Cour d'appel de Paris, 25 avril 2017, 2015/23772

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    2015/23772
  • Domaine de propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
  • Parties : EIGHTEEN SARL / MAJE SAS
  • Décision précédente :Tribunal de grande instance de Paris, 16 octobre 2015
  • Président : Monsieur Benjamin RAJBAUT
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Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Paris
2017-04-25
Tribunal de grande instance de Paris
2015-10-16

Texte intégral

COUR D'APPEL DE PARIS

ARRÊT

DU 25 avril 2017 Pôle 5 - Chambre 1 (n°101/2017 , 13 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 15/23772 Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 octobre 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS -RG n° 14/08698 APPELANTE SARL EIGHTEEN Immatriculée au Registre du Commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 448 058 644 Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège [...] 75002 PARIS Représentée par Me Corinne CHAMPAGNER KATZ de la SELASU CORINNE CHAMPAGNER KATZ, avocat au barreau de PARIS, toque : C1864 Assistée de Me Emmanuelle G de la SELASU CORINNE CHAMPAGNER KATZ, avocat au barreau de PARIS, toque : C1864 INTIMÉE SAS MAJE SAS ayant absorbé la société MAJE BOUTIQUE, SARL Immatriculée au Registre du Commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 382 544 310 prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège [...] Représentée et assistée de Me Philippe B, avocat au barreau de PARIS, toque : E0804 COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 1er mars 2017, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Benjamin RAJBAUT, Président Monsieur David PEYRON, Président de chambre Mme Isabelle DOUILLET, Conseillère qui en ont délibéré. Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile. Greffier, lors des débats : Mme Karine ABELKALON ARRÊT : •contradictoire • par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. • signé par Monsieur Benjamin RAJBAUT, président et par Mme Karine ABELKALON, greffier. E X P O S É D U L I T I G E La SAS M a pour activité la fabrication de vêtements, chaussures et accessoires, commercialisés sous la marque 'MAJE' et expose être titulaire de droits d'auteur et de dessins et modèles communautaires non enregistrés sur un motif imprimé dénommé 'mosaïque', créé le 21 mai 2012 par Mme Amélie C pour la collection printemps/été 2013 et utilisé pour la confection de la robe Arabesque, du débardeur Amquis, tu tee-shirt Canon et du pantalon Anita ; La SARL MAJE BOUTIQUE expose quant à elle distribuer en France, à titre exclusif, les produits griffés 'MAJE' au travers d'une centaine de points de vente ; Ayant été avisée de ce que le magasin à l'enseigne 'SEE U SOON' situé [...], exploité par la SARL EIGHTEEN, proposait à la vente un modèle de robe et de pantalon fabriqué à partir d'un tissu reproduisant selon elle les caractéristiques de son propre imprimé 'mosaïque', la SAS M a fait dresser le 18 avril 2014 un procès-verbal de constat d'achat et, autorisée par ordonnance présidentielle du 06 mai 2014, a fait procéder le 15 mai 2014 à une saisie-contrefaçon au magasin de vente en gros et demi-gros de la SARL EIGHTEEN situé [...], à la suite de quoi les sociétés MAJE et MAJE BOUTIQUE ont fait assigner le 12 juin 2014 cette société devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de droits d'auteur et de dessins et modèles communautaires non enregistrés et en concurrence déloyale ; Par jugement contradictoire du 16 octobre 2015, le tribunal de grande instance de Paris a : •rejeté la fin de non-recevoir pour défaut de titularité, •dit qu'en offrant à la vente un pantalon référencé 4 117 823 et une robe référencée 4 112 432 confectionnés dans un imprimé reprenant les caractéristiques de l'imprimé 'mosaïque' sur fond noir de la SAS M, la SARL EIGHTEEN a commis des actes de contrefaçon au titre du droit d'auteur et des dessins ou modèles communautaires non enregistrés au préjudice de la SAS M, •dit qu'en offrant à la vente un pantalon référencé 4 117 823 et une robe référencée 4 112 432 confectionnés dans un imprimé reprenant les caractéristiques de l'imprimé 'mosaïque' sur fond blanc de la SAS M, la SARL EIGHTEEN a commis des actes de contrefaçon au titre du droit d'auteur au préjudice de la SAS M, • dit que la SARL EIGHTEEN a commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la SARL MAJE BOUTIQUE, • interdit la poursuite de ces agissements, sous astreinte de 350 € par infraction constatée un mois après la signification de sa décision et ce pendant un délai de quatre mois, se réservant la liquidation de l'astreinte, • condamné la SARL EIGHTEEN à payer à la SA M la somme de 30.000 € en réparation du préjudice né de la contrefaçon, •condamné la SARL EIGHTEEN à payer à la SARL MAJE BOUTIQUE la somme de 80.000 € au titre de la concurrence déloyale, •autorisé la publication du communiqué judiciaire suivant dans deux journaux ou revues au choix des sociétés MAJE et MAJE BOUTIQUE, aux frais de la SARL EIGHTEEN, sans que le coût de chaque insertion ne puisse être supérieur à 3.500 € HT : 'Par décision en date du 16 octobre 2015, le tribunal de grande instance de Paris (chambre de la propriété intellectuelle et industrielle) a notamment jugé que la SARL EIGHTEEN a porté atteinte aux droits d'auteur de la société MAJE sur son motif mosaïque original apporté sur la robe M ARABESQUE et le pantalon M ANITA en commercialisant des vêtements reproduisant en tout ou partie ce motif et a condamné la SARL EIGHTEEN à indemniser les sociétés MAJE et MAJE BOUTIQUE en réparation des préjudices subis de ce fait' ; •condamné la SARL EIGHTEEN à payer aux sociétés MAJE et MAJE BOUTIQUE la somme globale de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les frais de constat du 18 avril 2014 et de saisie-contrefaçon du 15 mai 2014, ainsi qu'aux dépens, •rejeté le surplus des demandes, •ordonné l'exécution provisoire sauf en ce qui concerne la mesure de publication ; La SARL EIGHTEEN a interjeté appel de ce jugement le 25 novembre 2015 ; Par ses dernières conclusions d'appel n° 3, transmises par RPVA le 26 décembre 2016, la SARL EIGHTEEN demande : •d'infirmer le jugement entrepris, À titre principal : • de dire que la SAS M ne justifie pas être titulaire de droits d'auteur ni de droits sur les dessins et modèles communautaires non enregistrés sur le motif 'mosaïque' revendiqué, • de dire que le motif revendiqué par la SAS M n'est pas précisément caractérisé et n'est pas original et ne peut donc pas bénéficier de la protection sur le droit d'auteur, •de dire que la SAS M ne peut pas bénéficier de la protection par le droit des dessins et modèles communautaires non enregistrés dès lors qu'elle ne rapporte pas la preuve de la divulgation du dit motif au sein de la Communauté à une date certaine et que le motif revendiqué, dont les caractéristiques ne sont pas suffisamment précisées, n'est pas nouveau et ne présente pas un caractère individuel, •de débouter par conséquent la SAS M de l'intégralité de ses demandes sur le fondement de la contrefaçon, •de dire qu'elle n'a pas commis d'acte de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la SARL MAJE BOUTIQUE, reprise par la SAS M, ni de la SAS M, •de débouter par conséquent la SAS M de l'intégralité de ses demandes sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire, À titre subsidiaire : •de dire que la SAS M ne démontre pas le préjudice qu'elle allègue, •de débouter par conséquent la SAS M de l'intégralité de ses demandes, En tout état de cause : •de condamner la SAS M à lui verser la somme de 20.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ; Par ses dernières conclusions d'appel n° 2, transmises par RPVA le 29 décembre 2016, la SAS M, ayant absorbé la SARL MAJE BOUTIQUE, demande : • de donner acte à la SAS M de ce qu'elle vient aux droits de la SARL MAJE BOUTIQUE, • de confirmer partiellement le jugement entrepris, • de dire que la SARL EIGHTEEN en commercialisant les vêtements confectionnés dans l'imprimé argué de contrefaçon, s'est également rendue coupable de contrefaçon des droits de dessins et modèles communautaires non enregistrés lui appartenant, relatifs à cet imprimé 'mosaïque' sur fond blanc, • de condamner la SARL EIGHTEEN aux sommes supplémentaires suivantes : • 200.000 € à titre de dommages et intérêts du fait de l'atteinte à ses droits, constitutive de contrefaçon de ses droits d'auteur et de dessins et modèles communautaires non enregistrés, • 180.000 € à titre de dommages et intérêts du fait des actes distincts de concurrence déloyale et parasitaire, • d'ordonner à titre de supplément de dommages et intérêts, la parution de l'arrêt à intervenir sur la page d'accueil du site 'www.see- u-soon' pendant un mois à compter de la signification de l'arrêt, en police de caractère 12, • à titre infiniment subsidiaire, si la cour estimait que les faits ne constitueraient pas des actes de contrefaçon de ses droits, de dire qu'ils constituent des agissements de concurrence déloyale sur le fondement de l'article 1382 du code civil, compte tenu du risque de confusion, et des actes de parasitisme en condamnant la SARL EIGHTEEN à la somme de 380.000 € en complément des sommes déjà allouées par le tribunal, soit 110.000 €, en adoptant une substitution de motifs, •de condamner la SARL EIGHTEEN aux entiers dépens de première instance et d'appel ainsi qu'au paiement des frais irrépétibles exposés qu'il conviendra de fixer à la somme supplémentaire de 20.000 €, • de débouter la SARL EIGHTEEN de son appel, fins et conclusions ; L'ordonnance de clôture a été rendue le 03 janvier 2017 ; M O T I F S D E L ' A R R Ê T

Considérant

que, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ; Considérant qu'il sera donné acte à la SAS M de ce qu'elle vient désormais aux droits de la SARL MAJE BOUTIQUE suite à la dissolution sans liquidation de celle-ci le 29 août 2015 et à la transmission de l'universalité de son patrimoine à la SAS M, son associé unique ; I : SUR L'ACTION EN CONTREFAÇON AU TITRE DU DROIT D'AUTEUR : La titularité des droits d'auteur de la SAS M : Considérant que les premiers juges ont écarté la fin de non-recevoir soulevée par la SARL EIGHTEEN tirée d'un défaut d'intérêt à agir de la SAS M en relevant qu'il était démontré une exploitation sans ambiguïté des œuvres revendiquées sous son nom en France dès le mois de décembre 2012 ; Considérant que la SARL EIGHTEEN soutient que la SAS M ne démontre pas une cession effective à son profit des droits d'auteur sur les modèles revendiqués et qu'elle n'est pas davantage en mesure de rapporter la preuve d'une date certaine de création ni du processus créatif portant sur le motif revendiqué ; Qu'elle ajoute que la SAS M ne démontre pas davantage l'existence d'actes non équivoques d'exploitation en France du motif revendiqué, les pièces produites n'ayant aucune force probante ; Considérant que la SAS M réplique bénéficier de la présomption de titularité des droits et, subsidiairement, justifier de la cession des droits intervenue à son profit par Mme Amélie C, auteur de l'imprimé revendiqué ; Qu'elle fait valoir que les pièces versées aux débats confirment de façon incontestable que la commercialisation a débuté au mois de décembre 2012 pour l'imprimé 'Mosaïque', étant observé qu'aucune revendication n'est faite par un tiers quant à la création de cet imprimé ; Considérant ceci exposé, qu'en l'absence de revendication de la part des auteurs, fussent-ils identifiés, l'exploitation non équivoque de l'œuvre par une personne morale sous son nom fait présumer, à l'égard des tiers recherchés pour contrefaçon, que cette personne morale est titulaire sur l'œuvre, qu'elle soit collective ou non, du droit de propriété incorporelle de l'auteur ; Considérant que pour bénéficier de cette présomption simple, il appartient à la personne morale d'identifier précisément l'œuvre qu'elle revendique et de justifier de la date à laquelle elle a commencé à en assurer la commercialisation en établissant que les caractéristiques de l'œuvre revendiquée sont identiques à celles dont elle rapporte la preuve de la commercialisation sous son nom ; Considérant en premier lieu que l'imprimé 'Mosaïque' revendiqué est précisément identifié notamment par la production des dépôts Fidealis le 24 octobre 2012 (pièces 3 à 6) du pantalon Anita, de la robe Arabesque, du débardeur Amquis et du tee-shirt Canon reproduisant cet imprimé ; Considérant qu'il ressort des listings des ventes (pièces 9 et 33) que le pantalon Anita, la robe Arabesque, le débardeur Amquis et le tee- shirt Canon reproduisant l'imprimé Mosaïque revendiqué au titre du droit d'auteur ont été vendus en gros par la SAS M à la SARL MAJE BOUTIQUE puis au détail par celle-ci à ses clients finaux notamment à des grands magasins (Le Printemps, Le Bon Marché, Les Galeries Lafayette, le B.H.V., etc.) dès le 04 décembre 2012 ; Que les attestations délivrées le 09 avril 2015 (pièces 34 et 35) par le commissaire aux comptes de la SAS M et de la SARL MAJE BOUTIQUE confirment la commercialisation au détail de ces modèles dès le mois de décembre 2012 ; Que le Book de collection printemps été 2013 de la SAS M (pièce 8) démontre la commercialisation de ces modèles dès cette saison, de nombreux blogs sur Internet confirmant la divulgation au public de l'imprimé revendiqué dès la fin de l'année 2012 (pièces 27 à 30) ; Qu'il est ainsi suffisamment démontré par la SAS M de la commercialisation non équivoque sous son nom et à partir du mois de décembre 2012 du modèle d'imprimé 'Mosaïque' qu'elle revendique au titre du droit d'auteur ; Que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir pour défaut de titularité de droits d'auteur ; L'originalité du motif 'Mosaïque' revendiqué au titre du droit d'auteur : Considérant que les premiers juges ont dit que l'imprimé 'Mosaïque' bénéficie de la protection au titre du droit d'auteur au motif qu'il reprend des éléments connus dans une combinaison novatrice et porte l'empreinte de la personnalité de son auteur ; Considérant que la SARL EIGHTEEN soutient que la SAS M se contente de donner une description objective du motif revendiqué, sans décrire les choix esthétiques, seuls susceptibles de lui conférer une originalité, la simple reprise appartenant au fond commun de l'univers de la mode ne pouvant justifier une revendication privatiste et monopolistique ; Qu'elle ajoute que le motif revendiqué n'est pas reproduit à l'identique sur les tissus qui reproduisent une multitude de motifs variant d'un modèle de vêtement à l'autre et qu'aucune précision n'est apportée, la SAS M entendant s'octroyer un monopole sur un motif dont on ignore tout du contour, de l'étendue et de la composition exacte ; Considérant que la SAS M réplique que les motifs revendiqués se retrouvent de façon identique dans le tissu et qu'elle précise bien les caractéristiques de ces motifs portant bien l'empreinte de la personnalité de leur auteur par leur aspect totalement arbitraire ; Considérant ceci exposé, que la SAS M décrit les caractéristiques de l'imprimé 'Mosaïque' qu'elle revendique au titre du droit d'auteur comme se composant, sur un fond uni noir ou blanc, du dessin de bandes longitudinales, de largeur variable, juxtaposées les unes aux autres ; Que ces bandes comportent des formes géométriques telles que des ellipses crantées évoquant des soleils ou, sur une même bande longitudinale, des flocons de neige, certaines comportant des points ; que certaines ellipses sont plus larges, juxtaposées dans le sens de la verticalité ; Que des touches de couleurs vives apparaissent sur le motif de façon aléatoire et parsemée ; Considérant que l'ensemble de ces éléments se trouvent ainsi combinés sur l'imprimé selon des choix esthétiques arbitraires révélateurs de la personnalité créatrice de l'auteur de ce motif, étant relevé que la SARL EIGHTEEN ne verse aux débats aucun document destructeur de cette originalité ; Considérant que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont dit que l'imprimé 'Mosaïque' bénéfice de la protection prévue par les livres I et III du code de la propriété intellectuelle ; II : SUR L'ACTION EN CONTREFAÇON DE DESSINS OU MODÈLES COMMUNAUTAIRES NON ENREGISTRÉS : La qualité à agir de la SAS M : Considérant que les premiers juges ont dit que la commercialisation du modèle de tissu 'Mosaïque' à compter du mois de décembre 2012 justifiait de la qualité à agir de la SAS M au titre des dessins et modèles communautaires non enregistrés ; Considérant que la SARL EIGHTEEN soutient, pour les mêmes raisons que celles exposées au titre du droit d'auteur, que la SAS M ne démontre pas de manière certaine que le motif 'Mosaïque' revendiqué aurait été divulgué de manière non équivoque au public de la Communauté pour la première fois le 08 décembre 2012 et/ou le 01 février 2013 ; Considérant que la SAS M réplique que l'imprimé 'Mosaïque' a été divulgué au public dès le 08 décembre 2012 et au plus tard le 01 février 2013 et que les droits de dessins et modèles communautaires de Mme Amélie C sur cet imprimé lui appartiennent par application de l'article 14.3 du règlement 6/2002 ; Considérant ceci exposé, que selon l'article 11 du règlement (CE) n° 6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires, un dessin ou modèle communautaire non enregistré est protégé pendant une période de trois ans à compter de la date à laquelle il a été divulgué au public pour la première fois au sein de la Communauté ; Qu'un tel dessin ou modèle est réputé avoir été divulgué au public s'il a été publié, exposé, utilisé dans le commerce ou rendu public de toute autre manière de telle sorte que, dans la pratique normale des affaires, ces faits pouvaient raisonnablement être connus des milieux spécialisés du secteur concerné, opérant dans la Communauté ; Considérant qu'il ressort des pièces déjà examinées au titre de l'action en droit d'auteur, que le modèle d'imprimé 'Mosaïque' a été divulgué au public en France dès le mois de décembre 2012 par sa commercialisation sur les pantalons Anita, les débardeurs Amquis et la robe Arabesque et à partir du mois d'avril 2013 sur le tee-shirt Canon ; Qu'ainsi c'est à juste titre que les premiers juges ont dit que la SAS M justifiait de sa qualité à agir au titre des dessins ou modèles communautaires non enregistrés ; La validité de l'imprimé 'Mosaïque ' comme dessin ou modèle communautaire non enregistré : Considérant que les premiers juges ont dit qu'en l'absence de toute antériorité, le modèle 'Mosaïque' était à la fois nouveau et pourvu d'un caractère individuel et bénéficiait donc de la protection relative aux dessins et modèles communautaires non enregistrés ; Considérant que la SARL EIGHTEEN soutient que faute de date certaine de divulgation du modèle 'Mosaïque', elle n'est pas en mesure de savoir si ce motif serait encore protégé et qu'il est difficile de pouvoir en apprécier correctement la nouveauté ; Qu'elle ajoute que de surcroît les caractéristiques de ce motif ne sont pas précises et ne permettent pas de circonscrire l'objet de la protection revendiquée, ce motif étant en outre dépourvu de tout caractère individuel ; Considérant que la SAS M réplique que les critères de nouveauté et d'individualité sont remplis dans la mesure où les caractéristiques de son modèle sont parfaitement identifiées ; Considérant ceci exposé, que l'article 25 du règlement (CE) du 12 décembre 2001 dispose qu'un dessin ou modèle communautaire est nul s'il n'est pas nouveau au sens de l'article 5 et s'il ne présente pas un caractère individuel au sens de l'article 6 ; Considérant en premier lieu que les caractéristiques de l'imprimé 'Mosaïque' sont identifiées notamment par les dépôts Fidealis des vêtements reproduisant cet imprimé ainsi qu'il l'a déjà été analysé pour l'action sur le fondement du droit d'auteur ; Qu'il n'est produit aucune antériorité destructrice de nouveauté et que la présence des caractéristiques essentielles telles que décrites pour l'examen de l'originalité (juxtaposition de bandes longitudinales comprenant des formes géométriques en forme d'ellipses évoquant des soleils ou des flocons de neige stylisés, avec un contraste de noir et blanc, légèrement parsemé de couleurs vives) confère au dessin 'Mosaïque' une impression d'ensemble produite sur l'utilisateur averti différente de celle de l'art antérieur ; Que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont dit que l'imprimé 'Mosaïque' bénéficie de la protection au titre des dessins ou modèles communautaires non enregistrés ; III : SUR LA CONTREFAÇON : Considérant que les premiers juges ont retenu la contrefaçon tant de droits d'auteur que de dessins ou modèles communautaires non enregistrés pour le tissu 'Mosaïque' sur fond noir ; Qu'en ce qui concerne le tissu 'Mosaïque' revendiqué sur fond blanc, les premiers juges ont également retenu la contrefaçon de droits d'auteur mais ne l'ont pas retenue pour la contrefaçon de dessins ou modèles communautaires non enregistrés dans la mesure où le tissu de la SARL EIGHTEEN, majoritairement sur fond noir, ne constituait pas une copie servile de ce dessin sur fond blanc ; Considérant que la SAS M fait valoir que l'imprimé correspondant au tissu dans lequel ont été fabriqués la robe et le pantalon SEE U SOON constituent la contrefaçon à l'identique de ses droits d'auteur sur son imprimé 'Mosaïque' du fait de la reproduction servile de la combinaison originale et arbitraire des éléments constitutifs de sa création ; Qu'elle fait valoir que de même la SARL EIGHTEEN a porté atteinte aux droits de dessins et modèles communautaires non enregistrés tant sur l'imprimé 'Mosaïque' sur fond noir que sur celui sur fond blanc, lequel ne diffère nullement du dessin sur fond noir dont il n'est qu'une déclinaison ; Considérant que la SARL EIGHTEEN ne développe pas de moyens particuliers sur l'existence d'actes de contrefaçon ; Considérant ceci exposé, qu'il ressort du constat d'achat diligenté le 18 avril 2014 (pièce 10), du procès-verbal de constat du même jour (pièce 13) sur le site Internet 'www.see-u-soon.fr' et du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 15 mai 2014 (pièce 15) que la SARL EIGHTEEN commercialise un pantalon référencé 4 117 823 et une robe référencée 4 112 432 reproduisant à l'identique les caractéristiques telles qu'analysées précédemment de l'imprimé 'Mosaïque' ; Que dans la mesure où en matière de contrefaçon de droits d'auteur, celle-ci s'apprécie par les ressemblances et non pas par les différences, il apparaît que cette contrefaçon est constituée tant pour le dessin d'imprimé 'Mosaïque' sur fond uni noir que pour celui sur fond uni blanc dont il n'est que le miroir inversé au niveau des couleurs ; Considérant qu'en matière de contrefaçon de dessins ou modèles communautaires non enregistrés, l'article 19, §2 du règlement (CE) du 12 décembre 2001 dispose que 'le dessin ou modèle communautaire non enregistré ne confère (...) à son titulaire le droit d'interdire les actes visés au paragraphe 1 que si l'utilisation contestée résulte d'une copie du dessin ou modèle protégé ; Considérant que pour apprécier la contrefaçon d'un dessin ou modèle communautaire non enregistré, il ne suffit donc pas, comme pour un dessin ou modèle communautaire enregistré, de rechercher une identité des impressions visuelles globales au sens de l'article 10 du règlement mais également de rechercher si une telle identité résulte d'une copie dont l'article 19, §2 ne précise cependant pas qu'il doive s'agir d'une copie 'servile' à l'identique ; Considérant qu'en l'espèce le tissu commercialisé par la SARL EIGHTEEN sur son pantalon référencé 4 117 823 et sur sa robe référencée 4 112 432 reproduit à l'identique les caractéristiques de l'imprimé 'Mosaïque' sur fond noir ; Qu'en revanche ce tissu ne constitue pas la copie de l'imprimé 'Mosaïque' sur fond blanc même si l'impression visuelle globale quant à la géométrie des motifs est identique ; Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a dit que la SARL EIGHTEEN avait commis des actes de contrefaçon de droit d'auteur et de dessins ou modèles communautaires non enregistrés au préjudice de la SAS M en reprenant les caractéristiques de son motif 'Mosaïque' sur fond noir et en ce qu'il a dit que la SARL EIGHTEEN n'avait commis que des actes de contrefaçon de droit d'auteur en reprenant les caractéristiques du motif 'Mosaïque' sur fond blanc ; IV : SUR LA CONCURRENCE DÉLOYALE : Considérant que les premiers juges ont retenu la responsabilité de la SARL EIGHTEEN sur le fondement de la concurrence déloyale à l'encontre de la SARL MAJE BOUTIQUE (aux droits de laquelle vient désormais la SAS M) en commercialisant des vêtements reproduisant les caractéristiques essentielles de ceux commercialisés par cette société, ce qui est de nature à générer un trouble dans son activité ; Considérant que la SARL EIGHTEEN rappelle que la commercialisation de produits similaires à ceux d'un concurrent n'est pas un acte de concurrence déloyale et que la similarité des motifs en cause, déjà prise sur le fondement de la contrefaçon, ne saurait constituer à elle seule une faute caractérisant des actes de concurrence déloyale ; Qu'elle soutient que rien ne permet d'attester de la commercialisation par la SARL MAJE BOUTIQUE du motif revendiqué au moment de la constatation des faits ; Qu'elle ajoute que le prétendu préjudice propre et distinct qu'aurait subi la SARL MAJE BOUTIQUE n'est aucunement démontré et qu'il n'est pas démontré l'existence des investissements que cette société aurait engagés pour la création, la commercialisation ou la promotion du motif revendiqué ; Considérant que la SAS M, venant aux droits de la SARL MAJE BOUTIQUE, réplique que cette dernière a subi un préjudice propre et distinct en sa qualité de distributeur exclusif en France des produits MAJE, du fait de la reproduction illicite de l'imprimé litigieux, créant ainsi un risque de confusion dans l'esprit du consommateur ; Qu'elle ajoute que ce modèle d'imprimé a été utilisé pour façonner des vêtements et que la SARL EIGHTEEN a voulu tirer profit de la notoriété de cet imprimé afin de vendre des copies très bon marché, causant un préjudice pour la SARL MAJE BOUTIQUE qui a notamment perdu une marge commerciale ; Considérant ceci exposé que les faits de contrefaçon retenus à l'égard de la SAS M constituent des actes de concurrence déloyale à l'encontre de la SARL MAJE BOUTIQUE (aux droits de laquelle intervient désormais la SAS M) qui distribue les vêtements confectionnés avec le tissu reproduisant le motif 'Mosaïque' revendiqué ; Que la commercialisation illicite de vêtements réalisés dans un tissu reproduisant les caractéristiques essentielles de ceux commercialisés par la SARL MAJE BOUTIQUE est en effet de nature à générer un trouble dans son activité ; Qu'en conséquence, la décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a accueilli l'action de la SARL MAJE BOUTIQUE (aux droits de laquelle intervient la SAS M) pour les actes de concurrence déloyale résultant de la contrefaçon ; V : SUR LES MESURES RÉPARATRICES : Considérant que la SAS M évalue la masse contrefaisante à 1.650 pièces pour le pantalon et à 1.392 pièces pour la robe et que sur la base d'une marge de 30,27 € HT sur sa robe Arabesque et de 30,28 € sur son pantalon Anita, elle évalue sa perte de marge totale de gros à 92.098 € ; Qu'elle expose avoir engagé des investissements publicitaires à hauteur de 3.332.523 € pour l'année 2013 dont une partie a été affectée à l'imprimé contrefait ; Qu'elle invoque également un préjudice moral résultant de la commercialisation par la SARL EIGHTEEN d'une copie servile alors que sa marque est une marque notoire ; Qu'elle évalue le bénéfice réalisé par la SARL EIGHTEEN à 96.534 € sur la base d'un taux de marge usuel de 2,5 % ; Qu'elle conclut donc à la confirmation du jugement entrepris qui lui a alloué la somme de 30.000 € et, y ajoutant, demande une somme supplémentaire de 200.000 € en réparation des actes de contrefaçon ; Qu'en ce qui concerne le préjudice subi par la SARL MAJE BOUTIQUE relativement aux actes distincts de concurrence déloyale, la SAS M qui vient à ses droits expose que la marge moyenne était de 91,21 € HT par pantalon Anita vendu et de 81,75 € HT par robe Arabesque vendue ; qu'elle évalue ainsi la perte de marge au détail à 264.045 € ; Qu'elle conclut donc à la confirmation du jugement entrepris qui a alloué à la SARL MAJE BOUTIQUE la somme de 80.000 € et, y ajoutant, demande une somme supplémentaire de 180.000 € en réparation des actes de concurrence déloyale ; Qu'elle demande encore la confirmation de la décision de publication judiciaire ; Considérant que la SARL EIGHTEEN rappelle que la SAS M revendique seulement un imprimé et non le vêtement dans son entier et que les marges invoquées ne correspondent pas à la valeur réelle du motif en lui-même ; que de même les investissement liés à la création, la commercialisation et la promotion de ce motif ne sont aucunement rapportés, les pièces produites visant l'ensemble des collections commercialisées par la SAS M ; Qu'elle soutient que le préjudice moral subi par la SAS M n'est pas mieux établi ; Qu'en ce qui concerne la SARL MAJE BOUTIQUE, aux droits de laquelle vient la SAS M, elle affirme qu'il n'est pas rapporté la preuve d'un préjudice faute de preuve certaine de la commercialisation en France des produits revendiqués ; Qu'elle s'oppose à une mesure de publication judiciaire, les modèles en cause n'étant plus commercialisés ; Considérant ceci exposé, que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a, pour mettre fin et prévenir les actes de contrefaçon et de concurrence déloyale, interdit sous astreinte la poursuite de ces agissements ; Considérant qu'en ce qui concerne l'évaluation du préjudice subi par la SAS M du fait des actes de contrefaçon de droit d'auteur et de dessins ou modèles communautaires non enregistrés, qui doit être effectuée conformément aux dispositions des articles L 331-1-3 et L 521-7 du code de la propriété intellectuelle, il résulte du procès-verbal de saisie-contrefaçon que la masse contrefaisante est de 1.031 exemplaires vendus pour la robe référencée 4 112 432 et de 1.567 exemplaires vendus pour le pantalon référencé 4 117 823 ; Qu'il résulte également des pièces comptables produites que les marges de la SAS M en gros sont de 30,31 € sur son pantalon Anita et de 30,45 € sur sa robe Arabesque tandis que les marges de la SARL MAJE BOUTIQUE au détail sont respectivement de 91,21 € et de 81,75 € ; Considérant toutefois qu'il convient également de tenir compte du fait que la SAS M ne revendique dans la présente instance qu'un imprimé sur tissu et non un vêtement en son entier et que d'autre part, eu égard à la substantielle différence de prix public entre les vêtements vendus par la SAS M (195 €) et ceux vendus par la SARL EIGHTEEN (59 et 65 €), le manque à gagner de la SAS M ne peut correspondre au nombre d'unités vendues par la SARL EIGHTEEN dans la mesure où une proportion non négligeable des acheteurs de ces exemplaires n'auraient pas forcément acheté une robe ou un pantalon de la SAS M ; Qu'en outre le montant total des investissements publicitaires réalisés en 2013 par la SAS M ne peut être retenu puisque ceux-ci ont nécessairement concerné l'ensemble des produits conçus et commercialisés par cette société ; Qu'enfin les actes de contrefaçon ont nécessairement causé un préjudice moral à la SAS M du fait de la banalisation et de la dévalorisation de son modèle ; Considérant que la SARL MAJE BOUTIQUE, aux droits de laquelle intervient la SAS M, a également subi un préjudice propre du fait des actes de concurrence déloyale qui ont détourné une partie de sa clientèle même si ce préjudice ne peut correspondre, ainsi qu'il l'a été précisé précédemment, au nombre total d'unités vendues par la SARL EIGHTEEN ; Considérant qu'au vu de l'ensemble de ces éléments la cour évalue le préjudice économique subi par la SAS M du fait des actes de contrefaçon de son modèle d'imprimé 'Mosaïque' à la somme globale de 100.000 € et son préjudice moral à la somme de 20.000 € et le préjudice subi par la SARL MAJE BOUTIQUE, aux droits de laquelle intervient désormais la SAS M, à la somme globale de 150.000 € ; Considérant que comme le demande la SAS M, le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a alloué à la SAS M la somme de 30.000 € en réparation du préjudice né de la contrefaçon et à la SARL MAJE BOUTIQUE, aux droits de laquelle vient désormais la SAS M, la somme de 80.000 € au titre de la concurrence déloyale, et qu'y ajoutant, la SARL EIGHTEEN sera condamnée à payer à la SAS M la somme complémentaire de 70.000 € en réparation de son préjudice économique résultant des actes de contrefaçon, la somme de 20.000 € en réparation de son préjudice moral et, en sa qualité d'ayant droit de la SARL MAJE BOUTIQUE, la somme complémentaire de 70.000 € en réparation du préjudice résultant des actes de concurrence déloyale ; Considérant que le jugement entrepris sera également confirmé en ce qu'il a autorisé la publication d'un communiqué judiciaire dans deux journaux ou revues au choix de la SAS M et aux frais de la SARL EIGHTEEN sans que le coût de chaque insertion ne puisse être supérieur à 3.500 € HT, à titre de mesure réparatrice complémentaire ; Qu'il apparaît que les préjudices subis par la SAS M se trouvent ainsi suffisamment réparés et qu'il n'y a pas lieu d'ordonner à titre de supplément de dommages et intérêts, la parution du présent arrêt sur la page d'accueil du site 'www.see-u-soon' pendant un mois ; Considérant qu'il est équitable d'allouer à la SAS M la somme complémentaire de 10.000 € au titre des frais par elle exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens, le jugement entrepris étant par ailleurs confirmé en ce qu'il a statué sur les frais irrépétibles de première instance ; Considérant que la SARL EIGHTEEN sera pour sa part, déboutée de sa demande en paiement au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; Considérant que la SARL EIGHTEEN, partie perdante en son appel, sera condamnée au paiement des dépens d'appel, le jugement entrepris étant par ailleurs confirmé en ce qu'il a statué sur la charge des dépens de la procédure de première instance ; P A R C E S M O T I F S La Cour, statuant publiquement et contradictoirement ; Donne acte à la SAS M de ce qu'elle vient désormais aux droits de la SARL MAJE BOUTIQUE Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ; Y ajoutant : Condamne la SARL EIGHTEEN à payer à la SAS M les sommes complémentaires suivantes : • SOIXANTE DIX MILLE euros (70.000 €) en complément de l'indemnisation du préjudice économique résultant des actes de contrefaçon, • VINGT MILLE euros (20.000 €) en réparation de son préjudice moral, • SOIXANTE DIX MILLE euros (70.000 €) en complément de l'indemnisation du préjudice résultant des actes de concurrence déloyale subi par la SARL MAJE BOUTIQUE, aux droits de laquelle elle intervient ;

Déboute

la SAS M de sa demande, à titre de supplément de dommages et intérêts, de parution du présent arrêt sur la page d'accueil du site 'www.see-u-soon' pendant un mois ; Condamne la SARL EIGHTEEN à payer à la SAS M la somme complémentaire de DIX MILLE euros (10.000 €) au titre des frais exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens ; Déboute la SARL EIGHTEEN de sa demande en paiement au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; Condamne la SARL EIGHTEEN aux dépens de la procédure d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.