TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS
JUGEMENT rendu le 25 octobre 2019
3ème chambre 3ème section
N° RG 16/18392 - N° Portalis 352J-W-B7A-CJOAU
Assignation du 08 décembre 2016
DEMANDEURS
Société ORMCO CORPORATION
[...]
92867 ORANGE (ETATS-UNIS)
Société
ORMCO FRANCE
6 square de l'Opéra Louis Jouvet
75009 PARIS
représentées par Maître Denis MONEGIER DU SORBIER de l'AARPI HOYNG ROKH MONEGIER VERON, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0512
DÉFENDEUR
Société
ORTHO PARTNER S.A.R.L.
[...]
93100 MONTREUIL
représentée par Me Caroline CASALONGA, C, SAS SPE D'AVOCATS & CONSEILS EN PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE avocat au barreau de PARIS, vestiaire #K0177
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Carine G, Vice-Président
Laurence B, Vice-Président
Elise MELLIER, Juge
assisté de Marie-Aline P, Greffier
DÉBATS
À l'audience du 11 septembre 2019 tenue en audience publique
JUGEMENT
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort
La société ORMCO CORPORATION (ci-après « ORMCO ») créée en 1960, spécialisée dans le domaine de l'orthodontie, se revendiquant pionnière dans ce domaine, par la recherche permanente de solutions orthodontiques d'avant-garde et la commercialisation de nombreuses innovations majeures dans ce domaine, est titulaire du brevet EP 1 679 048, intitulé « Bracket orthodontique à ligature automatique »,
maintenu en vigueur par le paiement des annuités, dont la demande a été déposée le 30 décembre 2005 et qui a été délivré et publié le 6 août 2008.
La partie française du brevet a été limitée suivant décision du Directeur de l'INPI du 22 août 2016.
La société
ORMCO FRANCE est le distributeur des produits ORMCO en France, où le groupe est présent depuis 1973.
Ayant constaté la commercialisation par la société
ORTHO PARTNER, de produits orthodontiques, dont différentes lignes de boîtiers orthodontiques autoligaturants (Heimas V, Heimas Mini, G S ou Genius Metal, G Crystal), qu'elle estime similaires aux siens, la société ORMCO après y avoir été autorisée le 02 novembre 2016, a fait pratiquer une saisie-contrefaçon au siège de la société
ORTHO PARTNER, suivant procès-verbal du 8 novembre 2016.
Par acte du 8 décembre 2016, les sociétés ORMCO CORPORATION et
ORMCO FRANCE ont fait assigner la société
ORTHO PARTNER devant ce tribunal, en contrefaçon de la partie française du brevet EP 1 679 048 et en concurrence déloyale.
Dans le dernier état de leurs prétentions, suivant conclusions signifiées par voie électronique le 08 mars 2019, les sociétés ORMCO CORPORATION et
ORMCO FRANCE sollicitent du tribunal de :
Et par application des articles L. 611-1 et suivants, L. 613-1 et suivants,
L. 615-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle, et de l'article
1240 du code civil, ainsi qu'au vu des pièces énumérées au bordereau annexé aux présentes conclusions,
-Dire la société ORMCO CORPORATION et la société
ORMCO FRANCE recevables et fondées en leurs demandes, -Débouter la société
ORTHO PARTNER de toutes ses demandes, fins et conclusions, en particulier reconventionnelles, comme étant si ce n'est irrecevables, à tout le moins dénuées de tout fondement de droit ou de fait,
-Dire et juger que les revendications 1, 5, 6, 7, 8, 10, 11, 12, 13, 14, 15 et 16 de la partie française du brevet EP 1 679 048 sont valables, -Dire et juger que la société
ORTHO PARTNER, en important, offrant, mettant dans le commerce, exportant et détenant aux fins précitées des produits reproduisant les caractéristiques des revendications 1, 5, 6, 7, 8, 10, 11, 12, 13, 14, 15 et 16 de la partie française du brevet EP 1 679 048, dont la société ORMCO CORPORATION est propriétaire, sans son consentement, commet des actes de contrefaçon au sens de l'article L. 613-3 a/ du code de la propriété intellectuelle,
En conséquence,
-Faire interdiction à la société
ORTHO PARTNER, directement ou indirectement par toute personne physique ou morale interposée, d'offrir, de mettre dans le commerce, d'utiliser, d'importer, d'exporter, ou de détenir aux fins précitées, des produits reproduisant les
caractéristiques des revendications 1, 5, 6, 7, 8, 10, 11, 12, 13, 14, 15 et 16 de la partie française du brevet EP 1 679 048, dont la société ORMCO CORPORATION est propriétaire, et ce sous astreinte de 5.000 euros par jour de retard, passé un délai d'un mois à compter de la signification du jugement à intervenir,
-Ordonner à la société
ORTHO PARTNER, en application de l'article
L. 615-7-1 du code de la propriété intellectuelle, le rappel des circuits de distribution de l'ensemble des produits livrés à ses distributeurs à la date de signification du jugement à intervenir, pour les remettre à la société ORMCO CORPORATION, et ce sous astreinte de 5.000 euros par jour de retard, passé un délai d'un mois à compter de la signification du jugement à intervenir,
-Condamner la société
ORTHO PARTNER à payer à la société ORMCO CORPORATION, en réparation du préjudice commercial causé par la contrefaçon, la somme de 260.205 euros à titre de dommages et intérêts, quitte à parfaire et à actualiser, -Condamner la société
ORTHO PARTNER à payer à la société ORMCO CORPORATION, en réparation du préjudice moral causé par la contrefaçon, la somme de 150.000 euros à titre de dommages et intérêts, quitte à parfaire et à actualiser,
-Condamner la société
ORTHO PARTNER à payer à la société
ORMCO FRANCE, en réparation du préjudice commercial causé par la contrefaçon, et en application de l'article
1240 du code civil, la somme de 758.931 euros à titre de dommages et intérêts, quitte à parfaire et à actualiser,
-Ordonner la publication du jugement à intervenir en tête de la page d'accueil du site Internet de la société
ORTHO PARTNER accessible à l'adresse http://orthographiquement, dans une police de caractères de 20 pts au moins, mentionnant «
ORTHO PARTNER a été condamnée en France pour contrefaçon du brevet EP 1 697 048 au profit de la société ORMCO / O P Jude tau fringue Cormorans patent EP 1 697 048 in France », et ce pendant une durée de 3 mois, aux seuls frais de la société défenderesse, sous astreinte de 5.000 (cinq mille) euros par jour de retard,
-Condamner la société
ORTHO PARTNER, en application de l'article
L. 615-7-1 du code de la propriété intellectuelle, à prendre en charge les frais de publication du jugement à intervenir dans 5 journaux ou revues au choix de la société ORMCO CORPORATION, le coût de chaque publication étant fixé à la somme de 5.000 euros hors taxes, -Ordonner à la société
ORTHO PARTNER, si elle persistait à contester l'évaluation du préjudice subi par les sociétés demanderesses, de produire, dans le délai d'un mois à compter de la signification du jugement à intervenir, sous astreinte de 2.500 euros par jour de retard, tous documents établissant la marge brute obtenue pour l'ensemble des produits précités, la marge brute devant s'entendre du prix de vente moins le coût d'achat et le coût de commercialisation directe des produits, ces informations devant être certifiées par un commissaire aux comptes,
-Dire que le tribunal se réservera la liquidation des astreintes ainsi prononcées, en application de l'article
L. 131-3 du code des procédures civiles d'exécution,
-Condamner la société
ORTHO PARTNER à verser aux sociétés ORMCO CORPORATION et
ORMCO FRANCE la somme de 210.000 euros, en ce compris les frais de saisie-contrefaçon, au titre de l'article
700 du code de procédure civile,
-Ordonner l'exécution provisoire des dispositions du jugement à intervenir relatives aux mesures d'interdiction, de rappel des produits, de production d'information, et aux dommages et intérêts, nonobstant appel et sans constitution de garantie,
-Condamner la société
ORTHO PARTNER aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Denis M, par application de l'article
699 du code de procédure civile. En réplique dans le dernier état de ses prétentions, signifiées par voie électronique le 18 mars 2019, la société
ORTHO PARTNER demande au tribunal de :
Vu l'article
L. 614-12 du code de la propriété intellectuelle et les articles 56 et 138-1 a) de la Convention sur le Brevet Européen,
Vu les articles
6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et
9 du code de procédure civile, ensemble le principe de loyauté dans l'administration de la preuve,
Vu les pièces,
-Dire et juger que la société
ORTHO PARTNER est recevable et bien fondée en ses demandes, et y faisant droit :
-Dire et juger que la société ORMCO CORPORATION et la société
ORMCO FRANCE sont irrecevables et à tout le moins, mal fondées en toutes leurs demandes,
-Prononcer la nullité des revendications indépendantes 1, 5 et 15 et des revendications dépendantes 10 à 14 et 16 de la partie française du brevet EP-B-1 679 048,
-Débouter la société ORMCO CORPORATION de l'ensemble de ses demandes,
-Ordonner la transmission du jugement à intervenir à l'Institut National de la Propriété Industrielle aux fins d'inscription au Registre National des Brevets,
À titre subsidiaire :
-Dire et juger que la société ORMCO CORPORATION n'établit pas la matérialité de la contrefaçon ou à tout le moins que les produits
ORTHO PARTNER ne constituent pas une contrefaçon des revendications indépendantes 1, 5 et 15 et des revendications dépendantes 10 à 14 et 16 du brevet EP-B-1 679 048,
-Débouter la société ORMCO CORPORATION de l'ensemble de ses demandes concernant la contrefaçon,
À titre plus subsidiaire :
-Dire que les mesures réparatrices de la société ORMCO CORPORATION et de la société
ORMCO FRANCE ne sont pas fondées,
En tout état de cause :
-Condamner in solidum la société ORMCO CORPORATION et la société
ORMCO FRANCE à payer à la société
ORTHO PARTNER une somme de 150.000 euros, sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile,
-Condamner in solidum la société ORMCO CORPORATION et la société
ORMCO FRANCE aux entiers dépens de l'instance et dire qu'ils seront recouvrés conformément à l'article
699 du code de procédure civile.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 19 mars 2019 et l'affaire plaidée le 11 septembre 2019.
Conformément aux dispositions de l'article
455 du code de procédure civile, il est fait référence aux écritures précitées des parties, pour l'exposé de leurs prétentions respectives et les moyens qui y ont été développés.
MOTIFS
DE LA
DÉCISION
Sur le brevet 1679 048
Ce brevet, dont la demande a été déposée le 30 décembre 2005, délivré le 06 août 2008, intitulé « bracket orthodontique à ligature automatique » concerne un boîtier autoligaturant comprenant un corps, une fente pour un arc et une glissière pour ligature (élément déplaçable qui, en position fermée, retient l'arc).
Les boîtiers orthodontiques sont utilisés dans les traitements correcteurs destinés à améliorer l'occlusion d'un patient. Ces boîtiers sont fixés sur les dents du patient et viennent en prise avec un arc qui exerce des forces correctrices contraignant les dents à se positionner correctement. L'arc est maintenu dans la fente de chaque boîtier, par des ligatures traditionnelles (joints toriques ou fils métalliques) ou par un boîtier autoligaturant, qui présente un élément déplaçable de type loquet ou glissière, destiné à maintenir l'arc dans la fente du boîtier [0002].
Toutefois, les boîtiers autoligaturants présentent des inconvénients, au montage lorsque la molaire sur laquelle ils sont destinés à être montés présente une rotation sévère [0003] et à l'utilisation, parce qu'ils sont difficiles à manipuler dans la cavité buccale [0007] (nécessitent l'usage de pinces ou du fait de leur taille) ou parce qu'ils génèrent une occlusion entre le boîtier et les dents de la mâchoire opposée, des contacts entre ceux-ci [0004], un contact avec le tissu gingival et un inconfort pour le patient[0005].
Un document de l'art antérieur (brevet WILDMAN US 5613850), cité à la description, décrit un boîtier orthodontique, comprenant un corps, une fente pour arc et une glissière pour ligature, qui se déplace le long d'un guide selon un plan de translation particulier [0009], afin de pallier le contact entre la gencive et la glissière.
L'invention concerne un dispositif pour traitement orthodontique comprenant un boîtier autoligaturant, une fente pour arc et une glissière pour ligature, opérant un plan de translation déterminé (entre 10 degrés et 25 degrés et de préférence 20 degrés par rapport au plan de base [00011]), où la glissière se déplace vers la dent pour atteindre la position fermée et dans la direction opposée à la dent, pour atteindre la position ouverte [0010 lignes 22 à 27] et prévoit, pour assurer un ajustement étroit entre l'arc et la fente pour arc, une glissière qui comporte deux portions, la première portion étant en prise avec le guide d'engrènement et la seconde étant, en position fermée, parallèle au plan de base et recouvrant la fente pour arc [0012].
La face opposée du corps du boîtier a une forme profilée, de manière à supprimer une interférence occlusante entre le boîtier et les dents de la mâchoire opposée et peut comprendre un évidement qui définit une surface plane et sert de point de prise pour une pince [0013].
Il est également prévu des mécanismes destinés à empêcher la glissière de se désenclencher accidentellement ou par inadvertance du corps du boîtier, grâce à une portion en saillie ou réceptrice du corps du boîtier qui vient en prise avec la portion correspondante de la glissière, broche de retenue, rainure de retenue [0014, 0015].
Le brevet est illustré par sept figures représentant une vue en perspective du dispositif en position ouverte (figure 1) ou fermée (figure 2), une vue en coupe du boîtier définissant le plan de translation (figure 3), les mécanismes de retenue de la glissière (figure 4A par broche de retenue, figure 4B par rainure de retenue et figures 5A et 5B pour une bille de retenue)
L'invention a pour objet de pallier les inconvénients des boîtiers orthodontiques autoligaturants antérieurs en proposant un tel dispositif qui assure un parfait ajustement de l'arc de contention, avec la fente de l'arc et qui règle les autres inconvénients.
Le brevet tel que limité (pièce ORMCO n°5) comprend 17 revendications, dont les revendications 1, 5 et 15 indépendantes mais ayant un socle commun de caractéristiques numérotées par les demandeurs A à F, les revendications 6 à 8 et 10 à 13 dépendantes de la revendication 5 et la revendication 14 dépendante de la revendication 15.
La limitation a eu pour effet de combiner les revendications 1 et 2 telles que délivrées le 06 août 2008, dans la revendication 1 limitée, de combiner les revendications 1 et 6 dans la revendication 5 limitée et de combiner les revendications 1 et 15 dans la revendication 15 limitée.
Seules les revendications 1, 5 à 8, 10 à 16 sont invoquées au soutien de l'action en contrefaçon.
L'homme du métier est un concepteur ou un fabricant de matériel orthodontique, qui dispose de connaissances dans le domaine des boîtiers orthodontiques autoligaturants et en mécanique.
Sur la validité du brevet
La société
ORTHO PARTNER poursuit la nullité des revendications indépendantes 1, 5 et 15 du brevet, pour défaut d'activité inventive, au regard du brevet WILDMAN (US 5 613 850 déposé le 17 octobre 1995) ou de la combinaison de celui-ci avec le brevet HEISER (US2004/0170942 déposé le 26 février 2004), qui concernent tous deux, des boîtiers orthodontiques auto-ligaturants.
L'article 138-1-a/ de la CBE dispose que le brevet européen est déclaré nul par les tribunaux d'un État contractant « si l'objet du brevet européen n'est pas brevetable en vertu des articles 52 à 57 » , et notamment s'il contrevient aux dispositions de l'article 56 du même texte selon lequel « une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d'une manière évidente de l'état de la technique ».
Afin d'apprécier le caractère inventif, il faut déterminer si, eu égard à l'état de la technique, l'homme du métier, au vu du problème que l'invention prétend résoudre, aurait obtenu la solution technique revendiquée par le brevet en utilisant ses connaissances professionnelles et en effectuant de simples opérations. L'activité inventive se définit au regard du problème spécifique auquel est confronté l'homme du métier.
-revendication 1
Selon la défenderesse, le brevet WILDMAN US 5613850 divulgue la totalité des caractéristiques communes A à F, des revendications 1, 5 et 15 du brevet.
En ce qui concerne les caractéristiques G, H et I de la revendication 1, elles sont, selon elle, dépourvues d'activité inventive, au vu des connaissances générales en mécanique orthodontique de l'homme du métier, au regard de la combinaison de celles-ci avec le brevet WILDMAN ou de la combinaison des brevets WILDMAN et HEISER.
La demanderesse expose pour sa part, que seul le brevet tel que limité doit être considéré et que les documents WILDMAN et HEISER ne sont pas pertinents ou ne sont pas en tout état de cause, destructeurs d'activité inventive.
Sur ce,
La revendication 1 se lit comme suit :
A) Boîtier orthodontique auto-ligaturant (10) produisant le couplage d'un arc (18) à une dent (23), qui comprend un corps (12) configuré pour être monté sur la dent,
B) ledit corps du boîtier comportant une fente pour arc (16) dont la surface basale (40) définit généralement un plan de base (58) et
C) un guide d'engrènement à glissière (56) qui définit généralement un plan de translation (60),
D) ledit plan de translation (60) étant à un angle aigu par rapport au dit plan de base (58), et
E) une glissière pour ligature (14) qui est en prise dans ledit guide d'engrènement à glissière (56) et déplaçable par rapport au dit guide d'engrènement à glissière, parallèlement au dit plan de translation (60) entre une position ouverte dans laquelle l'arc (18) est insérable dans ladite fente pour arc (16) et une position fermée dans laquelle la glissière de ligature (14) retient l'arc (18) dans ladite fente pour arc
F) caractérisé en ce que le guide d'engrènement à glissière (56) est disposé de façon à ce que le déplacement de la glissière pour ligature (14) par rapport au guide d'engrènement à glissière (56) vers la position fermée déplace la glissière pour ligature (14) en direction occlusale ou gingivale (23) et à ce que le déplacement de la glissière pour ligature (14) par rapport au guide d'engrènement à glissière (56) vers la position ouverte déplace la glissière pour ligature (14) en direction gingivale ou occlusale, respectivement.
Ces caractéristiques A à F sont communes aux revendications 5 et 15.
La revendication 1 se poursuit par :
G) où ladite glissière pour ligature (14) comprend une surface qui fait face au dit guide d'engrènement à glissière (56) et présente une première et une seconde portion, ladite première portion (86) étant en prise dans ledit guide d'engrènement à glissière et
H) ladite seconde portion (88) étant située à un angle par rapport à ladite première portion
I) de façon à ce que ladite seconde portion (88) soit généralement parallèle au dit plan de base (58), où ladite seconde portion recouvre ladite fente pour arc (16) quand ladite glissière pour ligature (20) est dans la position fermée.
Le brevet WILDMAN (pièces
ORTHO PARTNER n° 6 et 6 bis) déposé le 17 octobre 1995, (US 5613850) intitulé « bracket labial miniature auto-ligaturant avec élément de verrouillage encliqueté » concerne un boîtier orthodontique à blocage automatique, composé d'un boîtier qui présente une fente pour arc et une fente de fermeture qui s'étend transversalement par-dessus la fente pour arc et un organe de fermeture qui peut être reçu à l'intérieur de la fente de fermeture et pouvant coulisser en travers de la fente pour arc. Il poursuit l'objectif d' « améliorer le boîtier orthodontique auto-ligaturant existant de manière à ce qu'il soit plus facile à fabriquer et à utiliser » (page 1 pièce 6 bis).
L'organe de fermeture qui y est décrit, peut opérer un mouvement de coulissement, suivant un plan de translation en position ouverte ou fermée, qui permet de retenir ou de libérer l'arc de contention, peu important que cet organe soit constitué de différents éléments (un noyau et un ressort en deux parties, un épaulement) et qu'il ait pour
fonction non pas seulement de fermer par translation la fente pour arc mais également de verrouiller le dispositif.
Il suggère également un plan de translation particulier (formant angle aigu par rapport au plan de base de la fente pour arc) en direction occlusale ou gingivale.
La société ORMCO ne peut donc pas soutenir que ce document n'est pas pertinent, au motif que l'organe de fermeture consisterait en un assemblage de plusieurs éléments mobiles et ne constituerait nullement une glissière, alors que ce document a été évoqué au cours de la procédure de délivrance devant l'OEB comme constituant l'art antérieur le plus proche ; alors que le brevet EP 048 lui-même ne distingue pas et évoque indistinctement « un organe de fermeture » ou « une glissière », qui s'ajuste dans une fente de fermeture ; et qu'enfin, ce document est expressément cité dans la description du brevet [0009], au titre de l'art antérieur, comme étant « un boîtier orthodontique, comprenant une fente pour arc et une glissière pour ligature ».
Ainsi, le brevet WILDMAN appartient au domaine technique de l'invention, à savoir les brackets orthodontiques auto-ligaturants et n'aurait donc pas été écarté par l'homme du métier.
Toutefois, rien ne permet de considérer que pour résoudre le problème technique de l'invention, à savoir assurer un étroit ajustement entre la glissière et l'arc, l'homme du métier aurait, partant du brevet WILDMAN, par une simple mesure d'exécution classique et connue en mécanique orthondontique, par un simple jeu d'encastrement et d'ajustement d'une forme à une autre, été incité à combler l'interstice entre l'arc et la glissière et aurait préconisé d'adapter la forme de la glissière afin qu'elle recouvre la fente pour arc et envisagé de modifier la glissière en ajoutant une protubérance ou en biseautant une portion de la glissière pour ligature pour qu'elle s'adapte à la face labiale de l'arc.
En effet, il n'est nullement établi que ses connaissances générales ou encore le document WILDMAN et ses figures, l'y incitaient.
Au contraire les suggestions de la société
ORTHO PARTNER apparaissent bien improbables mécaniquement, car l'inclinaison entre le plan de translation de la glissière et le plan de base de la fente pour arc exclut tout ajustement et tout contact entre la glissière et l'arc et dans l'hypothèse de l'ajout d'une protubérance, celle-ci est de nature à empêcher le mouvement translatif de la glissière.
Les connaissances générales de l'homme du métier ou celle-ci combinées aux enseignements du brevet WILDMAN, ne permettent pas d'aboutir d'évidence à la solution préconisée par le brevet pour résoudre le problème posé.
Le brevet HEISER (pièces
ORTHO PARTNER n° 7 et 7 bis) déposé le 26 février 2004 (US 2004/ 0170942), intitulé « bracket
orthodontique », consiste en un boîtier pour traitement orthodontique, sur une plaque de base attachée à une dent, comprenant une fente apte à recevoir un arc orthodontique et un ressort de fermeture, qui comprend un arc et une branche libre connectée, qui peut être déplacée en position ouverte dans laquelle la fente est librement accessible (...) et une position fermée où la branche libre du ressort couvre la fente. Il a pour but de « fournir un boîtier qui est capable de générer une force de fermeture élevée du ressort au cours de son ouverture » (page 2 traduction).
Dans ce brevet, l'ouverture et la fermeture de la fente pour arc sont réalisées par une déformation du ressort clipsé, au moyen d'un outil servant de levier et non pas par une glissière ou un organe de fermeture coulissant. En effet, les figures 9 et 10 démontrent clairement que le mouvement de la branche retenant l'arc est opéré par la déformation du ressort et le dégagement de la branche 17 a/, par déclipsage, ce que confirme la description du brevet qui mentionne que « l'outil 23 est pressé contre le bord libre de la section d'extrémité pliée17 a/ et a libéré la position d'enclenchement » et que « le ressort de fermeture 12 peut être basculé davantage vers l'arrière de telle sorte que les bras 18 libèrent librement la fente (figure 10) » (page 8 traduction).
Il ne peut donc être retenu que le mouvement du mécanisme de maintien de l'arc dans la fente, s'apparenterait d'abord à un mouvement de simple translation puis à un mouvement de basculement après que les moyens de verrouillage aient été dégagés. En outre, le ressort de fermeture ne comporte pas deux portions, mais plusieurs portions distinctes : une portion d'arc (13), s'étendant à une extrémité supérieure de laquelle se raccorde une portion d'extrémité libre sensiblement droite (14) et à l'autre extrémité inférieure de laquelle se raccorde également une extension droite (15) ; la portion 14 présente une langue (17) et des bras latéraux (18) (page 6 traduction).
Le brevet HEISER porte donc sur un boîtier auto-ligaturant à ressort de fermeture clipsable, qui assure par sa déformation, l'ouverture et la fermeture de la fente pour arc. Il ne poursuit pas l'objectif d'assurer un parfait ajustement de l'arc de contention, avec la fente de l'arc. Il n'est donc nullement établi que l'homme du métier, soucieux de résoudre le problème technique précité, se serait référé à ce document. L'homme du métier n'aurait pas plus été incité à combiner le document WILDMAN, qui décrit une glissière, pour modifier celle-ci au regard des enseignements du brevet HEISER.
La revendication 1 est donc inventive.
-revendication 5
La société
ORTHO PARTNER estime que cette revendication indépendante, issue de la combinaison des revendications 1 et 6
avant limitation, est dépourvue d'activité inventive, au vu du document WILDMAN et de trois brevets de l'art antérieur. Elle soutient que cette revendication concerne tout agencement, où le guide d'engrènement et la glissière comportent chacun une portion qui coopère avec l'autre.
La société ORMCO expose que les caractéristiques G, H et I de la revendication 5 portent sur deux portions (l'une en saillie, l'autre réceptrice) qui viennent en prise l'une avec l'autre, et qui se déplacent l'une par rapport à l'autre lors du mouvement de la glissière et qui ont pour objet de réguler le mouvement de la glissière, tout au long du déplacement.
Le document WILDMAN, s'il est retenu, ne serait selon elle pas pertinent, car l'organe de fermeture est composé d'un ensemble de composants qui ne peuvent être modifiés sans difficulté par l'homme du métier et que les autres brevets invoqués, s'ils comportent une portion en saillie et une portion réceptrice, ne coopèrent entre eux que de façon ponctuelle et dans des positions spécifiques de la glissière.
Sur ce,
Outre le socle commun des caractéristiques A à F de la revendication 1, la revendication 5 est libellée comme suit :
(... )
G) «où ledit guide d'engrènement à glissière comporte soit une portion en saillie soit une portion réceptrice et
H) où ladite glissière pour ligature comporte l'autre desdites portion en saillie et portion réceptrice,
I) ladite portion en saillie recevant ladite portion réceptrice, et où ladite portion en saillie et ladite portion réceptrice se déplacent l'une par rapport à l'autre quand ladite glissière pour ligature est déplacée le long dudit guide d'engrènement à glissière entre les positions ouverte et fermée. »
La description du brevet [0038] indique que le corps du boîtier et la glissière pour ligature, comportent chacun, respectivement, une portion en saillie ou une portion réceptrice, (une fente de retenue et une broche de retenue) qui « coopèrent pour réguler le déplacement de la glissière » et qui se déplacent l'une par rapport à l'autre. (ligne 30). « La configuration de la broche de retenue/fente empêche le détachement accidentel ou involontaire de la glissière... quand la glissière est en position ouverte ». Toutefois, « la configuration de la broche/fente ne bloque pas la glissière dans quelque position que ce soit ».
Il s'en déduit que les portions respectives coopèrent en permanence et se déplacent systématiquement l'une par rapport à l'autre et au cours du déplacement de la glissière, vers la position ouverte ou fermée, ce qui est confirmé par la figure 4 A du brevet qui établit bien que la tige 96 reste dans la fente 94 tout au long du déplacement. Ainsi, le dispositif n'est pas celui, comme le suggère la société ORTHO
PARTNER, suivant une acception large, de tout agencement comportant une portion en saillie et une portion réceptrice, coopérant exclusivement lorsque la glissière est en position ouverte.
Le document WILDMAN précité ne contient aucune incitation faite à l'homme de métier pour réguler le déplacement de la glissière, à modifier la structure complexe de l'organe de fermeture. Et les autres documents invoqués, à combiner avec le brevet WILDMAN, ne concernent aucunement le dispositif du brevet EP048 argué de nullité en ce qu'ils ne décrivent qu'une coopération ponctuelle de la saillie et de la portion réceptrice, et dans certaines positions spécifiques de la glissière.
Ainsi, le document WO 2004/047665 (pièce
ORTHO PARTNER n° 8) prévoit un mécanisme pour maintenir fermement la glissière dans ses deux positions extrêmes d'ouverture et de fermeture (et non pas tout au long du déplacement), d'une saillie qui coopère localement avec des encoches, où la saillie se déforme momentanément pour être déplacée et reprend ensuite sa forme initiale.
Il ne ressemble en rien au mécanisme de la revendication 5 du brevet EP048 et n'est donc pas opposable.
Le document WO 99/ 40871 (pièce
ORTHO PARTNER n° 9) concerne un dispositif qui « procure un support élastique pour le pion 42 et une flexion suffisante pour permettre au pion 42 d'entrer et de sortir de la gorge 43 » qui n'intervient que dans certaines positions de la glissière.
Le brevet US 2004/ 072117 (pièce
ORTHO PARTNER n° 10) décrit un mécanisme de clipsage qui n'intervient qu'en position fermée uniquement où « un élément d'engagement élastique avec une saillie positionnée pour s'engager dans une ouverture s'étendant à travers la glissière ligaturante, lorsque la glissière est en position fermée ».
La revendication 5 est donc valable.
-revendication 15
La société
ORTHO PARTNER expose que l'homme du métier aurait d'évidence imaginé au vu des enseignements du document WILDMAN, combiné au brevet US 2004/ 072117, de doter le boîtier orthodontique décrit dans le brevet WILDMAN de manière à prévoir dans le corps du boîtier, un élément élastique en saillie qui s'engage dans un orifice pratiqué dans la glissière pour la bloquer en position fermée.
Selon la société ORMCO, cette revendication concerne un élément d'enclenchement élastique pour permettre de fixer la glissière pour ligature, lorsqu'elle se trouve en position fermée et l'homme du métier n'aurait nullement été incité à modifier la configuration et la coopération des différentes pièces de l'organe de fermeture, en recourant à un élément élastique supplémentaire.
Sur ce,
Outre le socle commun des caractéristiques A à F de la revendication 1, la revendication 15 est libellée comme suit :
(...):
G) « où ladite glissière pour ligature comporte une ouverture, H) ledit boîtier orthodontique autoligaturant comprenant également un élément d'enclenchement élastique qui est couplé audit corps du boîtier et possède une extrémité libre adaptée pour mettre en prise ladite ouverture quand ladite glissière pour ligature est dans la position fermée, ledit élément d'enclenchement limitant le déplacement de ladite glissière pour ligature par rapport audit corps du boîtier quand il est en prise dans ladite ouverture ».
Le brevet EP048 indique [0034] que « un élément d'enclenchement élastique sert à fixer la glissière pour ligature dans la position fermée ». L'élément d'enclenchement a une forme en L et comprend une branche se prolongeant dans la direction linguale, qui est reçue dans un évidement. L'engagement entre l'ouverture dans la glissière 76, et la saillie se trouvant sur l'extrémité libre de l'élément d'enclenchement, maintient la glissière en position fermée, empêchant son déplacement involontaire d'une position fermée à ouverte.
Le brevet US 2004/ 0072117 décrit aussi une pièce de verrouillage élastiquement déformable qui comporte en son extrémité une saillie 46 qui s'engage dans une ouverture pratiquée dans la glissière afin de la bloquer en position fermée [0045].
Toutefois, le document WILDMAN qui comporte déjà un organe de fermeture complexe, composé de plusieurs éléments, n'incite pas l'homme du métier à intervenir en y ajoutant un élément élastique supplémentaire d'encliquetage, tel que suggéré dans le document précité, ou en tout état de cause, de parvenir d'évidence à la solution préconisée au brevet EP048, sans avoir à revoir intégralement la structure complexe de l'organe de fermeture du brevet WILDMAN.
La revendication 15 est donc inventive.
-sur les revendications dépendantes
Sont invoquées par la demanderesse, les revendications 1, 5 à 8, 10 à 16 et la défenderesse ne conteste pas la validité des revendications 6 à 8.
Sur ce,
Les revendications 10 à 14 et 16 dont la validité est contestée, sont dépendantes respectivement, de la revendication indépendante 5 et de la revendication indépendante 15, qui sont déclarées valables, et inventives, de telle sorte que les revendications dépendantes le sont également.
Les revendications 1, 5, 15, 10 à 14 et 16 qui sont opposées par la société ORMCO sont donc valables (la validité des revendications 6 à 8 n'étant pas contestée en défense et ne sera pas examinée).
La demande de nullité du brevet formée par la société
ORTHO PARTNER sera en conséquence rejetée.
2- Sur les preuves de la contrefaçon
La société
ORTHO PARTNER conteste la validité ou à tout le moins, la valeur probante du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 08 novembre 2016, du procès-verbal de constat du 21 novembre 2016 et de l'analyse du Cabinet X du
05 décembre 2016.
- procès-verbal de saisie-contrefaçon du 08 novembre 2016
Selon la défenderesse, ce procès-verbal réalisé au siège de la société
ORTHO PARTNER pendant huit heures est affecté d'irrégularités et ne rapporte pas la preuve de la matérialité de la contrefaçon. Les opérations ont été menées de façon déloyale par l'huissier et les experts l'accompagnant et il n'a pas été procédé sur place à l'analyse des produits saisis ; l'ensemble des démarches effectuées par l'huissier n'a pas été consigné (notamment en ce qui concerne la vérification des produits par les experts présents et si les produits saisis ont été mis sous scellés sur place ou en l'étude de l'huissier ; aucune liste des documents saisis n'a été dressée).
Elle soutient encore que la saisie-contrefaçon n'établit pas la matérialité de la contrefaçon, parce que les brackets saisis ont été décrits dans leur présentation et non pas dans leur structure, de sorte que le procès-verbal n'établit pas la reproduction des caractéristiques des revendications opposées.
Les sociétés demanderesses contestent tout détournement de la procédure de saisie-contrefaçon et toute déloyauté imputable aux intervenants, ajoutant que la validité de ces opérations n'est pas appréciée au regard de leur efficacité. L'ensemble des documents saisis ayant été listés et placés sous scellés, rien ne permet de soutenir que les propos des experts n'auraient pas été transcrits.
Sur ce,
Aux termes de l'ordonnance sur requête du 02 novembre 2016 autorisant la saisie (pièce ORMCO n° 13), l'huissier a pour mission de procéder à une saisie descriptive et à une saisie réelle des produits et de la documentation afférente, en présence d'un ou plusieurs experts.
Selon le procès-verbal de saisie-contrefaçon du 08 novembre 2016 (pièce ORMCO n° 15-1) établi par Me S, Huissier de justice, en présence notamment de Marie A, conseil en propriété industrielle et Alexandre P, expert, tous deux appartenant au cabinet de conseils en propriété industrielle X, il a été procédé par l'huissier
instrumentaire à une saisie descriptive et réelle (pièce n°15-1 précitée pages 2 à 14) des produits argués de contrefaçon, après que ceux-ci aient été préalablement identifiés par les experts précités, « au vu du brevet argué de contrefaçon, comme des éléments pertinents » (pièce n°15-1 précitée page 2). À l'issue de la description minutieuse de chaque produit, argué de contrefaçon et de son fonctionnement (coulissement de la partie mobile et cliquetis), l'Huissier demande aux experts, « s'ils souhaitent ajouter quelque chose à la description » (pièce n°15-1 page 14) lesquels répondent « qu'ils ne voient rien à ajouter à [la] ma description [de l'huissier] »».
Il ne peut toutefois être déduit de ces mentions, que les experts n'ont prononcé aucun mot, parce qu'ils savaient que les produits seraient analysés ultérieurement de manière non contradictoire, sauf à leur prêter des intentions que rien n'établit. Il apparaît plutôt que la description des brackets n'excédait pas les compétences de l'huissier, de sorte qu'il ne nécessitait pas des commentaires des experts. Il ne peut pas plus être reproché au saisissant de ne pas avoir apporté le matériel adéquat aux fins d'analyse sur place, alors même que par hypothèse, l'huissier ne sait pas au préalable ce qu'il va trouver au moment de l'exécution des opérations.
De même encore, il ne peut être soutenu que les experts ont vérifié les produits à l'aune du brevet, mais que le procès-verbal serait silencieux, alors qu'aucune mention du procès-verbal, qui fait foi jusqu'à inscription de faux, ne le laisse suspecter.
Une quelconque déloyauté de l'huissier et de ses assistants lors de l'exécution de la saisie n'est donc établie.
Par ailleurs, le procès-verbal intègre les photographies des produits qui n'avaient donc pas à être listées et le procès-verbal est particulièrement clair sur les éléments appréhendés par l'huissier, lesquels sont communiqués par les demanderesses, placés sous scellés ou revêtus d'un fil plombé, accompagnés d'une carte de visite de l'huissier, revêtue de la mention « objet placé sous scellé lors de ma saisie-contrefaçon du 08 novembre 2016 » (pièces ORMCO n° 15-2, 15-5 à 15-11) en parfaite correspondance avec les mentions du procès-verbal. Il n'était donc nul besoin d'en dresser une liste.
Enfin, le caractère infructueux d'une saisie est bien évidemment sans incidence sur la validité de celle-ci.
Les divers moyens successifs de nullité du procès-verbal de saisie seront donc écartés, la valeur probante devant être appréciée dans le cadre de l'examen de la matérialité de la contrefaçon.
-procès-verbal de constat du 21 novembre 2016 et rapport du Cabinet X
La société
ORTHO PARTNER rappelle que la preuve en matière de saisie-contrefaçon est libre sous réserve qu'elle soit obtenue
loyalement et expose que le procès-verbal de constat du 21 novembre 2016 et le rapport du Cabinet X constituent
la poursuite non autorisée des opérations de saisie-contrefaçon du 08 novembre 2016 et sont dépourvus de valeur probante à défaut de présenter des garanties suffisantes d'indépendance et d'impartialité.
Selon elle, le procès-verbal du 21 novembre 2016 est nul car il a été réalisé sans autorisation judiciaire préalable et ce au mépris des dispositions de l'article
R. 615-4 du code de la propriété intellectuelle, applicable aux mesures complémentaires aux opérations de saisie- contrefaçon. Il est irrégulier car il a été autorisé chez un tiers sans autorisation.
Ce constat a été établi en violation du droit à un procès équitable, car mené en présence d'un employé de la société requérante, non indépendant de la partie requérante.
Enfin ce constat et le rapport d'analyse qui en découle n'offrent aucune garantie, car le laboratoire IPGG où les analyses ont été réalisées, emploie l'un des conseils en propriété industrielle du Cabinet ayant assisté aux opérations de saisie-contrefaçon, lequel est également intervenu pour la limitation du brevet. Le rapport d'analyse est dépourvu de toute sincérité et en tout état de cause, de caractère probant, en l'absence de démonstration de la reproduction des caractéristiques des revendications opposées.
La société ORMCO répond que le procès-verbal du 21 novembre 2016 n'a pour objectif que d'assurer la traçabilité des produits qui ont fait l'objet d'analyse et est parfaitement régulier, et indépendant et distinct du rapport d'analyse, l'huissier ne s'étant livré qu'à de simples constatations et n'ayant par ailleurs pas été assisté par les personnes ayant mené les analyses ; que les griefs d'absence d'indépendance ne sont pas établis et qu'il ne lui était pas nécessaire de solliciter une autorisation judiciaire.
En ce qui concerne le rapport d'analyse, rien n'interdit au saisissant de faire procéder à une analyse, puisque la charge de la preuve lui incombe, sauf au saisi de proposer des éléments contraires. Il est sans incidence que l'un des conseils en propriété industrielle du cabinet Xait des liens avec le laboratoire d'analyse, ou encore qu'un
employé de la société ORMCO ait procédé à la découpe des produits. Les affirmations de la défenderesse, qui n'ont vocation qu'à instiller le doute, ne sont étayées par aucun élément tangible.
Sur ce,
Le procès-verbal du 21 novembre 2016 (pièce ORMCO n° 16) établi par Me J, Huissier de justice, a pour objet de faire constater l'intégrité des objets qui ont été saisis dans le cadre des opérations de saisie- contrefaçon du 08 novembre 2016 et l'intégrité des scellés correspondants, puis de procéder au bris des scellés aux fins d'analyse des produits et de repose de scellés. Il contient les
photographies qui ont été prises au cours de l'analyse des produits, placées sur une clef USB, préalablement sous son emballage.
Les constatations opérées par l'huissier consistent exclusivement à assurer la traçabilité des produits afin d'attester que ceux analysés sont bien ceux qui ont été appréhendés préalablement lors de la saisie-contrefaçon, puis à reconstituer les scellés, ainsi qu'à recueillir les clichés réalisés au cours de l'analyse. Il s'agit donc d'un acte distinct, indépendant des opérations de saisie-contrefaçon et distinct du rapport d'analyse.
Non seulement le laboratoire IPGG dans lequel ces constatations ont été opérées a donné son autorisation, ce dont l'huissier instrumentaire s'est préalablement assuré (pièce précitée page 2), mais en tout état de cause, le laboratoire serait le seul à pouvoir invoquer la violation d'un lieu privé.
Les sociétés ORMCO sont rentrées en possession des produits issus d'une saisie-contrefaçon, objet de l'analyse, de manière parfaitement régulière et elles ne nécessitaient nullement de requérir une autorisation judiciaire, aux fins de bris des scellés et de reconstitution des scellés afin de pouvoir accéder aux produits appréhendés. Il n'y avait pas lieu non plus d'en référer au juge, comme mentionné dans l'ordonnance autorisation la saisie, puisqu'il ne s'agissait pas « d'une difficulté » d'exécution de la saisie.
La présence d'un employé de la société saisissante, au cours des opérations distinctes d'analyse des produits, est sans incidence sur la validité du procès-verbal de constatations purement matérielles opérées par l'Huissier, puisque celui-ci a instrumenté dans son champ d'intervention exclusivement circonscrit à la garantie de la traçabilité des produits analysés et au recueil des clichés réalisés par ceux qui ont procédé aux analyses et l'huissier n'a nullement été assisté par le salarié de la société ORMCO.
Le procès-verbal du 21 novembre est donc exempt de toute irrégularité.
Le rapport d'analyse du cabinet X du 05 décembre 2016
(pièce ORMCO n° 17) consiste en l'analyse des produits appréhendés dans le cadre de la saisie-contrefaçon, dont l'origine est attestée par le procès-verbal du 21 novembre 2016.
La société ORMCO ne nécessitait pas plus de solliciter une autorisation judiciaire aux fins d'analyse des produits saisis, puisque les dispositions R. 615-4 du code de propriété intellectuelle n'édictent qu'une simple faculté pour le juge, d'ordonner des mesures complémentaires aux opérations de saisie-contrefaçon.
La présence d'un employé de la requérante ou les liens de l'un des conseils en propriété industrielle du cabinet ayant procédé à l'analyse avec le laboratoire IPGG ne constituent pas des éléments susceptibles de porter atteinte au droit au procès équitable ou d'affecter la sincérité des constatations, dans la mesure où le contenu de ce document, contrairement aux constatations d'un huissier qui font foi jusqu'à inscription de faux, est revêtu d'une force probante jusqu'à preuve contraire.
Par ailleurs le rapport du Cabinet X, établi certes
unilatéralement, a été communiqué et contradictoirement débattu. Ainsi, il appartenait à la société
ORTHO PARTNER de rapporter par la preuve contraire, la prétendue fausseté et insincérité des analyses réalisées, alors que les exigences jurisprudentielles récentes en matière d'impartialité et d'indépendance lors d'un constat d'huissier ne sauraient être transposées à des constatations réalisées par un laboratoire privé.
Or force est de constater que la société
ORTHO PARTNER s'est abstenue de toute diligence sur ce point.
Le rapport d'analyse du Cabinet X est donc régulier.
3- Sur la contrefaçon
La société ORMCO expose que le rapport d'analyse est probant quant à la matérialité de la contrefaçon, les critiques formulées par la défenderesse étant exclusivement de forme, non pertinentes et non pas de fond.
La société ORMCO ajoute que la matérialité de la contrefaçon n'est pas contestée et qu'en tout état de cause, les opérations de saisie- contrefaçon ont établi que la société
ORTHO PARTNER importe les produits boîtiers autoligaturants Genius S, G Chrystal, Heimas V et Heimas Mini (fabriqués par MEM DENTAL TECHNOL-Taiwan), les vend en France (catalogues, brochures, plaquettes, site internet, livraison) et à ses distributeurs à l'étranger et en assure la promotion en France.
La société ORMCO soutient que les brackets Genius S, G Chrystal, et Heimas Mini (qui sont une déclinaison de Heimas V) reproduisent les caractéristiques du brevet EP 048.
La société
ORTHO PARTNER soutient que la preuve de la matérialité de la contrefaçon n'est pas rapportée et que l'orientation réelle du plan de translation n'est pas établie (par suite, l'existence d'un angle aigu n'est pas rapportée), ni le fait que la seconde portion de la glissière serait parallèle au plan de base (caractéristique commune H des revendications indépendantes).
Sur ce,
Le rapport d'analyse du cabinet X (pièce ORMCO n° 17)
établit que :
-les boîtiers autoligaturants G Crystal U1L et U1R reproduisent les caractéristiques A à F, communes aux revendications indépendantes 1, 5 et 15 (pages 5 à 22 du rapport), ainsi que les revendications 1 (caractéristiques GHI), 5 (caractéristiques GHI), 6 à 8, et 11 à 16 (pages 30 à 43) ;
-les boîtiers autoligaturants HEIMAS V L5L,L5R, L4L et L4R reproduisent les caractéristiques A à F, communes aux revendications indépendantes 1, 5 et 15 (pages 22 à 26 du rapport), ainsi que les revendications 5, (caractéristiques GHI), 10 à 13 et 16 (pages 51 à 55),
-les boîtiers autoligaturants HEIMAS MINI U1L et U1R reproduisent les caractéristiques A à F, communes aux revendications indépendantes 1, 5 et 15 (pages 26 à 30 du rapport), ainsi que les revendications 1 (caractéristiques GHI), 5 (caractéristiques GHl), 10 à 13 et 16 (pages 56 à 60),
les boîtiers autoligaturants G S L5L, L5R, L4L, L4R, U5L, U5R, U4L, U4R, U1L et U1R reproduisent les caractéristiques des revendications indépendantes 1 et 5 ainsi que les revendications 10 à 13 et 16 (pages 43 à 50) ;
La matérialité de la contrefaçon est donc établie.
4- Sur les mesures de réparation financières
Les sociétés ORMCO sollicitent des mesures de réparation financières, indiquant qu'il convient d'intégrer dans la masse contrefaisante, l'ensemble des boîtiers appartenant aux quatre gammes et non les seuls boîtiers reproduisant les caractéristiques, car les boîtiers orthodontiques fonctionnent en système, sur le plan fonctionnel donc également sur le plan commercial. Le chiffre d'affaires total de la société
ORTHO PARTNER au vu des informations recueillies lors des opérations de saisie-contrefaçon s'élève à la somme de près de 2,2 millions d'euros, sans que ne soit connu le bénéfice réalisé par la défenderesse. Il n'y a pas lieu d'exclure de la masse contrefaisante les ventes réalisées avant la limitation du brevet, ni encore d'exclure les ventes destinées à l'export et il convient de considérer l'ensemble des boîtiers orthodontiques de chaque gamme, puisque toutes les dents doivent être appareillées, ainsi que les arcs de contention correspondants, qui sont indissociables des boîtiers.
La société ORMCO sollicite l'indemnisation forfaitaire de son préjudice économique, au regard d'un taux de redevance majoré fixé à 12 % et la condamnation de son adversaire au paiement de la somme de 150.000 euros en réparation du préjudice moral.
La société
ORMCO FRANCE, distributeur exclusif des produits subit un manque à gagner qu'elle évalue à 35 %, correspondant à son taux de marge, de la masse contrefaisante, soit la somme de 758.931 euros.
La société
ORTHO PARTNER conclut au débouté de ces prétentions, exposant qu'il n'y a pas lieu d'inclure dans la masse contrefaisante ni l'ensemble des brackets de chaque boîtier car seulement une partie d'entre eux serait contrefaisante, les brackets étant dissociables et la tendance étant d'éviter la pose de brackets sur chaque dent, ni par ailleurs les arcs orthodontiques, car ceux-ci peuvent être vendus séparément.
De plus, un breveté non exploitant ne peut invoquer la théorie du tout commercial.
Elle ajoute que la période antérieure à la limitation du brevet survenue le 22 août 2016 n'a pas à être considérée car le brevet tel que délivré tombait dans la portée du document WILDMAN.
Elle conteste le taux de licence et son doublement tel que sollicité par la société ORMCO, comme ne correspondant pas aux usages en la matière et suggère un pourcentage de 5 %, tout comme les prétentions formées au titre du préjudice moral, en l'absence d'atteintes à la valeur du brevet et à l'affaiblissement de sa portée.
En ce qui concerne le préjudice économique de la société
ORMCO FRANCE, le gain manqué doit être évalué, non pas sur toutes les ventes réalisées mais uniquement sur les ventes qui se seraient reportées sur le vendeur des produits brevetés, or le taux de report est en l'espèce nul ou résiduel car cette demanderesse n'établit pas commercialiser en France les produits, ni en être le distributeur exclusif, alors que le marché est très concurrentiel, que le distributeur n'y a pas une position importante ou dominante. Le taux de report doit être limité à 15 ou 20 %.
La perte de clientèle alléguée n'est pas démontrée et la société
ORMCO FRANCE ne communique pas sa marge brute.
Les mesures complémentaires sollicitées ne sont pas justifiées, selon la défenderesse.
Sur ce,
-détermination de la masse contrefaisante
Les brackets peuvent être distribués sous forme de sticks d'un même boîtier orthodontique destiné à une dent identifiée, mais également commercialisés, comme les brackets litigieux dans des boîtes, sous forme de « cas » ou de kits de 12, 20 ou 24 brackets, destinés à appareiller les dents d'un même patient,
Chacune des parties produit des attestations de praticiens qui ont des liens avec elle (pièces ORMCO n° 19 à 21 et pièces O n° 25 et 26) et il n'existe aucune raison sérieuse pour ce motif d'écarter un témoignage plus que l'autre, d'autant que finalement, ces attestations décrivent sensiblement la même chose, à savoir qu'un traitement orthodontique requiert un maintien de l'arc de contention et l'exercice de forces pour corriger la malocclusion, et nécessite que soient posés des brackets sur toutes les dents, de sorte que les brackets d'un « cas » sont indissociables, ce qui est confirmé du reste par la brochure publicitaire d'un concurrent (pièce ORMCO n° 28) et par les mentions sur le site internet de la fédération française d'orthodontie (pièce ORMCO n° 29), même si dans certaines hypothèses particulières (dentition prognate pièce O n°17, traitement en deux phases), il est envisagé momentanément de n'appareiller qu'une partie des dents.
Ainsi, il apparaît que chacun des brackets d'un « cas » de boîtiers orthodontiques apparaît nécessaire à la réalisation et à l'efficacité du traitement et il n'est pas concevable de les employer de manière isolée. Rien ne permet par ailleurs de considérer que les praticiens feraient systématiquement un panachage de brackets de différentes marques, pour appareiller un patient.
L'ensemble des « cas » identifiés doit donc être considéré, alors même que dans une boîte seul un petit nombre (de 2 à 10 selon les gammes) de brackets est contrefaisant.
En revanche, il n'existe aucun motif légitime, d'inclure dans la masse contrefaisante, les arcs de contention, dont il n'est pas établi qu'ils constituent un tout indissociable avec les brackets et parce qu'ils ne font pas l'objet de droits de propriété intellectuelle des sociétés ORMCO.
Les opérations de saisie-contrefaçon (pièce n° 15-4) ont établi la vente des produits litigieux, par la société
ORTHO PARTNER pour un chiffre d'affaires de 2.168.375 euros (prix de vente des matériels par la défenderesse), depuis la mise dans le commerce des brackets litigieux en 2014, 2015 ou mi-2016 selon les produits, sans que la marge de celle-ci ne soit déterminable (les pièces saisies révèlent les quantités acquises auprès du fabricant taïwanais MEM, mais pas leur prix qui est masqué). La marge réalisée par la société ORTHO et les bénéfices réalisés par celle-ci sont inconnus.
La limitation de la partie française du brevet le 22 août 2016 est sans incidence aucune, sur la période à considérer, en raison de la rétroaction de la limitation, à la date de dépôt du brevet et ce d'autant que la limitation si elle a un éventuel impact sur la validité du titre, est sans incidence sur la matérialité de la contrefaçon, puisque la limitation a eu pour effet de combiner entre elles deux revendications, en une seule, soit des caractéristiques qui se trouvaient d'ores et déjà revendiquées.
L'ensemble des chiffres précités doit donc être considéré, puisqu'ils concernent une période non atteinte par le délai de prescription (la commercialisation la plus ancienne des produits date de 2014 et l'assignation est de décembre 2016).
Enfin, doivent être également considérées, la masse relative aux exportations des produits contrefaisants, puisque l'exportation est visée expressément aux dispositions de l'article L. 613-3 a/ du code de la propriété intellectuelle.
-préjudice économique de la société ORMCO CORPORATION
Le titulaire du brevet sollicite une indemnisation forfaitaire conformément aux dispositions de l'alinéa 2 de l'article
L. 615-7 du code de la propriété intellectuelle et soutient que le taux de redevances habituellement pratiqué se situe entre 5 et 10 %, qu'il convient de majorer pour tenir compte du fait qu'aucune licence n'a été autorisée.
Toutefois, le taux de redevances en matière de santé est de l'ordre de 4 à 5 % (les décisions de justice produites par chacune des parties dans des domaines éloignés de l'orthodontie sont sans utilité aucune) qu'il convient de majorer à 8 %, pour tenir compte du comportement fautif du contrefacteur et au regard du texte précité, qui stipule que la somme forfaitaire allouée « doit être supérieure au montant des redevances qui auraient été dues si le titulaire y avait consenti ». La somme forfaitaire allouée sera en conséquence de 173.500 euros (soit la somme arrondie de 8 % du chiffre d'affaires de 2.168.375, 14 euros réalisé par la société
ORTHO PARTNER).
-préjudice moral de la société ORMCO CORPORATION
La société ORMCO CORPORATION subit un préjudice moral lié à l'atteinte à son titre, dont la valeur a été détournée par la société
ORTHO PARTNER qui utilise les enseignements du brevet, pour se prétendre « à la pointe de la technologie » et pour valoriser ses produits phares qui mettent en œuvre le brevet. La somme de 50.000 euros sera allouée à la société titulaire en réparation de l'atteinte à cet actif immatériel.
- préjudice de la société
ORMCO FRANCE
Les agissements de la société
ORTHO PARTNER à l'égard de la société
ORMCO FRANCE, distributeur exclusif en France des produits ORMCO, sont fautifs au regard des dispositions de l'article
1240 du code civil, comme contraires aux usages loyaux des affaires et cette demanderesse supporte un manque à gagner du fait de la commercialisation des produits et une perte de clientèle et sollicite l'application d'un taux de marge de 35 %,
Toutefois, les déclarations du vice-président Globals Sales de ORMCO CORP. (pièce ORMCO n°23) attestant que la part totale de marchés de ORMCO en France est de 30 % et que sa part, sur le marché des autoligaturants est de 85 % à 60 % selon qu'ils sont métalliques ou céramiques ou encore que la société
ORMCO FRANCE a perdu 50 clients, ne sont corroborées par aucune autre pièce.
Par ailleurs, le gain manqué de la société
ORMCO FRANCE doit être évalué exclusivement sur les ventes qui se seraient reportées sur le distributeur des produits brevetés et non pas sur toutes les ventes réalisées par le contrefacteur.
Ainsi, le taux de report doit en l'espèce, être fixé à 20 %, alors que le marché français du matériel orthodontique se partage entre plusieurs acteurs, dont la société
ORMCO FRANCE n'établit pas être le leader.
La somme de 433.675 euros (20 % du chiffre d'affaires de 2.168. 375 euros) sera ainsi allouée à la société
ORMCO FRANCE.
5- sur les autres mesures de réparation
Il sera fait droit, selon les modalités exposées au dispositif de la décision, aux mesures d'interdiction et de rappel des circuits commerciaux des produits litigieux.
Tout le préjudice et rien que le préjudice des sociétés demanderesses étant réparé, la demande de communication au titre du droit d'information n'apparaît pas justifiée, ni celle de publication de la décision.
6- Sur les autres demandes
La société
ORTHO PARTNER qui succombe supportera les dépens et ses propres frais.
En application des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile, la partie tenue aux dépens ou à défaut, la partie perdante, est condamnée au paiement d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, en tenant compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. La société
ORTHO PARTNER sera condamnée à payer aux sociétés ORMCO, la somme globale de 150.000 euros au titre des frais irrépétibles, y incluant le coût de la saisie-contrefaçon.
Les autres frais exposés (procès-verbal de constat du 21 novembre 2016 et rapport d'analyse) sans autorisation judiciaire préalable, ne constituent pas des dépens, au sens des dispositions de l'article
695 du code de procédure civile et demeureront en conséquence à la charge des sociétés ORMCO qui les ont exposés.
Les circonstances de la cause justifient le prononcé de l'exécution provisoire qui apparaît nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort,
Rejette l'action en nullité du brevet EP 1 679 048, formée par la société
ORTHO PARTNER,
Déclare valables les revendications 1, 5, 6 à 8, 10 à 16 de la partie française du brevet EP 1 679 048, appartenant à la société ORMCO CORPORATION,
Dit qu'en important, offrant, mettant dans le commerce, exportant et détenant les boîtiers autoligaturants G CRYSTAL, G SYSTEM, HEIMAS V et HEIMAS MINI, la société
ORTHO PARTNER, a commis des actes de contrefaçon et porté atteinte aux revendications 1, 5, 6, 7, 8, 10, 11, 12, 13, 14, 15 et 16 de la partie française du brevet EP 1 679 048, dont la société ORMCO CORPORATION est propriétaire,
Condamne la société
ORTHO PARTNER à payer à la société ORMCO CORPORATION, la somme de 173.500 euros, en réparation de son préjudice économique et la somme de 50.000 euros, en réparation de son préjudice moral,
Condamne la société
ORTHO PARTNER à payer à la société
ORMCO FRANCE la somme de 433.675 euros en réparation de son préjudice commercial,
Fait interdiction à la société
ORTHO PARTNER, directement ou indirectement par toute personne physique ou morale interposée, d'offrir, de mettre dans le commerce, d'utiliser, d'importer, d'exporter, ou de détenir aux fins précitées, des produits reproduisant les caractéristiques des revendications 1, 5, 6, 7, 8, 10, 11, 12, 13, 14, 15 et 16 de la partie française du brevet EP 1 679 048, dont la société ORMCO CORPORATION est propriétaire, et ce sous astreinte de 300 euros par jour de retard, passé un délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement,
Ordonne à la société
ORTHO PARTNER, en application de l'article
L. 615-7-1 du code de la propriété intellectuelle, le rappel des circuits de distribution de l'ensemble des produits livrés à ses distributeurs à la date de signification du jugement, aux fins de remise à la société ORMCO CORPORATION, et ce sous astreinte de 300 euros par jour de retard, passé un délai d'un mois à compter de la signification du jugement,
Dit n'y avoir lieu à publication du jugement,
Dit n'y avoir lieu à droit d'information,
Dit que le tribunal se réserve la liquidation des astreintes prononcées, Condamne la société
ORTHO PARTNER à verser aux sociétés ORMCO CORPORATION et
ORMCO FRANCE la somme globale de 150.000 euros, en ce compris les frais de saisie-contrefaçon, en application des dispositions de l'article
700 du code de procédure civile,
Condamne la société
ORTHO PARTNER aux dépens, Ordonne l'exécution provisoire,
Autorise Me Denis MONEGIER du SORBIER, avocat, à recouvrer directement contre la société
ORTHO PARTNER ceux des dépens dont il aurait fait l'avance sans en avoir reçu provision, conformément aux dispositions de l'article
699 du code de procédure civile,