Cour de cassation, Chambre sociale, 19 mai 2016, 14-26.995

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2016-05-19
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
2014-09-23
Conseil de Prud'hommes de Cannes
2013-03-29

Texte intégral

SOC. LG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 19 mai 2016 Cassation M. LACABARATS, conseiller le plus ancien faisant fonction de président Arrêt n° 949 F-D Pourvoi n° H 14-26.995 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

Statuant sur le pourvoi formé par

M. [Y] [Q], domicilié [Adresse 1], contre l'arrêt rendu le 23 septembre 2014 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (17e chambre), dans le litige l'opposant à la société Bel âge service, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation ; Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 5 avril 2016, où étaient présents : M. Lacabarats, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, M. Le Corre, conseiller référendaire rapporteur, Mme Geerssen, conseiller, Mme Hotte, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. Le Corre, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [Q], de la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat de la société Bel âge service, l'avis de M. Petitprez, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen

unique :

Vu

les articles 384, 394 et 398 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué

, que M. [Q] a saisi le 25 juillet 2011 le conseil de prud'hommes de Cannes d'une demande en résiliation du contrat de travail le liant à la société Bel âge service ; qu'après avoir été débouté par jugement du 27 juillet 2012 frappé d'appel, il a saisi le 14 septembre 2012 la même juridiction qui, par décision du 29 mars 2013, a constaté son désistement d'instance et d'action et s'est déclarée dessaisie ; Attendu que, pour confirmer un jugement ayant donné acte au salarié de son désistement d'instance et d'action, l'arrêt retient que les mentions figurant à ce titre dans le jugement ont la force probante d'un acte authentique, qu'il y a lieu de prononcer la jonction de cette première instance avec une autre instance pendante devant la cour ayant un objet identique et qu'il convient dès lors de constater l'extinction de l'instance ;

Qu'en se déterminant ainsi

, alors que la jonction de deux instances n'a pas pour effet de créer une procédure unique, sans rechercher si le salarié avait, au-delà des termes employés, manifesté une volonté claire et non équivoque de renoncer à la seconde instance dont elle était saisie, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 septembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ; Condamne la société Bel âge service aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Bel âge service à payer à M. [Q] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mai deux mille seize.

Par ces motifs

le bureau de jugement du conseil de prud'hommes de Cannes, statuant publiquement, par jugement non qualifié, donné acte à Monsieur [Y] [Q] de son désistement d'instance et action et se déclare dessaisi (…) » ; que les mentions figurant dans les jugements par lesquels les juges constatent la position prise par les parties à l'audience ont la force probante d'un acte authentique qui ne peut être contestée que par la voie de l'inscription de faux, ce qui n'est pas argué en l'espèce ; que dès lors le jugement doit être confirmé en ce qu'il a constaté le désistement d'instance et d'action de Monsieur [Q] et s'est déclaré dessaisi ; que par ailleurs, à titre surabondant, le principe de l'unicité de l'instance en matière prud'homale fait exception aux dispositions de l'article 385 du code de procédure civile ; que la jonction des deux actions qui sont identiques comme portant sur les mêmes demandes étend l'effet du désistement aux deux procédures et entraîne l'extinction de l'instance après jonction ; 1. ALORS QUE le désistement d'action doit reposer sur une volonté certaine et non équivoque du demandeur de renoncer à son action ; que l'arrêt constate que le jour même de l'audience, Monsieur [Q] a déposé des conclusions de désistement d'instance et non d'action, dans lesquelles il a indiqué expressément qu'il entendait maintenir ses prétentions formées dans une instance parallèle, ce dont il résulte que nonobstant ses déclarations lors de l'audience, la volonté de Monsieur [Q] de se désister de son action n'était pas certaine et non équivoque ; qu'en jugeant néanmoins que Monsieur [Q] s'était désisté de son action, la cour d'appel a violé les articles 384 et 398 du code de procédure civile ; 2. ALORS QUE le juge ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que l'arrêt énonce que les parties ont soutenu oralement à l'audience leurs conclusions écrites, lesquelles ne comportaient aucun moyen tiré de la force probante des mentions figurant dans le jugement, ce dont il résulte que la cour d'appel a soulevé ce moyen d'office sans avoir préalablement recueilli les observations des parties ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ; 3. ALORS QUE la fin de non-recevoir tirée de la règle de l'unicité de l'instance n'étant pas d'ordre public, le juge ne peut la relever d'office ; que dans ses conclusions soutenues oralement à l'audience, la société Bel Age n'a pas soulevé la fin de non-recevoir tirée de la règle de l'unicité de l'instance ; qu'en relevant d'office cette fin de non-recevoir, la cour d'appel a violé l'article R.1452-6 du code du travail ; 4. ALORS QUE le désistement d'un salarié dans une instance est sans effet sur la poursuite d'une autre instance engagée antérieurement par le même salarié ; qu'en étendant l'effet du désistement de Monsieur [Q] dans l'instance enrôlée sous le numéro 13/08940 à l'instance introduite antérieurement par le salarié devant la cour d'appel sous le numéro 12/16723, la cour d'appel a violé l'article R.1452-6 du code du travail.

MOYEN ANNEXE

au présent arrêt Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. [Q] IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement rendu le 29 mars 2013 par le conseil de prud'hommes de Cannes donnant acte à Monsieur [Q] de son désistement d'instance et d'action et se déclarant dessaisi, d'avoir prononcé la jonction de la procédure enrôlée sous le numéro 12/16723 avec la procédure enrôlée sous le numéro 13/08940 et constaté l'extinction de cette instance ; AUX MOTIFS QU'il est constant que les conclusions écrites prises par Monsieur [Q] en vue de l'audience devant le bureau de jugement du conseil de prud'hommes de Cannes font mention d'un désistement d'instance et non d'action ; qu'il sera rappelé toutefois qu'en matière prud'homale la procédure est orale ; qu'or il est mentionné au jugement déféré « vu les déclarations de [Y] [Q] à l'audience, le conseil constate que la partie demanderesse a déclaré expressément se désister de son instance et de son action à l'encontre de la SARL Bel Age Service ; que la partie défenderesse accepte explicitement ce désistement ; qu'en application des articles 394 à 399 du code de procédure civile, le bureau de jugement donne acte à Monsieur [Y] [Q] de son désistement d'instance et d'action.