Cour de cassation, Chambre sociale, 19 janvier 2011, 09-72.317

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2011-01-19
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
2009-01-27

Texte intégral

Met hors de cause, sur sa demande, l'association Société nautique de Marseille ;

Sur le moyen

unique :

Vu

l'article L. 1224-1 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué

, que l'association Société nautique de Marseille (l'association) a confié à la société MVGH l'exploitation de son service de restauration-bar du 1er mars 2002 au 1er mars 2006 ; que l'association n'ayant pas renouvelé le contrat à son échéance, la société MVGH, placée en liquidation judiciaire le 22 mai 2006, a procédé le 9 février 2006 au licenciement économique de M. X... qui était affecté sur ce marché en qualité de maître d'hôtel ; qu'un nouveau contrat de concession a été conclu le 1er avril 2006 entre l'association et la société Saru ; que cette dernière ayant refusé de reprendre M. X... à son service, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de réintégration et, subsidiairement, d'indemnisation au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes, l'arrêt retient que le contrat de travail de M. X... ayant été rompu le 9 février 2006, soit antérieurement au transfert d'activité le 1er avril 2006, les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail, qui ne concernent que les contrats de travail en cours d'exécution, ne lui sont pas applicables ;

Attendu, cependant

, qu'à moins que le repreneur lui ait proposé, avant la fin de son préavis, de poursuivre sans modification son contrat de travail, le salarié licencié à l'occasion du transfert de l'entité économique dont il relève, et dont le licenciement est ainsi dépourvu d'effet, peut, à son choix, demander au repreneur la poursuite du contrat de travail ou demander à la société qui l'a licencié réparation du préjudice résultant de la rupture ; que lorsque la perte de l'emploi résulte à la fois de l'ancien employeur, qui a pris l'initiative d'un licenciement dépourvu d'effet, et du nouvel exploitant, qui a refusé de poursuivre le contrat de travail ainsi rompu, le salarié peut diriger son action contre l'un ou l'autre, sauf un éventuel recours entre eux ; Qu'en statuant comme elle a fait, alors qu'il résultait de ses constatations que le salarié avait été licencié en raison de la perte par la société MVGH du marché de restauration-bar et que l'activité avait été reprise, après deux mois d'interruption, par la société Saru dans les conditions prévues par l'article L. 1224-1 du code du travail, ce dont il se déduisait que le licenciement de M. X... était dépourvu d'effet, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS

: CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit que le contrat de travail de M. X... n'a pas été transféré à l'association Société nautique de Marseille, l'arrêt rendu le 27 janvier 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ; Condamne M. Y..., ès qualités et M. Z..., ès qualités, aux dépens ; Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, les condamne à payer à Me Spinosi la somme globale de 2 500 euros, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'association Société nautique de Marseille ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf janvier deux mille onze.

MOYEN ANNEXE

au présent arrêt. Moyen produit par Me Spinosi, avocat aux Conseils, pour M. X.... Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le contrat de travail de Monsieur X... n'a pas été transféré, que son licenciement repose sur un motif économique réel et sérieux et d'avoir, en conséquence, débouté le salarié de toutes ses demandes ; Aux motifs que « certes, les dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail (recodifié L. 1224-1) qui posent le principe du maintien des contrats de travail en cours lorsqu'une entreprise est transférée ou qu'elle change de mains, s 'appliquent même en cas de suspension temporaire des activités, ce qui était le cas dans l'espèce, et dans les successions de concessions. Mais les textes n'interdisent pas les licenciements avant le transfert de l'entreprise et les dispositions sus-énoncées ne font pas obstacle à la rupture ordonnée par l'employeur dit « sortant ». Aucun élément ou document n'établit une collusion frauduleuse entre la société SARL MVGH et la SARL SARU ou une fraude de ces entreprises destinées à faire échec aux droits de Frédéric X... en matière de maintien de son contrat de travail. Par ailleurs, le licenciement effectué par la société SARL MVGH n'entre pas dans les cas de nullité qui auraient permis de dire que le licenciement n'était pas prononcé au moment où la SARL SARU avait repris les activités du restaurant-bar. Les dispositions de l'article L. 122-12 ne concernent que les contrats de travail en cours d'exécution, or, le contrat de Frédéric X... a été rompu le 9 février 2006 tandis que le transfert d'activité se situe au 1er avril 2006. La SARL SARU ne peut être mise en cause dans la rupture de la relation de travail subie par Frédéric X.... » ; Alors que le licenciement d'un salarié prononcé à l'occasion du transfert d'une entité économique autonome dont l'activité est poursuivie est privé d'effet ; que le salarié licencié dans ces conditions peut, à son choix, demander au repreneur la poursuite du contrat de travail rompu ou demander à l'auteur du licenciement réparation du préjudice qui en est résulté ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel, qui a relevé que le motif économique du licenciement du salarié reposait sur la perte par l'employeur de la concession du restaurant et que cette concession avait été reprise par la société SARU, ne pouvait se fonder sur l'absence de collusion frauduleuse entre le premier employeur et le repreneur, circonstance impuissante à faire obstacle au transfert du contrat de travail, pour débouter le salarié de sa demande en poursuite du contrat de travail ou, à défaut, en paiement de dommages et intérêts, sans violer l'article L. 1224-1 du code du travail.