Cour d'appel d'Angers, 4 septembre 2007, 06/828

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour d'appel d'Angers
2007-09-04
Tribunal de grande instance du Mans
2007-08-04
Tribunal de grande instance de Mans
2002-03-29

Texte intégral

COUR D'APPEL D'ANGERS 1ère CHAMBRE A RB / IM

ARRET

N 276 AFFAIRE N : 06 / 00828 Jugement du 04 Août 2005 Tribunal de Grande Instance du MANS no d'inscription au RG de première instance 02 / 01278 ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2007 APPELANTE : LA S.A.R.L. ODMO 27 rue Saint Martin-72500 CHATEAU DU LOIR représentée par la SCP CHATTELEYN ET GEORGE, avoués à la Cour assistée de Me Maria BONON, avocat au barreau du MANS INTIMEE ET INCIDEMMENT APPELANTE : LA SOCIETE LES PLEIADES 30 boulevard Heurteloup-37000 TOURS représentée par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la Cour assistée de Me BAUDRY, avocat au barreau de TOURS COMPOSITION DE LA COUR L'affaire a été débattue le 29 Mai 2007 à 13 H 45, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame CHAUVEL, conseiller, désignée par ordonnance du Premier Président en date du 22 décembre 2006 pour exercer les fonctions de président, Madame BLOCK, conseiller ayant été entendu en son rapport, et Madame VERDUN, conseiller qui en ont délibéré Greffier lors des débats : Madame LEVEUF ARRET : contradictoire Prononcé publiquement le 04 septembre 2007, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile. Signé par Madame CHAUVEL, président, et par Madame LEVEUF, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Vu l'ordonnance de clôture en date du 8 mars 2007 ; La SARL ODMO, qui a pour principale activité la maîtrise d'oeuvre, a signé, le 5 mars 2001, un marché de travaux à titre d'entreprise générale avec la société civile de construction vente LES PLEIADES, en vue de la construction de deux immeubles au MANS, pour un montant initial de (30 500 000 F HT) 4 649 695 € HT, soit 5 561 035. 20 € TTC. Le premier bâtiment LES PLEIADES a été construit et livré le 27 juillet 2001, alors qu'il devait être initialement livré le 30 juin 2001. L'ensemble immobilier SIRIUS était livrable le 30 juin 2002. Les parties ont signé un planning de paiement, annexé au marché initial et prévoyant le versement par la SCCV LES PLEIADES d'échéances mensuelles. Pour apporter une solution aux difficultés survenues en cours de chantier, les parties ont signé un protocole le 20 novembre 2001 portant sur les modifications suivantes : révision à la hausse du prix du marché de base, le portant ainsi de 4 649 595 € HT (30 500 000 F) à 4 802 144 € HT (31 500 000 F), soit 5 749 364. 20 € TTC ; institution du paiement direct entre les sous-traitants d'ODMO et le maître d'ouvrage, la SCCV LES PLEIADES, La SCCV LES PLEIADES a notifié une mise en demeure aux fins de résiliation du contrat le11 janvier 2002, après avoir fait constater l'interruption des travaux, et a fait poursuivre le chantier par d'autres entrepreneurs. La SCCV et la société ODMO se sont réciproquement reprochées de ne pas avoir respecté leurs obligations contractuelles. Par acte du 25 mars 2002, la société ODMO a assigné la SCCV LES PLEIADES en référé aux fins de règlement d'une provision à valoir sur les sommes lui restant dues. La SARL ODMO était par ailleurs titulaire d'un compte auprès de la CAISSE FEDERALE DE CREDIT MUTUEL MAINE ANJOU BASSE NORMANDIE. Dans le cadre de ses relations bancaires, la SARL ODMO a cédé, le 3 août 2001, à la CAISSE la créance relative au marché de travaux, signé le 5 mars 2001, envers la SCCV LES PLEIADES, et ce, par bordereaux de cession de créances professionnelles, conformément aux dispositions des articles L. 313. 23 à L. 313. 34 du Code Monétaire et Financier. Par arrêt de la Cour d'Appel de RENNES du 7 mai 2004, le Crédit Mutuel a été débouté de ses demandes en paiement formées à l'encontre de la SCCV LES PLEIADES, en l'absence de travaux exécutés par la société ODMO personnellement. Par ordonnance en date du 29 mars 2002, le président du tribunal de grande instance du MANS a renvoyé la cause des parties devant le tribunal de grande instance du MANS. Par jugement en date du 5 novembre 2002, ce tribunal a ordonné une expertise en commettant pour y procéder Monsieur Z..., avec pour mission notamment de : rechercher si la société ODMO a sous-traité tout ou partie des travaux confiés par la SCCV LES PLEIADES et, dans l'affirmative, préciser les entreprises et les travaux concernés ; rechercher si des retards de livraison ou des retards de paiement se sont produits et, dans l'affirmative, fournir tous les éléments permettant de déterminer les responsabilités encourues et, le cas échéant, chiffrer les pénalités dues ; récapituler les travaux exécutés par la société ODMO ou par ses sous-traitants en proposant un chiffrage de ces travaux, déduction faite du coût d'éventuelles réfections ; récapituler les sommes versées par les SCCV LES PLEIADES à la société ODMO et à ses sous-traitants. Après dépôt du rapport de l'expert, la société ODMO a notamment demandé au tribunal : que soit homologué le rapport de Monsieur Z... ; que soit jugée abusive la résiliation de contrat notifiée le 11 janvier 2002 par la SCCV LES PLEIADES ; que soit prononcée la résolution du contrat aux torts du maître de l'ouvrage ; que le marché ayant perdu son caractère forfaitaire en raison des modifications intervenues en cours d'exécution et aucun avenant n'ayant été signé, sa créance soit évaluée au coût des travaux réellement engagés. Par jugement en date du 4 août 2005, auquel il est référé pour l'exposé des faits et de la procédure antérieure, le tribunal de grande instance du MANS a statué comme suit : " Condamne la société ODMO à payer à la SCCV LES PLEIADES une somme de 1 160 646. 81 € ; Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ; Condamne la société ODMO aux dépens qui comprendront le coût de l'expertise judiciaire et qui seront distraits au profit de la SCP LOYER-LE DEUN, avocats. " La société ODMO a interjeté appel de cette décision. Elle demande à la Cour de : " Infirmer le jugement du tribunal de grande instance du MANS du 4 août 2005 (RG no 01 / 012178) ; Statuant à nouveau, Vu les articles 1134,1146,1184 et suivants du Code Civil, Vu les articles 1792,1793 et suivants du Code Civil, Dire et juger que la résiliation notifiée à ODMO par lettre recommandée du 11 janvier 2002 est imputable à la SCCV LES PLEIADES ; Prononcer la résolution du marché aux torts du maître de l'ouvrage ; Dire et juger que la résiliation notifiée à ODMO, du fait d'absence de retard démontré ou d'inexécutions ou d'abandon de chantier, est abusive en ce qu'elle est intervenue sans délai de préavis raisonnable, ni indemnité, ni respect de la norme NF 03-001

; En conséquence

, condamner la SCCV LES PLEIADES à verser à la société ODMO une somme qui ne saurait être inférieure à 100 000 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive de marché ; Dire et juger que le protocole d'accord du 20 novembre 2001 ne constitue pas un accord parfait sur la chose et le prix dans la mesure notamment où il n'a pas été concrétisé par un avenant au marché conformément aux prescriptions contractuelles et légales et qu'il n'a donc pas emporté la renonciation de la société ODMO à se prévaloir de ses droits ; Dire et juger au contraire que les modifications intervenues au cours de la réalisation des ensembles LES PLEIADES, de par leur nature, leur coût et leur ampleur, ont fait perdre au marché le caractère forfaitaire ; En conséquence, évaluer la créance d'ODMO à leur juste prix, à savoir au montant réellement engagé et condamner la SCCV LES PLEIADES à verser à ODMO SARL la somme de 936 043. 95 € au titre des prestations effectuées en sa qualité d'entreprise générale, calculés sur le coût global de l'opération, y compris des travaux supplémentaires effectués par ses sous-traitants, payés par ODMO et non pris en compte dans le cadre du protocole d'accord du 20 novembre 2001, soit : -2 % du montant hors taxes du montant du marché de 468 441. 42 € (30 792 577. 47 F-pièce no 55, colonne de gauche-S / Total Travaux), soit la somme de 93 885. 96 € (615 851. 55 F) ; -15 % du montant TTC du montant du marché de 468 441. 42 € + TVA à 19. 6 % = 5 614 380. 62 €, soit 842 157. 09 € (5 524 188. 40-F pièce no 55, colonne de gauche / FG) ; Déclarer la société LES PLEIADES non recevable, en tout cas non fondée en toutes ses demandes ; l'en débouter ; Décharger la concluante de toutes condamnations entreprises à son encontre ; Condamner la SCCV LES PLEIADES à verser à ODMO SARL la somme de 15 000 € sur la fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; La condamner aux entiers dépens d'appel et de première instance, qui seront recouvrés par l'avoué, en application des dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. " La SCCV LES PLEIADES, sur appel incident, demande à la Cour de : " A titre principal : Vu les dispositions des articles 809 et suivants du nouveau code de procédure civile, Vu les dispositions des articles 4 et suivants de la loi du 2 janvier 1981, Vu les dispositions des articles 1146 et suivants du Code Civil, Vu les dispositions des articles 1382 et suivants du Code Civil, Débouter la société ODMO de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ; Confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a rejeté les demandes de la société ODMO en paiement et condamné la société ODMO à restituer à la SCCV LES PLEIADES les sommes qu'elle a perçues en trop en exécution du marché à hauteur de la somme de 1 160 646. 81 € ; Statuant à nouveau, Constater que la résiliation du marché s'est réalisée aux torts de la société ODMO ; En conséquence, condamner la société ODMO à payer à la SCCV LES PLEIADES la somme de 157 180 € TTC correspondant aux honoraires qu'elle a perçus au titre de ses prestations de gestion du dossier ; Condamner la société ODMO à payer à la SCCV LES PLEIADES la somme de 173 836. 65 € au titre des levées des réserves effectuées sur l'immeuble LES PLEIADES ; Condamner la société ODMO à payer à la SCCV LES PLEIADES 1 000 000 € à titre de dommages-intérêts ; Constater que la SCCV LES PLEIADES a versé en trop à la société ODMO au regard de l'exécution de ses prestations, non pas la seule somme de 1 160 646. 81 € mais la somme de 1 299 643. 27 € ; En conséquence, condamner la société ODMO à payer à la SCCV LES PLEIADES une somme de 1 299 643. 27 € ; En tout état de cause, Condamner la société ODMO au paiement de la somme de 20 000 € en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Condamner la société ODMO aux entiers dépens dont distraction au profit de l'avoué aux offres de droit, en application des dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. " Pour l'exposé complet des moyens et des prétentions des parties, il y a lieu de se reporter aux dernières conclusions déposées au greffe le 7 août 2006 par la société ODMO et le 27 février 2007 par la SCCV LES PLEIADES. MOTIFS DE LA DECISION Il y a lieu de rappeler les points suivants : Le marché du 5 mars 2001, passé entre la SCCV LES PLEIADES et la société ODMO, stipulait un prix global forfaitaire. L'entreprise ODMO s'engageait sur un prix comprenant toutes les dépenses nécessaires à l'exécution des travaux. Celle-ci a sous-traité la totalité des marchés. Le planning des paiements prévoyait des échéances mensuelles. Par courrier du 24 octobre 2001, la société ODMO a autorisé la société LES PLEIADES à payer directement les sous-traitants qui avaient procédé aux travaux. Faisant référence à des " coûts supplémentaires dans la réalisation des travaux dus à des incidences techniques et à des travaux supplémentaires demandés ", l'entreprise ODMO et la SCCV LES PLEIADES ont convenu, dans le protocole du 20 novembre 2001 de modifications, du prix et des modalités de paiement. La société GORGET, sous-traitant chargé du gros oeuvre, a été placée en liquidation judiciaire le 26 novembre 2001. La SCCV LES PLEIADES soutient que la société ODMO ne peut faire valoir aucune créance puisqu'elle a cédé celle-ci à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL. Le fait que le débiteur cédé ne puisse se libérer qu'entre les mains du cessionnaire n'interdit pas à la société ODMO de faire reconnaître l'existence de sa créance en son principe et en son montant. La SCCV LES PLEIADES n'est pas fondée à soutenir que la société ODMO n'a ni intérêt à agir, ni qualité à agir. La société ODMO soutient que le protocole du 20 novembre 2001 ne peut être considéré comme un avenant au marché, ni comme un accord ferme et définitif sur le prix du marché, dans la mesure notamment où il n'y a eu ni signature d'un avenant, comme le prévoyait le protocole, ni établissement d'un échéancier financier conforme, ni les versements prévus. Le tribunal a estimé que le protocole, qui validait des travaux supplémentaires déjà effectués et prévoyait d'autres travaux supplémentaires, qui modifiait les dates de livraison des ouvrages et qui fixait de nouvelles modalités de paiement, s'était bien substitué au marché initial, même si l'avenant prévu n'a jamais été formalisé, aucune des parties n'ayant réclamé cette formalisation. Le montant initial des travaux était de 5 561 035. 20 € TTC ; selon le protocole du 20 novembre 2001, les parties ont décidé de voir le marché général porté à un montant de 5 743 364. 20 € TTC. Le protocole prévoyait également : -un paiement sur présentation des factures mensuelles, -des paiements des sous-traitants par délégation de paiement direct depuis le maître de l'ouvrage sur les situations d'avancement de travaux visées par l'entreprise générale et le maître d'oeuvre, -les sommes qui n'auraient pas été payées aux sous-traitants par l'entreprise générale seront retenues sur celles dues à l'entreprise générale. Les parties ont signé le protocole du 20 novembre 2001. Il était indiqué que le protocole serait entériné sous huit jours de sa signature par la rédaction d'un avenant aux pièces du marché qui liait les signataires. L'article 6 du protocole disposait : " Hormis les aspects de délais, de modalités de règlement, de montants des travaux et de plans qui seront précisés dans le protocole et qui viennent modifier le marché de base, tous les articles et dispositions dudit marché et de ses pièces annexes restent d'actualité et les soussignés devront s'y conformer. Le présent protocole devra être entériné par la signature d'un avenant au marché sous huit jours francs. " Le consentement des parties n'était pas subordonné à la réalisation de cette formalité. Les parties ont poursuivi le chantier sur la base de ce nouvel accord dans les mois qui ont suivi, sans exiger la rédaction de l'avenant au marché. Le protocole a été ainsi validé. La société ODMO soutient que les modifications imposées par le maître de l'ouvrage sont de nature à ôter à la convention son caractère forfaitaire, ce qui lui permettrait en conséquence de réclamer le coût des travaux réellement engagés (sa propre prestation d'entreprise générale et les sommes payées aux sous-traitants), et non celui convenu. Le tribunal a considéré que du fait du protocole le marché avait conservé son caractère forfaitaire, la société ODMO ne justifiant ni de la réalité des modifications intervenues après la signature du protocole, ni de l'importance des répercussions techniques et financières qu'elles auraient eu sur l'économie de l'opération. L'article 6 du protocole prévoyait expressément qu'hormis les aspects de délais et de modalités de règlements du montant des travaux et de plans qui étaient précisés dans le protocole et qui venaient modifier le marché de base, tous les articles et dispositions dudit marché et de ses pièces annexes restaient d'actualité. Le marché initial précisait que l'entrepreneur s'engageait à exécuter les travaux, objet du contrat pour un prix global et forfaitaire et que le prix qui s'entendait pour des travaux réalisés sans interruption de continuité et comprenait toutes les dépenses nécessaires à leur exécution. L'expert a souligné que le projet avait subi beaucoup de modifications, certaines manifestement dues aux errements de la maîtrise d'ouvrage, d'autres aux demandes imprécises voire contradictoires des acquéreurs, mais il n'est nullement démontré que l'économie du contrat a été bouleversée. Les parties ont signé le protocole pour prendre en compte les modifications qu'elles souhaitaient apporter au marché initial en précisant expressément que les autres stipulations restaient d'actualité. Le fait que des difficultés et modifications aient conduit les parties à la signature du protocole portant le prix de 5 561 035. 20 € à 5 743 364. 20 € n'interdisait pas aux parties de maintenir le caractère forfaitaire du prix du marché. La décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a retenu que les parties restaient liées par un marché à forfait après le protocole. La société ODMO prétend que la résiliation qui lui a été notifiée le 11 janvier 2002 est en réalité imputable à la SCCV LES PLEIADES. Le tribunal a retenu qu'il apparaissait que les propres retards et atermoiements de la SCCV LES PLEIADES avaient compliqué la tâche de la société ODMO et contribué à compromettre son équilibre financier ; il a estimé qu'il y avait lieu de considérer que la rupture des relations contractuelles entre les parties était intervenue au mois de janvier 2002 à leurs torts réciproques. Même si des devis de travaux supplémentaires avaient été acceptés par la SCCV LES PLEIADES dès le début de l'année 2001, le paiement des travaux supplémentaires acceptés ne pouvait être exigés avant leur exécution. L'expert a signalé que les échéances avaient été versées jusqu'en septembre 2001. En octobre 2001, la société ODMO a autorisé le règlement direct aux sous-traitants à la demande de la SCCV qui avait fait constater par huissier le 4 octobre 2001 la présence de seulement six ouvriers de l'entreprise de gros oeuvre GORGET sur le site. Ensuite, la SCCV a réglé les sous-traitants. La réalité de retard de paiement avant la signature du protocole n'est pas démontrée. En tout état de cause, s'il y avait des retards de paiement avant le protocole, le problème a été apuré par les dispositions prises lors du protocole et même avant puisque dès octobre 2001 la SCCV LES PLEIADES avait été amenée à régler directement les sous-traitants sur autorisation de la société ODMO. A compter du protocole, le principe des échéances mensuelles a été remplacé par un paiement sur présentation de situations mensuelles en fonction de l'avancement des travaux réalisés et vérifiés, tant par ODMO que par la maîtrise d'oeuvre. Ces échéances devaient être réglées aux sous-traitants. La société ODMO n'était plus fondée après la signature du protocole à persister à réclamer mensuellement le paiement des échéances initialement convenues. Au surplus, il n'est pas établi que les difficultés financières que la société ODMO aurait subies soient la conséquence des retards de paiement imputables à la SCCV. Par courrier du 11 janvier 2002, la SCCV LES PLEIADES a mis la société ODMO en demeure de reprendre le chantier et l'a informée qu'à défaut de réaction dans les 15 jours, le marché de travaux serait résilié de plein droit en raison de l'inexécution de ses obligations contractuelles. La société ODMO fait valoir qu'en l'absence de résiliation régulière, d'un constat contradictoire des ouvrages réalisés et d'un compte général définitif entre les parties sur l'initiative du maître de l'ouvrage, elle était fondée à entreprendre une action en s'appuyant sur le marché de travaux et l'échéancier financier. Elle soutient que le marché n'a pas été résilié de plein droit car la SCCV LES PLEIADES ne justifie pas qu'une telle résiliation serait fondée, notamment en absence d'inexécution de sa part, notamment d'un abandon de chantier et elle rappelle les contestations immédiates qu'elle a formulées. La société ODMO prétend que la résiliation est de surcroît abusive car elle est intervenue sans délai de préavis, ni indemnité, ni respect de la norme NF 03-001. Elle conclut que la SCCV LES PLEIADES doit l'indemniser du préjudice résultant de la résiliation injustifiée, qui s'est traduite par une éviction pure et simple du chantier et réclame la somme de 100 000 € à titre de dommages-intérêts. Le tribunal a débouté la société ODMO de sa demande concernant alors la somme de 1 000 000 €, visant à réparer le préjudice consécutif à son éviction du chantier au motif qu'elle ne fournissait ni précisions sur la nature et les composantes de ce préjudice, ni justificatifs. La SCCV LES PLEIADES conclut à la confirmation de la décision déférée en ce qu'elle a débouté la société ODMO de ses prétentions. Elle demande que la résiliation soit prononcée aux torts exclusifs de la société ODMO. Le marché du 5 mars 2001 prévoyait la résiliation de plein droit sans formalité judiciaire après une mise en demeure restée infructueuse plus de 15 jours. La SCCV a refusé, par courrier du 28 février 2002, de poursuivre ses relations contractuelles avec la société ODMO qui avait présenté une situation de travaux, en date du 20 février 2001, en contestant l'inexécution des obligations visées par la mise en demeure. La SCCV n'a pas notifié une résiliation le 11 janvier 2002. Elle a délivré une mise en demeure conformément au contrat qui prévoyait la résiliation de plein droit après cette formalité. Il était enjoint à la société ODMO de respecter ses obligations sous quinzaine à peine de résiliation. La validité de la résiliation n'est pas subordonnée à l'établissement d'un décompte général ou à l'établissement d'un constat contradictoire destinés à établir la réalité des griefs et à permettre l'apurement des comptes. Le contrat ne prévoyait pas l'établissement d'un constat contradictoire des ouvrages réalisés et d'un compte entre les parties. Dans sa lettre du 17 janvier 2002, la société ODMO a indiqué à la SCCV LES PLEIADES qu'elle contestait la résiliation et qu'elle avait été surprise de constater le passage d'une entreprise tierce chargée d'évaluer les travaux restant à effectuer ; qu'elle niait avoir abandonné le chantier. Il résulte de l'expertise et des constats d'huissier versés par la SCCV que les quelques salariés de la société GORGET chargée du gros-oeuvre n'étaient sur le chantier en janvier 2002 que pour enlever le matériel et procéder à l'inventaire. La société ODMO était liée par le contrat de sous-traitance à la société GORGET. Elle ne justifie d'aucune démarche pour obtenir la poursuite du contrat par cette société ou par une autre à l'occasion de l'ouverture de la procédure collective contre cette société en novembre 2001. La présence d'effectif du personnel de la société GORGET ne suffit pas à établir que la société ODMO avait rempli ses obligations. En n'entreprenant aucune démarche en vue de la reprise du chantier qu'elle avait sous-traité à la société GORGET, alors que la procédure collective avait été mise en oeuvre, la société ODMO a manqué à ses obligations. Elle ne pouvait prétendre devoir attendre le prononcé de la liquidation judiciaire et l'apurement des comptes de son sous-traitant, alors que c'était elle qui avait signé le marché et qui était tenue de l'exécution du chantier. Dans les rapports entre la SCCV LES PLEIADES et la société ODMO, c'est à la société ODMO que doit être imputée l'absence de règlement des sociétés sous-traitantes puisqu'elle avait reçu de la SCCV les fonds nécessaires pour leur paiement. La résiliation est exclusivement imputable à la société ODMO. La rupture du contrat par la SCCV LES PLEIADES n'était pas abusive. La décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a débouté la société ODMO de sa demande de dommages-intérêts pour rupture abusive et injustifiée mais pour les motifs ci-dessus exposés. La SCCV LES PLEIADES a résilié le contrat pour éviter les conséquences de l'abandon de chantier par les sous-traitants de la société ODMO, tant du fait du non-paiement que du fait de la procédure collective de la société GORGET. Dès le 20 décembre 2001, une autre entreprise se présentait pour chiffrer le marché de gros oeuvre du fait de la procédure collective de la société GORGET. Le chantier a été poursuivi.L'expert indique que la livraison de l'immeuble SIRIUS a été reportée du 30 juin 2002 à fin juillet 2002 dans le contrat LEGENDRE.L'expertise permet d'établir que les reports de livraison ne sont pas liés aux difficultés qui ont conduit à la résiliation et que cette résiliation n'a pas causé de préjudice à la SCCV LES PLEIADES. La demande de dommages-intérêts de la SCCV, pour un montant de 1 000 000 €, n'est pas justifiée. La SCCV a réclamé le règlement du coût des levées, des réserves et reprises des malfaçons. Avant même la rupture des relations contractuelles, la SCCV LES PLEIADES a fait réaliser, le 10 décembre 2001, un constat de l'état d'avancement du bâtiment SIRIUS. En l'absence de document établi contradictoirement entre les parties pour évaluer le montant des travaux réalisés par l'entreprise GORGET, l'arrêté de compte établi par l'expert judiciaire, Monsieur A..., désigné dans le cadre de la liquidation judiciaire de cette société, a été soumis à la critique des parties par l'expert désigné dans la présente instance, Monsieur Z..., pour être utilisé comme élément d'appréciation des travaux réalisés, du coût de ceux restant à effectuer et déterminer le coût des reprises des malfaçons et non finitions. Il en a été débattu contradictoirement par les parties et ce rapport a pu être valablement utilisé par l'expert pour déterminer l'état du chantier et établir les comptes entre les parties. Dans le corps de ses conclusions page13, la SCCV LES PLEIADES réclame 173 836. 65 € au titre des reprises des malfaçons sur l'immeuble SIRIUS. Dans le dispositif de ses conclusions, comme en pages 9 et 23 de ses conclusions, elle réclame cette somme au titre de la levée des réserves effectuées sur l'immeuble LES PLEIADES. La SCCV rappelle que le bâtiment LES PLEIADES a été réceptionné le 13 juillet 2001 et qu'à ce jour les réserves concernant cet ouvrage ne sont pas complètement levées. Elle affirme que le coût de levée des réserves s'élève à 173 836. 65 € TTC et qu'il incombait à l'entreprise générale de les supporter. Elle réclame la condamnation de la société ODMO à lui verser cette somme. La SCCV LES PLEIADES soutient sur ce point que les malfaçons et désordres et les sommes assumées par elle doivent être mises à la charge de la société ODMO car elle est tenue à une obligation de résultat. L'expert a retenu dans son rapport concernant LES PLEIADES, page 46, qu'il y avait lieu de déduire du montant forfaitaire convenu, les coûts des travaux devant permettre le parfait achèvement et la levée des réserves, soit : -marché initial............................................................. 17 423 296 F HT -réfaction..................................................................... 45 821 F HT -montant................................ 17 377 475 F HT ou....... 20 783 460 F TTC Il est ainsi parvenu au montant de 3 168 420 € TTC pour le coût de cette opération. Concernant l'immeuble SIRIUS, l'expert a retenu le décompte suivant : -avancement GORGET............................................... 3 112 544 F HT -réfaction GORGET.................................................... 245 189 F HT -avancement second oeuvre........................................ 36 400 F HT -montant........................ 2 903 755 F HT ou.............. 3 472 890 F TTC L'expert est ainsi parvenu à un montant de 529 440 € TTC. L'expertise permet, par un examen précis des différentes réclamations présentées par la SCCV LES PLEIADES, d'écarter le surplus de la demande formulée au titre des reprises, des malfaçons et défauts d'achèvement signalés et des réclamations relatives à des frais prétendument exposés. Concernant l'immeuble SIRIUS non achevé, l'expert a déterminé le montant des travaux réalisés sur la base des éléments fournis par l'expertise de Monsieur A.... Il a déduit le coût des travaux devant permettre le parfait achèvement et la levée des réserves des seuls travaux engagés et a rajouté les travaux réalisés. L'expert a établi les comptes en prenant pour base de calcul la somme de 3 855 033. 33 €, soit 3 168 420 € + 529 440 € + 157 173 €. La somme de 157 173 € correspondant à l'évaluation par l'expert de la prestation d'ODMO. Le montant de 3 855 033. 33 € représente le prix dû par la SCCV après déduction du coût des reprises. Celle-ci est fondée à réclamer en sus du trop versé, calculé sur ces bases et tel que fixé par le tribunal, le remboursement du coût des reprises. La SCCV prétend que la société ODMO est responsable du retard de livraison et lui doit (p. 14 de ses conclusions) 260 000 F au titre des pénalités concernant le bâtiment LES PLEIADES. La société ODMO fait valoir que la SCCV LES PLEIADES n'est pas fondée à réclamer les pénalités de retard pour les raisons exposées par l'expert dans son rapport et également parce que le retard est essentiellement de son propre fait. Le marché prévoyait à l'origine que les bâtiments devaient être livrés le 30 juin 2001 pour le bâtiment LES PLEIADES et le 30 juin 2002 pour le bâtiment SIRIUS. L'expertise permet de démontrer (p. 34 du rapport) qu'il n'est pas établi de retard imputable à la société ODMO compte tenu du nombre de jours d'intempérie justifiés concernant le bâtiment LES PLEIADES. La SCCV fait état du retard antérieur au protocole concernant LES PLEIADES : lors de la signature de cet accord, or les parties n'ont pas prévu de sanction pour le retard antérieur. Au vu de ces éléments, la SCCV n'est pas fondée à réclamer des pénalités de retard pour le bâtiment LES PLEIADES. Concernant le bâtiment SIRIUS, l'expert a indiqué que la levée des réserves avait eu lieu en mars 2003, soit près de 8 mois après la date convenue avec l'entreprise ODMO, alors que les marchés de sous-traitance avaient été convertis en marchés directement traités par la SCCV après janvier 2002, et la livraison prévue pour fin juillet 2002. L'expert conclut que le retard ne peut être imputé à la société ODMO du fait de l'état d'avancement du bâtiment lors de la rupture du contrat en janvier 2002. Il y a lieu de rappeler que l'arrêt des travaux de certaines entreprises a entraîné une rupture rapide du contrat par la SCCV avec poursuite directe du chantier avec les sous-traitants, ce qui apparaît avoir éviter toute incidence notable sur la progression du chantier. La SCCV n'est pas fondée à reprocher à la société ODMO les retards de livraison des immeubles. Elle sera en conséquence déboutée de ses demandes de pénalités. La SCCV LES PLEIADES réclame à la société ODMO le remboursement d'une somme de 1 299 643. 27 € au titre des versements qu'elle a effectués, excédant le prix forfaitaire. La société ODMO prétend que le caractère forfaitaire de la convention doit être écarté du fait du bouleversement des conditions économiques et qu'il lui est dû sur les prestations qu'elle a réalisées une somme de 936 043. 95 €, concernant plus particulièrement les comptes du bâtiment SIRIUS. Ce moyen a été écarté pour les motifs précédemment exposés. L'expert a pris en considération le montant des prestations ODMO au prorata des travaux réalisés (28 % du montant total) puisque cette rémunération était incluse dans le prix forfaitaire. La rupture du contrat imposait d'effectuer cette évaluation pour établir les comptes entre les parties à la date de la résiliation puisque l'immeuble SIRIUS était inachevé. Les travaux réalisés par la société GORGET et l'entreprise de second oeuvre ont fait l'objet de réserves chiffrées par le rapport A... ; l'abandon de chantier par certaines entreprises a été sanctionné par la résiliation mais il n'est pas démontré que la société ODMO ne pouvait pas de ce fait prétendre à la rémunération de sa prestation incluse dans le prix forfaitaire selon des pourcentages rappelés par l'expert en pages 73 et 76 de son rapport pour les travaux réalisés. En page 49 de son rapport, l'expert s'est expliqué sur les pourcentages permettant de chiffrer la prestation de la société ODMO et sur la raison pour laquelle il n'y avait pas lieu d'ajouter les frais généraux dont la société ODMO réclamait le remboursement. La valeur de cette prestation était incluse dans le montant forfaitaire du marché concernant l'immeuble achevé LES PLEIADES. Il y a par contre lieu d'ajouter la part de cette prestation réalisée pour le bâtiment SIRIUS à l'évaluation des travaux exécutés au jour de la résiliation pour établir les comptes et chiffrer ce qui était dû à cette date au titre du marché. La SCCV LES PLEIADES prétend que la société ODMO ne pouvait prétendre à sa rémunération car elle n'a pas reversé aux sous-traitants les sommes qui leur étaient destinées (p. 56 du rapport). Il y a lieu de souligner que l'expert a indiqué que l'absence de présentation de la répartition des sommes versées aux sous-traitants par ODMO et la SCCV LES PLEIADES ne lui permettait pas d'affiner son analyse et qu'au surplus cet examen relèverait d'une expertise comptable. Il a cependant procédé à une approche du problème pour rechercher les causes, il indique en page 60 de son rapport : " Là est bien le problème que nous avons évoqué plus haut : celui de ne pas avoir reconsidéré en date du 20 novembre 2001 le montant des paiements échus qui auraient tenus compte de l'augmentation du montant du marché, en n'ayant pas établi de document clair, précis et contradictoire des sommes versées et de celles restant dues, compte tenu de l'avancement du chantier, des réserves sur le bâtiment SIRIUS de l'actualisation des marchés de travaux avec les sous-traitants. Il souligne par ailleurs que malgré le contrôle qui aurait dû être effectué par le maître d'oeuvre, la SCCV a versé directement des sommes en excédant aux sous-traitants (p. 57 et 58 du rapport). Il ne peut donc être tiré du seul fait de l'absence de reversement par la société ODMO aux sous-traitants d'une partie de la somme perçue des PLEIADES la preuve que cette société est sans droit à percevoir la rémunération de sa prestation. Il résulte de l'expertise que la SCCV a versé une somme globale de 5 154 676. 60 € supérieure au montant du marché. Jusqu'en octobre 2001, la SCCV devait régler la société ODMO et non les sous-traitants. Les sommes versées par la SCCV LES PLEIADES aux sous-traitants en excédant ne peuvent être réclamées à la société ODMO qui a, après avoir reçu du maître de l'ouvrage 4 342 380. 98 €, reversé aux sous-traitants 3 024 577. 55 € et était en droit de conserver le montant de sa rémunération chiffrée par l'expert à 157 176. 61 €. La société ODMO n'est pas fondée à réclamer à la SCCV un solde au titre de ce marché alors que la SCCV a versé à la société ODMO puis aux sous-traitants lorsque cette dernière l'a autorisée à le faire, une somme globale supérieure au montant du marché forfaitaire. L'expert a souligné une incurie dans la gestion des règlements aux sous-traitants par les deux sociétés. La SCCV n'est fondée à réclamer à la société ODMO que l'excédent qu'elle lui a versé après règlement par celle-ci des sous-traitants et paiement de sa prestation, soit 1 160 646. 81 €. La décision déférée sera confirmée sur ce point. La société ODMO et la SCCV LES PLEIADES, succombant chacune en certaines de leurs prétentions, elles supporteront chacune la moitié des dépens. Il n'y a pas lieu, dans ces circonstances, de leur allouer une indemnité pour frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

STATUANT publiquement et contradictoirement, CONFIRME la décision déférée en ses dispositions non contraires à celles du présent arrêt ; La REFORMANT, DIT que la résiliation du contrat est imputable exclusivement à la société ODMO ; CONDAMNE la société ODMO à verser à la SCCV LES PLEIADES, au titre des malfaçons, levées de réserves et frais annexes, la somme de (45 821 F HT) 6 985. 37 € relative à l'immeuble LES PLEIADES et (245 189 F HT) 37 378. 82 € pour l'immeuble SIRIUS ; DIT n'y avoir lieu à indemnité pour frais irrépétibles au profit de la société ODMO et de la SCCV LES PLEIADES ; Les CONDAMNE aux dépens d'appel qui seront répartis par moitié entre elles et recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. LE GREFFIER LE PRESIDENT C. LEVEUF S. CHAUVEL