Cour de cassation, Chambre commerciale, financière et économique, 25 septembre 2012, 11-23.615

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2012-09-25
Cour d'appel de Dijon
2011-06-07

Texte intégral

Sur le premier moyen

, pris en sa deuxième branche :

Vu

les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué

, que la société Le Givry a donné en location-gérance à la société Le Givry F & B Concept (la société LG) un fonds de commerce de restauration ; qu'estimant que la société Le Givry lui avait dissimulé qu'elle n'avait pas exploité ce fonds pendant deux ans, la société LG l'a fait assigner en nullité du contrat, paiement de dommages-intérêts et restitution des loyers ; Attendu que pour accueillir ces demandes, l'arrêt relève que par arrêté municipal du 9 septembre 2005 l'établissement a été partiellement autorisé à ouvrir au public, autorisation ne concernant que la terrasse, la véranda et les WC, puis que par un arrêté du 28 novembre 2005 cette autorisation a été étendue au restaurant et que s'il est produit des déclarations de TVA pour les exercices 2005 et 2006, il n'est produit aucune pièce relative à l'exploitation du fonds au titre de l'année 2007, de sorte qu'il n'est pas démontré que le fonds a réellement été exploité pendant deux ans ;

Attendu qu'en statuant ainsi

, sans trancher le conflit qui opposait les parties quant à la date effective du commencement de l'exploitation commerciale du fonds et en exigeant la preuve d'une exploitation des lieux au cours de l'année 2007, laquelle était admise par toutes les parties, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS

, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a prononcé la nullité de la location-gérance du fonds de commerce en date du 27 mai 2008, et condamné la société Le Givry à rembourser à la société Le Givry F & B Concept le montant des loyers versés, soit la somme de 26 331,29 euros arrêtée au 28 février 2009, ainsi que les frais payés par le locataire-gérant pour la rédaction et l'enregistrement de l'acte, soit 1.864,59 euros, et en ce qu'il a condamné la société Le Givry F & B Concept à verser à la société Le Givry une indemnité de jouissance d'un montant équivalent au montant des loyers versés, soit 26 331,29 euros et ordonné la compensation entre les deux sommes, l'arrêt rendu le 7 juin 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon, autrement composée ; Condamne la société Le Givry F & B Concept aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Le Givry ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille douze

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt. Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour la société Le Givry. PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir prononcé la nullité du contrat de location-gérance conclu le 27 mai 2008 et condamné en conséquence la société LE GIVRY à restituer à la société LE GIVRY F & B CONCEPT l'intégralité des loyers déjà versés, soit la somme de 26.331,29 euros, majorée des frais payés par le locataire-gérant pour la rédaction et l'enregistrement de l'acte, soit 1.864,59 euros ; AUX MOTIFS QU'il ressort des débats et des pièces qui y ont été versées que la SARL LE GIVRY soutient avoir exploité le fonds de commerce donné en location-gérance à la société LE GIVRY F & B CONCEPT pendant un délai de deux ans, durée d'exploitation minimale légalement exigée ; qu'il ressort de l'arrêté municipal R 2005-91 en date du 9 septembre 2005 que l'établissement a été partiellement autorisé à ouvrir au public à compter de ladite date, autorisation ne concernant que la terrasse, la véranda et les WC ; que l'arrêté R 2005-125 du 28 novembre 2005 a élargi cette autorisation au restaurant ; qu'il n'est pas contesté qu'un arrêté de fermeture R 2007-127 est intervenu le 16 octobre 2007 ; qu'il ressort de la déclaration de TVA produite pour l'exercice 2005 que la production vendue s'est élevée à 19.764 euros ; qu'il ressort de la déclaration de TVA produite pour l'exercice du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2006 que la production vendue s'est élevée à 116.201 euros ; qu'aucune pièce relative à l'exploitation de l'établissement au titre de l'année 2007 n'est versée aux débats ; qu'il s'ensuit qu'il n'est pas démontré que l'établissement a été réellement exploité pendant la durée minimale requise de deux ans ; que dans ces conditions, la nullité de la location-gérance du fonds de commerce en date du 27 mai 2008 doit être prononcée ; qu'en conséquence, la SARL LE GIVRY doit être condamnée à rembourser à la SARL LE GIVRY F & B CONCEPT le montant des loyers versés, soit la somme de 26.331,29 euros, arrêtée au 28 février 2009 ainsi que les frais payés par le locataire-gérant pour la rédaction et l'enregistrement de l'acte, soit 1.864,59 euros ; ALORS QUE, D'UNE PART, le juge, qui est tenu en toutes circonstances d'observer le principe de la contradiction, ne peut fonder sa décision sur un moyen qu'il a relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que dans ses conclusions d'appel, la société LE GIVRY F & B CONCEPT n'avait nullement contesté que l'exploitation antérieure par le propriétaire du fonds n'avait pris fin que le 16 octobre 2007, mais entendait seulement voir retarder la date du commencement de l'exploitation au 28 novembre 2005, correspondant à celle de l'arrêté élargissant l'autorisation d'ouverture partielle précédemment donnée le 9 septembre 2005 ; qu'ainsi, à aucun moment n'avait été remis en cause le fait que le fonds avait continué d'être exploité pendant l'année 2007, et jusqu'au 18 octobre 2007 (cf. les conclusions d'appel de la société LE GIVRY F & B CONCEPT p. 3 et 4, et notamment p. 4 § 2 et 3) ; que dès lors, la Cour ne pouvait se fonder d'office, pour statuer comme elle l'a fait, sur le moyen tiré de ce qu'aucune pièce relative à l'exploitation de l'établissement au titre de l'année 2007 n'avait été versée aux débats, sans avoir préalablement rouvert les débats et invité les parties à s'expliquer quant à ce, sauf à violer les articles 16 du Code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ; ALORS QUE, D'AUTRE PART, le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ; qu'en l'espèce, les parties s'étaient accordées, comme le reconnaissait du reste expressément la société LE GIVRY F & B CONCEPT dans ses conclusions d'appel (cf. les conclusions d'appel de la société LE GIVRY F & B CONCEPT, p. 4 § 3 ; V. aussi les dernières conclusions de la société LE GIVRY, p. 4, trois derniers paragraphes), pour voir fixer la date de la fin de l'exploitation antérieure au 16 octobre 2007 ; qu'aussi bien, la Cour ne pouvait, sauf à méconnaître le principe dispositif, se saisir d'une contestation qui ne lui était pas soumise, tenant à l'absence de preuve de la poursuite de l'exploitation pendant l'année 2007 ; que sous cet angle, l'arrêt procède d'une violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile et du principe susvisé ; ET ALORS QUE, ENFIN ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, avaient été entre autres régulièrement communiquées, et donc versées aux débats par la société LE GIVRY, deux attestations, l'une émanant de la société BICBO, fournisseur de boissons, l'autre de la société DAVIGEL, fournisseur de denrées fraîches et surgelées, qui toutes deux témoignaient, en des termes parfaitement clairs et dépourvus d'équivoque, de la passation de commandes régulières par la société LE GIVRY, prise en la personne de son gérant, Monsieur X..., pendant toute la période comprise entre juin 2005 et septembre 2007 ; qu'en considérant néanmoins qu'aucune pièce relative à l'exploitation au titre de l'année 2007 n'avait été versée aux débats, la Cour statue au prix d'une dénaturation des termes du litige et viole, de ce chef également, l'article 4 du Code de procédure civile. SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir limité à la somme de 26.331,29 euros, soit à un montant équivalent au montant des loyers versés par le locataire au titre du contrat de location-gérance, le quantum de l'indemnité de jouissance due à la société LE GIVRY ; AUX MOTIFS QUE la nullité de la location-gérance du fonds de commerce en date du 27 mai 2008 doit être prononcée ; qu'en conséquence, la SARL LE GIVRY doit être condamnée à rembourser à la SARL LE GIVRY F & B CONCEPT le montant des loyers versés, soit la somme de 26.331,29 euros arrêtée au 28 février 2009, ainsi que les frais payés par le locataire-gérant pour la rédaction et l'enregistrement de l'acte, soit 1.864,59 euros ; qu'il convient de faire droit à la demande reconventionnelle de la SARL LE GIVRY et de condamner la SARL LE GIVRY F & B CONCEPT à lui verser une indemnité de jouissance d'un montant équivalent au montant des loyers versés, soit 26.331,29 euros et d'ordonner la compensation entre les deux sommes ; ALORS QUE dans le cas où un contrat nul a cependant été exécuté, les parties doivent être remises en l'état initial ; que si la restitution en nature s'avère impossible, la partie qui a bénéficié d'une prestation qu'elle ne peut restituer doit s'acquitter d'une indemnité à l'exacte mesure de la valeur de cette prestation ; qu'il s'ensuit que la Cour ne pouvait fixer arbitrairement à une somme équivalente à la fraction des loyers dont la société LE GIVRY F & B CONCEPT s'était acquittée envers la société LE GIVRY, avant de cesser ses versements, l'indemnité de jouissance due à la société LE GIVRY au titre des restitutions faisant suite à l'annulation du contrat de location-gérance, sans nullement tenir compte de la durée pendant laquelle le locataire du fonds en avait bénéficié, ni de la valeur de ce droit de jouissance ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour viole l'article 12 du Code de procédure civile, ensemble l'article 1304 du Code civil et les règles gouvernant les restitutions consécutives à l'annulation d'un contrat.