d'ordonner aux demandeurs de cesser d'utiliser les termes « gt design » ou « gt-design » sous quelque forme que ce soit, et ce sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée, - de condamner in solidum les demandeurs à payer au défendeur une somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts, - de condamner in solidum les demandeurs à payer au défendeur une somme de 5.000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile, - de condamner la demanderesse aux entiers frais et dépens. L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 octobre 2017. Les parties ayant régulièrement constitué avocat, le présent jugement, rendu en premier ressort, sera contradictoire en application de l'article 467 du code de procédure civile.

MOTIFS

DU JUGEMENT Monsieur Thibaut S conclut d'une part à la prescription de l'action et reconventionnellement à la nullité de la marque opposée qui la fonde. Ces deux moyens étant, par nature et par effet, des fins de non- recevoir que le tribunal peut examiner dans un ordre librement déterminé, la demande reconventionnelle, qui doit être nécessairement tranchée quand la question de la prescription serait privée d'objet par son succès, sera examinée préalablement dans une logique d'économie des moyens, la prescription étant de surcroît à l'évidence peu pertinente puisque la contrefaçon est un délit continu et que la poursuite des actes litigieux n'est pas contestée. 1°) Sur la nullité de la marque

Moyens des parties

Au soutien de sa demande reconventionnelle, Monsieur Thibaut S expose qu'il exploite son nom de domaine gtdesign.fr depuis une date antérieure au dépôt de la marque et que les signes et les produits sont identiques. En réplique, Madame Annabella A épouse A et Monsieur Philippe A contestent toute antériorité dans l'usage du signe « gtdesign » par Monsieur Thibaut S par rapport à l'exploitation du site gt-design.fr. Appréciation du tribunal En vertu des articles 31 et 32 du code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé, toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir étant irrecevable. Et, conformément à l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. Conformément à l'article L 714-3 du code de la propriété intellectuelle, est déclaré nul par décision de justice l'enregistrement d'une marque qui n'est pas conforme aux dispositions des articles L 711-1 et à L 711- 4, la décision d'annulation ayant un effet absolu et étant, une fois devenue définitive, transmise à l'INPI pour inscription sur ses registres par le greffe ou l'une des parties en application de l'article R 714-3 du même code. Et, en vertu de l'article L 711-4 du code de la propriété intellectuelle, ne peut être adopté comme marque un signe portant atteinte à des droits antérieurs, et notamment: a) A une marque antérieure enregistrée ou notoirement connue au sens de l'article 6 bis de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle ; b) A une dénomination ou raison sociale, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public ; c) A un nom commercial ou à une enseigne connus sur l'ensemble du territoire national, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public ; d) A une appellation d'origine protégée ou à une indication géographique ; e) Aux droits d'auteur ; f) Aux droits résultant d'un dessin ou modèle protégé ; g) Au droit de la personnalité d'un tiers, notamment à son nom patronymique, à son pseudonyme ou à son image ; h) Au nom, à l'image ou à la renommée d'une collectivité territoriale. Cette liste, introduite par l'adverbe « notamment », n'étant pas limitative, un nom de domaine, sous réserve de son exploitation effective démontrée, peut en cas de confusion dans l'esprit du public constituer dans le respect du principe de spécialité une antériorité opposable sur le fondement de l'article L 711-4. Conformément à l'article L 716-1 du code de la propriété intellectuelle, constitue une atteinte aux droits de la marque la violation des interdictions prévues aux articles L 713-2, L 713-3 et L 713-4 du même code. À ce titre, en vertu de l'article 713-2 du code de la propriété intellectuelle, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire : a) La reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, même avec l'adjonction de mots tels que : "formule, façon, système, imitation, genre, méthode", ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement ; b) La suppression ou la modification d'une marque régulièrement apposée. Enfin, aux termes de l'article L 713-3 du code de propriété intellectuelle, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public : a) La reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l'enregistrement ; b) L'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement. Les conditions de validité d'une marque devant exister au jour du dépôt, la disponibilité du signe doit être appréciée à cette date soit le 16 février 2015. Madame Annabella A épouse A est titulaire, avec Monsieur Philippe A, des droits de propriété intellectuelle sur la marque française verbale « GT DESIGN » déposée le 16 février 2015 sous le numéro 4157220 pour désigner après limitation du 12 août 2015 les produits suivants des classes 12 et 16 : - en classe 12 : « cadres, béquilles, freins, guidons, jantes, pédales de cycles, pneumatiques, roues ou selles de cycles » ; - en classe 16 : « articles pour reliures ; articles de papeterie, à savoir autocollants ; adhésifs (matières collantes) pour la papeterie ou le ménage ; machines à écrire et articles de bureau (à l'exception des meubles) ; matériel d'instruction ou d'enseignement (à l'exception des appareils) ; caractères d'imprimerie ; papier ; carton ; boîtes en carton ou en papier ; affiches ; albums ; cartes ; journaux ; prospectus ; brochures ; calendriers ; patrons pour la couture ; mouchoirs de poche en papier ; serviettes de toilette en papier ; linge de table en papier ; papier hygiénique ; sacs et sachets (enveloppes, pochettes) en papier ou en matières plastiques pour l'emballage ; sacs à ordures en papier ou en matières plastiques. » En application du droit interne interprété à la lumière de la directive 2008/95/CE du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des États membres conformément au principe posé par l'arrêt V on Colson et Kamann c. Land Nordhein-W estfalen du 10 avril 1984, l'examen de la pertinence de l'antériorité d'une marque suppose une comparaison de signes enregistrés et des produits et services visés à l'enregistrement et, en l'absence d'identité à la fois entre les signes et entre les produits et services, l'appréciation d'un risque de confusion. Le risque de confusion doit faire l'objet d'une appréciation abstraite d'une part en considération d'un public pertinent correspondant au consommateur des produits et services concernés normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, et d'autre part par comparaison entre le signe litigieux utilisé et la marque protégée par référence à son enregistrement indépendamment de ses conditions d'exploitation mais également par comparaison des services et produits visés dans l'enregistrement et des produits et services commercialisés sous le signe litigieux. Le risque de confusion est en outre analysé globalement : tous les facteurs pertinents, dont la notoriété de la marque et l'importance de sa distinctivité, doivent être pris en considération, l'appréciation globale de la similitude de la marque et du signe litigieux devant être fondée sur l'impression d'ensemble qu'ils produisent au regard de leurs éléments distinctifs et dominants. Le public pertinent, au regard des produits concernés qui sont des produits de consommation courante, est le consommateur français normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Monsieur Thibaut S oppose uniquement son nom de domaine. Aussi, les arguments des parties sur l'usage par celui-ci d'un nom commercial sont sans pertinence. La dénomination sociale, le nom commercial, l'enseigne ou le nom de domaine sont des signes d'usage soumis au principe de spécialité. Dès lors, ils ne peuvent constituer un droit antérieur au sens de l'article L 711-4 du code de la propriété intellectuelle qu'à compter de la date de leur exploitation effective dans le commerce indépendamment de l'accomplissement de toutes formalités qui président à leur publicité ou à leur enregistrement, tels l'inscription d'une dénomination sociale ou d'un nom commercial au RCS ou la réservation d'un nom de domaine, et uniquement si un risque de confusion dans l'esprit du public est démontré en considération de l'identité ou la similitude des signes ainsi que des produits et services objets des activités concurrentes et de la connaissance des signes par les consommateurs sur le territoire national, leur rayonnement devant être national dans le cadre de l'article L 711-4 du code de la propriété intellectuelle. Il est constant que Monsieur Thibaut S, quoique le Whois qu'il produit en pièce 5 ne mentionne pas son nom, a réservé le nom de domaine gtdesign.fr le 7 avril 2013. Il démontre par la production des captures d'écran non contestées en leur teneur du site Google Analytics (pièce 15) que son site a été visité, et par conséquent exploité, à compter du mois d'octobre 2013, soit près de 2 ans avant le dépôt de la marque litigieuse, ce que ne contestent d'ailleurs pas les demandeurs. Le fait que Madame Annabella A épouse A ait commencé à exploiter son site antérieurement à Monsieur Thibaut S ne lui conférerait aucune priorité au titre du droit des marques, l'enregistrement étant seul constitutif de droit au sens de l'article L 712-1 du code de propriété intellectuelle et l'unique droit de priorité envisageable étant le droit de priorité unioniste qui est étranger aux débats. Il serait en revanche de nature à écarter la qualification de droit antérieur opposable par Monsieur Thibaut S. (Futefois, Madame Annabella A épouse A n'apporte aucun élément étayant son affirmation puisque les seules pièces probantes (à les supposer communiquées puisqu'elles ne sont pas numérotées et ne figurent pas en bordereau), qui éclairent sa déclaration de chiffre d'affaires pour le troisième trimestre 2013 (pièce 5), sont des factures d'août 2013 mentionnant certes le signe « GT-DESIGN.FR » mais désignant les acheteurs sous la mention « client Ebay », toutes les autres pièces étant des impressions d'écran n'ayant aucune date certaine et dont l'authenticité du contenu n'est pas garantie ou des attestations des demandeurs eux-mêmes, pièces n'ayant pas plus de valeur que leurs propres déclarations que leur redondance n' élève pas au rang de preuve. Il est ainsi évident que le site gt-design.fr, dont rien ne prouve le contenu à une date quelconque et qui est le seul droit antérieur invoqué par Madame Annabella A épouse A, était en réalité un site de redirection vers une place de marché en ligne ce qui ne constitue pas un acte d'exploitation. Or, la marque déposée par Madame Annabella A épouse A et Monsieur Philippe A est constituée d'un élément verbal unique composé des lettres « GT » et de l'anglicisme « DESIGN ». Au regard des produits couverts, le public pertinent comprend aisément le sens de ces deux termes descriptifs qui désignent des articles de décoration relevant du domaine automobile, « GT » étant les initiales de Grand Tourisme, expression visant une catégorie de voitures réputées pour leurs performances. Ce signe est identique à celui constituant le nom de domaine exploité par Monsieur Thibaut S, le fait que « GT » et « design » soit ou non accolé étant strictement insignifiant. Par ailleurs, il est constant que les produits exploités par Monsieur Thibaut S sur son site internet gtdesign.fr sont identiques à ceux couverts par la marque de Madame Annabella A épouse A et de Monsieur Philippe A, les parties s'étant d'ailleurs dispensées de toute analyse comparée à cet égard. En conséquence, sans qu'il soit nécessaire de démontrer l'existence d'un risque de confusion, l'enregistrement de la marque n° 4157220 sera annulé pour tous les produits visés. Privés de droit sur leur marque, Madame Annabella AUMONT épouse ANDRE et Monsieur Philippe ANDRE n'ont ni qualité ni intérêt à agir en contrefaçon. Leurs demandes au titre de la contrefaçon sont en conséquence irrecevables en application des articles L 716-5 du code de la propriété intellectuelle et 31,32 et 122 du code de procédure civile. De ce fait, la fin de non-recevoir tirée de la prescription opposée par Monsieur Thibaut S est sans objet. 2°) Sur la concurrence déloyale et parasitaire Moyens des parties Tandis que Madame Annabella A épouse A explique que les faits de contrefaçon « constituent en outre des actes de concurrence déloyale en violation de l'article 1382 du Code Civil », Monsieur Philippe A ne développe à son tour aucune argumentation complémentaire et reconventionnellement précise qu'il « est acquis que le nom de domaine « gt-design.fr », enregistré par Mme ANDRE postérieurement à celui enregistré par M. SCHERRER (« gtdesign »), contrevient aux droits de ce dernier , en ce qu'il porte manifestement à confusion ». Appréciation du tribunal En vertu des dispositions des articles 13 82 et 13 83 (devenus 140 et 1241) du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, chacun étant responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence. La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce qui implique qu'un signe qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit sous certaines conditions tenant à l'absence de faute par la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit, circonstance attentatoire à l'exercice paisible et loyal du commerce. L'appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté d'usage, l'originalité et la notoriété de la prestation copiée. Le parasitisme, qui s'apprécie dans le même cadre que la concurrence déloyale dont il est une déclinaison mais dont la constitution est toutefois indifférente au risque de confusion, consiste dans le fait pour une personne physique ou morale de profiter volontairement et déloyalement sans bourse délier des investissements, d'un savoir- faire ou d'un travail intellectuel d'autrui produisant une valeur économique individualisée et générant un avantage concurrentiel. Il est constant que les parties, qui visent le même marché et la même clientèle, sont en situation de concurrence directe. Sur la demande principale Le tribunal relève que Monsieur Philippe A précise expressément former sa demande indemnitaire exclusivement au titre de la contrefaçon en motivant ce choix par le fait qu'il n'exploite pas la marque (page 2 de ses écritures). Aussi, seule Madame Annabella A épouse A agit au titre de la concurrence déloyale et parasitaire. L'action en concurrence déloyale, qui échappe aux règles spéciales régissant l'action en contrefaçon qui sanctionne une atteinte à un droit réel privatif, ne peut être invoquée cumulativement à cette dernière qu'en présence d'un fait dommageable fautif distinct du comportement constitutif de la contrefaçon. La sanction du cumul de demandes indemnitaires fondées sur des faits identiques au titre de la responsabilité délictuelle n'est pas, à la différence de celle des actions fondées cumulativement sur les responsabilités contractuelle et délictuelle, l'irrecevabilité des deux demandes mais uniquement de celle des deux qui est présentée à titre complémentaire. Elle peut en revanche l'être à titre subsidiaire pour des faits identiques à charge pour la partie qui l'invoque de les qualifier et de les motiver conformément aux règles propres à la concurrence déloyale et parasitaire, le titulaire d'un droit de propriété intellectuelle ne pouvant jouir de plus de droits sur le terrain de la concurrence déloyale et parasitaire qu'il n'en a en application du droit des marques et l'action fondée sur la responsabilité délictuelle ne pouvant constituer une protection de repli par rapport à celle, spéciale, offerte par l'action en contrefaçon. Madame Annabella A épouse A invoque lapidairement des faits strictement identiques à ceux développés au soutien de son action en contrefaçon. Si l'irrecevabilité, et non le rejet, de celle-ci lui permet théoriquement de présenter cette demande additionnelle, la nature de la fin de non-recevoir ici retenue emporte inévitablement le rejet de ses prétentions : Monsieur Thibaut S justifiant d'un usage antérieur de son nom de domaine gtdesign.fr, aucune faute ne peut lui être imputée. Le tribunal relève surabondamment que Madame Annabella A épouse A forme une demande indemnitaire unique sur le fondement de la contrefaçon et de la concurrence déloyale bien que les conditions de réparation soient distinctes et ne consacre pas une ligne à l'explication de son préjudice qui n'est pas étayé par la moindre pièce, carences cumulées qui commandent à nouveau le rejet de sa prétention financière. Sur la demande reconventionnelle Conformément aux articles 12 et 16 du code de procédure civile, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables et doit donner ou restituer dans le respect du principe de la contradiction leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée. Quoique son argumentation soit également plus que succincte, Monsieur Thibaut S évoque une atteinte à son nom de domaine et un risque de confusion et vise dans le « par ces motifs » de ses écritures l'article 1382 du code civil, le tribunal en déduisant qu'il sollicite la radiation du nom de domaine " gt-design.fr " sur le fondement de la concurrence déloyale. Pour les raisons déjà énoncées au titre de la demande reconventionnelle en nullité transposables pour la comparaison des signes et des produits et pour la preuve de la réalité et de l'antériorité de l'exploitation du site " gtdesign.fr ", rien n'étant par ailleurs opposé sur les conditions de commercialisation effective des produits, il sera fait droit à ses demandes de radiation et d'interdiction sous astreinte conformément à l'article L 131-1 du code des procédures civiles d'exécution, le risque de confusion étant évident au regard de l'identité des signes d'une part et des produits d'autre part. Les mesures d'interdiction seront toutefois circonscrites au domaine de l'activité de Monsieur Thibaut S précisé en page 2 de ses écritures (« fabrication et de vente de produits adhésifs décoratifs pour les véhicules et motos et pour la décoration intérieure ») et ne seront pas prononcées à l'encontre de Monsieur Philippe A à qui aucun fait n'est imputé ni imputable. En revanche, si, selon la Cour de cassation, un acte de concurrence déloyale cause nécessairement un préjudice à sa victime, celle-ci n'est pas pour autant dispensée de la preuve élémentaire de sa mesure. En l'absence de toute explication livrée par Monsieur Thibaut S et de toute pièce permettant au tribunal de déterminer un quantum quelconque, sa demande indemnitaire reconventionnelle sera rejetée. 3°) Sur les demandes accessoires Succombant au litige, Madame Annabella A épouse A et Monsieur Philippe A, dont la demande au titre des frais irrépétibles sera rejetée, seront condamnés in solidum à payer à Monsieur Thibaut S la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens de l'instance. Inutile au regard de la solution du litige, l'exécution provisoire du jugement ne sera pas ordonnée conformément à l'article 515 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe le jour du délibéré, par jugement contradictoire et rendu en premier ressort, Prononce la nullité de l'enregistrement de la marque française verbale « GT DESIGN » déposée le 16 février 2015 sous le numéro 4157220 pour tous les produits et services visés à l'enregistrement ; Ordonne la transmission de la décision, une fois celle-ci devenue définitive, à l'INPI aux fins d'inscription au Registre national des marques, à l'initiative de la partie la plus diligente et aux frais de Madame Annabella A épouse A et de Monsieur Philippe A; Déclare en conséquence irrecevables les demandes de Madame Annabella A épouse A et de Monsieur Philippe A au titre de la contrefaçon ; Constate en conséquence que la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action opposée par Monsieur Thibaut S est sans objet ; 1 Rejette les demandes de Madame Annabella A épouse A au titre de la concurrence déloyale et parasitaire ; Dit qu'en exploitant le site internet " gt-design.fr " pour commercialiser des produits identiques à ceux vendus par Monsieur Thibaut S sur son site " gtdesign.fr " dans des conditions créant un risque de confusion dans l'esprit du consommateur, Madame Annabella A épouse A a commis à l'encontre de Monsieur Thibaut S des actes de concurrence déloyale ; Enjoint en conséquence à Madame Annabella A épouse A de procéder à la radiation du nom de domaine gt-design.fr sous astreinte de 30 euros par jour de retard pendant un délai de 2 mois à compter de l'expiration du délai d'un mois courant dès la signification du jugement ; Interdit en outre à Madame Annabella A épouse A d'utiliser le signe « GT DESIGN » ou « GT-DESIGN » pour fabriquer et vendre des produits adhésifs décoratifs pour les véhicules et motos et pour la décoration intérieure sous les mêmes conditions de délais et d'astreinte mais par infraction constatée ; Se réserve la liquidation de ces astreintes ; Rejette en revanche la demande indemnitaire reconventionnelle de Monsieur Thibaut S au titre de la concurrence déloyale et parasitaire ; Condamne in solidum Madame Annabella A épouse A et Monsieur Philippe A à payer à Monsieur Thibaut S la somme de DEUX MILLE euros (2 000 €) en application de l'article 700 du code de procédure civile ; Condamne in solidum Madame Annabella A épouse A et Monsieur Philippe A à supporter les entiers dépens de l'instance ; Dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire du jugement.