COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-9
ARRÊT
AU FOND
DU 22 SEPTEMBRE 2022
N° 2022/ 600
Rôle N° RG 21/16993 N° Portalis DBVB-V-B7F-BIPO2
[C] [W]
C/
[R], [U], [Y], [Z] [E]
[V] [E]
S.A.S.
CGBS MIRAMAR
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me
Philippe KLEIN
Me
Frédéric KIEFFER
Me
Paul GUEDJ
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge de l'exécution de GRASSE en date du 28 Octobre 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 21/00115.
APPELANTE
Madame [C] [W]
née le [Date naissance 4] 1951 à [Localité 13] (JAPON)
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 8]
représentée par Me
Philippe KLEIN de la SCP RIBON KLEIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
plaidant par Me
Jacques RANDON, avocat au barreau de NICE
INTIMES
Monsieur [R], [U], [Y], [Z] [E]
né le [Date naissance 2] 1947 à [Localité 10] ([Localité 10]),
demeurant [Adresse 6]
Madame [V] [E]
née le [Date naissance 5] 1970 à [Localité 10] ([Localité 10]),
demeurant [Adresse 7]
Tous deux représentés et plaidant par Me
Frédéric KIEFFER de la SELARL
KIEFFER - MONASSE & ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE
S.A.S.
CGBS MIRAMAR
poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 1]
INTERVENANT FORCÉ
représentée par Me
Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
plaidant par Me
Franck GAMBINI de la SELARL SELARL
D'AVOCATS MAXIME ROUILLOT- FRANCK GAMBINI, avocat au barreau de GRASSE, substitué par Me
Audrey CHIOSSONE, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles
804 et
805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Mai 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Evelyne THOMASSIN, Président, et Madame Sophie TARIN-TESTOT, Conseiller.
Madame Evelyne THOMASSIN, Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
L'affaire a été débattue le 25 Mai 2022 en audience publique. Conformément à l'article
804 du code de procédure civile, Madame Evelyne THOMASSIN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Evelyne THOMASSIN, Président
Madame Pascale POCHIC, Conseiller
Madame Sophie TARIN-TESTOT, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Josiane BOMEA.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Septembre 2022.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Septembre 2022,
Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Mme Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Faits, procédure et prétentions des parties :
[Z] [E], né en [Date naissance 14] 1925 et madame [C] [W], née en 1951, se sont mariés le [Date mariage 9] 1991, sous le régime de la séparation de biens. En 2001, ils ont acquis en indivision une villa dénommée '[Adresse 12], située [Adresse 12], pour le prix de 1 143 000 euros payé comptant.
En mai 2005, l'époux a déposé une requête en divorce sur laquelle est intervenue le 9 juin 2005, une ordonnance de non conciliation qui a attribué à l'épouse une pension alimentaire de 10 000 euros par mois et la jouissance gratuite de la résidence secondaire d'[Localité 11].
Le divorce a été prononcé par le juge aux affaires familiales de Paris, en ordonnant la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux et il a été notamment alloué à madame [W] une prestation compensatoire de 750 000 €.
[Z] [E] a entrepris une action en révocation de la donation des deniers qu'il avait consentie à sa femme pour lui permettre d'acquérir la moitié de la villa d'[Localité 11]. Il est décédé le [Date décès 3] 2015, ses héritiers sont ses enfants [V] et [R] [E].
Le tribunal judiciaire de Grasse a ordonné le 17 juin 2021, avec exécution provisoire, sur le fondement des articles
815 et suivants du code civil, le partage de l'indivision existant entre monsieur [R] [E], madame [V] [E] et madame [C] [W], sur les biens à [Adresse 12], ce par voie de licitation à la barre du tribunal, sur la mise à prix de 2 500 000 €. Il estimait que la demande ne relevait pas de l'article
267 du code civil, à savoir la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux après divorce, mais uniquement d'un partage d'indivision. Il retenait cependant dans sa motivation une créance des héritiers envers l'ex épouse au titre de la donation déguisée pour 1 050 000 €.
Par un jugement du 28 octobre 2021, le tribunal judiciaire de Grasse a :
- débouté madame [W] de sa demande d'arrêt des poursuites de saisie immobilière sur le fondement de l'article
L311-4 du code des procédures civiles d'exécution,
- débouté l'intéressée de ses demandes en nullité des poursuites pour défaut de titre exécutoire,
- l'a condamnée aux dépens, et à payer la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile à monsieur [R] [E] et madame [V] [E].
Il retenait qu'il s'agissait d'une licitation partage et non d'une mesure d'exécution de sorte que le débat sur l'existence d'un titre exécutoire n'entrait pas dans ses pouvoirs. La licitation par adjudication a eu lieu au profit de la SAS
CGBS Miramar au prix de 1 900 000 €.
Madame [W] a fait appel par déclaration en date du 3 décembre 2021. Un avis de fixation lui a été adressé le 3 janvier 2022, lui indiquant l'orientation du dossier en procédure 'à bref délai' et son obligation procédurale de signifier ou notifier la déclaration d'appel dans les 10 jours et de conclure dans le mois.
Ses moyens et prétentions étant exposés dans des conclusions en date du 27 janvier 2022 au détail desquelles il est renvoyé, elle demande à la cour de :
- la recevoir en son appel,
- réformer le jugement,
- la déclarer bien fondée en sa demande d'arrêt des poursuites, pour parvenir à la licitation du bien d'[Localité 11],
- condamner solidairement monsieur [R] [E] et madame [V] [E] à lui payer la somme de 2 500 euros en application de l'article
700 du code de procédure civile,
Subsidiairement,
- ordonner un sursis à statuer jusqu'à la décision de la cour sur le recours intenté à l'encontre du jugement du 17 juin 2021,
- plus subsidiairement, sur la base de l'article
107 du code de procédure civile, joindre la présente affaire à l'instance principale pour être statué par une seule décision,
- réserver en ce cas les demande accessoires au titre de l'article
700 du code de procédure civile et les dépens.
Elle soutient qu'il ne peut être procédé à la licitation alors que le jugement du 17 juin 2021 ne contient aucune condamnation et qu'elle n'est qu'une modalité de partage. Il n'y a pas lieu à action oblique en l'espèce, la créance qui est invoquée, au titre de la révocation d'une donation ne sera exigible que lors du partage définitif en application des articles
1542 et
1543 du code civil.
Leurs moyens et prétentions étant exposés dans des conclusions en date du 25 janvier 2022, auxquelles il est renvoyé, monsieur et madame [E] demandent à la cour de :
- relever la caducité de la déclaration d'appel n°21-14749 en date du 3 décembre 2021,
- déclarer madame [W] irrecevable en son appel et également en sa demande de sursis à statuer,
- la débouter de ses demandes,
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- condamner l'appelante à leur payer une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile, et à supporter les entiers dépens.
La caducité de l'appel doit être retenue car l'appelante dans ses conclusions ne demande pas l'infirmation de la décision, de sorte qu'il y a lieu de confirmer le jugement. Le premier président a refusé d'arrêter l'exécution provisoire de la décision, et il n'entre pas dans les pouvoirs du Jex d'ordonner l'arrêt des poursuites. Il n'y a pas connexité entre les deux instances, au sens des articles
100 et
101 du code de procédure civile, le jugement du 17 juin 2021 concerne une action en licitation partage, celui du 28 octobre 2021, un arrêt des poursuites, l'annulation d'une audience et le défaut de titre exécutoire à l'initiative de madame [W].
Ses moyens et prétentions étant exposés dans des conclusions en date du 14 février 2022, auxquelles il est renvoyé, la SAS
CGBS Miramar demande à la cour de :
- déclarer l'appel caduc,
- à défaut déclarer l'appel irrecevable,
- débouter l'appelante de toutes ses prétentions,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 28 octobre 2021,
- condamner l'appelante à payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens avec distraction au profit de la SCP Cohen-Guedj-Montero-Daval-Guedj.
Etant assignée devant la cour, elle est contrainte de prendre parti dans un litige qui lui est étranger. Dans les premières conclusions déposées dans le délai de l'article
905 du code de procédure civile, il n'était pas demandé la réformation de la décision déférée. Cela n'est apparu que dans les conclusions postérieures du 27 janvier 2022 qui prétendent annuler et remplacer celles du 13 janvier 2022, ce qui n'est pas possible au regard de l'article
910-4 du code de procédure civile. La demande d'arrêt des poursuites n'a pas plus d'objet puisque l'adjudication a été réalisée. L'appel est donc inutile et irrecevable. Aucune demande n'est formée contre elle., sa mise en cause est abusive, il convient de lui allouer des frais irrépétibles.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 avril 2022.
MOTIVATION
DE LA
DÉCISION :
* sur la caducité de la déclaration d'appel :
L'article
905-2 du code de procédure civile dispose en son premier alinéa qu'à peine de caducité de la déclaration d'appel, l'appelant dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception de l'avis de fixation de l'affaire à bref délai pour remettre ses conclusions au greffe.
Il résulte de l'article
954 du code de procédure civile, que l'appelant, dans le dispositif de ses conclusions auquel la cour d'appel est tenue de répondre pour statuer, doit énoncer de manière complète ses prétentions et une demande expresse de réformation en exposant les moyens invoqués à son soutien.
Selon une jurisprudence bien établie, la Cour de cassation tire de la combinaison des articles
542 et
954 du code de procédure civile, le fait que la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement lorsque le dispositif des conclusions de l'appelant n'énonce aucune demande d'infirmation ou d'annulation du jugement.
En l'espèce, il est exact que dans le premier jeu de ses écritures, madame [W] n'avait pas sollicité l'infirmation de sa décision, mais la cour d'appel est saisie de ses écritures postérieures, les dernières, datées du 27 janvier 2022 dont le contenu a été rappelé ci dessus et qui sont intervenues dans le mois de l'avis de fixation, du 3 janvier 2022. Cette régularisation intervenue avant l'expiration du délai pour conclure conduit la cour d'appel à écarter la caducité de la déclaration d'appel.
* sur la demande d'arrêt des poursuites et le sursis à statuer :
Le premier juge par une motivation complète, pertinente que la cour adopte a exactement rappelé que la vente de l'immeuble ne s'inscrit pas dans une procédure de voie d'exécution, mais constitue une modalité de partage en présence d'un bien immobilier que l'on ne peut diviser en nature, ce sur le fondement de l'article
815-17 du code civil.
La demande relevait d'une suspension de l'exécution provisoire attachée à la décision ordonnant licitation-partage, mais il n'a pas été fait droit par le premier président dans une décision en date du 12 novembre 2021, sur le fondement de l'article
524 du code de procédure civiles condamnant madame [W] à payer 3 000 euros d'article
700 du code de procédure civile et aux dépens.
Dans un tel cadre juridique, la demande de sursis à statuer n'a pas de fondement, le juge de l'exécution avec les pouvoirs duquel statue la cour n'ayant pas à interférer sur le fond.
* sur la connexité :
Lorsqu'existe entre des affaires portées devant deux juridictions différentes un lien tel, qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire et juger ensemble, il peut être demandé à l'une de ces juridictions de se dessaisir et de renvoyer en l'état, la connaissance de l'affaire à l'autre juridiction.
Il n'existe pas entre les deux procédures, de lien justifiant d'une connexité et d'un renvoi de l'une des compositions vers l'autre.
* sur les frais irrépétibles :
Il est inéquitable de laisser à la charge de monsieur [R] [E] et madame [V] [E] les frais irrépétibles engagés dans l'instance, une somme de 2 000 € leur sera allouée.
Les autres demandes de ce chef seront rejetées.
La partie perdante supporte les dépens, ils seront à la charge de madame [W] qui succombe en l'essentiel de ses prétentions.
PAR CES MOTIFS
:
La cour, après en avoir délibéré, statuant par décision contradictoire, mise à disposition au greffe,
DIT n'y avoir lieu à sursis à statuer,
ECARTE la demande de renvoi pour connexité,
DIT n'y avoir lieu à caducité de l'appel,
CONFIRME le jugement déféré,
CONDAMNE madame [W] à payer à monsieur [R] [E] et madame [V] [E] une somme de 2 000 € sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile,
CONDAMNE madame [W] aux dépens d'appel,
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE