Cour de cassation, Troisième chambre civile, 2 février 2017, 13-10.507

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2017-02-02
Cour d'appel de Colmar
2011-04-01

Texte intégral

CIV.3 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 février 2017 Rejet M. CHAUVIN, président Arrêt n° 174 F-D Pourvoi n° Q 13-10.507 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ Statuant sur le pourvoi formé par M. [P] [R], domicilié [Adresse 1], contre l'arrêt rendu le 1er avril 2011 par la cour d'appel de Colmar (2e chambre civile, section B), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [V] [B], 2°/ à Mme [C] [Z] épouse [B], domiciliés tous deux [Adresse 2], défendeurs à la cassation ; Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 3 janvier 2017, où étaient présents : M. Chauvin, président, Mme Guillaudier, conseiller référendaire rapporteur, M. Jardel, conseiller doyen, Mme Berdeaux, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Guillaudier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [R], de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de M. [B] et Mme [Z], et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué

(Colmar, 1er avril 2011), que, par acte sous seing privé du 18 août 2007, M. [B] et Mme [Z] ont vendu à M. [R] un immeuble, sous condition suspensive de l'obtention par l'acquéreur d'un prêt de 545 000 euros, la réitération par acte authentique étant fixée à fin novembre 2007 ; que, M. [R] n'ayant pas signé l'acte authentique en raison de la non-obtention du prêt, M. [B] et Mme [Z] l'ont assigné en vente forcée, paiement de la clause pénale et dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen

, ci-après annexé :

Attendu que M. [R] fait grief à

l'arrêt de rejeter sa demande d'annulation du "compromis" de vente pour vice du consentement ;

Mais attendu

qu'ayant constaté que M. [B] et Mme [Z] avaient vendu la même surface que celle qu'ils avaient acquise et retenu, sans dénaturation, que le constat établi le 23 septembre 2009 par l'huissier de justice ne faisait la preuve d'aucune appropriation d'une partie du fonds de leur voisin et que la vente de la chose d'autrui n'était pas démontrée, la cour d'appel a pu en déduire que le consentement de M. [R] n'avait pas été vicié et que sa demande d'annulation du "compromis" de vente devait être rejetée ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen

, ci-après annexé :

Attendu que M. [R] fait grief à

l'arrêt de le condamner à payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts ;

Mais attendu

qu'ayant constaté que le "compromis" de vente stipulait une condition suspensive de l'obtention de prêts de 545 000 euros auprès de la Banque populaire ou de la CMDP et retenu que M. [R] ne justifiait que d'une seule demande de prêt d'un montant de 678 000 euros, bien supérieur au financement projeté, et qu'il ne démontrait pas que sa situation financière personnelle se serait dégradée, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, a pu, par ces seuls motifs, en déduire que le défaut de réalisation de la condition résultait des carences de M. [R] et qu'il devait être condamné à indemniser M. [B] et Mme [Z] du préjudice qui résultait de l'immobilisation de leur bien et du défaut de perception du prix de vente et dont elle a souverainement fixé le montant ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [R] aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. [R] et le condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. [B] et Mme [Z] ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux février deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. [R] PREMIER MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande d'annulation du compromis de vente pour vice du consentement et condamné M. [R] à payer à M. [B] et à Mme [Z] à titre de dommages-intérêts la somme de 8.530,08 € portant intérêt au taux légal, ainsi que la somme de 2.000 € par mois à compter du 1er avril 2008 jusqu'au 30 novembre 2010 ; AUX MOTIFS QUE M. [R] se prévaut pour la première fois, près de trois ans après la signature du compromis de vente d'un vice du consentement, en faisant valoir que les biens visités incluent une bande de terrain de près d'un are appartenant au fonds voisin que les consorts [B]-[Z] ne peuvent lui vendre, sauf à lui vendre la chose d'autrui, ce qu'il ignorait ; mais qu'il résulte du compromis de vente que le bien acquis est une maison de neuf pièces d'environ 350 mètres carrés sur un terrain d'environ 7 ares situé [Adresse 3] ; que sa désignation cadastrale est commune de [Localité 1] section [Cadastre 1], village 0 ha 6 a 97 ca, sol, maison, et bâtiments accessoires ainsi qu'il résulte du projet d'acte établi par Me [M], notaire à [Localité 2] chargé de la réitération de la vente en la forme authentique ; que cette même surface figurait déjà dans l'acte de vente du 29 avril 2003, date à laquelle les consorts [B]-[Z] ont acquis le bien en cause des époux [P] ; que le constat produit aux débats par M. [R], établi le 23 septembre 2009 par Me [F], huissier de justice à [Localité 3], ne fait la preuve d'aucune appropriation par les consorts [B]-[Z] d'une partie du fonds de leur voisin ; qu'en l'absence de preuve d'une telle appropriation et de toute tentative de vente de la chose d'autrui, c'est vainement que M. [R] soutient que son consentement a été vicié ; ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; qu'il résulte clairement du constat produit aux débats par M. [R] que le terrain réellement occupé par les consorts [B]-[Z] empiète sur la parcelle voisine appartenant à M. [L] ; qu'en retenant que le constat produit aux débats ne fait la preuve d'aucune appropriation par les consorts [B]-[Z] d'une partie du fonds de leur voisin, la Cour d'appel a dénaturé ce constat et violé l'article 1134 du Code civil. SECOND MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. [R] à payer à M. [B] et à Mme [Z] à titre de dommages-intérêts la somme de 8.530,08 € portant intérêt au taux légal, ainsi que la somme de 2.000 € par mois à compter du 1er avril 2008 jusqu'au 30 novembre 2010 ; AUX MOTIFS QUE M. [R] soutient par ailleurs qu'engagé sous la condition suspensive de l'obtention du financement pour l'acquisition du bien en cause, cette condition ne s'est pas réalisée, sans que puisse lui être reproché une quelconque faute ayant empêché l'accomplissement de la clause ; que le compromis de vente liant les parties a été passé sous la condition suspensive de l'obtention de prêts de 545.000 € auprès de la banque populaire ou de la CMDP ; qu'il stipule que l'acquéreur s'oblige à justifier ses dossiers de demandes de prêts en fournissant sans retard tous les renseignements et documents qui pourront lui être demandés, et à les déposer auprès des organismes financiers qu'il aura choisis dans le délai imparti de dix jours à compter de la réception par lui du compromis de vente, à justifier dans les 48 heures de tout refus motivé en informant le vendeur et en avisant la société Atlas Transactions par l'intermédiaire de laquelle le compromis a été conclu ; que M. [R] ne démontre nullement avoir déposé les demandes de prêt dans le délai qui lui était imparti de dix jours suivants la réception du compromis, intervenue selon son annexe n° 16 le 31 août 2007 ; qu'il justifie par ailleurs d'une seule demande de prêt formée auprès de la CCM Basse Zorn d'un montant de 678.000 € bien supérieur au financement projeté qu'il tente d'expliquer par le prétendu mauvais état du bien immobilier en cause qu'il a pourtant visité et qui n'est pas démontré, cette demande de prêt lui ayant été refusée le 6 décembre 2007 ; que si les pièces du dossier révèlent par ailleurs que M. [R] a, dès la fin du mois d'août 2007, été mis en relation par l'intermédiaire de la Atlas Transactions avec la société Plurifinance, laquelle lui a remis une liste de documents à fournir (cf. annexe n° 19 de M. [R]), il ne justifie nullement y avoir donné suite ; que s'il prétend également que sa situation financière s'est brutalement dégradée après la signature du compromis, force est de constater que les justificatifs produits concernent non sa situation personnelle mais celle de la société d'exploitation des établissements [R] qui n'est pas partie au compromis de vente et de plus, aucun élément de comparaison n'est produit permettant de connaître la situation financière de cette société dont il était le dirigeant avant la signature du compromis ; que les carences de M. [R] ainsi mises en évident ont dès lors à juste titre conduit le tribunal à considérer la condition suspensive comme levée ; qu'il ressort en effet du compromis de vente que si le défaut de réalisation de la condition suspensive résulte d'une faute commise par l'acquéreur, négligences ou non accomplissement des diligences nécessaires (dossiers de prêt non déposée, dossiers demeurés incomplets malgré la demande des organismes prêteurs ou d'Atlas Transaction), la condition suspensive est réputée réalisée et la vente est parfaite ; mais attendu que M. [V] [B] et Mme [C] [Z] renoncent devant la Cour à réclamer la passation forcée de la vente par acte authentique, action qu'ils avaient introduite dans le délai prescrit par l'article 42 de la loi du 1er juin 1924 ; qu'il convient de leur en donner acte ; que le jugement entrepris sera en conséquence infirmé en ce sens à ce titre ; que les consorts [B]-[Z] sont cependant fondés à réclamer réparation du préjudice subi du fait de la carence fautive de M. [R] qui a refusé de réitérer son consentement en la forme authentique au plus tard pour le 30 novembre 2007 comme il s'y était engagé dans le compromis de vente, leur préjudice résultant de l'immobilisation de leur bien et du défaut de perception du prix de vente ; que la Cour confirme le montant de 2.000 € par mois arbitré par le tribunal, lequel est dû depuis le 1er décembre 2007 jusqu'au 30 novembre 2010 au vu du compromis de vente signé le 24 septembre 2010 par les consorts [Z]-[B] avec un nouvel acquéreur avec lequel ils ont convenu de la réitération en la forme authentique en décembre 2010 ; que c'est également à bon droit que le Tribunal a mis à la charge de M. [R] les frais du procès-verbal de carence établi le 11 février 2008 par Me [M], notaire à Dettwiller, qu'ils ont exposés d'un montant de 530.08 € ; que la carence fautive de M. [R] étant à l'origine de la présente procédure, il convient de confirmer les frais et dépens de première instance et de le condamner aux dépens de l'appel et à payer aux consorts [Z]-[B] la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; 1°) ALORS QUE ne commet pas de faute l'emprunteur qui a sollicité un prêt non conforme aux stipulations du contrat dès lors que la banque lui aurait de toute façon refusé le prêt en raison de ses capacités financières ; qu'en l'espèce M. [R] produisait un courrier de la banque CMDP selon lequel un prêt de 545.000 € lui aurait été refusé, comme l'avait été celui de 678.000 € en raison de l'absence de moyens financiers, et faisait valoir qu'il lui était impossible, en raison de sa situation, de trouver un financement ; qu'en retenant pourtant l'existence d'une faute de M. [R], la Cour d'appel a violé les articles 1178 et 1147 du Code civil ; 2°) ALORS QUE ne commet pas de faute l'emprunteur qui n'a pas sollicité autant de prêts que les stipulations du contrat le prévoyait dès lors qu'il n'aurait pu de toute façon en obtenir en raison de ses faibles capacités financières ; qu'en l'espèce M. [R], commerçant retraité exploitant une entreprise connaissant des déficits, faisait valoir, productions à l'appui justifiant qu'il ne pouvait obtenir d'emprunt et qu'il faisait l'objet d'interdictions d'émettre des chèques, qu'en raison de ces différents éléments il lui était impossible de trouver un financement au vu de sa situation financière ; qu'en retenant l'existence d'une faute de M. [R] pour ne pas avoir demandé autant de prêts que ce qui était contractuellement prévu, la Cour d'appel a violé les articles 1178 et 1147 du Code civil ; 3°) ALORS QU'en retenant l'existence d'une faute de M. [R], sans s'expliquer sur le moyen faisant valoir, productions à l'appui, qu'il lui était impossible de trouver un financement en raison de ses moyens financiers, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ; 4°) ALORS QUE les dispositions d'ordre public de l'article L. 312-16 du Code de la consommation, empêchent d'imposer des obligations contractuelles de nature à accroître les exigences résultant de ce texte, notamment en obligeant une partie à déposer le dossier de crédit dans un certain délai ; qu'en l'espèce, la promesse de vente obligeait M. [R] à déposer ses dossiers de demandes de crédit dans un délai de dix jours à compter de la réception du compromis de vente ; que ces dispositions contraires à l'article L. 312-16 du Code de la consommation devaient être écartées ; que la Cour d'appel en retenant que M. [R] ne démontrait pas avoir déposé les demandes de prêts dans le délai de 10 jours imposé par le contrat a violé l'article L. 312-16 du Code de la consommation ; 5°) ALORS QUE la réparation d'un dommage ne peut excéder le montant du préjudice ; qu'un vendeur ne souffre pas d'un préjudice de défaut de perception du prix de vente et d'immobilisation de son immeuble, consécutif au refus d'un premier acquéreur de réitérer par acte authentique la vente conclue, jusqu'à ce qu'il réitère par acte authentique la vente de cet immeuble avec un nouvel acquéreur ; qu'en effet, l'immobilisation cesse à la date à laquelle l'immeuble est remis en vente, le premier acquéreur défaillant ne pouvant être responsable du délai de réitération de la vente ; qu'en condamnant néanmoins M. [R] à indemniser un préjudice d'immobilisation jusqu'à la réitération de la vente, la Cour d'appel a violé les articles 1147 et 1149 du Code civil.