Logo pappers Justice

Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 mai 2005, 04-86.060

Synthèse

Voir plus

Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
10 mai 2005
Cour d'appel de Grenoble
17 septembre 2004

Texte intégral

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Sur le rapport de Mme le conseiller PALISSE, les observations de Me BLONDEL, de la société civile professionnelle DEFRENOIS et LEVIS et de la société civile professionnelle RICHARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DAVENAS ; Statuant sur les pourvois formés par : - X... Milady - Y... Elisabeth, épouse X..., parties civiles, contre l'arrêt de la cour d'appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 17 septembre 2004, qui, dans la procédure suivie contre Patrice Z... et Thierry A... du chef d'homicide involontaire et infractions à la réglementation du travail, a prononcé sur les intérêts civils ; Joignant les pourvois en raison de la connexité ; Vu le mémoire en demande, commun aux demanderesses et les mémoires en défense produits ;

Sur le moyen

unique de cassation, pris de la violation des articles R. 237-1, R. 237-2, R. 237-6 et R. 237-7 du Code du travail, violation des articles 221-6, 221-8 et 221-10 du Code pénal, violation de l'article 1382 du Code civil et violation de l'article 593 du Code de procédure pénale ; "en ce que la Cour a déclaré irrecevable la constitution de partie civile s'agissant des faits reprochés à Thierry A... et a rejeté toutes autres prétentions plus amples ou contraires des parties civiles ; "aux motifs que s'agissant des faits reprochés à Thierry A..., d'une part, que selon les termes de la prévention, il est d'abord reproché à Thierry A... d'avoir méconnu les dispositions de l'article L. 230-2 du Code du travail ; que contrairement aux affirmations des parties civiles dans leurs conclusions communes, les dispositions des articles L. 231-1 et L. 231-2 ne sont nullement visées par l'ordonnance de renvoi, seul acte de saisine de la juridiction répressive et que la simple lecture de l'article L. 263-2 du Code du travail démontre que les dispositions de l'article L. 230-2 dudit Code ne sont pas pénalement sanctionnées qu'en conséquence Thierry A... ne peut à quelque titre que ce soit être recherché en responsabilité pénale de ce chef ; "aux motifs encore qu'en l'état de la prévention dont les parties civiles ne sauraient demander la modification en cause d'appel, quel que soit le motif surabondant sur ce point du jugement attaqué, il ressort de l'examen attentif du présent dossier et des débats devant la Cour, notamment des réponses aux questions qu'elle a posées, que, dans les circonstances de l'espèce le travail entrepris par Jean-Paul X... le jour des faits de la cause ne saurait être analysé en une activité interférant avec celles de la société alors dirigée par Thierry A... au sens des articles R. 237-6 et R. 237-7 du Code du travail, précisément destinées à prévenir les risques résultant d'une interférence d'activités inexistante en l'espèce, qu'en conséquence les dispositions visées à la prévention, dont la violation serait à l'origine du décès de Jean-Paul X... selon l'accusation, n'étant pas applicables en l'espèce, Thierry A... ne saurait davantage être recherché en responsabilité pénale de ce chef et qu'au surplus et en toute hypothèse n'a pas été rapportée à l'encontre de Thierry A... l'existence d'une faute revêtant une certaine intensité et une particulière évidence, constitutives d'une faute caractérisée au sens de l'article 121-3 du Code pénal, tant par la gravité des carences supposées que par celle du risque de mort auquel était exposée la victime, alors que dans les circonstances de l'espèce, les éventuels actes ou omissions de Thierry A... ne pourraient être que dans un rapport de causalité indirecte au sens de l'article 121-3 précité avec le décès de Jean-Paul X... ; qu'en effet doit être considéré comme indirecte la causalité d'un acte ou d'une omission qui, sans entrer directement dans la production du dommage corporel, a cependant créé ou contribué à créer la situation à l'origine du dommage ou à l'éviter ; "alors que, d'une part, l'arrêt qui se borne à affirmer que le travail entrepris par la victime le jour des faits ne pouvait être analysé en une "activité interférant avec celles de la société A..." cependant que par ailleurs la cour d'appel relève qu'intervenaient à l'opération de retaillage des pneumatiques du camion de la société A... non seulement M. B..., mécanicien des Etablissements A... mais également M. C..., chauffeur du tracteur de la société A... qui déplaça ledit tracteur (cf p. 6 de l'arrêt), la Cour ne justifie pas légalement son arrêt au regard des textes cités au moyen ; "alors que, d'autre part, et en toute hypothèse, la Cour ne pouvait se borner à se prononcer au regard de "l'inexistence" d'une interférence d'activités entre les deux sociétés, sans rechercher si, au regard des circonstances de l'espèce, l'accident n'était pas intervenu dans le cadre de l'exécution d'une opération ou de la participation à l'exécution d'une opération au sens de l'article R. 237-1 du Code du travail, c'est à dire d'une prestation de service ou d'un travail réalisé par les sociétés en présence "afin de concourir à un même objectif" et ce d'autant que les salariés de la société A... sont intervenus au moment du drame, qu'ainsi l'arrêt attaqué n'est pas davantage légalement justifié ; "et alors enfin qu'à supposer même qu'il puisse être admis comme le fait la cour d'appel que les éventuels actes ou omissions commis par Thierry A... se trouvaient dans un rapport de causalité indirecte avec le dommage au sens de l'article L. 121-3 du Code pénal, la chambre des appels correctionnels ne pouvait se dispenser, ainsi qu'elle l'a fait, de rechercher si Thierry A... n'avait pas violé "de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou les règlements" en étant nécessairement intervenu sur le site ne serait-ce que par l'intermédiaire de deux de ses salariés M. B... mécanicien des Etablissements A... et M. C... chauffeur du tracteur de la société A... laissé le salarié victime travailler dans des conditions extrêmement dangereuses ; qu'ainsi l'arrêt attaqué n'est pas légalement justifié au regard des textes cités au moyen" ; Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, et en répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, exposé les motifs pour lesquels elle a estimé que la preuve des infractions reprochées n'était pas rapportée à la charge de Thierry A..., en l'état des éléments soumis à son examen, et a ainsi justifié sa décision déboutant les parties civiles de leurs prétentions ;

D'où il suit

que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ; Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE

les pourvois ; DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du Code de procédure pénale au profit de Milady X... et Elisabeth X..., parties civiles ; DECLARE IRRECEVABLE la demande de Thierry A... présentée sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ; Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Palisse conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ; Greffier de chambre : M. Souchon ; En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;