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Cour d'appel de Nouméa, 28 août 2023, 22/00038

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Nouméa
28 août 2023
Tribunal du Travail de Nouméa
31 mai 2022

Texte intégral

N° de minute : 50/2023 COUR D'APPEL DE NOUMÉA

Arrêt

du 28 Août 2023 Chambre sociale Numéro R.G. : N° RG 22/00038 - N° Portalis DBWF-V-B7G-TCP Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 31 Mai 2022 par le Tribunal du travail de NOUMEA (RG n° :20/184) Saisine de la cour : 09 Juin 2022 APPELANT S.A.S. ASSYSTEM NOUVELLE-CALEDONIE, prise en la personne de son représentant légal en exercice Siège social : [Adresse 1] - [Localité 2] Représentée par Me Fabien MARIE membre de la SELARL D'AVOCATS CALEXIS, avocat au barreau de NOUMEA INTIMÉ M. [G] [I] né le 03 Février 1984 à [Localité 4] demeurant [Adresse 5] - [Localité 3] Représenté par Me Philippe TONNELIER membre de la SELARL TONNELIER, avocat au barreau de NOUMEA COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 29 Juin 2023, en audience publique, devant la cour composée de M. Philippe DORCET, Président de chambre, président, M. Thibaud SOUBEYRAN, Conseiller, Madame Béatrice VERNHET-HEINRICH, Conseillère, qui en ont délibéré, sur le rapport de Monsieur Philippe DORCET. Greffier lors des débats et de la mise à disposition : Mme Isabelle VALLEE ARRÊT contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie, signé par Monsieur Philippe DORCET, président, et par Mme Isabelle VALLEE, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire. Copie revêtue de la formule exécutoire : -Me TONNELIER Expédition : Me MARIE - (Par LR/AR) : - M. [I] [G] - SAS ASSYSTEM NC PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE La SARL ASSYSTEM NOUVELLE-CALEDONIE a embauché M. [I] à compter du 16 août 2011 en qualité d'ingénieur commercial lequel a évolué au poste de manager commercial à compter du 31 janvier 2014, de responsable chargé d'affaires en janvier 2015 et enfin responsable d'activité cadre B2 à compter du 18 décembre 2015. Les parties ont conclu un accord de résiliation conventionnelle le 13 décembre 2019 selon lequel M. [I] quittait la société le 10 janvier 2020 après avoir été placé en congés payés à compter du 16 décembre 2019, la société lui réglant 4'904'640 XPF d'indemnité de départ négocié. Selon courriel du 10 février 2020 et courrier signifié par huissier du 4 mai 2020, M. [I] contestait son solde de tout compte indiquant qu'il manquait une part de son bonus sur objectifs 2018 et la prime conventionnelle de fin d'année. Il contestait en outre la validité de l'accord de rupture précisant qu'il avait été contraint de signer sous peine d'être licencié. Il lui aurait été laissé moins de 48 heures pour réfléchir et prendre conseil sous prétexte que le président quittait le territoire le soir même et que les documents avaient été antidatés afin que l'indemnité soit prise en compte sur l'exercice comptable 2020. Dans le même ordre d'idées, il faisait valoir que des congés payés lui avaient été imposés du 13 décembre au 10 janvier 2020 afin d'être en cohérence avec les documents antidatés. L'employeur convenait, par courrier en date du 12 mai 2020, qu'il manquait dans le solde de tout compte le bonus annuel sur objectifs 2019 qui, selon lui, tient lieu de prime de fin d'année et précisait que celui-ci s'élevait à 164'796 XPF. En revanche il contestait les autres chefs de demandes et réfutait les propos de M. [I] sur les conditions de la rupture. Le conseil de M. [I] sollicitait dès lors par courrier du 24 juin 2020, la somme de 6'335'590 XPF en complément de l'indemnité de départ, relevant que la rupture du contrat de travail n'était pas justifiée et que lui était due, outre le rappel de la prime de l'exercice 2018, l'indemnité compensatrice de préavis, l'indemnité de licenciement les congés payés pour la période du 13 décembre au 10 janvier outre une indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Par requête en date du 5 octobre 2020, M. [I] a cité ASSYSTEM devant le Tribunal aux fins de voir annuler l'accord de rupture et requalifier la rupture en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse. Il réclamait en outre 7'009'090 XPF à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1'401'818 XPF (licenciement vexatoire), 2'102'727 XPF (indemnité compensatrice de préavis) et 202'185 XPF (congés payés sur préavis), 1'547'599 XPF (indemnité de licenciement), 106'865 XPF (rappel de la prime sur l'exercice 2018) 700'909 XPF au titre des congés payés forcés outre 450'000 XPF au titre des frais irrépétibles engagés. M. [I] faisait valoir pour l'essentiel que l'accord de rupture amiable devait être annulé car signé le 13 décembre sous la pression de l'employeur qui l'avait menacé de licenciement après lui avoir fait de reproches sur son travail au cours d'une réunion le 11 décembre à laquelle il avait été convoqué par SMS et don't l'objet était le budget. ll indiquait qu'il n'avait pas eu le temps de prendre conseil et avoir été contraint de la signer après moins de 48 heures de réflexion sous prétexte que le président, M. [Z] prenait l'avion. En outre la rupture amiable était d'autant moins possible qu'un litige persistait entre lui qui souhaitait rester et son employeur, qui demandait sa démission, le désaccord portant sur le montant de son bonus 2018, depuis le mois de mars 2019 date à laquelle il avait eu connaissance du bonus sur son bulletin de salaire. Quant au mail produit par l'employeur où M. [I] le remerciait, il démontrait au contraire son désarroi suite aux conditions de la rupture': il rappelait avoir contesté très rapidement les conditions de la rupture et n'être pas le seul salarié concerné évoquant le cas d'une dame [C] victime des mêmes méthodes de son employeur. ll sollicitait la requalification de la rupture en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse estimant, par ailleurs, les conditions de la rupture vexatoires car brutale, l'employeur l'ayant traité d'incompétent sans raison et l'ayant placé en congés payés forcés. Sur ce point précis, il fait valoir qu'il était d'usage dans l'entreprise de cumuler les congés, l'organisation du travail ne permettant pas de les prendre et estime donc justifiée sa demande en paiement à ce titre. ASSYSTEM réplique pour l'essentiel que le salarié ne rapporte pas la preuve que son consentement a été vicié alors qu'il a indiqué qu'il reconnaît avoir eu le temps nécessaire à sa prise de décision et que selon la jurisprudence, l'existence d'un différend entre les parties n'affecte pas la validité d'un accord de rupture conventionnelle en l'absence de pression ou contrainte, ce que ne rapporte pas le salarié. Elle affirmait que les documents n'avaient pas été antidatés et permettaient au requérant de revenir sur sa décision jusqu'à la date de la rupture en date du 10 janvier précisant que le différend sur le bonus 2018 était postérieur à la rupture': il citait en ce sens un courriel du 10 février. Il contestait avoir exercé toute contrainte ou menace sur le salarié, puisque ce dernier l'avait même remercié pour sa proposition. Pour ce qui concernait des congés «'forcés'», il expliquait que compte-tenu du nombre de congés accumulés par M. [I] (50 jours), il était légitime de les lui imposer et d'autant moins qu'il ne s'y était pas opposé. Il concluait au débouté de toutes les demandes supplémentaires et sollicitait le versement de la somme de 250'000 XPF au titre des frais irrépétibles. A titre subsidiaire, il demandait que soit constaté que le salarié avait déjà perçu la somme de 4'904'640 XPF au titre de l'indemnité de rupture conventionnelle et ordonner la compensation avec les sommes allouées au titre du licenciement. Par jugement en date du 31 mai 2022, le tribunal condamnait la société ASSYSTEM à payer à Monsieur [G] [I] sept millions neuf mille neuf cent neuf francs (7'009'909) XPF a titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sept cent mille francs (700'000) XPF (licenciement vexatoire), deux millions cent deux mille sept cent vingt-sept (2'102'727) francs (indemnité compensatrice de préavis), deux cent dix mille deux cent soixante-douze (210'272) francs XPF (congés payés sur préavis), un million cinq cent quarante-sept mille cinq cent quatre-vingt-dix-neuf (1'547'599) francs XPF (indemnité de licenciement), cent six mille huit cent soixante-cinq (106'865) francs XPF (rappel de la prime sur l'exercice 2018). Il ordonnait la compensation entre les sommes allouées à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et la somme allouée au titre de l'indemnité de rupture par la société ASSYSTEM Nouvelle-Calédonie (Quatre millions neuf cent quatre mille six cent quarante (4'904'640) francs XPF outre cent quatre-vingt mille (180'000) francs XPF au titre des frais irrépétibles ;. Il fixait à sept cent mille neuf cent neuf (700'909) francs XPF la moyenne des trois derniers mois de salaire et déboutait M. [I] du surplus de ses demandes. Par requête en date du 07 juin 2022, ASSYSTEM relevait appel de la décision. En cause d'appel, l'employeur demande l'infirmation du jugement considérant que l'accord de résiliation était parfaitement valable pour les raisons suivantes': le premier juge aurait reproché à l'employeur de ne pas s'expliquer sur sa volonté de proposer un départ négocié alors que s'agissant d'un mode de rupture qui suppose un simple consentement des parties, la rupture n'a pas à être motivée le tribunal aurait conclu au vu d'un «'timing serré'» que M. [I] avait eu moins de 24 heures pour étudier le document alors d'une part que la rapidité de négociation ne signe pas nécessairement un vice du consentement et d'autre part que M. [I] était un «'cadre rompu aux négociations'» à même de comprendre les enjeux de la rupture à laquelle il avait consentie l'alternative «'rupture amiable ou licenciement'» reprise par le tribunal ne repose que sur les affirmations péremptoires du salarié à l'exception de toute autre preuve, l'attestation d'un psychiatre étant établie sur les seuls dires de M. [I] lors de la négociation entre les parties, M. [I] a obtenu bien plus que ce qui avait été conclu dans un projet précédent. pour ce qui est de la jurisprudence métropolitaine inapplicable à l'espèce, selon laquelle, l'existence d'un différend au moment de la conclusion d'une convention de rupture négociée en application de l'article L1237-11 du code du travail métropolitain n'affecterait pas en elle-même la validité de cette convention, il est observé que le différend allégué sur le BSO 2018 est né postérieurement à la rupture soit deux mois après ainsi qu'il résulte d'un courriel de M. [I] daté du 10 février 2020 l'absence de l'intégralité des sommes à percevoir dans l'accord ne constituait pas en soi un élément de nature à vicier le consentement s'agissant d'un solde de tout compte dont les montants ne sont pas négociables et parfois même inconnus à l'heure de la signature et ce d'autant moins que M. [I] avait signé le 10 janvier son reçu pour solde de tout compte Les intérêts du salarié ont été préservés ce qui ressort du fait qu'il a reçu une indemnité de départ de 9 mois et a d'ailleurs remercié ASSYSTEM de lui offrir une opportunité de départ ainsi qu'il ressort d'un courriel du 19 mai 2019 Quant aux congés «'forcés'» du 16 décembre jusqu'à la date de la rupture, l'employeur indique qu'ils résultent de l'accord de résiliation signé par M. [I] et du fait que ce dernier bénéficiait d'un solde de plus de 50 jours de congés à fin novembre 2019. En réponse, M. [I] a sollicité la confirmation du jugement sauf sur trois points, le rejet de sa demande de remboursement des congés forcés, une augmentation au double du montant de l'indemnité accordée pour licenciement vexatoire et l'attribution d'un complément de 106'865 XPF au titre de la prime qui lui est due au titre de l'exercice 2018.

SUR QUOI

Sur la nullité de l'accord de rupture amiable ll résulte des dispositions des articles Lp 122-1 et suivants du code du travail de Nouvelle -Calédonie que la rupture d'un contrat de travail à durée indéterminée en dehors de la période d'essai ne peut résulter que d'un licenciement pour motif personnel ou économique ou de la démission du salarié. La jurisprudence admet cependant la rupture négociée d'un commun accord à condition qu'elle soit indépendante de tout litige (Cass. Soc. 11 février 2009 n° 08-40. 095) et dans le cadre d'un licenciement économique qu'elle intervienne, en outre à la demande expresse du salarié. Pour être valable, le consentement des parties doit être existant (c'est-à-dire intégre, exempt de vice), libre et éclairé. L'erreur, le dol et la violence constituent des vices du consentement si, sans eux, l'une des parties n'aurait pas conclu le contrat ou l'aurait conclu a des conditions substantiellement différentes (article 1130 du Code civil). Ainsi qu'exposé par le premier juge, les dispositions de l'article L 1237-11 du code du travail métropolitain prévoient un régime autonome de rupture du contrat de travail soumis à des conditions de forme et de fond strictes qui n'ont pas été rendues applicables en Nouvelle-Calédonie' comportant notamment la possibilité d'être assisté lors des pourparlers comme pour un licenciement, l'envoi d'un exemplaire de la convention à l'administration du travail qui contrôle que les règles relatives à la rupture conventionnelle ont bien été respectées ainsi que l'existence d'un délai de rétractation. Il n'est pas contesté que la proposition de rupture négociée est intervenue à l'initiative de l'employeur. Il est reproché au tribunal de s'être interrogé sur les raisons pour lesquelles l'employeur a souhaité le départ d'un cadre majeur qui avait plus de 8 ans d'ancienneté alors que M. [I] convoqué par SMS le 11 décembre 2019 à une réunion sur le budget 2020, lors de laquelle il lui a été demandé de partir et proposé une rupture amiable, a reçu le document afférent le 12 décembre à 20 heures avec signature le 13 décembre, de sorte que le salarié a eu au moins de 24 heures pour étudier le document et prendre sa décision. Il est en effet difficile de comprendre pour quelles raisons un cadre important ainsi qu'il ressort de sa qualité de «'Responsable d'activité secteurs Industries et Systèmes'»' aurait décidé, sans en prendre l'initiative, de quitter la société en 48 heures montre en main alors qu'il y exerçait depuis plus de 8 ans avec une progression continue. Il sera relevé que si une convention est parfaite par la rencontre de deux consentements sans qu'il soit besoin d'en préciser formellement les raisons ainsi que rappelé par l'appelant, le contexte et les raisons pour lesquelles les parties s'engagent réciproquement est essentiel afin de s'assurer qu'aucun vice du consentement ne soit de nature à entraîner l'annulation de la convention. Il n'est nullement établi que le salarié avait eu connaissance au préalable du souhait de son employeur de le voir partir, et le fait qu'il se voyait reprocher de mauvais résultats, ce que ne dément pas l'employeur, constituait en soi une pression psychologique qui n'a pu qu'altérer le libre arbitre de M. [I]. Le tribunal relève, par ailleurs que le consentement du requérant a été vicié en ce sens que l'accord ne mentionnait pas les sommes qu'il allait percevoir au solde de tout compte et qui se sont avérées inférieures à celles auxquelles il pouvait prétendre de sorte qu'il n'avait pas tous les éléments financiers pour apprécier l'opportunité de signer la convention qui prévoyait l'octroi d'une indemnité de rupture de 4'904'640 XPF au titre de l'indemnité de départ négocié. Dès que le salarié a reçu son solde de tout compte adressé au salarié le 6 février, M. [I] l'a contesté ainsi que l'accord de rupture amiable en sollicitant une part de prime sur le bonus 2018 qui lui avait été retirée sans explication ainsi que la prime de fin d'année 2019. ll s'ensuit ainsi que le relève le tribunal que «''. manifestement, le salarié a été trompé sur l'économie générale du contrat et qu'il n'aurait pas signé ou l'aurait conclu à des conditions substantiellement différentes s'il avait été informé de l'intégralité des sommes qu'il allait recevoir lors de son solde de tout compte.'» En outre l'existence d'un délai de rétractation symbolique y compris pour la Nouvelle-Calédonie, était de nature à caractériser un défaut d'information sur les conséquences de la rupture ce d'autant que le délai qui lui avait été accordé ne lui a pas permis de consulter un conseil. Il est objecté par l'appelant que M. [I] était un cadre «'rompu aux négociations'» particulièrement bien placé pour saisir les enjeux de l'accord, la rapidité d'une négociation ne signant pas nécessairement un vice du consentement. Il sera remarqué en premier lieu que la spécialité de M. [I] ne concernait pas les ressources humaines mais relevait d'un champ de conventions techniques bien éloigné des compétences nécessaires à la négociation des ruptures de contrat de travail. En outre, une telle célérité dans la conclusion d'un accord pris à l'initiative d'un chef d'entreprise mettant fin en moins de 48 heures à plus de 8 ans de travail d'un cadre majeur de la société devient parfaitement suspecte lorsque s'y rajoute un mode convocation (SMS) qui s'apparente à un entretien préalable puisque c'est à l'occasion de la réunion du 11 au soir que des reproches seront faits à M. [I], l'omission des sommes dues et un délai de rétractation inexistant. La cour partage de ce point de vue l'analyse du tribunal sur le ton employé par le salarié dans son courriel en date du 19 décembre 2019 (" Merci de m'avoir permis de quitter les premiers pour enfin rejoindre les meilleurs (les seconds) Je vous souhaite une bonne et longue course en tête d'affiche, le second rang me va bien.") lequel loin d'établir que le requérant était satisfait de l'accord de rupture manifeste bien plutôt son désarroi avec ironie. Ce trait de caractère de M. [I] ressort d'ailleurs d'un autre courriel attestant de plusieurs pommes de discorde entre le salarié et son employeur (cf pièce 15 courriel du 17 avril 2019':«'Optimiste de naissance, je reste confiant...'») Dans ces conditions, la décision du tribunal selon laquelle l'accord de rupture est nul et doit être requalifié en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse sera confirmée Sur les sommes réclamées Par application des dispositions de l'article Lp 122-35 du Code du Travail de Nouvelle-Calédonie, si le licenciement d'un salarié survient sans que la procédure requise ait été observée mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge impose à l'employeur d'accomplir la procédure prévue et accorde au salarié, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure a un mois de salaire. Si ce licenciement survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge octroie une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois, en cas de «deux ans ou plus d'ancienneté. Sur ce point, la cour reprendra à son compte les calculs établis par le premier juge au vu des pièces produites (bulletins de salaire), de l'ancienneté du salarié (8 ans et 4 mois), de son âge au moment de la rupture (36 ans) et ce en application des articles Lp 122-22, Lp 122-24, Lp 122-27, Lp 122-35 du code du travail de Nouvelle-Calédonie. Sur la base d'un salaire mensuel brut non contesté calculé sur les douze derniers mois de 700'909 XPF, il sera alloué 2'102'727 XPF (préavis 3 mois (avenant cadre AIT) outre 210'272 XPF de congés-payés sur préavis, 1'547'599 XPF d'indemnité de licenciement (article 8 AIT avenant cadre) et 7'009'909 XPF pour licenciement abusif. Sur le caractère vexatoire constitutif d'un préjudice distinct ll est de jurisprudence constante qu'un licenciement même justifié par une cause réelle et sérieuse ne doit pas être vexatoire et qu'à défaut l'employeur peut être condamné à payer au salarié des dommages-intérêts Les circonstances de la rupture sans que le salarié ait pu bénéficier de la procédure de licenciement, se soit retrouvé à la porte en 48 heures après 8 ans et 4 mois de travail au terme d'une progression constante dans la hiérarchie de l'entreprise sans qu'il ait jusque-là fait l'objet d'une quelconque remarque défavorable, le fait d'avoir été placé en congés du jour au lendemain à l'égal d'une mise à pied conservatoire ont incontestablement causé un préjudice moral justifiant l'attribution de dommages intérêts à hauteur de ce qui a été attribué par le premier juge soit la somme de 700'000 XPF. Rien ne justifie à cet égard que cette indemnité soit doublée ainsi qu'il est sollicité. Sur les congés-payés ll résulte de l'article 67 de l'AIT que le salarié qui, au cours de l'année de référence justifie avoir occupé chez le même employeur pendant un temps équivalent à un minimum d'un mois de travail effectif, a droit a un congé dont la durée est déterminée à raison de deux jours et demi ouvrables par mois de travail sans que la durée totale du congé exigible puisse excéder 30 jours ouvrables. L'article Lp 241-7 du code du travail prévoit que les congés payés peuvent être cumulés sur trois ans sous réserve que le salarié prenne au moins 6 jours ouvrables de congés par an et que cette possibilité fait l'objet d'un accord écrit entre le salarié et l'employeur. Enfin, selon la jurisprudence, si un salarié n'a pu prendre ses congés du fait de l'employeur, il peut prétendre à des dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'il a subi. M. [I] était en congés du 13 décembre au 10 janvier. Il indique cependant qu'ils lui ont été imposés lors de la signature de la rupture. Il est constant qu'il se trouvait à [Localité 6] le 19 décembre ainsi qu'il ressort du courriel envoyé à son employeur et que ses congés payés lui ont été réglés puisqu'il a perçu son salaire pendant ses congés tel que cela résulte du bulletin de salaire des mois de décembre et janvier. Non seulement, M. [I] n'établit pas qu'il avait reporté ses congés payés avec l'accord express de son employeur ou qu'il avait été empêché par celui-ci de les prendre, mais il s'avère ainsi qu'il l'indique lui-même dans ses conclusions (page 6)':' «'Enfin s'agissant de [Localité 6], ce voyage était prévu de longue date'», ce qui suppose qu'il avait posé des congés à l'avance. Dans ces conditions, le requérant ne peut prétendre à nouveau au paiement de son salaire pour cette période et le jugement du tribunal du travail sera confirmé sur ce point ll sera donc débouté de cette demande a ce titre. Sur le bonus 2018 Le requérant fait à nouveau valoir en cause d'appel que le gérant se serait engagé à lui payer la somme de 1'453'358 XPF au titre du bonus 2018 et qu'il n'a perçu au titre de son solde de tout compte que 1'346'493 XPF de sorte qu'il lui resterait dû à ce titre la somme de 106'865 XPF. Il ne justifie pas plus qu'en première instance de l'existence d'un accord et sera débouté de cette demande. Sur la compensation entre les sommes versées et allouées Il y a lieu d'ordonner la compensation entre les sommes qui ont été versées à M. [I] et les sommes qui lui sont allouées à titre de dommages-intérêts par la cour. Sur l'exécution provisoire ll sera rappelé que l'exécution provisoire est de droit en cause d'appel. Sur les frais irrépétibles ll serait inéquitable de laisser à la charge du salarié les frais irrépétibles qu'il a engagés non compris dans les dépens. La société défenderesse sera condamnée a lui payer la somme de 180'000 XPF à ce titre. Sur les dépens La défenderesse qui succombe sur les demandes concernant le licenciement sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort, CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement du tribunal du travail en ce qu'il a déclaré nul l'accord de rupture amiable conclu le 13 décembre 2020 entre M. [G] [I] et la société ASSYSTEM Nouvelle-Calédonie et requalifié la rupture du contrat de travail en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et vexatoire ; CONDAMNE la société ASSYSTEM à régler à M. [I] une somme de 180'000 XPF au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens de l'instance. Le greffier, Le président.